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Utilisateur:Loxias1987/Brouillon - Style Louis XIII

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Style Louis XIII
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Contexte historique
Datation 15891661
Origines Drapeau du Royaume de France Royaume de France
Chronologie stylistique
Périodes du style 1589-1620 : période maniériste
1620-1643 : période « centrale »
1643-1661 : période classiciste
Style précédent Seconde Renaissance française
Style contemporain Style jacobéen (Angleterre)
Style baroque (Italie, Espagne, Portugal, Pays-Bas, Allemagne)
Style suivant Style Louis XIV
Réminiscence Style néo-Louis XIII

Influences artistiques

Principales caractéristiques

Architecture

  • Jusqu'aux années 1620 : verticalisme, fragmentation des toitures et des plans, polychromie des façades, ornementation maniériste puis baroque
  • A partir des années 1630 : recherche d'harmonie des masses, simplification du décor, disparition progressive de la polychromie
  • A partir des années 1640 : unification et abaissement des toitures, uniformisation des façades, ornementation plus mesurée, animation des masses par décrochements

Décor intérieur

  • Vogue des lambris à la française puis des lambris de hauteur
  • Persistance des cheminées massives puis réduction progressive de leurs tailles
  • Monumentalisation des portes à double vantaux
  • Persistance des solives peintes et vogue des plafonds à caissons jusqu'aux années 1640 puis apparition des plafonds à voussures

Mobilier

  • Apparition du placage d'ébène et du métier d'ébéniste
  • Généralisation du tournage en spirales, chapelet et balustre
  • Moulurations épaisses et silhouettes architecturées
  • Entretoises en cadre puis en H, assouplissement croissant des dossiers et des accotoirs des sièges et perte progressive de leurs traverses avants
  • Vogue du cabinet et apparition de l'armoire à deux portes

Ornementation

  • Guillochis
  • Oves
  • Socles et corniches
  • Rinceaux de feuilles d'acanthe
  • Colonnes torses
  • Pointes de diamant

Le style Louis XIII désigne un style français d'architecture et d'arts décoratifs se développant approximativement de 1589 à 1661. Dans sa définition historiographique la plus large, cette appellation couvre ainsi la période allant de l'avènement d'Henri IV jusqu'au début du règne personnel de Louis XIV. Dans une acceptation chronologique plus restreinte, le style Louis XIII peut qualifier seulement la période proprement dite du règne de Louis XIII, de 1610 à 1643.

Suite au dénouement des guerres de Religion par la promulgation de l'édit de Nantes en 1598, le royaume de France connaît le début d'un processus de croissance économique favorisant l'émergence d'une bourgeoisie commerçante et entraînant l'ascension sociale des gens de finance et de la noblesse de robe, dont les offices sont devenus héréditaires depuis l'instauration de la paulette en 1604. L'élévation de ces différents groupes sociaux a pour conséquence la multiplication de nouvelles demeures privées à l'instar des hôtels particuliers parisiens. Cette forte activité immobilière intervient dans un contexte de reconstruction du royaume impulsée par le pouvoir aux lendemains des guerres civiles, se traduisant notamment par d'importants travaux menés à Paris et dans plusieurs résidences royales. Au mécénat monarchique et princier soutenant artistes et architectes, s'ajoute le soutien de l'État à la production artisanale française dans une perspective mercantiliste. Dans le cadre d'un artisanat toujours régit par le système des corporations, la période se caractérise ainsi par l'intégration de nouveaux savoir-faire et le développement progressif de manufactures royales soutenues grâce à l'octroi de privilèges.

C'est dans cet environnement favorable à leur vitalité que s'épanouissent architecture et arts décoratifs. Période charnière entre les derniers feux de la Renaissance française et l'affirmation de l'esthétique louis-quatorzienne, le style Louis XIII se caractérise par de notables évolutions. Succédant à la Seconde Renaissance française, le style demeure, jusque dans les années 1620, toujours fortement influencé par le maniérisme tardif, coïncidant avec l'essor de la seconde école de Fontainebleau. Annexant diverses influences artistiques étrangères (italienne, espagnole, flamande ou allemande) pour mieux les réinterpréter et les fondre dans une expression stylistique nationale, cette première période du style correspond également à l'intégration de formes et de motifs inspirés du baroque qui se diffuse en ce début du XVIIe siècle dans l'Europe de la Contre-Réforme. C'est en réaction à ce syncrétisme stylistique qu'apparaissent les premières tendances du classicisme français à partir des années 1630. Si la rigueur classiciste influence d'abord l'architecture, les arts décoratifs conservent, jusqu'au début des années 1640, la richesse et l'éclectisme du vocabulaire ornemental acquis depuis le début du siècle. Durant la dernière phase du style, le goût pour le respect des règles classiques s'impose résolument à l'ensemble des disciplines artistiques, des années 1640 au début des années 1660. Tout en gardant leur inventivité, les réalisations s'orientent désormais vers l'expression d'une majesté à la fois puissante et contenue, annonçant déjà les prémices du style Louis XIV.

Les caractéristiques stylistiques de cette période ont inspiré, de la seconde moitié du XIXe siècle jusqu'au début du XXe siècle, le style néo-Louis XIII, particulièrement dans les domaines de l'architecture et du mobilier.

Contexte historique

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Si l'époque débute par le dénouement des Guerres de Religion et la promulgation de l'édit de Nantes en 1598, les perspectives de paix ouvertes lors du règne d'Henri IV se heurtent dès 1635 au déclenchement du conflit franco-espagnol opposant la France aux Hasbourg dans le cadre de la guerre de Trente Ans, et ce jusqu'à la signature du traité des Pyrénées en 1659. A partir de la fin du XVIe siècle, la construction de l'État moderne en France se caractérise par la montée de l'absolutisme et la centralisation du pouvoir, coïncidant avec le principe de raison d'Etat développé sous le règne de Louis XIII par le cardinal de Richelieu. Cette affirmation du pouvoir royal n'empêche cependant pas les troubles et révoltes agitant les régences de Marie de Médicis et d'Anne d'Autriche d'atteindre leur paroxysme lors de la Fronde de 1648 à 1653.

Reconstruction/Constructions

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Les années de reconstruction

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Voir Pérouse de Montclos, p.195-196 Les premières années du règne d’Henri IV ont été marquées par les guerres de Religion, qui ne s’achèvent qu’avec la promulgation, en avril 1598, de l’édit de Nantes mettant fin à plus de trente années de guerre civile en France. Quelques semaines plus tard, le 2 mai 1598, est signée la paix de Vervins avec l’Espagne, achevant la guerre franco-espagnole débutée en 1595. Cette pacification intérieure annonce une nouvelle ère de prospérité et de développement artistique, conjuguée à la nécessité de reconstruire les nombreux édifices détruits par les guerres civiles. Ainsi, Henri IV entreprend à Paris d’importantes modifications architecturales et urbanistiques. La construction du Pont Neuf (1598-1607), de la place Dauphine (1607) et de la place Royale, future place des Vosges, (construite entre 1605 et 1612), attestent de ces ambitions. Outre Paris, Henri IV entreprend également un vaste programme de reconstruction dans le Languedoc, ou bien encore dans le Nord de la France, favorisant ainsi la stimulation de toute l’économie du royaume. Cette politique s’accompagne de la fondation de nouvelles villes à l’instar d’Henrichemont (1609-1624) par Sully ou de Charleville (1608-1611) par Charles II de Gonzague. La renaissance des villes après les guerres civiles se traduit également par l’essor des constructions privées. ascension d’une nouvelle élite : construction d’hôtels particuliers Après l'insécurité vécue pendant la grande moitié du XVIe Siècle, les français éprouvent un grand besoin de stabilité et de confort. Encouragés par ces perspectives de paix et de prospérité, la noblesse et la bourgeoisie commerçante se lancent dans la construction d’hôtels particuliers au mobilier pratique et sobre,


Les résidences royales

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Le règne d’Henri IV est également marqué par une série d’importants travaux dans les différentes résidences royales : création de la petite et de la grande galerie au Louvre (1595-1606), travaux de la galerie des Cerfs, de la galerie de Diane et de la chapelle de la Trinité à Fontainebleau ou encore agrandissement du « château vieux » à Saint Germain-en-Laye.

Après l’assassinat d’Henri IV en 1610, la régente Marie de Médicis poursuit la même politique en faveur des arts. Depuis son mariage, celle-ci a pratiqué un important mécénat artistique en plaçant sous sa protection de nombreux artistes. Ambroise Dubois, recruté en pour la décoration de ses appartenant au château de Fontainebleau ou encore les peintres Jacob Bunel, Gabriel Honnet et Guillaume Dumée, participant à la décoration de son Grand Cabinet au Louvre, en bénéficieront. Devenue régente, Marie de Médicis commande en 1615 la construction du Palais du Luxembourg à l’architecte Salomon de Brosse. Le chantier du palais du Luxembourg constituera, durant les années 1620, un centre d’attraction importants pour de nombreux artistes avec des sculpteurs tels que Guillaume Berthelot et Christophe Cochet et des peintres comme Jean Mosnier, Philippe de Champaigne, et Simon Vouet. Marie de Médicis tente d’attirer à Paris des artistes de grand renom et notamment Pierre Paul Rubens pour l’exécution d'une galerie de peintures, composées entre 1622 et 1625, consacrées à sa vie (le cycle de Marie de Médicis aujourd'hui au musée du Louvre) pour le palais du Luxembourg. Si Louis XIII ne fut pas un roi bâtisseur, il faut cependant citer la construction, en 1623, du pavillon de chasse au sommet du plateau de Versailles, sur le chemin allant de Versailles à Trianon. Celui-ci, sous les ordres de l’architecte Philibert Le Roy, sera agrandit en 1631 et constituera le « deuxième château ».

Une politique protectionniste en faveur des manufactures françaises

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A partir du règne d’Henri IV, les manufactures d’arts décoratifs bénéficient d’une politique protectionniste visant à favoriser le développement de la production française. Afin de réduire les importations de produits de luxe tels que les soieries d’Italie, les tapisseries des Flandres ou encore les produits d’ébénisterie d’Allemagne, des douanes furent installées aux portes de Paris (ref : dictionnaire des mob). De même, Henri IV accorde des privilèges et encourage la venue d’artisans étrangers en provenance de Hollande, d’Espagne, d'Allemagne, de Flandre ou encore d'Italie destinés à former des apprentis français et fait aménager 27 logements et 5 ateliers d’artistes sous la nouvelle grande galerie du Louvre. Autre levier destiné à favoriser le développement des arts décoratifs français, Henri IV soutient les corporations et le développement des manufactures, préfigurant la réorganisation de ces ateliers sous Colbert et la création des futures manufactures royales. C’est d’abord le cas des manufactures de soieries à Lyon et à Tours. L’apparition d’un règlement régissant la profession en 1596 et l'introduction à Lyon du métier à la grande tire, importé d'Italie, permettant progressivement de rivaliser avec les productions italiennes, témoignent d’évolutions notables pour la soierie française. (articles détaillé : Histoire de la soierie à Lyon et Manufacture des Gobelins) Les manufactures de tapisseries se développent également. Henri IV décide en avril 1601 d'installer dans le faubourg Saint-Marcel, qui est alors un quartier de teinturiers, dans « une grande maison ou antiennement se faisoit teinture » Marc de Comans et François de La Planche, tapissiers flamands, le premier d'Anvers et le second d'Audenarde, pour réaliser des tapisseries façon de Flandres. Les deux tapissiers jouissent de nombreux privilèges dont celui exclusif interdisant à toute personne d'ouvrir un atelier semblable au leur pendant 15 ans. Le roi leur assure un logement gratuit et accorde aux ouvriers qui les suivraient en France l'exemption du droit d'aubaine, la dispense des tailles, des subsides, des impositions et des gardes. Les laines, soies et autres matières qui entrent dans la composition des tapisseries terminées sont exemptées de taxes et d'impôts. Les deux entrepreneurs reçoivent chacun 15 000 livres de pension et 100 000 livres pour leurs frais de première installation. Ils s'obligent à prendre 25 apprentis la première année et 20 les années suivantes, entretenus au frais de l'État, et à maintenir en activité 80 métiers à tisser, dont 60 à Paris et 20 à Amiens ou une autre ville. Cet atelier précédera la future manufacture des Gobelins. Citons également, la création de l’atelier de tapisseries de la Grande Galerie du Louvre dirigé par Maurice du Bourg et Girard Laurent. Le développement des manufactures se poursuit sous Louis XIII avec la création de la manufacture de tapis de la Savonnerie, fondé par Pierre Dupont et Simon Lourdet sur la colline de Chaillot en 1627.

Mécénat et collectionneurs

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Esthétique

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Influences stylistiques

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Une évolution des influences (Italie + Hollande + Espagne) Les grands architectes s'inspirent des styles italiens et flamands pour créer un style original Le mobilier Louis XIII, qui résulte de ces inspirations différentes est assez confus, mais dans l'ensemble il est sobre et droit. Les formes s'adoucissent au fur et à mesure que l'on avance dans le style Louis XIII. Le style Louis XIII, d'esthétique naît du mélange de diverses influences artistiques étrangères. Ce style apparu pendant la 1ère moitié du 17è siècle trouve ses sources en Hollande et en Espagne, alors que le style précédent, la Renaissance, s’inspirait grandement de l’Italie. On multiplie les expériences artistiques et les recherches stylistiques sont diverses : on s’inspire du baroque italien, mais aussi des meubles flamands, Durant la première moitié du XVIIe siècle, les petites guerres de territoire facilitent l'enrichissement artistique venu des pays voisins et favorisent aussi l'échange des nouvelles techniques comme la marqueterie. D'une part, le goût artistique de la Renaissance française se perpétue auprès de la bourgeoisie française. Il prend la forme d'un style antique simplifié et très épuré de type Henri II. D'autre part, les styles européens arrivent en France grâce aux importations de meubles pour la cour royale. Le goût du baroque italien est soutenu par Mazarin et la florentine Marie de Médicis, femme de Henri IV. L'espagnole et femme de Louis XIII, Anne d'Autriche, participe aux influences ibériques. Enfin, les artisans et les artistes comme le peintre Rubens font découvrir les arts de la Flandre et des Pays-Bas.

De 1610 à 1661, le développement des arts s'affirme pas à pas et prépare les bases du classicisme du style suivant. En effet, Louis XIV saura rationaliser et organiser tous ces arts à son profit.


Ses formes massives et épurées sont assouplies par des décors en bois tourné ou sculptés de profondes moulurations. Le motif décoratif géométrique comme la pointe de diamant, les montants tors, les entretoises en H et les pieds en boule caractérisent bien le style Louis XIII. Foisonnement, éclectisme le style s’inscrit dans les prémices du Baroque, rigueur progressive avec la montée du Classicisme à la française


Ornementation

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Les ornements typiques de la période : ils s’inspirent encore des grotesques de la Renaissance pour ensuite adopter des ornements plus classiques et majestueux augurant du style Louis XIV. Diffusion des modèles par les estampes.

Architecture

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Communs du château de La Ferté-Imbault construits en 1627 par le maréchal d'Estampes.

Le « style Louis XIII » en architecture est un style de transition ; il reste très marqué par les styles des règnes précédents, mais poursuit le mouvement qui mènera au Classicisme du Grand Siècle. De la « seconde Renaissance », les architectes ont d'abord retenu une formule maniériste, où les volutes, les niches, les toitures pentues à la française, les lucarnes, les jambes de pierre et le contraste des matériaux (pierre, brique, ardoise) animent les bâtiments. La technique évolue également, les fenêtres ornées de grandes clés saillantes et appareillées en bossage s'agrandissent et surtout gagnent en verticalité ; ainsi, les meneaux de pierre, caractéristiques des architectures gothique et Renaissance, sont remplacés par des châssis de menuiserie[1].

Cependant, ils adoptent également les recherches d'unité et de grandeur que la Renaissance a favorisées en tant que « retour à l'antique ». Ils recherchent la simplicité des lignes ; le répertoire antique (colonnes, frontons courbes) se fait plus monumental, comme au château (détruit) de Richelieu, le roi ne construisant que très peu... sinon le premier Versailles. En effet, le règne de Louis XIII étant caractérisé par d'innombrables guerres financées par les impôts des français, et étant conscient de la peine qu'ils avaient à financer toutes les campagnes militaires, le Roi refusait de leur imposer également le coût des bâtiments car il aimait son peuple et se voyait particulièrement affecté quand ce dernier souffrait.

La place des Vosges à Paris est emblématique de cette double tendance, à la fois charmante et pittoresque, et strictement régulière, presque sans ornementation. Inaugurée par le jeune Louis XIII, elle avait cependant été ordonnée par son père Henri IV.

L’architecture religieuse

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Contexte : Concile de Trente, Contre-Réforme, apparition des nouvelles congrégations religieuses

Les différents types de plans

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A partir du début du XVIIe siècle jusqu'au milieu des années 1620, le plan des églises évolue résolument vers deux types principaux : le plan à nef unique et le plan centré[2].

L'église à nef unique ou en croix latine à un seul vaisseau
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Type de plan à nef unique ou en croix latine à un seul vaisseau : Église Saint-Joseph-des-Carmes, Paris, 1613.

Suite aux prescriptions du concile de Trente en matière d'architecture, notamment interprétées par l'archevêque de Milan Charles Borromée dans ses Instructions pour les édifices et mobiliers religieux publiées en 1577, le plan en croix latine à un seul vaisseau est perçu comme plus chrétien que d'autres types de plans[3]. Il favoriserait la prédication en permettant aux fidèles réunis en un seul vaisseau de mieux voir et entendre l'orateur, à l'inverse des églises à vaisseaux multiples. Ce type de plan est particulièrement apprécié par les nouvelles congrégations religieuses comme celle des Jésuites, sous l'impulsion notamment du frère jésuite et architecte Étienne Martellange[2].

Il se compose d'une nef unique et large, flanquée de chapelles latérales souvent communicantes, pouvant parfois être surmontées de tribunes. Un transept non débordant et un choeur sans collatéraux, ni déambulatoire, ni chapelles, complètent l'ensemble. Une coupole peut également couronner la croisée du transept. Si la présence du transept permet de matérialiser la croix sur le plan de l'église, celui-ci ne déborde pas de l'axe des chapelles, afin notamment de s'inscrire au mieux dans le rectangle du parcellaire citadin[3]. De même, l'obligation d'orienter le choeur des églises à l'est est levée afin de faciliter l'insertion de ces nouvelles églises dans les plans urbains[3].

Le Gesù de Rome, témoignant de ce parti pris architectural, demeure le principal modèle ayant inspiré les réalisations françaises durant la période. Parmi celles-ci, il convient de citer, l'église Saint-Bernard du Couvent des Feuillants (1601), la chapelle du collège des Jésuites au Puy-en-Velay (1605), l'église du Couvent des Minimes de la place Royale (1611), l'église du couvent des Carmes déchaussés (1613), l'église de l'Oratoire (1621) ou encore l'église Saint-Louis de la maison professe des Jésuites (1627).

L'église à plan centré
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Type de plan centré : Chapelle Sainte Marie-La Visitation, Paris, 1632.

Héritage des églises de la Renaissance italienne, le plan centré est toujours usité durant la période, bien qu'il soit plus rarement utilisé par les nouvelles congrégations religieuses que le plan à nef unique[4]. Il semble cependant qu'il soit davantage choisi pour les églises et chapelles des couvents de femmes[4].

Les églises à plan centré sont généralement surmontées de coupoles, et peuvent aussi bien se présenter en forme de croix grecque, comme c'est le cas pour la chapelle du noviciat des jésuites d'Avignon (1601) ou en croix latine à courte nef, comme pour la chapelle du collège des jésuites de Rouen (1615)[5]. Des chapelles de plans circulaires peuvent également rayonner autour de l'espace central.

L'un des exemples les plus remarquables demeure la chapelle Sainte Marie-La Visitation, l'église parisienne des Visitandines construite à partir de 1632 sur les plans de François Mansart. De même, la chapelle Notre-Dame-des-Ardilliers de Saumur (1652), témoigne de ce parti pris architectural.

Le plan centré rencontrera un regain de succès dans la seconde moitié du XVIIe siècle, notamment à travers les projets de monuments funéraires et de mausolées s'inspirant des réalisations romaines antiques[4]. C'est par exemple le cas du projet de la chapelle funéraire des Bourbons à Saint-Denis (1665), également conçu par François Mansart.

L'église à plan mixte
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Type de plan mixte : Chapelle de la Sorbonne, Paris, 1635.

Tenant à la fois du plan allongé à nef et du plan centré, le plan mixte est caractéristique de l'architecture romaine de la première moitié du XVIIe siècle[6]. En 1607, l'initiative de l'architecte Carlo Maderno d'ajouter une nef au plan centré de la basilique Saint-Pierre conçu par Bramante demeure l'un des premiers témoignages de ce parti pris hybride entre les deux formules. De même, le plan mixte de l'église San Carlo ai Catinari à Rome (1612) constitue également une source d'inspiration pour les réalisations françaises durant la période[6].

