Café turc
La culture et la tradition du café turc *
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Café turc, lokum et verre d'eau | |
Pays * | Turquie |
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Liste | Liste représentative |
Année d’inscription | 2013 |
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Le café turc (türk kahvesi en turc), café à la turque, café grec ou café oriental, est une boisson à base de café en décoction, qui se boit principalement au Proche-Orient, en Afrique du Nord, en Europe du Sud-Est, dans le Caucase ainsi qu'en Ukraine. La dénomination « à la turque » ne fait pas référence à une paternité historique avérée mais à la diffusion de cette méthode de préparation par le biais du monde ottoman.
Histoire
Au tournant des XVe et XVIe siècles, la consommation de café se diffuse dans le monde musulman, au Caire notamment, depuis l'Arabie et La Mecque où il était connu depuis au moins 1414-1415[1].
Dans les années 1640, le chroniqueur ottoman İbrahim Peçevi rapporte l'ouverture du premier café à Constantinople : « Jusqu'en l'an 962 (1554-1555), dans la ville chérie de Dieu Constantinople, de même que dans l'ensemble des terres ottomanes, le café et les cafés n'existaient pas. À cette époque, deux hommes, Hâkem d'Alep et Şems de Damas, sont venus à la ville : ils ont chacun ouvert un magasin dans le quartier Tahtakale, et ont commencé à fournir du café[2]. »
Si la diffusion du café est le fait de marchands, notamment arméniens dans le cas de Vienne ou Paris[2], celle de sa préparation « à la turque » provient directement de l'expansion territoriale de l'Empire ottoman et de son influence culturelle dans les régions administrées[3]. C'est pourquoi on le retrouve aussi bien en Afrique du Nord, au Proche-Orient, dans le Caucase que dans les Balkans et jusqu'en Ukraine (notamment à Lviv et d'une manière générale dans l'extrême ouest du pays[4]).
Plus récemment, la tradition du café turc traditionnel s'est amoindrie par la disponibilité croissante du café instantané ou à l'italienne, d'autres boissons chaudes comme le thé ou des jus de fruits et sodas[3].
Diffusion géographique
Le café est préparé « à la turque » notamment :
- dans les pays du Proche-Orient (Chypre, Israël, Liban, Palestine, Syrie, Turquie) ;
- dans les pays de l'ex-Yougoslavie (Bosnie-Herzégovine, Croatie, Kosovo, Macédoine du Nord, Monténégro, Serbie, Slovénie) ;
- dans les autres pays des Balkans (Albanie, Bulgarie, Grèce, Roumanie) ;
- dans les anciennes régences ottomanes de l'Afrique du Nord ou zones proches (Algérie, Égypte, Libye, Maroc et Tunisie) ;
- dans les pays du Caucase (Arménie, Géorgie) ;
- en Ukraine (oblasts occidentaux, notamment Lviv).
Dénominations
Dans de nombreuses langues, le terme café « turc » a été remplacé par le nom local, parfois pour des raisons politiques. Il en va ainsi en Grèce : « café grec » (ελληνικός καφές, ellinikós kafés) ou à Chypre : « café chypriote » (κυπριακός καφές, kypriakē[réf. nécessaire] kafés). L'utilisation de ces termes s'est généralisée à partir de la seconde moitié du XXe siècle — surtout après l'invasion de Chypre par les forces armées turques en 1974 —, l'appellation « café turc » (τουρκικός καφές) étant plus répandue auparavant[5].
En Bosnie-Herzégovine, il est couramment appelé « café bosnien[6] » (bosanska kafa) de même qu'en Arménie, « café arménien » (Հայկական սուրճ ; haykakan sourdj), ou qu'en Serbie, « café serbe » (Српскa кафа, srpska kafa).
Cependant, les Serbes l'appellent également « café domestique » ou « café de la maison » (домаћа кафа) ou tout simplement « café turc » (turska kafa, турска кафа[7]).
En Slovénie, en Croatie, en Macédoine de même qu'en Israël, il est fréquemment appelé simplement « café noir » (črna kava ; crna kava ; црно кафе ; קפה שחור).
Préparation
La cuisson s'effectue dans une petite casserole de fer blanc ou de cuivre appelée cezve[8] en Turquie et en Arménie, djazwa en Algérie, zazwa en Tunisie[9], briki (μπρίκι) en Grèce[10], ibric en Roumanie[11] et différentes appellations dans les pays arabes : rakwa (ركوة) au Liban et en Syrie, kanaka (كنكة) en Égypte[12].
On verse le café moulu très fin et le sucre dans l'eau froide. On met le mélange sur le feu jusqu'à ce qu'il frémisse. Le café ne doit pas bouillir. Il faut le retirer du feu quand le café mousse. L'opération est répétée un certain nombre de fois selon les pays et les habitudes.
On peut verser enfin quelques gouttes d'eau froide pour faire déposer le marc et on sert aussitôt le café brûlant.
Le café ainsi préparé se déguste en aspirant le breuvage afin de ne pas avaler le marc.
Après consommation, la coutume était de renverser la tasse sur la soucoupe et de lire l’avenir dans les motifs laissés par le marc de café sur les bords ou au fond de la tasse.
On distingue généralement trois types de préparation, en fonction de la quantité de sucre :
- Pur, une cuillerée de café, en turc sade, en grec sketos (Σκέτος).
- Moyen, une cuillerée de café et une cuillerée de sucre, en turc orta, en grec metrios (Μέτριος).
- Sucré, une cuillerée de café et deux cuillerées de sucre, en turc şekerli, en grec glykos (Γλυκός[13]).
Variantes
- En Turquie, dans le sud-est du pays, on ajoute parfois des graines de pistache[14],[15],[16], comme dans le Menengiç kahvesi.
- En Arabie, on y ajoute souvent des grains de cardamome[8].
- On peut y ajouter une goutte d'eau de fleur d'oranger[9],[17],[18], pratique courante en Algérie et en Tunisie.
- Au Maroc, le « café aux épices » est préparé avec un Arabica accompagné d'une dizaine d'épices comme de la cannelle, du gingembre, du poivre, et du clou de girofle. Il se déguste souvent accompagné de pâtisseries au miel[19].
Notes et références
- Alain Huetz de Lemps, Boissons et civilisations en Afrique, Bordeaux, Presses universitaires de Bordeaux, , 658 p. (ISBN 2-86781-282-8, lire en ligne), p. 509.
- (en) Cemal Kafadar, A history of coffee, Harvard University (lire en ligne).
- Hélène Desmet-grégoire, « Le Café en Turquie : Terrasses et Intérieurs », Revue Oluşum / Genèse, no 14, (lire en ligne).
- (en) Yuliya Popova, « Tracing the coffee house revolution to its Ukrainian roots », sur BBC, (consulté le ).
- (en) Mathew Tekulsky, Making Your Own Gourmet Coffee Drinks : Espressos, Cappuccinos, Lattes, Mochas, and More!, , 96 p. (ISBN 0-517-58824-2).
- « Les Viennois invités à découvrir le café bosnien », sur BH info, (consulté le ).
- (sr) « Kako se kuva domaća kafa », sur CoffeeFest Serbia, (consulté le ).
- « Le café arabe, un symbole de générosité. Formulaire de candidature », sur le site de l'Unesco (consulté le ).
- « Tunisie : le café turc, une tradition orientale de plus de 400 ans », sur Tunisie.fr, (consulté le ).
- « Café grec », sur Ambassade de Grèce (consulté le ).
- (ro) « Cafe turceasca », sur Despre cafea, (consulté le ).
- « Café du monde : le café turc », sur Le Petit Noir, (consulté le ).
- « Le café turc », sur Délices de Turquie, (consulté le ).
- (en) « Everything You Want To Know About Traditional and Exquisite Turkish Coffee », sur Espressocoffeeguide.com (consulté le ).
- Coffee has deep roots in Turkey, The Daily Comet (en), 13 février 2008.
- Daily Life in the Ottoman Empire, Mehrdad Kia, Lire en ligne.
- (en)The Oxford Companion to Food, Alan Davidson, Lire en ligne.
- Café fort comme un Turc, Femme Actuelle.
- Café aux épices ou café beldi, sur Choumicha.ma.