Les églises à plan mixte se caractérisent ainsi par l'adjonction d'un espace allongé, jouant le rôle de nef, à un espace de plan circulaire systématiquement coiffé d'une coupole. Selon les cas, la disposition de ces deux espaces varie : l'espace de plan centré peut se situer aussi bien au centre de la nef qu'en constituer l'une des extrémités longitudinales afin d'y placer le maître-autel.

Dessiné par Jacques Lemercier, le plan de la chapelle de la Sorbonne (1635) est emblématique des églises françaises à plan mixte. A la double destination du lieu, à la fois chapelle du collège de Sorbonne et mausolée du cardinal de Richelieu s'ajoute une double identité visuelle : la façade sur la place de la Sorbonne et le maître autel déterminent l'axe longitudinale de la nef de la chapelle, tandis que la façade sur la cour du collège et le tombeau du cardinal déterminent l'axe transversal de plan centré du mausolée[7]. Une décennie plus tard, François Mansart choisit également le parti pris du plan mixte pour son projet de l'église Notre-Dame du Val-de-Grâce (1645). A l'instar de l'Escurial, le projet du complexe de l'abbaye du Val-de-Grâce rassemble à la fois un palais, destiné à Anne d'Autriche, et un couvent, auquel s'ajoute la fonction d'église paroissiale. Sous la coupole, le choeur de plan centré, est ainsi adjoint de trois parties témoignant de cette triple fonction : l'oratoire du palais, le choeur des religieuses et la nef des paroissiens[7].

Façades et décors

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Verticalisme et inspiration romaine : les façades de la Contre-Réforme (1600-1630)
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Frontispice du château d'Anet, 1545-1550.

Modèle importé des églises romaines de la Contre-Réforme[8], la façade composée de deux à trois ordres superposés est caractéristique des églises françaises du premier quart du XVIIe siècle. Les principales inspirations de ce modèle venu d'Italie demeurent encore ici le Gesù de Rome édifié en 1575 ainsi que les théories et travaux des architectes Sebastiano Serlio et Jacopo Barozzi da Vignola[9].

Emprunté aux réalisations italiennes, ce type de façade se compose d'un niveau inférieur sur lequel prends place un niveau supérieur plus étroit, tous deux reliés par des ailerons encadrant la partie supérieure. Un troisième niveau peut également surmonter l'ensemble. Plaqué devant la nef, la façade dissimule ainsi bien souvent le corps de l'église devant lequel elle prend place[10]. Appliqué à ce modèle, la principale spécificité française réside surtout, jusque dans les années 1630, dans le verticalisme des façades hérité de la Renaissance française. De même, les derniers feux de la Seconde Renaissance française s'expriment encore au début du XVIIe siècle dans les colonnes baguées et dans les superpositions d'ordres et de frontons que l'on retrouve par exemple dans la façade de l'église Saint-Étienne-du-Mont de Paris (1610-1622)[9] ou dans la façade de la cathédrale Notre-Dame du Havre (1630)[11].

Si le frontispice du château d'Anet créé par Philibert de l'Orme au milieu du XVIe siècle constitue le premier témoignage de la superposition des trois ordres antiques dans l'architecture civile française, la façade du transept sud de l'église Saint-Pierre de Dreux, dessinée par Louis Métezeau vers 1600, peut être considérée comme l'un des premiers exemples français de l'utilisation de deux ordres superposés dans l'architecture religieuse[12].

Façade de l'église Saint-Gervais-Saint-Protais de Paris par Salomon de Brosse, Paris, 1616-1621.

Mais l'archétype des façades françaises de la Contre-Réforme demeure la façade de l'église Saint-Gervais-Saint-Protais de Paris édifiée entre 1616 et 1621 d'après un dessin de Salomon de Brosse[8]. Celle-ci est ainsi composée d'un triple étagement d'ordres grecs superposés : dorique au premier niveau, ionique au second et corinthien au troisième. Cette superposition d'ordres antiques, tout comme l'usage des colonnes dédoublées, des niches scandant le second niveau ou encore des ailerons encadrant le niveau supérieur sont caractéristiques des réalisations françaises du premier quart du XVIIe siècle.

La façade de l'église Saint-Bernard du couvent des Feuillants conçue par François Mansart en 1623 s'inspire directement de cette réalisation[10], bien qu'y subsistent encore certains traits maniérisants, tels que les figures couchées du fronton ou bien le couronnement en fronton cintré sans base[13].

De même, l'église Saint-Gervais-Saint-Protais inspire quelques années plus tard François Derand pour le dessin de la façade de l'église Saint-Paul-Saint-Louis (1627-1641), ancienne église de la maison professe des jésuites, dont le plan général avait été conçu par Etienne Martellange. Cependant cette façade, où seuls les ordres riches, corinthien et composite, sont employés et où l'ornementation chargée et foisonnante est empruntée au répertoire architectural des Pays-Bas[14], tranche avec la sobriété des réalisations précédentes. Cette tendance se retrouve quelques années plus tard dans la façade de la chapelle Sainte-Marie de Nevers (1639-1643), qui adjoint à la superposition de deux ordres corinthiens une riche ornementation s'inspirant du baroque flamand[9].

La façade de l'église Saint-Paul-Saint-Louis est l'objet de critiques de la part des jésuites et des partisans d'un classicisme plus rigoureux qui lui objectent sa surcharge décorative et lui préfèrent des réalisations plus sobres et davantage situées dans la droite ligne de la tradition romaine, à l'instar de la façade de l'église du noviciat des Jésuites de Paris (1630), également dessinée par Etienne Martellange[14].

Recherche d'équilibre et façades à l'antique (1630-1650)
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Façade de la chapelle de la Sorbonne (côté cour du collège) par Jacques Lemercier, Paris, 1635-1642.

A partir des années 1630, les réalisations s'orientent vers une quête d'équilibre entre les différents niveaux composant les façades. Les effets de décrochements et de saillie entre les masses, tout comme les jeux de reliefs produits par les surfaces sculptées sont moins présents, témoignant d'une plus grande sobriété[11].

Les façades d'églises dessinées par Jacques Lemercier dans les années 1630, comme celle de l'église Saint-Pierre-Saint-Paul de Rueil-Malmaison ou celle de l'église Notre-Dame de Richelieu, toutes deux commanditées par le cardinal de Richelieu, se caractérisent ainsi par leurs masses pyramidales où les deux niveaux sont simplement reliés par une corniche et des ailerons. La rythmique très ordonnée de la distribution des façades est garantie par les pilastres encadrant les ouvertures et les niches garnies de statues[11].

Mais ce sont surtout les façades dites « à l'antique » qui témoignent de la nouvelle influence du classicisme français en architecture. L'exemple le plus éloquent de cette tendance demeure la chapelle de la Sorbonne, également édifiée par Jacques Lemercier, entre 1635 et 1642. La façade latérale, donnant sur la cour du collège de Sorbonne, est exceptionnelle par son portique à l'antique, unique dans l'architecture française de la première moitié du XVIIe siècle[7]. Composée de deux niveaux superposés d'ordres corinthien et composite, la façade donnant sur la place de la Sorbonne s'inscrit quant à elle davantage dans la tradition romaine des façades de la Contre-Réforme[7] tout en conservant une sobriété et un équilibre dans ses proportions monumentales[11].

Dans une moindre mesure mais tout en conservant un esprit similaire, la façade dessinée en 1645 par François Mansart pour l'église Notre-Dame du Val-de-Grâce adjoint un porche à l'antique surmonté d'un fronton à une façade à deux niveaux superposés d'ordre corinthien reliés par des ailerons, caractéristique des églises romaines. La richesse de l'ornementation de l'oeuvre de François Mansart tranche toutefois avec la sobriété des réalisations de Jacques Lemercier.

L'architecture publique

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Les réaménagements urbains tout comme les créations de villes nouvelles de la première moitié du XVIIe siècle imposent une nouvelle esthétique de la place publique et contribuent à la conception de nouveaux espaces couverts publics auxquels il convient d'apporter de nouvelles solutions architecturales adaptées à leurs fonctions. Ainsi, les fonctions édilitaires, le commerce monétaire et les fonctions hospitalières ou scolaires s'expriment dans la création de ces nouveaux bâtiments publics durant la période, bien que ce processus de formation de l'architecture publique n'aboutira réellement que dans la seconde moitié du XVIIIe siècle[15].

L'urbanisme

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Les projets urbanistiques parisiens sous Henri IV
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Si les réalisations urbaines aménagées sous le règne d'Henri IV transforment Paris, elles imposent surtout une nouvelle conception de la ville et de nouveaux modèles en matière d'urbanisme. Celles-ci ont pour objectifs d'ouvrir une perspective sur la Seine, de créer de nouveaux axes ordonnancés structurant la ville ou bien encore de doter la capitale de nouveaux espaces publics libres[16].

Détail du plan de Mérian (1615) figurant le Pont Neuf, la pompe de la Samaritaine, la statue équestre d'Henri IV et la place Dauphine. Non visible, la rue Dauphine se situe dans le prolongement du pont, à droite du plan.

Bien que certains travaux aient été projetés ou initiés dès le XVIe siècle sous la dynastie des Valois, l'ensemble des aménagements réalisés autour du Pont Neuf sur la pointe ouest de l'île de la Cité, constitue l'un des premiers programmes urbains parisiens planifiés par Henri IV. L'ordonnancement et la cohérence de cet ensemble témoigne ainsi d'une grande innovation en matière d'esthétique urbaine au tournant du XVIIe siècle. Ouvert sur le cours du fleuve, le Pont Neuf (1578-1607) est le premier pont de Paris construit sans maisons[17] tandis que la pompe à eau de la Samaritaine (1602-1608), édifiée au droit de l'une des arches du pont, demeure la première machine élévatrice d'eau de la capitale permettant ainsi d'alimenter en eau le quartier du Louvre. Bordant le Pont Neuf, l'architecture ordonnancée des maisons édifiées autour du triangle de la place Dauphine (1580-1611) témoigne d'une nouvelle conception de la place urbaine, s'inscrivant dans la lignée des places à programmes italiennes comme la place du Capitole de Rome. La place Dauphine, dédiée au commerce et aux opérations de bourses et de change, trouve aussi ses inspirations dans les modèles de places marchandes, comme la place du Change de Metz[17]. La rue Dauphine, percée en 1607 sur la rive gauche de la Seine dans le prolongement du Pont Neuf, est la première rue de Paris dotée d'un alignement, permettant ainsi l'architecture ordonnancée des maisons prévues dans le projet initial[17]. Enfin la statue équestre d'Henri IV située sur le Pont Neuf derrière la place Dauphine, commandée en 1605 et inaugurée en 1614, parachève ce nouveau décor urbain et constitue la première statue monumentale édifiée de façon permanente en France[17], s'inspirant notamment de l'antique statue équestre de Marc Aurèle.

En aval de ce nouvel ensemble du Pont Neuf s'ajoutent également l'aménagement des quais de Seine et la construction de la Grande Galerie reliant le palais du Louvre au palais des Tuileries qui ont également pour but d'ouvrir la ville sur le fleuve[16].

Gravure de Matthäus Merian (1648) représentant le carrousel tenu lors de l'inauguration de la Place Royale en 1612.

A l'instar de la place Dauphine, la place Royale, actuelle place des Vosges, conçue par Louis Métezeau entre 1605 et 1612, s'inscrit dans la lignée des places à architecture ordonnancée du début du XVIIe siècle. Dédiée aux logements de gens de qualité, elle se situe au coeur du quartier en vogue du Marais, à l'emplacement de l'ancien hôtel des Tournelles. De plan carré, elle est presque entièrement fermée et ceinturée par trente-six pavillons d'habitation, chacun composé d'un rez-de-chaussée à arcades, de deux étages carrés et de deux étages de comble. L'unité de l'ensemble est garantie par l'uniformité des façades en briques rouges à chaînages de pierre calcaire blanche ainsi que par la hauteur identique des hôtels. Les côtés nord et sud de la place sont rythmées respectivement en leurs centres par le Pavillon de la Reine et le Pavillon du Roi, plus hauts que les autres bâtiments et disposant de passages aux rez-de-chaussée menant aux rues adjacentes. Place dédiée à la détente et à la fête (un carrousel y est donné à l'occasion de son inauguration en 1612), elle perd son caractère de square privé[17] lorsque le cardinal de Richelieu y fait élever la statue équestre de Louis XIII en 1639. La place Ducale de Charleville-Mézières édifiée par Clément Métezeau entre 1612 et 1627 s'inspire de la place Royale.

Projet de la Place de France par Claude Chastillon (1610).

Le projet de la place de France témoigne également des grandes ambitions urbanistiques d'Henri IV. Lancé en 1607 sous la direction de Jacques Aleaume et de Claude Chastillon, ce projet fut interrompu en 1610 à la mort du souverain. Située au nord du quartier du Marais à la limite de l'agglomération, cet ensemble monumental devait être constitué d’une place semi-circulaire adossée à l'enceinte de Charles V dans laquelle une nouvelle porte aurait été ouverte. Un nouveau canal navigable devait se situer à l’emplacement du fossé de l’enceinte. Rayonnant en éventail depuis la place, huit rues, portant symboliquement le nom des principales provinces françaises, auraient desservi un nouveau quartier. Tout comme les places Dauphine et Royale, les sept pavillons bordant la place auraient bénéficié d'une architecture identique et ordonnancée avec des arcades en rez-de-chaussée, des poivrières aux angles des étages et surmontés de lanterneaux témoignant de la persistance des modèles hérités de la Seconde Renaissance française.

L'aménagement urbain des villes nouvelles
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A l'échelle du royaume de France, les villes neuves créées sous Henri IV et Louis XIII n'ont pas réellement d'ambitions économiques ou politiques[18]. Ces fondations urbaines ne sont pas réalisées à l'initiative du pouvoir royal et relèvent davantage de pouvoirs ducaux ou seigneuriaux. Ainsi, ces villes nouvelles répondent plus à des stratégies personnelles qu'à l'aménagement urbain du royaume qui compte déjà un nombre conséquent d'agglomérations au début du XVIIe siècle[16].

Créée en 1587[18] par le duc Charles III de Lorraine, la ville neuve de Nancy, bâtie à côté de la ville-vieille médiévale, conserve encore les partis-pris des villes du XVIe siècle avec son plan en damier conçu par l'architecte et urbaniste italien Hieronimo Citoni. La rationalité humaniste héritée de la Renaissance s'exprime à travers les larges axes perpendiculaires Nord-Sud / Est-Ouest ouvrant sur quatre portes tandis qu'une vaste place est aménagée au centre de la ville nouvelle. A partir de 1598, des fortifications sont bâties autour de la ville nouvelle par l'architecte Jean-Baptiste Stabili.

Vue générale de la place Ducale de Charleville-Mézières par Clément II Métezeau, 1612-1627.

A l'instar de la ville-neuve de Nancy, la fondation de Charleville résulte d'une ambition ducale. En 1606, Charles Ier Gonzague, duc de Nevers, décide de fonder une ville-Etat sur le modèle des principautés de la Renaissance italienne destinée à devenir la capitale de la principauté d'Arches. Son objectif est de créer une cité idéale selon des principes politiques, urbains et architecturaux hérités du XVIe siècle. Les travaux, commencés en 1608, sont confiés à l'architecte Clément II Métezeau. Portant témoignage d'une volonté d'organisation rationnelle, le plan en damier est également choisi, mais la grille délimitée par les rues est toutefois scandée par un réseau de diverses places. Le centre du plan est occupé par la Place Ducale d'où filent des rues perpendiculaires en direction des quatre points cardinaux. Ces axes répartissent ainsi la cité en quatre quartiers, chacun possédant sa propre place et son église (Saint-Ignace, Saint-Sépulcre, Saint-François et Notre-Dame). Commencée en 1612 sur le modèle de la place des Vosges, la place Ducale possède également une architecture ordonnancée avec vingt-trois pavillons construits à l'identique, chacun composé d'un rez-de-chaussée à arcades, de deux étages carrés et d'un étage de comble. A partir de 1625, sur la face nord-ouest de la place, sont édifiés les façades du palais ducal qui restera néanmoins inachevé.

Façade de la maison dite de Sully à Henrichemont, selon un plan de Salomon de Brosse (1609-1610).

Destinée à devenir la capitale de la nouvelle principauté souveraine de Boisbelle acquise en 1605 par Maximilien de Béthune, duc de Sully, la ville d'Henrichemont est également caractéristique de l'urbanisme du début du XVIIe siècle. Si le nom de la ville nouvelle rend hommage à Henri IV, Sully a également choisi des hommes de l'entourage du roi pour sa construction. L'ingénieur du roi Claude Chastillon est l'auteur du plan de la cité tandis que Salomon de Brosse dresse les plans des bâtiments. S'inscrivant dans un carré, le plan radioconcentrique[18] de Chastillon ne reprend toutefois pas le modèle du plan en damier choisi à Nancy ou à Charleville. Au centre se trouve une large place carrée d'où partent quatre rues principales tracées dans l'axe des côtés, menant aux quatre portes de la ville, et quatre rues diagonales tracées à partir des angles. Les rues partant des axes des côtés divisent la ville en quatre quartiers tandis qu'au centre de chaque quartier se trouve une placette reliée à la place centrale par une des rues en diagonales. Les travaux commencés en 1609 prévoient la construction de seize corps de logis en brique à l'architecture identique dont les façades sont ornées de pilastres et de frontons, ainsi que d'une église catholique, d'un temple protestant, d'un collège, d'une halle et d'une hôtellerie. À la mort d'Henri IV en 1610, la ville nouvelle ne comprend que les seuls pavillons de la place centrale et ceux longeant les rues principales tandis que l'église, le temple et le collège ne sont pas encore construits.

Grand rue de Richelieu débouchant sur la place Royale (actuelle place des Religieuses). Vue de la porte de Chinon à l'arrière plan (1631-1642).

Cette ambition de cité idéale se traduit quelques années plus tard à travers la fondation de Richelieu. En 1631, le cardinal de Richelieu obtient de Louis XIII l'autorisation de créer ex nihilo « un bourg clos de murailles et de fossés » au coeur du nouveau duché de Richelieu, fondé en 1629. A ce projet s'ajoute la construction du château ducal qui sera adjoint au sud de la nouvelle agglomération. La création des plans de la ville et du château sont confiés à l'architecte Jacques Lemercier et à ses frères Pierre et Nicolas[16]. A l'instar de Nancy et de Charleville, le plan en damier est également choisi mais la stricte symétrie du plan inscrit dans un rectangle le rapproche d'Henrichemont. Il s'articule autour de deux places symétriques, la place Royale (actuelle place des Religieuses) et la place du Cardinal (actuelle place du Marché), toutes deux reliées par une grande artère médiane (actuelle Grand rue). La ville, ceinte de remparts bordés de douves, est accessible par trois portes monumentales tandis que la quatrième, factice, sert à respecter la symétrie de l’ensemble. Encadrant symétriquement la place du Cardinal, l'église Notre-Dame et la halle couverte se font face. Construits à l'identique selon un plan-type, les hôtels lotis le long de la Grande Rue témoignent également de la volonté d'ordonnancement de l'ensemble. Si ces différentes caractéristiques s'inscrivent dans l'héritage de l'urbanisme du début du XVII siècle, le projet de Richelieu innove surtout dans l'association entre la ville et le château, préfigurant ainsi Versailles.

Hôtels de ville et parlements

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Façade du palais du Parlement de Bretagne par Germain Gauthier et Salomon de Brosse, Rennes, 1618-1655

Si les hôtels de ville sont apparus en France depuis la fin du Moyen Âge, l'architecture édilitaire connaît un développement durant la période, avec l'apparition d'édifices publics dégagés sur leurs quatre côtés et se détachant du reste du parcellaire urbain[19].

Durant le règne d'Henri IV, les réalisations consistent surtout en l'agrandissement de bâtiments existants et l'esthétique des façades reste toujours très proche de l'architecture palatiale. L'exemple le plus notable demeure l'hôtel de ville de La Rochelle. Commencé au XVe siècle, l'hôtel de ville s'agrandit avec la construction de la grande galerie ou grande salle de l'échevinage (1595-1605) et de l'escalier d'honneur à double volée et tribune surmontée d'un baldaquin, sous lequel sera placée une statue d'Henri IV en 1612. L'emploi de colonnes baguées, l'usage de rythmes complexes ainsi que l'ornementation générale témoignent de la persistance de l'architecture maniériste, héritée de la Seconde Renaissance française, au tournant du XVIIe siècle[20].

D'autres réalisations locales conservent tardivement cet héritage à l'instar de l'hôtel de ville d'Hesdin où la bretèche érigée en 1629 à l'avant-corps de la façade, destinée à proclamer les décisions municipales, porte toujours une ornementation inspirée de la Renaissance (termes masculins ou cuir découpé).

Témoignant davantage d'un goût national que provincial, un changement s'opère avec le palais du Parlement de Bretagne, édifié à Rennes à partir de 1618 d'après les plans de Germain Gaultier et de Salomon de Brosse. Dégagé latéralement par des rues et en façade par une place, il se détache des constructions urbaines voisines et adopte une esthétique propre à l'édifice public notamment par l'adjonction en façade d'un grand perron avec escalier à double volée (aujourd'hui détruit) menant à la salle des pas perdus du premier étage[21].

A la suite de la réalisation rennaise, d'autres ouvrages reprennent cette même esthétique de l'édifice public durant la période. C'est par exemple le cas de l'hôtel de ville de Reims (1627-1653) et de l'hôtel de ville de Lyon (1646-1652). Bien qu'ayant tous deux conservés l'héritage médiéval du beffroi symbolisant l'indépendance de leurs villes, tous deux sont délimités des ilots voisins par des rues et des places et leurs façades possèdent en leurs centres des avant-corps surmontés de bas-reliefs et disposant d'imposants perrons menant vers leurs entrées principales.

Les institutions monétaires et les bourses de commerce

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Paris ne possédant au XVIIe siècle ni d'hôtel de la monnaie (malgré l'ancienneté de la Monnaie de Paris) ni de bourse de commerce, les rares exemples français édifiés durant la période témoignent davantage des influences étrangères et des particularismes locaux que d'un goût proprement national. Le développement plus précoce du capitalisme dans d'autres pays européens, comme les Pays-Bas ou l'Italie du Nord, explique notamment cette diffusion de modèles venus de l'étranger[22].

Il en va ainsi de l'hôtel des Monnaies d'Avignon, construit en 1619 et attribué à François de Royers de La Valfenière[22]. Cet édifice commandité par le cardinal Borghèse, légat pontifical d'Avignon possède une esthétique générale fortement influencée par l'italianisme qui domine alors le goût public dans le Comtat Venaissin. Le parti pris architectural s'inscrit notamment dans le style du palladianisme, originaire de Vénétie. Le caractère monumental de la façade, carrée et massive, sans saillies dynamisant la façade, est particulièrement exceptionnel et novateur pour un établissement fabriquant de la monnaie en ce premier quart du XVIIe siècle[19].

Quelques années plus tard, la loge du Change de Lyon édifiée par Simon Gourdet entre 1631 et 1653 d'après un plan orginal de Sebastiano Serlio, emploie également un volume massif avec un portique constitué de quatre arcades en façade et couvert d'un toit percé de lucarnes.

S'inspirant des modèles venus du Nord de l'Europe, la Bourse de Lille, édifiée par Julien Destrée entre 1651 et 1653, adopte l'esthétique propre aux bourses de commerce initiée par la bourse d'Anvers (1531), la bourse de Londres (1565-1570) ou bien encore la bourse d'Amsterdam (1607-1611). Elle consiste en un bâtiment carré au centre duquel se trouve une cour centrale à portiques où s'exerce le commerce monétaire, tandis que des boutiques prennent place au rez-de-chaussée des quatre façades extérieures. L'ornementation générale s'inspire également du style bruxello-anversois, qui se diffuse à la même époque, notamment à travers les recueils de l'architecte et graveur Jacques Franquart[23].

Les établissements hospitaliers et scolaires

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Passant progressivement de l'autorité ecclésiastique à l'autorité civile depuis le XVIe siècle, les établissements hospitaliers créés durant la période conservent encore l'héritage de l'architecture conventuelle[22] où les cours et les pavillons s'ordonnancent autour d'une chapelle.

L'architecte et topographe Claude Chastillon, concepteur en 1605 de la place des Vosges, réemploie le parti-pris de la place fermée pour dessiner le plan de l'hôpital Saint-Louis (1607-1611), édifié à l'initiative d'Henri IV. Les bâtiments à appareillage de briques et de calcaire s'ordonnancent autour d'une grande cour carrée, rappelant l'architecture d'un cloître. A l'instar de la place des Vosges, les quatre bâtiments encadrant la cour possèdent en leurs centres des pavillons plus élevés édifiés en avant-corps des façades et percés d'arcades voûtées. Destinée à accueillir les habitants de la paroisse, la chapelle se trouve en retrait de l'ensemble, ouverte sur la ville.

Fondé par le cardinal Mazarin, l'hôpital de la Salpêtrière, édifié à partir de 1657 sur les plans de Libéral Bruand, reprend en revanche le modèle de l'hôpital en croix déjà initié au siècle précédent pour l'hôpital des Rois-Catholiques de Saint-Jacques de Compostelle (1511) ou bien pour l'hôpital de Tavera de Tolède (1541) en plaçant la chapelle au centre d'un plan en forme de croix[22].

L'architecture des collèges, souvent fondés dans la première moitié du XVIIe par des congrégations religieuses à l'instar des Jésuites ou des Oratoriens, conserve également l'apparence d'établissements conventuels. Suite à la destruction de l'ancien collège gothique ainsi que du collège de Calvy voisin, la reconstruction du collège de Sorbonne commanditée par le cardinal de Richelieu en 1635 et confiée à Jacques Lemercier, témoigne de la persistance de cet ordonnancement. Le projet consiste en une grande cour fermée s'étendant au nord de la nouvelle chapelle de la Sorbonne, évoquant ainsi un cloître adjoint à une église. Quelques années plus tard, le collège des Quatre-Nations (1661-1688), édifié par Louis Le Vau suite au legs du cardinal Mazarin, s'ordonnera également autour d'une chapelle mais s'affranchira davantage du modèle conventuel[24].

L’architecture des demeures royales et privées

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L'essor des officiers et des financiers dans la première moitié du XVIIe siècle a pour conséquences directes d'accroître le nombre de commandes architecturales mais aussi d'impulser un nouveau modèle, celui de la demeure à la française[25].

Plans et distributions

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Développement du nombre de pièces, usages diversifiés selon les pièces, évolution de leur distribution.

Les châteaux
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Le plan quadrangulaire
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Vue du château de Verneuil-sur-Oise tirée du Premier volume des plus excellents Bastiments de France de Jacques Ier Androuet du Cerceau (1576).

Au début du XVIIe siècle, les plans des châteaux s'inscrivent toujours dans la tradition du plan quadrangulaire avec une cour centrale flanquée de pavillons aux quatre coins[26]. Les modèles hérités du XVIe siècle, à l'instar du château d'Ancy-le-Franc ou du château d'Écouen, constituent encore des sources d'inspiration pour les premières réalisations de la période. Parmi ces modèles, le château de Verneuil-sur-Oise, conçu vers 1558 par Jacques Ier Androuet du Cerceau, présente ainsi un plan caractéristique composé de quatre ailes encadrant une cour d'honneur et délimitées par quatre pavillons aux angles[27]. Formant un U autour de la cour, le corps de logis principal et les ailes latérales se déploient sur trois niveaux d'étages, tandis que l'aile d'entrée se compose d'une simple galerie en rez-de-chaussée couverte d'une terrasse et percée en son centre par un châtelet d'entrée surmonté d'un dôme. Reliant les quatre ailes entre-elles, quatre pavillons composés de quatre niveaux d'étages se dressent aux angles du château.

Ce type de plan quadrangulaire est toutefois l'objet de plusieurs variations. Le corps de logis principal peut posséder ou non des pavillons décrochés qui peuvent être simples ou jumelés. L'aile d'entrée peut être soit composée d'un bâtiment coiffé d'un comble, d'une galerie en rez-de-chaussée couverte d'une terrasse ou d'un simple mur-écran. Souvent plus basse pour apprécier la vue sur le corps de logis principal, l'aile d'entrée est souvent percée en son centre d'un châtelet d'entrée ou d'un portail monumental[26].

Plan du rez-de-chaussée du palais du Luxembourg publié dans L'Architecture française de Jean-François Blondel (1752-1756).

En 1615, la reine-mère Marie de Médicis confie à l'architecte Salomon de Brosse la construction du palais du Luxembourg destiné à devenir sa demeure particulière. Le plan du palais est caractéristique des châteaux français du début du XVIIe siècle. Construit à la limite méridionale de Paris, il bénéficie d'importants dégagements et son plan quadrangulaire tient davantage du château rural que du palais urbain[28]. A l'instar du château de Verneuil-sur-Oise dont s'inspire l'architecte[27], on y retrouve le corps de logis et les ailes latérales formant un U autour d'une cour centrale fermée par une aile d'entrée. Celle-ci se compose d'une galerie en rez-de-chaussée percée en son centre par un châtelet d'entrée surmonté d'un dôme. Quatre pavillons marquent également les angles de la cour. Cependant l'innovation du projet réside dans l'ampleur du corps de logis par rapport aux autres ailes et dans le dédoublement des pavillons à ses angles antérieurs et postérieurs. De même la partie centrale du corps de logis occupée par le grand escalier et le vestibule forme un avant-corps prenant la masse d'un pavillon. La distribution des pièces est également caractéristique de la période : un appartement (antichambre, chambre, cabinet et garde-robe) occupe chaque étage des pavillons tandis que les salles et galeries occupent les ailes latérales et les parties centrales du corps de logis.

Quelques années plus tard, le projet de reconstruction du château de Blois, commandé en 1634 par Gaston d'Orléans à l'architecte François Mansart, reprend le parti pris du palais du Luxembourg[27] avec un plan s'articulant autour d'une cour centrale, les pavillons dédoublés de l'aile en fond de cour ou encore le choix d'un corps d'entrée monumental coiffé d'un dôme. Faute d'argent, les travaux sont arrêtés en 1638 à la naissance du futur roi Louis XIV et seule l'aile en fond de cour, aujourd'hui dénommée « aile Gaston d'Orléans », est achevée.

A l'instar du projet du château de Blois, le plan en quadrilatère domine encore largement les réalisations des années 1630[29]. C'est notamment le cas du deuxième château de Versailles édifié en 1631 par l'architecte Philibert Le Roy et commandité par Louis XIII afin d'agrandir le pavillon de chasse construit quelques années plus tôt. Ceint de douves, le château de Le Roy se compose d'un corps de logis en forme de U encadrant une cour d'honneur fermée par un portique à arcades garnies de ferronneries et où quatre pavillons en fort décrochement sont adjoints aux quatre angles. Témoignant de la vivacité du modèle quadrangulaire, on retrouve des dispositions analogues dans le plan du château de Chilly-Mazarin par Clément Métezeau (1627-1632), dans le projet du château de Coulommiers terminé par François Mansart en 1631, ou bien encore dans les plans du château de Pont-sur-Seine (1632) et du château de Chavigny (1637) dessinés par Pierre Le Muet.

Vue générale en perspective du château de Richelieu d'après Adam Pérelle (avant 1695). On y observe successivement la basse-cour, l'anticour et le logis seigneurial.

L'un des châteaux à plan quadrangulaire les plus remarquables des années 1630 demeure le château de Richelieu. En 1631, l'architecte Jacques Lemercier conçoit un plan carré où le corps de logis en forme de U, flanqué de quatre pavillons, s'articule autour d'une cour d'honneur. Cette dernière est fermée par une aile d'entrée constituée d'une galerie en rez-de-chaussée surmontée d'une terrasse et comportant en son centre un pavillon d'entrée monumental. L'ensemble du logis seigneurial est ceint de douves. Le château est surtout complété par un ensemble de communs et de cours situées en amont : une première basse-cour est encadrée par deux groupes de bâtiments s'ordonnançant autour d'arrière-cours fermées par des murs-écrans percés de portails, abritant notamment les écuries du commun et les ménageries. Une deuxième anticour menant jusqu'au logis est encadrée par deux ailes abritant les écuries seigneuriales et des appartements, chacune flanquées de pavillons à leurs extrémités et possédant un pavillon central. Plus grand château de France avant le Versailles de Louis XIV[30], Richelieu préfigure ce dernier par son arborescence d'ailes et de cours et par son modèle inédit de ville-château.


Le plan désarticulé
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Restitution du château de Blérancourt, d'après les plans de Salomon de Brosse (1612-1619).

En parallèle du plan quadrangulaire, se développe dès les années 1610 le modèle du plan désarticulé[31]. Ce type de plan consiste à faire disparaître les deux ailes latérales ainsi que l'aile d'entrée et à isoler le corps de logis principal situé en fond de cour. Cependant, deux pavillons d'angle, parfois accompagnés d'un portail, subsistent à l'avant du corps de logis, matérialisant ainsi l'aile d'entrée du traditionnel plan quadrangulaire. Ces deux pavillons abritent parfois le logement du portier et une chapelle.

Le plan du château de Blérancourt, dessiné en 1612 par Salomon de Brosse, est l'un des premiers témoignages de ce nouveau parti pris architectural. Conçu par le même architecte et contemporain du palais du Luxembourg, le corps de logis du château de Blérancourt dispose également de quatre pavillons jumelés à ses angles. L'originalité du plan tient cependant en l'absence d'ailes latérales bordant la cour d'honneur, isolant ainsi le corps de logis au centre d'un terre-plein bordé de fossés tout en l'ouvrant vers l'extérieur. Cette nouvelle disposition annonce le modèle du château moderne en plan massé qui s'imposera à partir de la seconde moitié du XVIIe siècle[32]. Bordant le fossé antérieur, l'évocation de l'aile d'entrée du plan quadrangulaire subsiste grâce à la présence de deux pavillons d'angle, aux dimensions ramassées par rapport aux pavillons du corps de logis, tous deux reliés par une balustrade au centre de laquelle prend place un portail monumental.

Façade Est du château de Balleroy, par François Mansart (1625-1630).

Si Blérancourt demeure la référence de ce modèle, le parti-pris du plan désarticulé se retrouve dans d'autres réalisations d'architectes moins prestigieux comme le château des Moulières ou le château de Villebourgeon. De même, le château de Courances, malgré l'adjonction de l'aile des communs sur une partie latérale du corps de logis, procède aussi du plan désarticulé par ses deux pavillons antérieurs reliés par un mur-écran percé d'un portail placés dans l'axe central du château.

Le château de Balleroy édifié par François Mansart entre 1625 et 1630, s'inscrit également dans la tradition de Blérancourt. Disposé sur un terre-plein bordé de fossés, le corps de logis est massé[33] avec un grand pavillon central se détachant en avant-corps de la façade. La cour d'honneur est bordée de terrasses surélevées rappelant l'emplacement des ailes latérales du plan quadrangulaire. Deux pavillons de tailles modestes encadrent l'avant-cour étagée à un niveau inférieur à celui de la cour d'honneur. L'évocation de l'aile d'entrée a disparu comme le démontre l'absence de balustrade, de mur-écran ou de portail entre les deux pavillons.

Le plan massé
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A partir des années 1630-1640, l'élargissement progressif de la profondeur du corps de logis fait évoluer les plans et la distribution intérieure des châteaux français[34]. Ce changement est principalement dû à la diffusion du comble brisé ou « toit à la Mansart » permettant de couvrir un espace plus large que les traditionnels comble droit et comble à surcroît[34]. Le plan massé se caractérise ainsi par un corps de logis double en profondeur permettant davantage de dégagements et d'espaces de circulation, rompant ainsi avec l'enfilade unique des pièces[34]. De même, le plan du château est désormais centré autour du corps de logis et non plus autour d'une cour. Les ailes latérales du plan quadrangulaire, déjà absentes du plan désarticulé, disparaissent ainsi totalement au profit de larges pavillons encadrant le corps de logis.

Façade côté cour du château de Maisons, par François Mansart (1640-1651).

Le château de Maisons, édifié entre 1640 et 1651 selon les plans de François Mansart, illustre l'évolution vers ce nouveau modèle. Bien que le corps de logis conserve certains archaïsmes tels que les corps simples en profondeur et la structuration très marquée des différents corps, le château présente la forme caractéristique du plan massé avec un corps central placé entre deux pavillons en retour d'équerre. Le château est placé sur une plateforme ceinte de fossés. Sur cette plateforme, les emplacements des ailes latérales, des pavillons d'angles antérieurs et de l'aile d'entrée du plan en quadrilatère sont matérialisés au sol par des terrasses ceintes de balustrades, encadrant ainsi la cour d'honneur. Le mur de clôture de l'aile d'entrée est remplacé par un fossé dit « saut-de-loup » ou Ha-ha, permettant de dégager la perspective sur le corps de logis du château.

Le modèle d'un corps central flanqué de deux pavillons en retour d'équerre se retrouve également dans le plan du château de Cheverny (1624-1634) par Jacques Bougier ou plus tardivement dans celui du château de Sucy-en-Brie (1660-1687) par Louis Le Vau.

Plan du logis du château de Vaux-le-Vicomte par Louis Le Vau (1656-1661).

Egalement édifié par Louis Le Vau entre 1656 et 1661, le château de Vaux-le-Vicomte témoigne de l'évolution finale des châteaux français vers le plan massé. S'il possède un corps de logis double en profondeur caractéristique du plan massé, l'innovation principale réside toutefois dans le grand salon dit « à l'italienne ». Précédé du côté de l'entrée par un vestibule, ce grand salon à l'italienne de forme ovale se déploie sur la hauteur du rez-de-chaussée et du premier étage et constitue un avant-corps formant abside au centre de la façade côté jardin. La distribution des pièces place symétriquement les appartements du roi et les appartements d'apparat du maître de maison de part et d'autre du salon à l'italienne, tandis que les étages sont réservés aux appartements privés[35]. Le corps de logis et la cour d'honneur sont disposés sur une plate-forme ceinte de douves où l'on retrouve, matérialisés par des terrasses surmontées par des pièces de pelouse et des fontaines, l'emplacement des pavillons d'angle et des ailes latérales du plan en quadrilatère encadrant la cour d'honneur à l'avant du corps de logis.

Les hôtels particuliers
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Phénomène principalement parisien, le développement des hôtels particuliers dans la première moitié du XVIIe siècle résulte de l'essor de la noblesse de robe, des officiers et des financiers et de la nécessité de renouveler l'organisation de la demeure urbaine pour loger ces notables[30].

Plan du rez-de-chaussée de l'hôtel de la Vrillière (1635) par François Mansart. L'hôtel comporte un corps de logis double et dispose de plusieurs cours.

Héritage des hôtels particuliers médiévaux comme l'hôtel de Sens ou l'hôtel de Cluny, les plans des réalisations de la fin du XVIe siècle et du début du XVIIe siècle se caractérisent par des corps de logis simples en profondeur entourant une cour centrale séparée de la rue par un mur de clôture, le corps de logis principal, souvent situé en fond de cour, jouxtant un jardin privé. On retrouve notamment cette organisation traditionnelle dans le plan de l'hôtel de Sully conçu par Jean Androuet du Cerceau en 1625.

Cependant, en concomitance avec les évolutions urbanistiques parisiennes des règnes d'Henri IV et de Louis XIII, un autre type de plan apparaît au début du siècle. Autour des nouvelles places royales, comme la place Dauphine et la place des Vosges, ou le long des quais de l'île Saint-Louis apparaissent des hôtels où les corps de logis sont placés à front de rue afin de profiter de ces nouvelles perspectives sur la ville[36]. Précédés par le corps de logis principal, la cour et le jardin se succèdent ainsi en fond de parcelle. C'est notamment le cas des plans de l'hôtel du Cardinal de Richelieu (1605-1612) et de l'hôtel d'Hesselin dessiné par Louis Le Vau (1640-1644). L'hôtel de Beauvais conçu par Antoine Le Pautre entre 1655 et 1660 dispose d'un corps de logis sur rue avec des boutiques au rez-de-chaussée. Rejetés en fond de cour, les communs sont notamment couverts au premier étage par la chapelle, la galerie et un jardin suspendu[37].

Plan du premier étage de l'hôtel de Beauvais (1654) par Antoine Le Pautre

A partir des années 1640, les nouveaux hôtels particuliers parisiens se dotent de deux cours juxtaposées et distinctes selon leurs usages : la cour d'honneur dédiée à l'entrée noble et la basse cour dédiée aux communs et aux services[38]. Le plan de l'hôtel de la Vrillière conçu par François Mansart en 1635 ou celui de l'hôtel d'Avaux conçu par Pierre Le Muet (1642-1648) témoignent de ce parti-pris.

A l'instar du plan massé qui se généralise pour les châteaux, les corps de logis simples laissent progressivement la place aux corps doubles en profondeur, permettant de multiplier le nombre de pièces et de faciliter leur distribution[39]. L'hôtel de Jars, situé rue de Richelieu et conçu par François Mansart en 1648 adopte ainsi un corps de logis double et une seule aile abritant les communs, placée d'un seul côté de la cour d'honneur. Celle-ci est ainsi décentrée par rapport à l'axe de la parcelle tandis que le jardin, placé derrière le corps de logis, occupe toute la largeur du terrain. La rupture d'axe entre la cour et le jardin est cachée grâce au doublement du corps de logis. Le plan de cet hôtel fixe pour un siècle les dispositions de l'hôtel particulier français[40]. Quelques années plus tard, les plans de plan de l'hôtel Salé (1656-1659) dessiné par Jean Boulier de Bourges reprend cet axe décentré entre cour et jardin avec un corps de logis double et une aile des communs rejetée sur un côté de la cour d'honneur.

Le renouvellement de la distribution et de la séquence des pièces
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L'évolution des plans du château et de l'hôtel particulier français dans la première moitié du XVIIe siècle s'accompagne d'un renouvellement de la séquence des pièces.

Plan du second étage de l'hôtel Lambert (1641) par Louis Le Vau, illustrant la succession antichambre-chambre-cabinet-garde-robe d'un appartement. L'escalier, au centre, dessert deux appartements. Le vestibule de forme ovale dessert la galerie qui s'ouvre sur le jardin.

Depuis le XVIe siècle, la distribution de l'appartement, dévolu à un seul occupant, consiste en une séquence de pièces se succédant en enfilade et obéissant à une certaine hiérarchie, de la pièce la plus publique à la pièce la plus intime. L'appartement se compose ainsi d'une salle ou grande salle servant de grande pièce publique où se tiennent les grandes assemblées (festins ou bals), d'une chambre servant de petite pièce de réception et de chambre à coucher, et d'un cabinet servant de pièce privée tenant lieu de cabinet de travail, de bibliothèque ou de cabinet de curiosités[41]. Deux autres pièces peuvent s'ajouter à cet ensemble : l'antichambre, servant autant à la prise des repas que de salle d'attente pour les visiteurs avant leur réception dans la chambre, et la galerie qui sert à la fois de lieu de passage et de promenade.

A partir du XVIIe siècle la présence d'une antichambre se généralise à l'ensemble des châteaux et hôtels particuliers tandis que celle de la galerie, plus luxueuse et demandant une place plus importante, reste optionnelle[41]. Intimement liée à la chambre, une garde-robe complète systématiquement cette séquence de l'appartement français. A la séquence antichambre-chambre-cabinet-garde-robe, peuvent s'ajouter d'autres pièces d'usage commun à l'ensemble des résidents du château ou de l'hôtel, comme une chapelle ou un appartement des bains[41].

Plan du rez-de-chaussée de l'hôtel d'Avaux (1642) par Pierre Le Muet. Le vestibule est au centre du corps de logis principal, situé en fond de cour, et dessert l'escalier rejeté vers la gauche. Le rez-de-chaussée se compose d'un appartement sans grande salle comportant plusieurs chambres dont une chambre à alcôve.

Jusqu'aux années 1640, dans les demeures possédant un corps de logis simple, les pièces de l'appartement se succèdent à partir de l'escalier, placé au centre du logis et distribuant les différents appartements. Les premières salles des appartements bénéficient d'une double exposition sur cour et jardin, tandis que les pièces plus confidentielles situées au bout de l'enfilade se développent bien souvent dans les ailes placées en retour donnant sur la cour. A partir des années 1640, la généralisation du doublement du corps de logis en plan massé va bouleverser cette organisation. L'escalier est souvent reporté vers une extrémité du bâtiment tandis que les pièces, désormais juxtaposées, ne prennent le jour que d'un seul côté mais gagnent en facilité de circulation et d'aménagement intérieur[41].

Durant la période, de nouvelles pièces apparaissent tandis que d'autres voient leurs usages modifiés. Prenant place au centre du plan, le vestibule gagne progressivement en importance. En précédant l'escalier, il devient le pivôt autour duquel s'ordonnent les espaces de circulation. Monumentalisé, il prend la fonction d'atrium (vestibule du château de Maisons-Laffitte ou vestibule de l'hôtel d'Avaux) et devient parfois une réelle salle de réception remplaçant la traditionnelle grande salle qui disparait des intérieurs à partir des années 1620. Donnant systématiquement sur le jardin de l'hôtel, la galerie peut également assumer certaines fonctions de l'ancienne grande salle et devient parfois un long cabinet où sont exposées les collections du maître de maison lorsqu'elle se situe au bout de l'enfilade de l'appartement (galerie de l'hôtel Lambert)[42]. Les pièces dites « à l'italienne » s'élevant sur deux niveaux avec deux registres de fenêtre superposées, font leur apparition. Ce type d'aménagement spectaculaire est souvent choisi pour la chambre d'un appartement (chambre de l'hôtel de la Vrillière ou grande chambre de l'hôtel Amelot de Bisseuil) ou pour ce qui deviendra la future pièce dénommée « salon », assumant à la fois les fonctions de réception de la grande salle et de la chambre (grand salon ovale du château de Vaux-le-Vicomte).

Evolutions techniques

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Les combles
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Comble droit à pannes d'après Pierre Le Muet (1623).

Le mode de couverture qui prédomine de la fin du XVIe siècle jusqu'aux années 1640 demeure le comble dit « à la française »[43] se caractérisant par des fermes fortement triangulées. Deux types de combles à la françaises coexistent durant la période :

  • Le comble droit est constitué de fermes droites aux pentes aigues s'élevant directement à partir du sommet du mur gouttereau[44]. Il se constitue d'un entrait bas, avec arbalétriers longs et un poinçon long. Utilisé en France septentrionale depuis le début du XVIe siècle, on trouve dans ce type de comble l'emploi du système de charpente à pannes disposées entre les arbalétriers et les chevrons[45].
Comble à surcroît et étages d'après Pierre Le Muet (1623).
  • Le comble à surcroît est constitué de fermes reposant sur des sablières pratiquées dans une saignée du mur gouttereau, prenant ainsi appui beaucoup plus bas que l'extrémité supérieure du mur[44]. Ceci favorise l'ouverture de lucarnes passantes dans ce surcroît du mur. Afin de dégager un véritable étage de combles entre le plancher et la ferme, un poinçon plus court vient prendre place sur un entrait dit « retroussé » placé plus en hauteur, permettant ainsi une plus grande habitabilité des combles[45]. A partir du début du XVIIe siècle, ce modèle du comble à surcroît s'enrichit d'un nouveau type : la charpente à étages. La partie haute et pointue, non habitable, du comble est constituée d'une ferme aux dimensions plus modestes, tandis que la partie basse, le comble habitable, est constituée de deux grosses pièces courtes, les jambes de force, s'adossant au surcroît[46].
Comble brisé ou à la Mansart d'après Pierre Le Muet (1717-1732).

A partir des années 1630-1640, se généralise l'emploi du comble brisé, souvent attribué dans l'historiographie à François Mansart et à Pierre Le Muet[47]. S'inspirant des modèles méridionaux et italiens (couverture basse sur terrasse horizontale) tout en découlant du comble droit français à surcroît et étages, il se caractérise par une pente du toit brisée à la jonction de la ferme et des jambes de force. La pente du toit est donc constituée de deux parties : la partie inférieure bordant les jambes de force, appelée brisis, est surmontée d'une partie haute, appelée terrasson, qui coiffe la ferme. Ce type de toiture, va caractériser l'architecture française du XVIIe siècle par l'ampleur de son utilisation, justifiée notamment par l'habitabilité des combles rendue et par l'économie de bois réalisée[48]. Dès lors les toitures coiffant les différents volumes sont davantage unifiées, s'abaissent et se dissimulent derrière des balustrades ou des parapets[47]. Ce type de toiture permet également de composer sur des corps de logis doubles en profondeur.

L'escalier se perfectionne durant le premier tiers du XVIIe siècle, faisant évoluer les modèles de l'escalier à vis médiéval et de l'escalier droit hérité de la Renaissance[49]. A l'instar de l'escalier Henri II conçu par Pierre Lescot au palais du Louvre (1551-1555), les modèles d'escaliers droits de la fin du XVIe siècle et du début du XVIIe siècle sont encore constitués de deux volées de sens opposées séparées par un mur d'échiffre et couvertes d'un plafond rampant ou d'une voûte en berceau.

La première évolution consiste à percer d'arcades le mur d'échiffre puis de remplacer ce mur par une rampe d'appui à claire-voie scandée par des poteaux afin de gagner en jour[49]. Conservant le principe de l'escalier à noyau mais logée dans une cage rectangulaire, la charpente repose ainsi entièrement sur ces poteaux. Ce système est notamment employé par Jacques Bougier pour l'escalier d'honneur du château de Cheverny (1624-1634) ou encore par Pierre Le Muet pour l'escalier du château de Chavigny (1638).

Progressivement les architectes tendent à faire disparaître partiellement ou totalement ces poteaux en renvoyant toutes les poussées de l'ensemble de la structure, volées de marches et paliers, sur les murs de la cage d'escalier instituant ainsi le modèle de l'escalier suspendu sur voûtes[49]. Dès 1620 Jean Thiriot utilise ce nouveau modèle pour l'escalier à volées droites de l'hôtel de Canillac mais c'est François Mansart qui initie le premier modèle d'escalier tournant suspendu sur voûtes pour l'escalier du château de Balleroy (1625-1630) en y perfectionnant l'art de la stéréotomie[50].

La cage d'escalier gagne en monumentalité en jouant sur les volumes dégagés par ces innovations techniques[51]. C'est notamment le cas de l'escalier d'honneur de l'aile Gaston d'Orléans du château de Blois (1635-1638), dont la construction est également confiée à François Mansart : le dégagement obtenu par l'escalier sur voûtes permet à l'architecte de monumentaliser la cage d'escalier en la coiffant d'une double coupole emboîtée. Mansart aura de nouveau recours à un plan carré en partie basse surmonté d'une coupole de forme ovale en partie haute pour l'escalier d'honneur du château de Maisons (1640-1651). Préfigurant l'escalier des Ambassadeurs du château de Versailles, Louis Le Vau donne une stature imposante à l'escalier de l'hôtel Lambert (1642) en le dotant d'un double déploiement[51].

Façades et décor

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Le style Henri IV-Marie de Médicis (1589-1624)
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Verticalisme : comble droit et à surcroît : fragmentation du plan et de l'élévation en plusieurs corps de logis avec toitures indépendantes.

Traitement des surfaces : emploi combiné de la pierre et de la brique. Type sobre (joue simplement sur la polychromie pierre, brique et ardoise) et type orné (inspiré du maniérisme tardif, influences étrangères, apparition de l'ornement baroque).

Le style « central » (1624-1640)
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Style sévère, apparition de la rigueur classiciste : simplification des masses, unification des façades, simplification des lignes et du décor. Articulation plus harmonieuse des lignes verticales et horizontales. Disparition progressive de l'usage de la brique. 2 écoles : style sévère et dépouillé à la Le Mercier ou ornementation beaucoup plus riche mais toujours respect des règles classiques.

Le style classicisant (1640-1661)
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Généralisation des combles brisés : toitures en croupe, unification et abaissement des toitures derrières des balustrades. Disparition progressive des lucarnes et de leur ornementation. Uniformisation des façades. Rejet de la polychromie, imposition de la mesure et de la symétrie. Jeux de lumière sur les redans et les décrochements.

Décor intérieur

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Les lambris

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Les lambris d'appui

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Très bas de hauteur, les lambris d'appui sont principalement destinés à supporter les tapisseries ou les tentures de cuir tendues depuis la partie supérieure des murs[52]. Composés de panneaux verticaux et horizontaux, ces lambris sont souvent ornés de peintures représentant des paysages, des scènes diverses ou des natures mortes. Ces peintures, polychromes, monochromes ou traitées en camaïeu, s'intègrent dans des cartouches parfois d'inspiration maniériste. Des ornements variés tels que les chiffres ou les monogrammes des commanditaires, des grotesques ou des mascarons s'intercalent entre ces scènes. Les panneaux verticaux peuvent parfois prendre la forme de pilastres[52].

Les lambris à la française

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Héritage des lambris du XVIe siècle, à l'instar de ceux ornant la galerie François-Ier du château de Fontainebleau, le lambris dit « à la française » est constitué de panneaux de bois occupant entre la moitié et les deux tiers de la hauteur du mur. Ces panneaux se composent souvent d'un lambris d'appui surmonté d'un lambris médian couronné d'une large corniche formant parfois étagère. Au-dessus de celle-ci prends place un attique orné de tentures ou de tableaux. Cet ordonnancement tripartite des registres horizontaux (lambris d'appui, lambris médian et attique), est généralement scandé par des éléments verticaux : panneaux, piédroits peints ou sculptés, ou pilastres[52].

Les décors des lambris d'appui se composent de cartouches allégoriques, de paysages, de natures-mortes, de vases de fleurs ou des chiffres des propriétaires[53]. On retrouve le même type d'ornements sur les lambris médians, mais ces derniers, aux dimensions plus importantes que celles des lambris d'appui, possèdent des compostions plus sophistiquées et des paysages ou vues topographiques plus élaborés[52]. Les tableaux ornant l'attique relèvent souvent de la peinture d'histoire[53], mais des portraits allégoriques peuvent aussi figurer sur ce registre. Des objets décoratifs, vases ou statuettes, peuvent prendre place sur les épaisses corniches séparant le lambris médian de l'attique[54].

Les lambris à la française sont employés jusqu'au milieu du XVIIe siècle avant de céder la place aux lambris de hauteur. A la fin des années 1640, l'ordonnancement est amené à évoluer à l'instar du décor du cabinet de l'hôtel de Villacerf où la corniche diminue en saillie et l'attique est réduite à un étroit bandeau.

Les lambris de hauteur

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A la différence du lambris à la française, le lambris de hauteur occupe toute la surface du mur, du sol au plafond, sans l'interruption d'une corniche. Les panneaux de bois horizontaux et verticaux, sont assemblés par embrèvement via un système de rainures et languettes[55].

La répartition des registres horizontaux demeure tripartite, mais des évolutions ont lieu durant la période. Dans les années 1620-1630, le lambris d'appui, bas de hauteur, est surmonté d'un grand lambris médian supportant le décor principal, lui-même couronné d'un lambris supérieur de même dimension que le lambris d'appui. Ce type d'agencement est notamment présent dans l'antichambre de la marquise d'Huxelles au château de Cormatin.

Dans les années 1640 l'apparition de grands panneaux de hauteur modifie cette répartition : le panneau supérieur, très haut et vertical, occupe toute la moitié supérieure du mur tandis que les lambris médians et d'appui, tous deux bas de hauteur et oblongs, occupent la moitié inférieure. Le décor de la chambre de la maréchale de la Meilleraye, à l'Arsenal de Paris témoigne de ce nouveau parti pris décoratif.

Les portes connaissent quelques évolutions durant la période. En général les portes sont plutôt basses, étroites et dotées d'un seul vantail comportant deux ou trois panneaux superposés. Ces panneaux sont souvent peints d'une couleur unie : gris, rouge ou laissés dans les tons du bois[56]. Les portes peuvent aussi s'harmoniser aux lambris voire se dissimuler dans le décor.

Durant le règne de Louis XIII, les portes deviennent plus monumentales, notamment afin de mettre en valeur l'effet d'enfilade des pièces de plus en plus recherché dans l'architecture. Les portes à double vantaux se généralisent et s'intègrent dans de larges encadrements surmontés de frontons, de cartouches ou de médaillons abritant des reliefs ou des peintures[57].

Les cheminées

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Élément architectural le plus imposant de la pièce, la cheminée demeure l'élément décoratif central autour duquel se déploie tout le programme décoratif[58]. Héritée du XVIe siècle et toujours usitée durant le règne de Louis XIII, la cheminée dite « à la française » se caractérise par sa masse parallélépipédique imposante, droite et rectangulaire, s'étendant du sol au plafond et se dégageant en forte saillie du mur. Située dans l'axe du foyer qu'elle surmonte, la cheminée à la française est munie d'une grande hotte rectangulaire ou carrée recevant l'essentiel du décor architectural et ornemental[59]. Si l'emploi de la pierre et du marbre, rare et onéreux, se limite souvent au manteau de la cheminée encadrant le foyer, la plupart des coffrages des hottes sont réalisés en bois ou en plâtre[58].

Véritable morceau de bravoure du décor intérieur, les cheminées à la française conservent, jusqu'au milieu des années 1620, un programme ornemental exubérant toujours fortement influencé par l'Ecole de Fontainebleau[59]. Durant toute la période la partie centrale de la hotte est systématiquement ornée d'une toile peinte, d'un buste parfois logé dans une niche circulaire ou d'un bas-relief. Ces éléments centraux s'insèrent dans un environnement richement sculpté, souvent polychrome et parfois relevé de dorure. Aux ornements maniéristes tels que les mascarons, les cartouches ou encore les figures aux lignes serpentines s'ajoutent des putti, des guirlandes de fruits et de fleurs, des rinceaux de feuilles d'acanthe ou encore des trophées. Si le choix des ornements varie au cours du siècle, le respect d'une stricte symétrie de l'ensemble du décor demeure la principale règle observée durant toute la période[58].

Cependant, les cheminées dépourvues de hottes apparentes commencent à apparaître à partir des années 1640[60]. Grâce au dispositif attribué à l'architecte Pierre Le Muet visant à introduire directement les conduits d'évacuation des fumées dans les murs[56], la taille du foyer des cheminées diminue durant tout le XVIIe siècle et la hotte s'intègre progressivement à la paroi murale pour laisser uniquement le manteau de la cheminée en saillie du mur à la fin du siècle[54].

Les plafonds

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Les plafonds à poutres et solives apparentes

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Jusqu'au milieu du XVIIe siècle, l'essentiel des plafonds couvrant les pièces sont à poutres et solives apparentes[55]. Système traditionnel de couvrement intérieur[61], ce type de plafond, qualifié de « plafond à la française », se trouve surtout dans les pièces de réception à l'instar des salles, des antichambres et des galeries[55].

Si d'ordinaire les poutres et solives reçoivent un traitement dans les tonalités des bois ou sont simplement recouvertes d'une peinture unie, les plafonds plus élaborés reçoivent un riche décor peint de couleurs vives. Les motifs ornant les poutres et solives s'inspirent notamment du vocabulaire ornemental maniériste : bandes à entrelacs, mascaron, fleurons, rosettes ou encore cartouches en forme de cuir découpé[55]. Des petites scènes, des paysages ou des allégories sont parfois peints dans des cartouches décorant les faces des poutres principales, tandis que les monogrammes ou blasons des propriétaires agrémentent aussi bien les solives que les poutres. Si la plupart de ces décors tentent d'imiter le relief, notamment par l'emploi de grisailles, certaines décorations sont parfois réalisées en papier mâché avant d'être dorées à la feuille[55].

Les plafonds à compartiments

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Héritage du XVIe siècle, les plafonds plats à compartiments sont toujours employés durant la période et rencontrent un grand succès durant le règne de Louis XIII[56]. Ils consistent en des caissons de menuiserie, aux fonds peints ou marouflés de toiles peintes, recouvrant le réseau de solives du plafond initial mais pouvant laisser apparentes les poutres principales autour desquels ils se déploient[55].

Les formes et les tailles de ces compartiments ainsi que leurs dispositions sont diverses et varient durant la période. Il peut s'agir d'un simple damier de compartiments disposés de façon régulière ou bien encore de petits caissons distribués autour d'un grand caisson central[49].

A partir des années 1620, le décor sculpté ornant les poutres et les caissons est souvent traité en fort relief et tend progressivement à masquer le réseau des poutres[49] à l'instar des grandes guirlandes ornant les plafonds de l'appartement de la maréchale de La Meilleraye à l'Arsenal de Paris ou ceux décorant la chambre du roi au château d'Oiron.

Les scènes peintes des caissons sont parfois les oeuvres de peintres renommés, comme Charles Poerson qui illustrent les plafonds de l'Arsenal dans les années 1640-1645[61]. Les peintures de ce type de décor permettent également aux peintres de créer une véritable unité narrative entre les décors des murs et ceux des plafonds[56].

Les plafonds à compartiment sont surtout utilisés pour décorer des pièces plus confidentielles comme les chambres ou les cabinets[55].

Les plafonds à voussures

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C'est à partir du milieu des années 1640 qu'apparaissent les plafonds à voussures, dits « plafonds à l'italienne », dans les intérieurs[49] avant qu'ils ne détrônent définitivement les traditionnels plafonds à la française et les plafonds plats à compartiments dans les années 1650-1660[62].

Trouvant son inspiration dans les voûtes peintes de la Renaissance italienne, l'utilisation de toiles rapportées sur des plafonds fut initiée dès le milieu du XVIe siècle en Italie par Pellegrino Tibaldi pour décorer les plafonds du Palazzo Poggi (1550) avant d'être imitée par les frères Carrache pour la réalisation de certaines parties des célèbres fresques de la galerie Farnèse (1597-1607)[60].

Ce type de plafond se compose de quatre voûtains en arc de cercle reliant la partie haute des murs à un compartiment central. Véritable innovation technique, il consiste ainsi à suspendre au plafond initial une structure légère et concave de lattes de bois enduites de plâtre[62] sur lesquelles sont peints les décors.

Si les premières réalisations des années 1640, à l'instar du plafond du cabinet de l'hôtel de Villacerf à Paris, se caractérisent surtout par des figures ornementales plutôt simples et statiques[62], les plafonds à voussures de la décennie suivante se définissent principalement par le caractère illusionniste et dynamique des peintures, évoquant des scènes célestes où se déploient des figures mythologiques. Ces plafonds donnent ainsi l'impression de s'ouvrir sur des ciels peuplés de personnages en mouvement. Ces représentations s'insèrent dans de fausses architectures réhaussées de figures ou de guirlandes en stucs blancs ou dorés et alternent avec des « bas-reliefs feints » imitant la pierre ou le métal par un traitement en camaïeu ou en grisaille[63].

Parmi les peintres se distinguant particulièrement dans l'ornementation de ce type de plafond, il convient notamment de citer Giovanni Francesco Romanelli qui réalise les plafonds de l'appartement d'été d'Anne d'Autriche au palais du Louvre, Eustache Le Sueur qui décore les plafonds de l'hôtel Lambert et surtout Charles Le Brun qui réalise certains plafonds de l'hôtel La Rivière et du château de Vaux-le-Vicomte et qui portera l'art de la voûte historiée à son apogée à Versailles dans la seconde moitié du siècle.

Narcissa Niblack Thorne, French Bedroom, Late 16th Century, vers 1939, Art Institute of Chicago
  • Nombreuses influences étrangères (flamandes, italiennes ou espagnoles)
  • Lignes droites
  • Les sièges gardent une traverse de façade qui rappelle les sièges à piètement non ajouré de la Renaissance (sgabello)





Matériaux et techniques

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La menuiserie

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Le terme de menuiserie s’applique aux meubles réalisés en bois massif par des menuisiers : sièges, tables, montants des lits, et bâtis des meubles destinés à être plaqués[64].

Durant la première moitié du XVIIe siècle, la pratique de la menuiserie est toujours étroitement encadrée par le système des corporations. Depuis le Moyen Âge, les artisans du meuble sont ainsi soumis à un ensemble de règles et sont seulement autorisés à travailler le bois massif[64].

Les essences de bois
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Parmi les essences de bois utilisés, le bois de chêne, essence la plus utilisée dans le mobilier jusqu'au XVIe siècle[65], demeure toujours très présent dans la production de cette époque. De couleur brun-jaune, il est particulièrement dur, durable et résistant aux variations atmosphériques[65]. Il est principalement utilisé pour les sièges, les tables, pour le bâti des meubles et les éléments de la structure des lits[66]. Le bois de hêtre se substitue également au bois de chêne. D'une couleur blanchâtre à rougeâtre, il possède un aspect peu homogène mais il est très solide et supporte bien le fort assemblage[67].

Les « bois blancs » (sapin, peuplier ou aulne) sont moins solides que le chêne ou le hêtre mais sont plus légers. Le bois de sapin est d'une couleur blanche veinée de jaune, et est en général moins cher que les autres essences de bois[68]. On les emploie davantage pour réalisés les plateaux des tables à tréteaux destinées aux repas[66].

Le bois de noyer est dur et homogène et possède une couleur jaune fauve veinée de brun ou de noirâtre[67]. Détrônant la suprématie du bois de chêne dans le mobilier à partir du XVIe siècle, il est particulièrement apprécié durant toute la période pour son aspect brillant que mettent en valeur la sculpture et le tournage. Il est ainsi utilisé pour le piétement en bois tourné des sièges et des tables ainsi que pour les buffets à deux corps et les armoires[66].

Le tournage
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Exemple d'un tournage en balustre ornant les pieds et l'entretoise d'un fauteuil de style Louis XIII ou néo-Louis XIII

Trouvant son inspiration dans le mobilier flamand, le tournage sur bois devient la principale technique de décoration du mobilier durant la première moitié du XVIIe siècle[69], au point de devenir l'une des caractéristiques majeures du mobilier de style Louis XIII[70].

Dès le début du siècle, l'engouement pour les éléments décoratifs réalisés par tournage sur bois rend déterminante la place du tourneur dans la production des meubles, poussant notamment à la création de la corporation des tourneurs[71].

Sans toutefois éclipser la sculpture, notamment sur certains buffets ou cabinets, les parties des meubles traités en tournage sont les montants, les accotoirs, les pieds, les traverses d'entretoise, ou encore les pilastres des meubles[69].

Plusieurs types de tournage coexistent durant la période :

  • Le tournage en colonne reprend la forme architecturale d'une colonne, souvent surmontée d'un chapiteau dorique reposant sur un piédouche.
  • Le tournage en chapelet ou en perles consiste en une juxtaposition et succession régulière de boules ou de masses ovoïdes.
  • Le tournage en torse ou salomonique consiste en des spirales s'étirant de façon hélicoïdale autour d'un fût central.
  • Le tournage en balustre comprends un ou plusieurs fûts piriforme séparés par des annelets et encadrés par des piédouches et chapiteaux.
  • Le tournage en vase ou en toupie prend une forme similaire à ces deux objets et orne généralement le centre de l'entretoise des tables.
La mouluration
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L'aspect fortement architecturé du mobilier de style Louis XIII doit beaucoup aux moulures qui ornent les corniches, les socles et les panneaux des meubles. Dans la première moitié du XVIIe siècle, les corniches, ornant notamment les parties supérieures des buffets et des armoires, sont particulièrement épaisses.

Caractéristique du style, les formes géométriques prédominent durant la période pour décorer les panneaux :

  • La moulure en tas de sable comporte un simple parallélépipède taillé en quatre facettes.
  • La moulure en pointes de gâteau comprend six à huit pointes tendant vers le centre du motif, prenant parfois l'apparence d'une croix de Malte.
  • La moulure en pointe-de-diamant est en forme de losange, taillé en quatre ou huit facettes, souvent encadrés par quatre triangles taillés en facettes.
  • La moulure en gâteau comporte plusieurs cercles concentriques.

L'ébénisterie et la marqueterie

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La première moitié du XVIIe siècle correspond à une grande évolution du mobilier français : l'apparition de l'ébénisterie et de la technique du placage sur bois. Originaire d'Allemagne et de Hollande, cette nouvelle technique pénètre en France grâce aux « menuisiers en ébène » étrangers[72].

En 1608, Henri IV encourage l'installation dans la Grande Galerie du Louvre du menuisier hollandais Laurent Septarbres[72]. N'étant pas membres de la corporation des menuisiers parisiens, et afin de les protéger de l'hostilité de ces derniers, les nouveaux ébénistes français s'installent dans des lieux privilégiés où il bénéficient de la franchise du travail, notamment l'Enclos du Temple ou le Faubourg Saint-Antoine qui deviendra l'un des principaux centres de production de l'ébénisterie française[72]. L'un des premiers ébénistes français est Philippe Boudrillet, établi au Faubourg Saint-Antoine en 1635, nommé menuisier ordinaire en ébène du roi de 1636 à 1638[72].

Apparue en Allemagne dès les années 1620, la technique de la marqueterie est progressivement utilisée par les ébénistes français qui vont tirer profit des variétés des essences de bois et d'autres matériaux pour composer de nouveaux décors[73]. Si les ébénistes-marqueteurs étrangers sont particulièrement sollicités en France à l'instar du hollandais Pierre Gole ou de l'italien Philippe Caffieri, tous deux recrutés par le cardinal Mazarin[74], les ébénistes français gagnent en réputation dans ce domaine. C'est le cas de l'ébéniste-marqueteur Jean Macé qui s'expatrie aux Pays-Bas pour se perfectionner dans la technique de l'ébénisterie et de la marqueterie, avant d'être logé au Palais du Louvre en 1644[75]. Cette première génération d'ébénistes-marqueteurs précède ainsi de quelques décennies André-Charles Boulle, qui pratiquera avec une grande virtuosité cet art sous le règne de Louis XIV, au point de lui donner le nom de « marqueterie Boulle »[73].

Les essences de bois
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Bois exotique de l'ébénier ayant donné son nom au métier d'ébéniste, l'ébène est utilisée depuis la fin du XVIe siècle en Allemagne et dans l'Europe du nord pour fabriquer des meubles[76]. De couleur homogène noire, il s'agit d'un bois particulièrement dur et dense, dont la surface s'adapte bien au polissage. Provenant de régions tropicales diverses (Antilles, côte occidentale de l'Afrique, Gabon, Madagascar, îles Moluques ou encore Makassar), il existe plusieurs variétés d'ébène comportant autant de variations de couleurs. Du fait de son importation en Europe par les compagnies des Indes, son coût est particulièrement élevé ce qui explique notamment son usage parcimonieux en tant que bois de placage[76].

Essence de bois européenne plus économique que l'ébène, le bois de poirier noirci est aussi utilisé comme bois de placage durant la période. Bois dur, d'une couleur variant du rose au rouge sombre, il possède un grain serré similaire à l'ébène[77]. Possédant une surface bien adaptée au polissage, il est aussi particulièrement recherché en ébénisterie pour ses propriétés adaptées à la sculpture fine et à la mouluration[68]. En outre, il prend très bien la teinture noire servant à imiter le bois d'ébène.

Bois dur, lourd et peu nerveux, le bois de palissandre possède comme l'ébène plusieurs variétés et nuances de couleurs allant du brun orangé au rose[76]. Importé d'Inde, du Brésil ou de Madagascar, ce bois exotique est particulièrement précieux et est davantage utilisé pour les travaux de marqueterie durant la période.

Le placage et la marqueterie
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Les fines feuilles de placage sont destinées à être collées en surface du bâti nu du meuble.

La dureté du bois d'ébène et son coût relativement important sont à l'origine de la création de la technique du placage sur bois et de l'ébénisterie.

C'est à partir du XVIe siècle [69] que l'on commence à débiter l'ébène en feuilles de 8 à 10 millimètres d'épaisseur afin de les coller au bâti nu, souvent en chêne ou en sapin, d'un meuble au moyen d'une colle de provenance animale (nerfs ou os)[70]. Les feuilles d'ébène sont ensuite sculptées en bas-relief ou gravées du fait de leur faible épaisseur.

Dans le premier tiers du XVIIe siècle, les premières réalisations de marqueterie consistent en des incrustations de cuivre, d'écailles de tortue ou d'étain dans du bois d'ébène, à l'instar du cabinet-bureau du maréchal Charles Ier de Créquy aujourd'hui conservé au Musée de Cluny[69]. L'ébéniste choisit les lamelles des divers matériaux qu'il superpose et découpe ensemble à la scie à découper afin d'obtenir une découpe exactement similaire. Les jeux d'éléments obtenus après découpage sont ensuite insérés les uns dans les autres afin d'obtenir un décor aux coloris contrastés[73].

Les grands lits et leurs garnitures

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Anonyme, d'après Abraham Bosse, Les Femmes à table en l’absence de leurs maris, après 1636, Musée national de la Renaissance. Un grand lit est visible à gauche, au second plan.

Dans les différentes couches de la société de la première moitié du XVIIe siècle, le lit demeure le meuble principal de la chambre, par son volume et sa valeur[78], comme le démontrent les inventaires après décès ou les gravures réalisées à cette époque[79].

Dans la chambre, le lit prend généralement place dans un angle de la pièce et délimite une ruelle. Cependant, l’usage d’un lit placé au centre d’une alcôve (distinguée par une estrade ou une ouverture plus réduite) et mis en parallèle du mur, se répand dans la première moitié du siècle, notamment chez la marquise Catherine de Rambouillet[78]. Permettant d’y recevoir des visiteurs, cette disposition en « lit de milieu » ou « lit de bout » sera employée jusqu’à la fin du XVIIIe siècle pour les lits de parade.

Comme aux siècles précédents, le lit demeure parfois transportable, en étant démonté et rangé dans des malles, lors des déplacements[79].

Garniture d'un lit à la française :
  • 1 : pomme
  • 2 : pente
  • 3 : fond au revers du ciel de lit
  • 4 : dossier
  • 5 : cantonnière ou bonne-grâce
  • 6 : chevet
  • 7 : courtepointe
  • 8 : soubassement

Le lit à baldaquin dit « à la française », demeure le principal type connu durant la période. De forme cubique, il comporte un ciel de lit de même dimension que la couche. La structure du lit se compose d’un châssis rectangulaire appelé « enfonçure », recevant le « coucher » composé généralement d’une paillasse, de plusieurs matelas de futaine remplis de bourre ou de laine sur lequel prends place un lit de coutil rempli de plumes. Un sommier de crin, plus onéreux, peut aussi être employé. On y ajoute un traversin de plumes voire un oreiller. Des couvertures de laine, appelées « catalognes » complètent cet ensemble. La tête de lit se compose d’un « chantourné » ou chevet. Aux quatre angles se dressent quatre piliers de bois tourné, en noyer voire en chêne ou en hêtre, parfois appelés « quenouilles » ou « colonnes », soutenant le ciel de lit, que l’on appelle « impériale ». Au-dessus du ciel de lit et en prolongement des piliers, prennent place quatre vases appelés « pommes » ou quatre bouquets de plumes. Les dimensions des lits varient entre 1,30 et 2,25 mètres de large, 1,95 et 2,45 mètres de long et 2,45 à 3,05 mètres de haut[80].

L’ensemble de la structure est entièrement recouverte d’étoffes[81], parfois similaires à celles garnissant les sièges. Dans la première moitié du XVIIe siècle, il existe deux façons de dissimuler le châssis et la couche.

La première consiste en une « housse », c’est-à-dire en un rectangle de tissu, supporté par le ciel de lit, auquel sont cousus de longs pans de tissus retombant verticalement sur les côtés. Ces pans sont fixes et ne sont pas coulissants. On maintient le lit ouvert en repliant les pans au niveau de la traverse supérieure du ciel de lit et en les attachant par des cordons. Aux quatre angles du lit retombent des cantonnières, composées soit d’une bande d’étoffe pliée en deux soit de deux bandes cousues ensemble verticalement [82].

La seconde façon d’habiller la structure consiste en des rideaux surmontés d’anneaux coulissants sur une tringle. Cette dernière est dissimulée par des pentes, droites ou festonnées, suspendues au ciel de lit. Des cantonnières, fixes, ou des « bonnes-grâces », coulissantes, garnissent également les quatre angles du lit[83]. Il semble que cette seconde méthode, plus commode que la traditionnelle house, prédomine à partir des années 1650[82].

La pièce de tissu garnissant l’espace entre les deux piliers à la tête du lit s’appelle un « dossier » tandis que le dessous du ciel de lit, également garni, s’appelle un « fond ». La partie basse du lit est également garnie de trois « soubassements » entourant le coucher, ou d’une courtepointe, parfois appelée « couverture de parade », disposée sur le coucher et retombant jusqu’au sol [84].

La préciosité des étoffes employées ainsi que la richesse du décor déterminent le rang social. Les rideaux du lit restent généralement clôt en journée[85].

Les lits de repos

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N'étant pas destinés au sommeil nocturne, les lits de repos sont des couches d'appoint et ne comportent pas de rideaux. Ils sont généralement placés au centre d'une pièce. Il s'agit davantage d'un meuble de réception et ils préfigurent en ce sens les canapés qui apparaissent à la fin du siècle[86]. Durant la période, les lits de repos ne comportent qu'un seul chevet à l'une des extrémités du meuble.

Les sièges

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Anonyme, d'après Abraham Bosse, L'ouïe, XVIIe siècle, Musée des Beaux-Arts de Tours.

Les sièges constituent à cette époque l’essentiel du mobilier et sont les plus nombreux dans les intérieurs[87]. Mobiles, on les déplace au gré des besoins au centre de la pièce avant de les ranger contre les murs lorsqu’ils sont inutilisés. Dans l’idéal on les emploie par groupe de six[88] si l’argent du propriétaire et la place disponible le permettent. Toutefois il semble que la seule règle qui se dégage durant la période est de posséder un nombre pair pour chaque type de siège[87].

Le banc, héritier du mobilier médiéval, conserve toujours une place dans les intérieurs. Recouvert d’une étoffe pour plus de confort, il deviendra plus tardivement ce qu’on appellera la banquette[89].

Les tabourets et ployants

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Il existe plusieurs types de tabourets, aussi appelés « placets »[90], durant la période. Les escabeaux (ou « escabelles ») sont composés d’un plateau étroit soutenu par quatre pieds ou par deux panneaux pleins. Ils sont assez élevés et ne possèdent ni dossier, ni bras. On les utilise essentiellement pour se mettre à table [89] et connaissent un engouement dans les années 1650[91].

Les ployants, sans bras ni dossier, dont les pieds en forme de X peuvent être repliés, étaient notamment employés dans l’espace public des résidences royales et servaient notamment au respect de l’étiquette de cour, permettant aux personnes autorisées de s’asseoir en présence des souverains[89].

Les chaises à dos

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Inspirées des formes hispano-flamandes[93],[94], « les chaises à dos » (c’est-à-dire avec dossier et sans accotoirs) possèdent au début du siècle une structure raide, une assise plutôt basse et un dossier vertical peu élevé.

La chaise à vertugadin est adoptée en France au début du XVIIe siècle avec la mode féminine de la robe à vertugadin, originaire d’Italie et d’Espagne. Comportant d’importants bourrelets sur les hanches, cette robe à crinoline rend impossible l’usage de chaises à bras et nécessite la création d’un siège spécifique. Assez basse et large pour permettre le déploiement du vertugadin, elles comportent uniquement un dossier, sans accotoirs[89],[92].

Les chaises à bras et fauteuils

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Fauteuil de style Louis XIII :
  • 1 : dossier
  • 2 : assise
  • 3 : accotoir droit tourné en spirales
  • 4 : extrémité d'accotoir à tête de lion
  • 5 : traverse entre les montants avants
  • 6 : entretoise en H
  • 7 : pied rectangulaire

La « chaise à bras » comportant des accotoirs, que l’on appelle « fauteuil » à partir de 1636[93], est le type de siège le plus fréquent dans les intérieurs[95]. Tout comme les chaises à dos, les chaises à bras possèdent au début du siècle une structure plutôt raide avec un dossier droit en forme de rectangle horizontal placé au milieu du dos et des accotoirs droits et plats[94]. Les accotoirs naissent dans le quart inférieur du dossier pour reposer sur un montant réalisé dans la continuité des pieds antérieurs. L’entretoise, reliant les quatre pieds, est généralement en cadre et les pieds, simplement équarris, comprennent souvent de simples montants droits à section carrée, notamment pour les deux pieds postérieurs.

Progressivement, la structure générale du fauteuil évolue durant la période. A partir des années 1630, l’assise se rehausse et le dossier s’incline légèrement tout en gagnant de la hauteur[96] : le dossier naît un peu au dessus du siège et soutient le dos jusqu’aux épaules. L’entretoise prend désormais la forme caractéristique du style Louis XIII, en forme de H[94], et une barre transversale réunie bien souvent la partie supérieure des deux montants antérieurs. Surtout, le traitement en bois tourné des montants, traverses et accotoirs devient beaucoup plus sophistiqué. Les pieds prennent tout d’abord la forme de colonnes doriques, avant de recevoir un décor tourné à perles ou en grains de chapelets où les jointures sont parfois soulignées par des éléments de section carrée[97]. A la fin du règne de Louis XIII, le tournage se complexifie encore avec l’apparition de montants en forme de spirales et évolue durant la régence d’Anne d’Autriche avec un tournage au décor plus classicisant faisant s’alterner balustres et boules[97]. Les accotoirs, droits, suivent la même évolution et possèdent une facture similaire. Au bout de certains accotoirs apparaissent des cubes ornés de cercles, des têtes de lions ou des bustes de femmes nommés « têtes de poupées »[93]. D’abord rigides, les accotoirs gagnent progressivement en mouvement en adoptant une forme sinueuse dite en « os de mouton »[98], épousant davantage la courbure des bras. Ces derniers se terminent par des crosses enroulées ou prennent la forme de feuilles d’acanthe sculptées pour les fauteuils les plus onéreux.

Les « fauteuils de malades » apparaissent durant la période. Ces sièges, souvent à roulettes, possèdent un système de crémaillère latérale permettant d’incliner le dossier[99],[100].

Le bois des sièges sont la plupart du temps laissé au naturel. Cependant, avec la mode du bois noirci, dans les années 1620, l’usage de bois polychromes se développe. Le bois, peut être peint, principalement en noir et en rouge [101]. Les bois vernis, c’est-à-dire laqué, et dorés se rencontrent surtout à partir des années 1660[101].

La garniture des sièges

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Louis Le Nain, Les Joueurs de trictrac, XVIIe siècle, Musée du Louvre. L'homme attablé à droite de l'image est assis sur une chaise dont l'assise et le dossier sont habillés d'une housse.

Plus précieuse que la structure en bois, la garniture habillant le dossier et l’assise détermine réellement la valeur du siège[97]. Depuis la fin du XVIe siècle, celle-ci est fixée de façon permanente, remplaçant l’ancien usage des coussins mobiles placés sur l’assise que l’on appelait « carreaux » [102]. On note toutefois la persistance de l’utilisation des carreaux par-dessus la toile tendue des sièges ployants, afin de les rendre plus confortables[90].

L’assise et le dossier sont rembourrés de crin, de laine ou de bourre et recouverts d’une garniture. Souvent employé à cette époque, le cuir est résistant et peu coûteux tandis que le tissu (velours, soierie, drap ou serge de laine) voire la tapisserie à l’aiguille, sont plus chers. Un cloutage très ostentatoire maintient la garniture au siège. On apprécie tout d’abord les gros clous ronds et dorés (dont le diamètre varie jusqu’à trois centimètres)[93] avant de voir apparaître des clous de plus petites dimensions, de forme pyramidale[93].

Avec l’évolution de la structure du siège et l’élargissement vertical du dossier, la structure en bois ne devient plus apparente et le dossier est entièrement habillé de tissu. En parallèle du système de fixation par cloutage, on note également l’utilisation de housses, permettant de changer aisément la garniture[103]. Il peut s’agir de housses en une seule pièce dissimulant tout le bois du siège, soit de housses spécifiques pour l’assise ou le dossier.

Enfin, de la passementerie enrichit souvent les bordures des garnitures : franges et crépines garnissent ainsi les pourtours du dossier et de l’assise.

Les garnitures de paille concernent surtout le mobilier des catégories sociales modestes. Quant à l’utilisation du cannage, appelé « paille façon de Flandres »[104], et du rotin, elle représentait un coût relativement élevé en France. Il s’agissait essentiellement de produits d’importation en provenance de la Hollande qui en détenait le monopole grâce à la Compagnie des Indes[105].

Les tables à manger

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Anonyme, d'après Abraham Bosse, Le goût, XVIIe siècle, Musée des Beaux-Arts de Tours.

Il n’existe pas de pièce spécifiquement dédiée aux repas, qui sont généralement prit dans l’antichambre des appartements[106]. Héritage de l’époque médiévale, la table se compose toujours de planches posées sur des tréteaux : on « dresse »[107] la table juste avant les repas et on la démonte une fois qu’ils s’achèvent. Cette tradition reste en usage durant tout le XVIIe siècle[108].

Du fait de cette non-permanence de l'espace dédié au repas, les rares tables à manger comportant un châssis fixe disposent souvent de rallonges[109], notamment pour faciliter leur transport et leur rangement dans les appartements. La table « tirante » ou à rallonges comporte un épais plateau dissimilant deux plateaux supplémentaires se tirant et se juxtaposant au plateau principal[110].

Destinées à accueillir plusieurs convives lors des repas, les tables dites « de monastère », généralement exécutée en bois massif et dont le long plateau est fixé sur des pieds réunis par une traverse, se rencontrent surtout dans les réfectoires des communautés religieuses.

Les petites tables

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Table de style Louis XIII :
  • 1 : plateau
  • 2 : ceinture
  • 3 : tiroir, moulure à pointe de diamant
  • 4 : pied tourné en balustre
  • 5 : entretoise en H, tournée en balustre
  • 6 : toupie
  • 7 : pied boule

L’emploi de petites tables volantes en bois gagnent en popularité dans la première moitié du siècle[106]. Elles sont destinées à divers usages : tables de toilette, tables d’écriture ou encore tables de jeux.

En noyer, hêtre, acajou, voire en chêne pour les plus imposantes, elles se composent d’un plateau posé sur un châssis formé de quatre à sept pieds en bois tourné, pouvant être droits, en colonne, en spirales ou en balustre. Destinés à consolider l’ensemble, les quatre pieds sont reliés par une entretoise qui peut être en cadre, en forme de H et coiffée d’une toupie ou bien en forme de X sinueux, notamment à la fin de la période[107].

Certaines tables qualifiées de « brisées » sont pliantes. Un tiroir peut également prendre place dans la ceinture, sous le plateau. Le plateau est parfois constitué de rallonges pour allonger la table[108]. A l’inverse, le plateau peut être constitué d’abattants se repliant sur eux-mêmes pour un gain de place (plateau « ployant par les bords »[111]).

Si les plateaux des tables sont parfois richement décorés de marqueterie, ils sont toutefois rarement laissés nus[111]. Des tapis, souvent de la même étoffe que celles du lit et des sièges, les recouvrent. Ces tapis prennent différentes formes : simple rectangle de tissu bordé de franges ou tapis en « housse » en forme de croix, dont on attache les coutures au moyen de lacets ou de boutonnières. Concernant les tables destinées à l’écriture, des tapis de cuir, parfois disposés par-dessus ces housses, permettent un meilleur soutien. Les onéreux tapis d’Orient, considérés comme trop précieux pour être mis au sol, sont posés sur les tables des chambres et constituent un comble de raffinement et de distinction[111].


Les tables de marqueterie

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La technique de la marqueterie vient orner les tables les plus luxueuses à partir des années 1620. Egalement disposées sur un piètement en bois tourné, elles possèdent tout d’abord des plateaux marquetés de différentes essences de bois indigène, principalement du noyer. A partir des années 1650, le bois d’ébène et le « bois des Indes » viennent enrichir les décors de ces tables.

Les guéridons

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Les guéridons et sellettes apparaissent en France à la fin de la période, au début du règne de Louis XIV [112]. Ils possèdent une base épaisse et lourde afin de constituer une bonne assise, sur laquelle repose un pied central, ou « fût », en bois tourné (en balustre ou en spirale) surmonté d’un plateau ou tablette de forme circulaire, souvent orné de moulures. Sans réelle fonction utilitaire, ils sont surtout dédiés à recevoir ou présenter des objets[112], particulièrement les luminaires[113].

Les meubles de rangement

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Parties d'un cabinet français :
  • 1 : bandeau
  • 2 : face extérieure du vantail, décor en bas-relief
  • 3 : face intérieure du vantail, décor gravé
  • 4 : niche centrale
  • 5 : vantail de la niche centrale
  • 6 : tiroir ou layette
  • 7 : ceinture
  • 8 : pied avant tourné en spirale
  • 9 : pied arrière droit
  • 10 : tablette d'entretoise
  • 11 : pied boule

Meuble en usage dans toute l’Europe depuis le XVIe siècle, il connaît un engouement tout particulier durant la première moitié du XVIIe siècle. D’abord fabriqué en Italie, en Allemagne (Augsbourg, Nuremberg), dans les Flandres (Anvers) ou aux Pays-Bas (Amsterdam)[114], il s’agit d’un produit importé en France. Cependant la politique protectionniste en faveur des arts décoratifs encouragée sous Henri IV, va permettre le développement d’une réelle production française marquée par des ébénistes de renom, à l’instar de Laurent Septarbes[115] ou de Jean Macé nommé « ébéniste du roi » en 1641[114].

Il s’agit essentiellement d’un meuble de parade, que seules les élites peuvent s’offrir. Le luxe des matériaux employés et la richesse des décors sculptés traduisent le rang social de son propriétaire. Le cabinet est principalement voué au rangement et à la présentation de petits objets de collections[114] à une époque où se développent les collections privées des cabinets de curiosités, constituées de monnaies, médailles, coquillages, minéraux et objets d’histoire naturelle divers. Il est généralement adossé à un mur[115].

Le bâti du cabinet, en bois indigène comme le chêne ou le peuplier, est recouvert par un placage de bois précieux, notamment d’ébène. Le meuble étant destiné à être placé contre un mur, son dos ne reçoit pas de placage. Il peut être peint de fleurs ou posséder un décor gravé ou sculpté [107].

Le cabinet français est de taille imposante et mesure en général 2 mètres de haut, pour une largeur variant entre 1,60 et 1,80 mètres et d’une profondeur de 0,60 mètres[115]. Il se compose de deux éléments superposés et indépendants : un piètement sur lequel repose le cabinet proprement dit, appelé partie supérieure.

Le piètement est généralement constitué de huit à douze pieds. Les pieds sont sculptés ou tournés en colonne, voire en colonnes torses. Les pieds placés à chaque extrémité sont presque toujours doublés, tandis que les pieds situés au centre peuvent être simples. Le fond du piètement, destiné à être situé contre le mur, peut-être plein ou ouvert. L’ensemble repose souvent sur un plateau rectangulaire, ou tablette d’entretoise, disposé sur des boules rondes ou aplaties situées sous chaque pied. Deux tiroirs ou une tablette que l’on peut tirer occupent la partie supérieure du piètement, sous le cabinet.

La partie supérieure est composée de deux vantaux en façade. L’extérieur de ces vantaux est orné d’un riche décor sculpté en bas-relief ou gravé : une sculpture dans une niche ou une scène centrale sont encadrées par des colonnes ou bien des bas-reliefs à motifs floraux. La face intérieure des vantaux comporte également un décor similaire qui est le plus souvent traité en gravure et non en relief afin de permettre une aisance de fermeture. Des tiroirs ou des statues placées dans des niches peuvent encadrer les deux vantaux en façade.


L’intérieur du cabinet est constitué de cinq niveaux de tiroirs ou « layettes », flanquant ou encadrant un caisson central s’ouvrant au moyen de deux petits vantaux. Les tiroirs sont souvent rehaussés de moulures et ornés de boutons en cuivre ou en bronze doré, tandis que les vantaux du caisson central reçoivent un décor gravé ou sculpté en léger-relief, figurant parfois une scène.

L’intérieur du caisson central est conçu comme un théâtre en miniature[107]. Les inspirations sont variées : grotte, temple, palais ou encore scène de théâtre. L’illusion d’un espace miniature est rendue grâce à l’aménagement d’effets de perspective accélérée dans la marqueterie des sols ou dans les peintures des plafonds[116]. Les éléments du décor intérieur sont constitués de matériaux divers afin de donner l’illusion du réel : petits miroirs, écailles de tortues, ivoire, métaux, pierres dures et précieuses, mosaïques de marbre ou encore petites toiles peintes[107]. En contraste avec l’ensemble du meuble de couleur ébène, les revers des vantaux reçoivent un placage polychrome de bois indigènes, souvent à décors géométriques[116].

Les buffets et les armoires

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Pieter de Hooch, Portrait d'une famille jouant de la musique, 1663, Cleveland Museum of Art.

Les buffets et les armoires sont utilisés aussi bien dans les demeures bourgeoises que dans les résidences nobiliaires[117]. Ils trouvent leur place dans les habitations en fonction de ce qu’elles contiennent : les pièces de service pour le stockage de la vaisselle et du linge, les garde-robes pour les vêtements, les chambres et cabinets pour les papiers, bijoux et bibelots[118].

Ils sont principalement réalisés en noyer ou en chêne, parfois en hêtre. Les panneaux peuvent être en sapin[118]. Les meubles de menuiserie sont majoritaires, on dénombre peu de buffets ou d’armoires d’ébénisterie durant la première moitié du siècle[119].

Les meubles d’apparat, très ouvragés, ne concernent qu’une petite part de l’ensemble de la production réalisée à cette époque.

Buffet à deux corps de style Louis XIII :
  • 1 : corps supérieur, en retrait
  • 2 : corniche
  • 3 : vantail à moulure en gâteau
  • 4 : corps inférieur
  • 5 : tiroir
  • 6 : vantail à moulure en pointe de diamant

Meuble très apprécié depuis le milieu du XVIe siècle, le buffet est « à deux corps » c’est-à-dire composé de deux éléments superposés : un corps inférieur reposant sur quatre pieds, comportant deux vantaux ou « guichets », surmonté par deux tiroirs, et le corps supérieur, généralement de plus petite dimension et légèrement en retrait, comporte également deux vantaux et est surmonté d’une imposante corniche. En général, il est peu sculpté[81]. Des moulures viennent souligner les bordures des tiroirs et des vantaux dont les surfaces sont parfois décorées de motifs géométriques plus complexes tels que des losanges dans des carrés ou des triangles taillés en facettes en « pointes de diamant ». Les plus onéreux buffets de parade peuvent comporter des scènes sculptées sur leurs vantaux. Les montants peuvent aussi s’orner de colonnettes pleines ou de colonnettes torses lorsqu’ils ne comportent pas de décor plus sophistiqué tels que des cariatides sculptées en haut-relief pour les buffets les plus précieux.

Le mobilier de cette première moitié du XVIIe siècle s’enrichit d’un nouveau meuble : l’armoire à deux portes [81]. Si le siècle précédent a vu se généraliser l’armoire dans les intérieurs, celle ci comportait alors au moins quatre vantaux à l’instar du buffet.

L’armoire ne possède qu’un seul corps, reposant sur des pieds droits, en boule ou en boule aplatie, et se compose, à partir du règne de Louis XIII, de deux grands vantaux. Elle peut comporter un ou deux tiroirs sous les portes et est également surmontée d’une corniche. Tout comme pour les buffets, le décor des portes est composé de plusieurs panneaux encadrés de moulures et ornés de « pointes de diamant » ou de motifs en cercles concentriques en relief, dits « en gâteau »[81].

Les coffres

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Abraham Bosse, Un laquais debout, 1633. Un coffre muni de poignées et recouvert de cuir clouté est visible au sol, à droite.

L’usage des buffets et armoires n’a cependant pas fait disparaître celui du coffre, héritage du mobilier médiéval, qui demeure toujours un élément essentiel de rangement utilisé dans toutes les couches de la société[120]. On le place plutôt dans les chambres, dans les cabinets ou dans les pièces de service, selon leur contenu. Dans les chambres, ils sont surtout destinés au rangement du linge, des pièces de monnaie, de l’orfèvrerie ou des bijoux[121].

Ils sont le plus souvent en bois de chêne[121]. Une couverture en cuir fixée par des clous dorés ou argentés, à l’instar de ceux que l’on trouve sur les sièges, peut parfois les recouvrir, notamment pour leur assurer une protection lors des voyages.

On en détermine deux types : le coffre au couvercle plat dit « coffre carré » ou « huche » et celui au couvercle bombé appelé « coffre bahut ». La façade, souvent plate et peu ornée[121], peut cependant être décorée d’une épaisse moulure[81]. Ils reposent souvent sur des pieds en boule ou en boule aplatie. Une à deux serrures en assure la fermeture [120].

L’usage de « coffres de nuit » ou « coffres de toilette » est également rapporté à cette époque. On les trouve principalement dans les chambres des dames. Ils sont de plus petites dimensions, reposent sur une table et sont recouverts de « housses » de tissus, semblables à celles recouvrant les tables[122]. Ces coffres ont parfois l’intérieur garni d’étoffe et sont parfois posés sur un piètement de table.

Les tapisseries

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Ateliers du Faubourg Saint-Marcel, Philipp de Maecht et Jean Tayer, d'après Pierre Paul Rubens, La mort de Constantin, tenture de L'Histoire de Constantin, 1623-1625, Philadelphia Museum of Art.

La première moitié du XVIIe siècle constitue l'apparition et la généralisation des productions de tapisserie françaises, reléguant, de façon progressive, les productions flamandes au second plan[123]. La politique protectionniste d'Henri IV, en instituant des droits de douane pour les produits issus de la concurrence étrangère, va favoriser et stimuler la production française de tapisseries, notamment à Paris. Si les ateliers de Felletin et d'Aubusson sont réputés depuis le XVIe siècle, c'est en effet dans la capitale française que se développent de nouveaux centres de production dans la première moitié du XVIIe siècle. Fondé en 1601[124], l'atelier du faubourg Saint-Marcel, dirigé par les lissiers flamands Marc de Comans et François de La Planche, bénéficie de nombreux privilèges et exemptions fiscales et préfigure la manufacture des Gobelins. Fort de leurs succès, ils installent de nouveaux ateliers à Tours et à Amiens[125]. En 1633[126], leurs successeurs et fils respectifs, Charles de Comans et Raphaël de la Planche, demandent à exercer séparément leur monopole. Charles, suivi par ses frères Alexandre (en 1635) et Hippolyte (en 1651), reste ainsi à la tête de l'atelier du faubourg Saint-Marcel, tandis que Raphaël part fonder son propre atelier dans le faubourg Saint Germain[126].

En 1606[127] est également fondé l'atelier de tapisseries de la Grande Galerie du Louvre. En 1608 le lissier Maurice du Bourg (ou Dubout), qui dirigeait l'atelier d'apprentissage de l'hôpital de la Trinité depuis 1584, en assure la direction avec Girard Laurent.

Si certaines tentures sont des retissages d'anciens cartons du XVIe siècle, voire du Moyen Âge[128], les tapisseries constituent pour les artistes contemporains un support non négligeable de diffusion de leurs oeuvres[128]. Bien que des artistes étrangers de renom, notamment flamands, tels que Pierre Paul Rubens ou Jacob Jordaens fournissent des cartons de tapisseries pour les manufactures parisiennes, les artistes français ne sont pas en reste. Dans le premier quart du siècle, Henri Lerambert, Guillaume Dumée ou encore Laurent Guyot fournissent ainsi les premiers cartons qui feront le succès des ateliers du faubourg Saint-Marcel. A leur suite, les artistes les plus en vue du règne de Louis XIII, tels que le premier peintre du Roi Simon Vouet, Claude Vignon, Laurent de La Hyre, Jacques Stella, Michel Corneille l'Ancien, ou bien Philippe de Champaigne fournissent de nouveaux sujets et contribuent au renouvellement stylistique de la tapisserie française[129]. D'autres peintres, à l'instar d'Isaac Moillon ou de Charles Poerson vont consacrer une part importante de leurs oeuvres à la réalisation de cartons de tapisseries pour les manufactures françaises.

Manufacture d'Aubusson, Verdure à la girafe, vers 1600, Musée des Hospices civils de Lyon.

Héritage du Moyen Âge et de la Renaissance, le goût pour les tapisseries de verdures, dont les décors se composent essentiellement de motifs de végétaux et d'animaux, est toujours présent durant la période. Les verdures tissées dans les Flandres ou à Aubusson, sont particulièrement appréciées. Plus précieuses, les tapisseries historiées dites « à figures », ornées de scènes narratives, sont généralement d'un coût plus important et font souvent partie d'une suite ou d'un cycle illustrant une histoire particulière. Les sujets sont tout d'abord puisés dans l'Histoire religieuse : l'Ancien Testament (L'Histoire d'Abraham et L'Histoire de Moïse d'après Simon Vouet) tout comme le Nouveau Testament (Histoire de la Vie du Christ d'après Henri Lerambert, Scènes de la vie de la Vierge d'après Philippe de Champaigne, Jacques Stella et Charles Poerson). Viennent ensuite les sujets historiques, qu'il s'agisse de sujets antiques (Histoire d'Artémise d'après Henri Lerambert, Histoire d'Alexandre d'après Jacob Jordaens, Histoire de Constantin d'après Pierre Paul Rubens et Histoire de Cléopâtre d'après Charles Poerson) ou de thèmes historiques plus récents (Les Rois de France d'après Laurent Guyot). Enfin, si les sujets empruntés à la mythologie sont particulièrement présents (Histoire d'Achille d'après Pierre Paul Rubens, Les Travaux d'Ulysse d'après Simon Vouet, Histoire de Didon et Enée d'après Michel Corneille) des thèmes littéraires plus récents, notamment empruntés au poète Le Tasse, font également leur apparition (Histoire d'Aminte et Sylvie d'après Claude Vignon, Histoire de Clorinde et Tancrède d'après Michel Corneille, Renaud et Armide d'après Simon Vouet).

Raphaël de la Planche, d'après Simon Vouet, Chariclée emmenée par des pirates, tenture de L'Histoire de Théagène et Chariclée, 1634-1635, Legion of Honor, San Francisco.

Bien que les sujets représentés sur les tapisseries aient leur importance, les bordures constituent une part essentielle dans la fonction décorative des tapisseries[130]. Plus encore, les bordures et les scènes historiées qu'elles encadrent, possèdent souvent une importance égale pour les commanditaires des tapisseries. Lors des passages de commande, ces derniers déterminent, parfois avec une grande précision, le programme iconographique et ornemental qu'ils souhaitent faire figurer dans les bordures[130], notamment les chiffres, emblèmes, devises et armoiries de leurs familles. Les bordures permettent ainsi d'étudier l'évolution du goût et l'évolution stylistique de la tapisserie française durant la période. Dans le sillage du maniérisme du XVIe siècle, les productions des années 1600-1620 se caractérisent encore par l'emploi de larges bordures ornées de cartouches à enroulements, de cuirs ou de grotesques[131]. Ce programme ornemental trouve également ses inspirations dans le style auriculaire à partir des années 1610-1620. Surtout, ce type de bordure se caractérise par l'emploi d'un décor continu, différenciant les bordures verticales et horizontales[132]. A partir des années 1630, à la suite de Simon Vouet, les bordures gagnent en monumentalité en adoptant une mouluration beaucoup plus importante, débordant parfois sur le sujet. Traités en camaïeu, leur répertoire ornemental se compose essentiellement de médaillons, de putti, de rinceaux ou d'arabesques[133]. Ces médaillons et putti débordant dans les angles et au centre des bordures, donnent un aspect beaucoup plus irrégulier à l'ensemble et s'assimilent à un décor très puissant et architecturé que l'on retrouve à la même époque dans les plafonds[134]. A partir de la fin des années 1640, les bordures retrouvent un décor plus lisse et régulier tout en utilisant le même vocabulaire iconographique. Les bordures s'apparentent davantage aux cadres des tableaux et seuls les éléments situés aux angles semblent scander le décor[134].

Constituant toujours à cette époque les éléments essentiels du décor mural[135], l'usage des tapisseries est assez largement répandu dans les intérieurs français, nobles comme bourgeois. Les foyers plus modestes peuvent s'offrir des tapisseries de plus faible coût. Ainsi les bergames, ayant pour origine la ville de Bergame en Italie, se répandent en France depuis la fin du XVIe siècle. Il s'agit de tapisseries plutôt grossières, manufacturées sur un métier à tisser, faites de matières filées diverses (laine, de soie, de coton, de chanvre, de poil de chèvre ou de bovidé). Des ateliers français se spécialisent dans la fabrication de bergames, notamment à Lyon, Elbeuf ou Rouen et l'appellation de « tapisserie de Rouen » est associée à ce type de production. De même, les tapisseries d'Auvergne en provenance d'Aubusson ou de Felletin sont plutôt choisies par des familles moins fortunées[136]. L'emploi de fils métalliques, notamment les fils d'or et d'argent, font sensiblement augmenter le prix de la tapisserie. Les inventaires parisiens de l'époque révèlent que le prix de ces tentures oscillent entre 60 et 30 000 livres, avec une valeur moyenne d'environ 2000 livres[126].

Accrochées à des tringles fixées sous les corniches, les tapisseries descendent en général jusqu'au sol, et peuvent aussi indifféremment être accrochées devant les fenêtres ou les embrasures des portes[135]. De même, les tableaux, miroirs ou appliques sont accrochés directement sur les tapisseries, bien que cet usage puisse gêner la bonne perception des scènes représentées.

Nicolas Tournier, Le Concert, vers 1630-1635, Musée du Louvre. Considérés comme très précieux, les tapis d'Orient ne sont pas disposés au sol mais sont exposés sur les meubles qu'ils recouvrent.

Depuis le Moyen Âge, les centres traditionnels de production de tapis, dits au point noué, se situent au Levant et au Moyen-Orient[137].

Afin d'encourager la production française dans la fabrication des tapis et ainsi limiter les importations étrangères, Henri IV accueille, dès 1604 dans les atelier de la Grande Galerie du Louvre, le tapissier Pierre Dupont (1570-1640) afin qu'il y perfectionne la technique des tapis « façon de Turquie et du Levant »[138]. Vers 1625, Simon Lourdet (1595-1666), ancien apprenti de Pierre Dupont, créé son propre atelier dans le bâtiment d'une ancienne savonnerie à Chaillot, où Marie de Médicis avait établi en 1609, un orphelinat[138]. Pierre Dupont y trouva une partie de sa main d'oeuvre. En 1626, Pierre Dupont et Simon Lourdet décident de s'associer afin qu'il leur soit accordé des privilèges communs. C'est ainsi qu'en 1627, le conseil d'Etat leur donne l'exclusivité de la fabrication des tapis, pour une période de dix-huit ans[138] et que de fait est créé la manufacture de la Savonnerie, regroupant sous cette appellation les deux centres de production du Louvre et de Chaillot.

Les tapis tissés au point noué utilisant le noeud turc dit « ghiordès » semblent être les plus courants[137], mais les tapis veloutés brodés sur canevas sont également recensés durant la période[139]. Inspirés des modèles orientaux, le décor se compose souvent de semis de fleurs agrémenté de campanes (petites cloches), rinceaux, de rubans et de paniers de fruits, le tout se détachant sur un fond de couleur sombre. A l'instar des tapisseries, d'importantes bordures se développent dans les marges, tandis qu'une couronne de fleurs orne fréquemment le centre du motif. Généralement de forme rectangulaire, leur longueur moyenne oscille entre 3,15 mètres et 9,50 mètres durant la période[140].

Les tapis sont essentiellement destinés à couvrir des meubles, tables, mais aussi cabinets et buffets. Rectangulaires ou carrés, ils peuvent être "en housse" avec des pans se rabattant de chaque côté pour envelopper un meuble[141]. Cependant lorsque des tapis couvrent le sol, ils sont généralement placés sous les lits[142].

Arts du métal

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L’orfèvrerie

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Portrait de Claude Ballin, orfèvre et principal créateur du mobilier d'argent de Versailles.

La disparition de la grande majorité des pièces d'orfèvrerie réalisées durant la première moitié du XVIIe siècle, notamment lors des fontes publiques ordonnées par Louis XIV en 1689 pour soutenir l'effort de guerre lors de la guerre de la Ligue d'Augsbourg, a laissé peu de témoignages matériels de la production de cette époque[143].

Parmi les orfèvres les plus renommés du temps, il faut citer Claude Ballin, maître orfèvre en 1637, qui reçoit de nombreuses commandes du cardinal de Richelieu ou encore d'Anne d'Autriche pour laquelle il réalise sa toilette d'or[144]. Autre orfèvre réputé en son temps, François Ier Roberday (✝ 1650), maître orfèvre en 1621, travaille aussi pour la Couronne et possède un logement dans les ateliers de la Grande Galerie du Louvre. Ballin comme Roberday appartiennent tous deux à des dynasties d'orfèvres à l'instar des frères Delabarre, François, Josias et Pierre, orfèvres également logés au Louvre et travaillant pour Louis XIII[145].

Si les pièces d'orfèvrerie destinées à un usage fonctionnel et quotidien demeurent souvent dépourvus de tout décor, la plupart des objets de la période encore conservés possèdent d'abondants décors ciselés. On y retrouve le même programme ornemental que dans d'autres domaines des arts décoratifs : godrons, cartouches, moulures simples, perlées ou torsadées se détachent en fort relief sur les surfaces. L'inspiration végétale prédomine : tresses de lauriers, feuilles d'acanthe, paquets de fruits, enroulements feuillagés ou encore rinceaux abondent. Certains de ces ornements rappellent l'influence toujours prégnante du décor maniériste hérité de l'école de Fontainebleau[146]. A partir des années 1620 le style auriculaire, constitué de vigoureux enroulements de cuir découpé ou de mascarons grimaçants, fait son apparition dans les réalisations parisiennes. Dans les années 1630, les productions de Pierre Delabarre ou de François Roberday mettent davantage en avant des formes végétales très épineuses et stylisées[146].

Mais outre cette ornementation foisonnante, ce sont surtout les décors historiés, gravés ou ciselés, qui se déploient sur toutes les surfaces des pièces d'orfèvrerie. Scènes mythologiques, bibliques ou allégoriques viennent ainsi peupler les panses des vases, les fonds des bassins ou bien les pieds des chandeliers et démontrent cette ambition narrative que l'on retrouve dans le décor intérieur, le mobilier, les tapisseries ou encore la céramique de cette époque[146].

Le mobilier d'argent

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Associée à la découverte du Nouveau Monde et à l'afflux concomitant de métaux précieux en Europe[147], la vogue du mobilier d'argent, originaire d'Italie et d'Espagne, se propage en France sous le règne de Louis XIII[148]. Ce mobilier de très grand luxe demeure surtout accessible à la famille royale et aux princes, même si certains particuliers peuvent accéder à ce type d'objets à l'instar de François de Castille († 1652), surintendant de la maison et des finances de Gaston d'Orléans et beau-père de Nicolas Fouquet[147].

Parmi les premiers témoignages de ce type de production en France, il convient de citer le mobilier d'argent de la chambre de Marie de Médicis au palais du Louvre. Celui-ci se composait de plaques de lumières, de porte-flambeaux et d'une balustrade isolant le lit en argent[148].

Anne d'Autriche possédait dans sa chambre et dans son cabinet du Louvre une balustrade d'argent fabriquée à Paris, une table d'argent réalisée en Espagne, deux guéridons d'argent et deux grands miroirs garnis d'argent[148]. De même, le cardinal Mazarin détenait trois tables en argent, fabriquées à Paris, en Espagne et en Italie, ornées de scènes historiées[148].

Ce type de mobilier produit dans la première moitié du XVIIe siècle préfigure ainsi les productions réalisées sous le règne de Louis XIV, notamment le célèbre mobilier d'argent de Versailles réalisée par Claude Ballin.

L'orfèvrerie religieuse

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Gravure de Charles Fichot représentant l'aiguière « à l'antique » de la chapelle de Colbert de Villacerf, aujourd'hui conservée dans le trésor de la cathédrale de Troyes

L'orfèvrerie religieuse représente, durant la période, une part importante de la production des orfèvres[145]. Les différents objets d'orfèvrerie religieuse constituent une « chapelle », c'est à dire un ensemble d'objets nécessaires à la célébration du culte catholique : calice, patène, ciboire, ostensoir, encensoir, bassin, burettes, aiguière, plateau, et « parure d'autel » (chandeliers et croix d'autel).

L'une des plus somptueuses chapelles de la période demeure celle donnée en 1636 par le cardinal de Richelieu au roi Louis XIII, composée de douze pièces en or enrichies de 9013 diamants, 355 rubis, et 29 perles[145][149].

Parmi les chapelles de cette époque encore conservées dans leur intégralité, il convient de citer l'ensemble de douze pièces en argent commandité par Édouard Colbert de Villacerf pour la chapelle du château de Villacerf et réalisé par les orfèvres parisiens Antoine Crochet et Nicolas Dolin entre 1637 et 1667, aujourd'hui conservé dans le trésor de la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Troyes[150]. L'ensemble des pièces, repoussées et ciselées, comporte des décors narratifs relatant des épisodes de l'Ancien et du Nouveau Testament.

La forme des calices évolue durant la période. Si les calices de la fin du XVIe et du début du XVIIe siècle possèdent encore une composition caractéristique de la Renaissance, avec des pieds polylobés, un noeud central à bossettes et une large coupe, les calices réalisés à partir du règne de Louis XIII se composent d'un pied circulaire et d'une coupe moins évasée et plus haute[151]. Des scènes historiées sont fréquemment ciselées sur la panse de la coupe, sur le noeud et le pied.

Les aiguières et les burettes conservent en revanche la forme des aiguières dites « à l'antique » héritée de la Renaissance[152], avec une panse ovoïde, un col étroit, un bec long et une anse en forme de S.

L'orfèvrerie de table

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Aiguière et bassin, argent fondu, repoussé et ciselé, Paris, vers 1630, trésor de la cathédrale Notre-Dame de Paris.

Concernant l'orfèvrerie civile, on constate tout d'abord la fonction purement décorative et ostentatoire de certains récipients dont le décor, richement ciselé au repoussé, démontre un usage relevant davantage de l'apparat que du fonctionnel[145]. C'est le cas notamment des ensembles composés d'aiguières « à l'antique » (qualifiés de « vases » dans les sources textuelles) et de bassins, ronds ou ovales, qui constituent des ensembles cohérents avec des programmes iconographiques et ornementaux similaires sur les deux types d'objets. En 1653 le cardinal Mazarin possédait ainsi deux vases et deux bassins en vermeil, fabriqués à Paris, dans ses collections[145]. De même, les buires, grands récipient à becs évasés et à larges anses, initialement destinés à contenir des boissons, deviennent de réels vases ornementaux ornés de scènes historiées.

Plus proche des usages de la table mais possédant tout autant une fonction ostentatoire, les nefs de table héritées du Moyen-Âge, et les cadenas, hérités du XVIe siècle, sont toujours en usage durant la période et font partie intégrante de l'étiquette de cour. Destinés à contenir des assaisonnements[153] (épices, sel, poivre ou sucre) et les couverts de leurs propriétaires, les souverains et les grands, à l'instar du prince de Condé, du duc de Guise, de Mazarin ou d'Anne d'Autriche, possèdent chacun un ou plusieurs de ces objets réalisés en or ou en vermeil[154]. Parmi les quelques pièces connues, le cadenas en or du prince de Condé était orné d'une figure de Néréide, tandis que celui d'Anne d'Autriche, également en or, portait ses armes ceintes de feuilles de laurier[148].

Jusqu'au milieu du XVIIe siècle, la vaisselle d'orfèvrerie se compose surtout de plats et d'assiettes peu ornés et aux formes peu diversifiées. C'est ce que tend à démontrer la vaisselle de vermeil et d'argent du cardinal de Richelieu, qui, bien qu'étant très abondante, ne comporte que des assiettes, des plats et des bassins[154]. A partir des années 1650, les pièces se diversifient davantage dans leurs formes comme dans leurs fonctions. Les plats et assiettes « à l'italienne » c'est à dire de forme creuse, s'ajoutent aux plats et assiettes « à la française », de forme plate. Qualifiées à l'époque de « mazarines », l'une des première mention d'assiettes creuses en France est faite dans l'inventaire du cardinal Mazarin en 1653[154].

Aux plats et aux assiettes s'ajoutent les nombreux ustensiles associés à l'assaisonnement. Les salières constituent toujours des morceaux de bravoure pour les orfèvres, auxquelles viennent se joindre de nouveaux ustensiles liés aux progrès de la gastronomie : sucriers à poudre, huiliers, vinaigriers ou moutardiers. C'est à partir du XVIIe siècle que l'huilier et le vinaigrier sont réunis en un seul objet, présentés sur un plateau ovale dans deux supports ajourés montés à vis et séparés par une tige centrale surmontée d'un anneau[155].

Hans Ier Reichart, coupe couverte, argent fondu, martelé, repoussé, ciselé et doré, Mulhouse, vers 1590-1619, Musée des Arts décoratifs.

Concernant les récipients destinés au service de la boisson, il faut tout d'abord citer l'aiguière dite « à crosse » qui s'inscrit dans la tradition de l'aiguière à « anse tournée » héritée du milieu du XVIe siècle. Elle possède une silhouette caractéristique en forme de tulipe et comprend une anse à angle droit dont la partie inférieure est incurvée en crosse. Les parties les plus ornées se situent au niveau du pied et sur la ceinture de la panse. Ce type d'aiguière reste en usage jusqu'au milieu du XVIIe siècle. L'aiguière « en casque », dont la forme de la panse et du bec verseur évoque la forme d'un casque à l'antique renversé[156], est également un modèle de récipient en vogue durant la période[157]. Possédant un corps uni et monté d'une seule pièce, le pot verseur, généralement disposé sur un pied circulaire, à la panse ventrue, au col tronconique et à l'anse courbe, représente le type de récipient verseur appartenant à la vaisselle quotidienne[158].

Du côté des récipients destinés à la consommation de la boisson, deux grands types coexistent : la coupe à boire et le gobelet. Les coupes se présentent généralement sur un pied. La production d'hanaps, type de vase luxueux sur pied possédant parfois un couvercle, généralement en argent doré et hérité du XVIe siècle, reste encore présente au cours du XVIIe siècle, notamment chez les orfèvres de Strasbourg[159]. La coupe « à godrons », dont le corps composé de godrons repose sur un piédouche ou sur un pied surmonté d'une tige, est également toujours présente durant la période. Les coupes caractéristiques de l'époque sont plutôt basses, unies, sur un pied mouluré et munies de deux anses fondues et rapportées en console ou en enroulements[159]. Concernant le gobelet, le modèle en forme de tulipe prends progressivement le pas sur le modèle cylindrique préféré au XVIe siècle[160]. Le gobelet en forme de tulipe, dont la panse s'évase vers le haut, repose souvent sur un piédouche godronné ou mouluré. L'encolure est souvent ornée de filets gravés. A partir du milieu du XVIIe siècle, certains gobelets sont surmontés d'un couvercle indépendant[160]. L'un des rares exemples subsistant de la vaisselle royale en or de cette époque reste le « gobelet d'Anne d'Autriche », dont la panse est ornée de godrons torses rehaussés de rinceaux gravés[161].

Les couverts de table subissent des évolutions notables durant la période. Au XVIIe siècle, le cuilleron de la cuillère, jusqu'alors de forme circulaire, s'aplatit et s'allonge jusqu'à l'ovale. A partir du règne de Louis XIII, le manche des cuillères s'aplatit et s'élargit, en s'épanouissant vers son extrémité qui prend une forme trilobée ou arrondie[162]. De même, les fourcherons de la fourchette passent de deux à trois voire quatre dents au cours du siècle[162]. Quant au couteau de table, il servait jusqu'alors à trancher, mais aussi à piquer les aliments pour les porter en bouche et de cure-dents. Une anecdote relate que le cardinal de Richelieu serait lui-même à l'origine d'un édit ordonnant la généralisation du bout arrondi ou émoussé du couteau, pour des raisons d'hygiène et de sécurité[162]. Quoiqu'il en soit, cet usage du couteau à l'extrémité arrondie se développe au cours de la première moitié du XVIIe siècle et rend l'usage de la fourchette, jusqu'alors moins répandu que celui du couteau, indispensable pour piquer les aliments[162].

Les objets de toilette

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Nécessaire de toilette de Frances Stewart, vermeil, Paris, 1652-1672, Musée national d'Écosse. L'ensemble est composé d'un coffre de transport, d'un miroir, de bougeoirs, de boîtes, de coffrets, de ferrières, de plateaux et de vergettes.

Les objets nécessaires à l'hygiène et à la beauté, constituent une « toilette » dont les différentes pièces doivent former un ensemble cohérent et harmonieux. La mode des services de toilette d'orfèvrerie semble naître à la cour de France durant la première moitié du XVIIe siècle, avant de se répandre dans les autres cours européennes, notamment en Angleterre[163]. Parmi les ensembles les plus connus, figurent la toilette d'or d'Anne d'Autriche réalisée par Claude Ballin (aujourd'hui disparue), celle de la duchesse d'York Anne Hyde dont quelques pièces sont conservées au Musée du Louvre, celle de Marie-Henriette Stuart réalisée par Pierre Prévost, conservée au château de Chatsworth ou encore celle de Frances Stewart conservée au Musée national d'Écosse[163]. Le caractère luxueux de ces objets dédiés à des usages personnels et confidentiels s'explique par le fait que la toilette n'est plus seulement considérée comme un moment intime mais peux constituer un réel instant de mondanité et de réception dans les milieux princiers et aristocratiques[164]. Cet usage aristocratique s'inspire du cérémonial royal et constitue un moment important de la vie sociale[165]. Durant la toilette, l'ensemble des objets est présenté et exposé sur une table de toilette pour ensuite être rangé dans un coffre transportable, formant alors un « nécessaire de toilette ».

Parmi les objets destinés à l'hygiène figurent le pot à eau et la cuvette qui représentent les deux objets les plus communs de la toilette et constituent le pendant de l'aiguière et du bassin, sensés être utilisés à table pour se rincer les doigts au cours des repas[164]. Les crachoirs et les pots d'aisance peuvent également être en argent[166].

Par leur préciosité, les miroirs de toilette constituent les pièces les plus luxueuses de la toilette. Posés sur une table de toilette au moyen d’un chevalet ou béquille fixé au dos du cadre, il sont généralement plus larges que haut[167]. Les éléments d'orfèvrerie, fondus et ciselés, sont montés sur un cadre de menuiserie. Ils sont fréquemment surmontés d'un « chapiteau » ou fronton réalisé au repoussé et comportant les chiffres, armes ou blasons de leurs propriétaires. Sur la table de toilette, les miroirs sont généralement encadrés par des bougeoirs ou flambeaux, faisant également partie intégrante du nécessaire de toilette.

Les récipients à produits de beauté destinés à la poudre, au fard, aux pommades ou aux mouches se composent de pots, de forme ronde ou octogonale, fermés par des couvercles. Les pots à fard se présentent généralement par paire sur un plateau présentoir[164]. Durant la période les écuelles[168], munies de deux anses, d'un couvercle et d'une vasque en forme de plat[169], malgré leur typologie les associant à la vaisselle de table, font très souvent partie des toilettes de cette époque[170]. Enfin les « ferrières » sont des flacons destinés à contenir les parfums et autres « eaux de senteurs »[170]. Au milieu du XVIIe siècle, les modèles de ferrières sont généralement de forme parallélépipédique.

Les boîtes et coffrets de la toilette sont liés à divers usages. Les « carrés », grandes boîtes de forme rectangulaire, sont destinés à contenir les peignes et accessoires de toilette[170], et certains coffrets, possédant généralement des couvercles bombés durant la période, sont munis de pelotes à épingles fixées à l'intérieur ou au-dessus du couvercle[171].

La toilette se compose également de divers objets liés à la parure et aux vêtements. Parmi eux, les « gantières », plateaux de forme ovale sur pieds ou en forme de corbeille, servent à présenter les gants, tandis que les « soucoupes à pieds », de forme ronde, servent à présenter les bijoux, atours et autres objets liés à la parure[170]. De même, les « vergettes », sont des sortes de gros blaireaux destinés à brosser et épousseter les habits[170].

L'éclairage

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Le domaine de l'éclairage a également fortement inspiré les orfèvres durant la période. Deux grands types de réalisations prédominent : les luminaires « à poser » et les plaques de lumière.

Durant la période les sources de lumière sont principalement mobiles et on les déplace avec soi[172]. Parmi les luminaires à poser, on distingue le chandelier ou candélabre, pouvant recevoir plusieurs chandelles[173], du flambeau, qui n’en comporte qu’une seule [174]. Ils peuvent comporter un système à broche (la bougie est alors piquée sur une broche), ou un système à binet ou à douille (la bougie s’encastre dans un réceptacle) et peuvent parfois comporter une bobèche pour y récupérer la cire.

Si les chandeliers et les flambeaux sont pour la plupart en cuivre, en potin[113], en fer voire en bois[175], les plus onéreux sont réalisés en argent. La taille des chandeliers varient, des plus petits formats, comportant deux ou trois branches, aux plus grands formats, comportant jusqu’à huit branches[175]. Les flambeaux possèdent également plusieurs formes. Les flambeaux dits « à la financière », comportant une base carrée et un fût à balustre, sont les plus courants[175], mais d’autres modèles aux pieds carrés et au fûts droits et cannelés sont également présents durant la période.

Apparaissant à la fin de la période, sous le règne de Louis XIV, la girandole est un chandelier à plusieurs branches, souvent ornées de pampilles de cristal[176] et adoptant une forme pyramidale.

Les plaques adoptent généralement une forme de coquille[177] et peuvent posséder une ou deux lumières. Elles possèdent une face bombée en leur centre laissant chatoyer la lumière des bougies. Il semble que les deux systèmes, à bobèche ou à binet coexistent, mais que l’usage de la bobèche soit plus systématique que pour les bras de lumière. D’abord objet d’orfèvrerie, en vermeil ou en argent blanc[177] elles peuvent aussi être en céramique, en bois sculpté ou en cuivre[178]. Anne d'Autriche en possédait plusieurs en argent dans son appartement d'hiver au Louvre[148].

Tout comme les tableaux, les appliques peuvent être apposées directement sur les tapisseries historiées revêtant les murs, au détriment du décor de ces dernières [179]. Les miroirs de toilette pouvaient également disposer d’appliques fixées directement sur leurs montants [178].

Les chenets

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Demeurant l’élément essentiel des accessoires de foyer (ou « feux »), les chenets constituent des éléments décoratifs à part entière durant la période. Avec les autres éléments des feux que sont les pincettes, les tenailles ou les pelles, les chenets doivent composer un ensemble cohérent en termes d’esthétique.

Les chenets s’ornent généralement d’une ou de deux boules superposées appelées « pommes ». Elles peuvent être lisses ou cannelées à « côtes de melons »[113] ou à godrons et parfois surmontées de « flammes » ou de vases. La tige peut être en forme de colonnes. Les décors de mascarons anthropomorphes et zoomorphes peuvent également faire partie de l’ornementation au niveau de la base. Si les grandes cheminées du début du siècle peuvent parfois accueillir deux paires de chenets, une grande et une petite, l'évolution de la forme et de la taille des cheminées durant le siècle entraîne une diminution de leur taille et une modification de leur forme : les grosses pommes cèdent progressivement la place à des petits vases ou à des figures[180].

Bien que la plupart soient en fer, en cuivre doré, voire argenté, ou en bronze, les chenets en argent apparaissent et se développent à partir du règne de Louis XIII[148]. L'une des premières mentions en est faite en 1643 dans l'inventaire après décès du cardinal de Richelieu, qui en possédait une paire en argent « à grosses pommes ». En 1661, le cardinal de Mazarin en possédait plusieurs paires, dont une ornée de figures mythologiques représentant Jupiter et Junon adaptée du modèle des célèbres chenets de l'Algarde. Enfin, Anne d'Autriche en possédait trois paires dans son appartement d'hiver du palais du Louvre[148].

Chenets de style Louis XIII :
  • 1 : flamme
  • 2 : vase
  • 3 : pomme à côtes de melon
  • 4 : porte-broche
  • 5 : chevalet
  • 6 : base à mascaron anthropomorphe

Les étains

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Plat, étain, France, début du XVIIe siècle, Metropolitan Museum of Art.

La première moitié du XVIIe siècle constitue une période florissante pour la poterie d'étain, tant par la diversité de sa production, sa qualité technique que par son inventivité formelle[181].

On constate tout d'abord un accroissement de la demande en poterie d'étain dès le début du siècle : le retour de la paix civile et religieuse en France ainsi que le développement du commerce favorisent l'ascension sociale de la bourgeoisie, de marchands ou d'hommes de robe désireux d'acquérir de nouveaux objets imitant les usages aristocratiques[182]. Ne pouvant acquérir des objets d'orfèvrerie d'argent, trop onéreux, l'orfèvrerie d'étain constitue ainsi une alternative de qualité pour la bourgeoisie[182].

Quelques évolutions notables ont lieu durant la période concernant la profession, démontrant la reconnaissance sociale des potiers d'étain en France. En 1614 sont organisés à Paris les états généraux des potiers d'étain. En 1643, une sentence instaure l'apparition de leurs initiales sur les petits poinçons et de leurs noms en toutes lettres sur les plus grands, ainsi que la date de leur accession à la maîtrise[181], favorisant ainsi l'authentification des productions.

Aiguière, étain, Montbéliard, premier quart du XVIIe siècle, Metropolitan Museum of Art.

A l'instar de la production d'orfèvrerie de la même époque, les typologies des objets fabriqués en étain sont variées. En premier lieu la platerie, c'est à dire la vaisselle à usage domestique, est particulièrement abondante. Caractéristique de la période, le plat « à la cardinale » ou « à la Mazarin » est de forme circulaire, possède d'abord un fond creux presque hémisphérique avant de progressivement s'aplatir, et possède une aile particulièrement large[183]. A partir du milieu du XVIIe siècle, l'usage du plat à venaison destiné à présenter les pièces de gibier ou les volailles se développe : ils ont de grandes dimensions, cinquante centimètres de diamètre en moyenne, sont majoritairement de forme circulaire mais sont parfois ovales et possèdent une aile plate ornée de moulures multiples sur les bords[183]. Souvent ces plats sont ornés des armoiries gravées de leurs propriétaires en leur centre[181].

Comme le plat « à la cardinale », les assiettes de la période présentent de larges ailes. Elles sont généralement d'assez petites dimensions, très plates et présentent un creux de profondeur s'incurvant progressivement au cours de la période pour recevoir notamment les mets en sauce[181]. Destinée à la consommation des potages et des viandes en sauce, l'écuelle à bouillon demeure dans la première moitié du XVIIe siècle un élément essentiel des services de tables. Elle se présente en général sous la forme d'un bol muni de deux oreilles dont les contours deviennent plus sinueux au fil du temps. Progressivement le bol s'élargit et le fond s'aplatit durant la période. A partir du milieu du siècle apparaît le couvercle, généralement plat ou légèrement surélevé, pour garder le plat chaud[184].

L'aiguière est la pièce d'apparat de la vaisselle d'étain, souvent mise en évidence sur les dressoirs des propriétaires[182]. Elle repose sur un piédouche court et possède souvent un déversoir assez long fixé très bas sur la panse. L'anse, d'abord carrée au début du siècle, prends progressivement le profil d'un C ou d'un S. Lorsqu'elle comporte un couvercle, celui-ci est plat ou légèrement surélevé et on le manipule au moyen d'un poucier. Le décor, généralement des godrons ou des rinceaux de feuillages, se trouve sur les couvercles et les anses. Parallèlement d'autre modèles plus sobres, sans couvercles et disposant uniquement de becs verseurs, se développent[185].

Les objets d'étain pour la cuisine et le service de table sont aussi bien fabriqués à l'intention des particuliers que pour les communautés religieuses ou les institutions hospitalières qui se développent durant le XVIIe siècle. A côté de ces objets d'usage alimentaire, il faut noter l'abondante production de matériel hospitalier en étain, notamment les pots pharmaceutiques, les objets liés à l'hygiène et les ustensiles médicaux[186].

Les coffrets à saintes huiles employés dans le culte catholique, sont principalement fabriquées en étain. De forme rectangulaire, ils sont généralement surmontés de couvercles en doucine coiffés de croix tréflées[187].

Arts du feu

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La céramique

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Malgré le succès croissant de la porcelaine de Chine importée en Europe, l'art de la céramique en France est dominé par deux grandes techniques durant la période : la terre vernissée et la faïence.

Les terres vernissées

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Ecole de Bernard Palissy, plat avec Pomone, céramique à glaçure plombifère, France, fin du XVIe siècle-début du XVIIe siècle, Metropolitan Museum of Art.

Fabriquée en France dans l'ensemble du royaume depuis la fin du Moyen Âge, l'art de la terre vernissée aussi appelé « plommure », a connu ses heures de gloire dans la seconde moitié du XVIe siècle avec l'oeuvre de Bernard Palissy. Une partie de la production de la fin du XVIe siècle et du début du XVIIe siècle s'inspire encore largement de ces réalisations, au point que certaines pièces furent longtemps confondues avec son oeuvre[188].

Plusieurs centres de production, possédant souvent des traditions céramiques anciennes, sont particulièrement actifs durant la période. Malgré l'impact des guerres de Religion, la Saintonge, bénéficiant de matières premières abondantes et de débouchés portuaires, demeure une région réputée pour ses pièces d'apparat depuis le XVIe siècle, notamment grâce aux ateliers de La Chapelle-des-Pots. Les réalisations saintongeaises, aux formes souvent complexes, relèvent parfois d'une fonction davantage décorative qu'utilitaire[189] et possèdent des caractéristiques spécifiques comme les glaçures vertes ou des décors armoriés finement moulés[190].

De même, le pays d'Auge, notamment grâce aux centres de production du Pré-d'Auge et de Manerbe, possède une activité céramiste très ancienne remontant à l'époque gallo-romaine, due aux qualités plastiques de l'argile locale. Depuis la fin du XVe siècle les ateliers augerons sont spécialisés dans la production d'épis de faîtage. Caractéristique de la région, celle-ci prend une ampleur très importante durant le règne de Louis XIII. De forme pyramidale et s'articulant autour d'une tige de fer, les épis de faîtage normands en terre vernissée sont souvent constitués de trois parties : la base ou tuile faîtière reposant directement sur la toiture, le motif central en forme de coupe goudronnée ou de vase, et le couronnement constitué d'un personnage, d'un animal (souvent un oiseau) ou d'un croissant[190].

Bol, céramique à glaçure plombifère, Beauvaisis, vers 1600, Metropolitan Museum of Art.

Autre région française aux traditions céramistes anciennes, le Beauvaisis, disposant de matières argileuses variées, a connu une période florissante au cours du XVIe siècle avec la réalisation de grands plats circulaires ornés de scènes de la Passion du Christ. S'inspirant des productions italiennes de la Renaissance, les céramistes beauvaisiens du début du XVIIe siècle utilisent encore la technique du décor a sgraffiato pour orner certaines de leurs réalisations. La superposition d'engobes de couleurs différentes est également une caractéristique des terres vernissées locales[191].

Mais ce sont surtout les ateliers du nord de la France, de l'Artois au Pas-de-Calais, qui se développent durant la période[192]. Dominées par les productions à pâte rouge et à pâte blanche, les réalisations artésiennes se caractérisent notamment par le recours au décor « à la corne » ou « au barolet » : l'engobe est appliquée sur la céramique au moyen d'une corne percée en son extrémité permettant de tracer avec précision les éléments décoratifs[193]. De même, à l'instar des productions du Beauvaisis, les céramistes du nord de la France ont souvent recours au décor a sgraffiato[191]. Si l'aire artésienne est particulièrement active dans le domaine de la céramique depuis le XVIe siècle, les ateliers pas-de-calaisiens de Desvres, de Montreuil et de Sorrus connaissent un véritable essor dans la première moitié du XVIIe siècle[194].

D'après François Briot, aiguière à décors de grotesques, céramique à glaçure plombifère, France, 1600-1610, Musée d'Art du comté de Los Angeles.

A côté de ces différents centres régionaux, l'Île-de-France, avec les ateliers de Fontainebleau (longtemps associés au nom de la paroisse d'Avon) et de Paris, tente de s'affranchir du prestigieux héritage de Bernard Palissy[195]. Si l'historiographie a longtemps qualifié les productions franciliennes réalisées à partir des années 1590 de « post-palisséennes », il convient de relativiser l'influence directe de l'atelier de Palissy. Stylistiquement proches, les céramiques de la période reprennent certes la technique du moulage, mais trouvent leurs inspirations dans de nouveaux modèles, notamment dans la gravure[195]. De même, loin des expérimentations techniques de Bernard Palissy, les céramistes de la période ont recours à des recettes plus simples, notamment dans l'obtention des couleurs, acquises au moyen d’une glaçure plombifère transparente colorée par des oxydes métalliques[195].

L'un des principaux ateliers actifs à Fontainebleau durant la période, demeure celui dirigé par « l'émailleur du roi sur terre » Jean II Chipault († 1610) probablement associé[191] à l'émailleur sur terre lorrain Claude Berthélémy, naturalisé français par lettres patentes d'Henri IV en 1602[195]. Ce dernier assure la direction de l'atelier de Fontainebleau de 1610 à 1626 et en diversifie la production en réalisant des pièces jaspées, des terres sigillées et des figurines dont les modèles peuvent être réalisés par des sculpteurs[191]. Le prestige artistique de l'atelier de Fontainebleau constitue un centre d'attraction pour de nombreux artisans à l'instar du maître verrier et fabricant de terres sigilées Antoine Clarissy qui établit son éphémère verrerie royale au domaine du Monceau à Avon de 1641 à 1643[195]. Les successeurs de l'atelier de Fontainebleau semblent avoir été actifs jusque dans les années 1660[191].

A Paris, le faubourg Saint-Germain constitue également un centre important de terres vernissées, notamment avec les ateliers de Pierre et Benjamin Chipault, sans doute apparentés à Jean Chipault, actifs à la fin du XVIe siècle. A la suite de ces derniers ce sont les frères Daniel et Aggée Cattier qui dominent les réalisations germanopratines de 1602 à 1642 avec une abondante production de céramiques moulées aux typologies variées (vaisselle de table, pièces décoratives, statuettes ou pièces de poêle) fabriquées en série[195].

La faïence

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La faïence de Nevers
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Attribué à l'atelier de Nicolas Estienne, d'après Bernard Salomon, plat rond La Pluie de cailles dans le désert, décor a istoriato, faïence, Nevers, vers 1640-1645, Musée du Louvre.

Durant les règnes d'Henri IV et de Louis XIII, le Nivernais se révèle être le principal centre français de production de faïence[196]. L'essor et le primauté de la faïence de Nevers se produit à partir des années 1580, succédant ainsi à la faïence de Lyon, sur le déclin[196]. A la tête du comté de Nevers, la Maison de Gonzague, à travers les ducs Louis IV de Gonzague-Nevers et son fils Charles Ier de Mantoue, entretient une politique active de mécénat favorisant la venue de nombreux artistes italiens, verriers et faïenciers notamment. En 1572 le duc Louis fait venir à Nevers des verriers d'Altare en Ligurie, encourageant ainsi la venue de potiers originaires de la ville voisine d'Albissola, dont Dominique Conrade qui s'installe dans la capitale nivernaise avant 1578[197].

A sa suite, l'un de ses parents, Augustin Conrade (1540-1612), arrive à Nevers en 1584[196] et fonde la première faïencerie de Nevers. Il y trouve une production locale de céramiques non émaillées et des ouvriers formés à l'art de la terre[198]. En outre, le Nivernais bénéficie d'abondantes ressources pour l'activité faïencière : un gisement d'argile en activité, un sable de qualité pour la fabrication de l'émail et du bois provenant des forêts du Morvan pour alimenter les fours de cuisson[198]. Augustin Conrade s'associe dans un premier temps à des verriers d'origine italienne dont Jacques de Sarode, puis de 1588 à 1589, au potier originaire de Faenza, Jules Gambin, avec qui il dirige les faïenceries du Logis Saint-Gildas et de Bethléem situées rue de la Tartre[199]. D'autres membres de la famille d'Augustin Conrade rejoignent la région dès les années 1580 : son frère Baptiste (1543-avant 1618), son frère[200] ou neveu[201] Dominique († après 1638) et son neveu Bernardin qui fonde en 1595 un atelier de faïence à Cosne-Cours-sur-Loire[201]. Dans la première moitié du XVIIe siècle, le fils de Dominique, Antoine Conrade (1604-1648) devient le plus célèbre faïencier de Nevers [201].

Attribué à l'atelier d'Antoine Conrade, plat La Récolte de la Manne, décor a raffaellesche, faïence, Nevers, 1620-1645, Metropolitan Museum of Art.

Malgré le privilège de fabrication accordé par le roi Henri IV aux Conrade pour une période de trente ans [197],[201], les manufactures se développent à Nevers, passant de cinq ateliers en 1612 à huit en 1640[197] faisant de la capitale du Nivernais le plus important centre faïencier du royaume sous le règne de Louis XIII. Parmi les autres ateliers connus durant la période, il faut citer ceux dirigés par Jules Gambin à la maison Bethléem et à l'auberge des Trois Rois (à partir de 1609)[201], la faïencerie de l'Autruche fondée en 1619[201] par Pierre Blanchet ou plus tardivement l'atelier du logis Saint-Georges fondé en 1648.

Concernant les caractères stylistiques de la faïence de Nevers, les décors trouvent d'abord leur inspiration dans la faïence italienne, notamment à travers quatre grands types :

  • Les décors historiés (dits a istoriato) polychromes s'inspirent des majoliques d'Urbino. En vogue depuis la première moitié du XVIe siècle et déjà empruntés par les faïenceries de Lyon dès le milieu du XIVe siècle[201], ce type de décor perdure durant toute la période, jusqu'au règne de Louis XIV. Des scènes bibliques ou mythologiques recouvrent une grande partie voire la totalité de la surface des pièces. Parfois, des figures se détachent sur un décor à fond bleu ondé simulant un paysage marin. Si l'inspiration est italienne, la facture nivernaise se caractérise par une plus grande lisibilité des scènes et des figures[198].
Atelier des Conrade, assiette, décor en semis d'inspiration chinoise, faïence, Nevers, vers 1630-1640, Sèvres, Musée national de céramique.
  • En réaction[202] à ces pièces entièrement historiées, les décors de grotesques (dits a raffaellesche), également d'origine urbinate, se développent sur les productions nivernaises du début du XVIIe siècle. Combinant de petites scènes historiées encadrées par des ornements annexes antiquisants (rinceaux, mascaron ou camée), les faïenciers de Nevers assimilent ce type de décor en y introduisant d'autres motifs décoratifs (cuirs, entrelacs, animaux ou personnages)[198].
  • Le décor dit a compendiario, originaire de Faenza, se caractérise à l'inverse par la parcimonie et la légèreté des décors, souvent réalisés dans une palette de couleurs réduite au bleu et au jaune, mettant en valeur le fond blanc de la faïence[202]. Ce type de décor, employé à Nevers dès le début du XVIIe siècle, orne souvent des pièces en relief aux formes godronnées, festonnées ou côtelées voire des rondes-bosses ou des appliques)[198]. Certaines pièces sont également laissées blanches, sans aucun décor[202].
  • Le décor en semis (dit calligrafico naturalistico) employé par les faïenciers liguriens à la fin du XVIe siècle, est pratiqué à Nevers des années 1630 jusqu'aux années 1650[202]. Il consiste en la disposition, en semis et sans échelle de grandeur, de motifs d'animaux et de végétaux. Si les motifs paraissent tout d'abord jetés au hasard, les faïenciers nivernais ordonnent et hiérarchisent progressivement le décor autour d'un motif central et ajoutent de nouveaux motifs comme des scènes pastorales[198] ou des motifs d'inspiration chinoise.
Aiguière et assiette, décor dit « persan », faïence, Nevers, vers 1650-1680, Metropolitan Museum of Art.

Si les céramistes de Nevers s'inspirent tout d'abord de ces divers décors italiens pour mieux les réinterpréter, de nouveaux décors apparaissent à partir des années 1630 et deviennent caractéristiques de la production faïencière nivernaise du XVIIe siècle :

  • Les décors blancs dits « persans », se détachant sur un fond à glaçure bleu profond, apparaissent entre les années 1630 et 1650[202]. Ces motifs d'oiseaux et de bouquets de fleurs inspirés par la céramique d'Iznik ont transité dès la fin du XVIe siècle à travers les productions des céramistes de Faenza et de Ligurie. Les faïenciers nivernais réussissent cependant à obtenir une glaçure bleue d'une profondeur et d'une intensité jamais égalées[203] et adaptent ce décor au goût classiciste du temps en introduisant de la symétrie dans le motif[198]. Certaines pièces, plus rares, sont à fond jaune profond ornés de décors bleus et blancs ou à fond blanc ornés d'un décor en camaïeu de verts rehaussés d'ocre et de noir.
  • Les décors de type « pastoral » apparaissent à Nevers dans les années 1640 et trouvent leur inspiration dans les gravures de L'Astrée d'Honoré d'Urfé, roman pastoral connaissant un grand succès dans la première moitié du XVIIe siècle. Se détachant sur le blanc de la faïence, des figures bleues représentant des bergers coiffés de chapeaux à larges bords sont disposés sur les pièces au gré de l'imagination du décorateur[198]. A ce type de décor s'ajoutent également des scènes de pêche et de chasse, s'inspirant notamment des gravures de Philippe Galle, des scènes de vie ou des paysages[198].

Conjuguée à l'apparition de nouveaux décors (chinois notamment), la primauté de la faïence de Nevers se poursuit sous le règne de Louis XIV jusque dans les années 1680, avant de subir la concurrence de nouveaux centres de production comme ceux de Rouen et de Moustiers[203].

La faïence de Rouen
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La régence d'Anne d'Autriche marque le début du renouveau de la faïence de Rouen. Centre actif durant le deuxième tiers du XVIe siècle sous l'impulsion du faïencier Masséot Abaquesne, la mort de ce dernier en 1564 et les guerres de Religion mirent fin à la production rouennaise jusqu'au milieu du XVIIe siècle[204].

En 1648 est enregistré un privilège de production de faïence en Normandie, octroyé par la régente Anne d'Autriche à Nicolas Grandval de Poirel, huissier du cabinet de la reine, pour une durée de cinquante ans. Grandval confie la direction de la fabrique au faïencier champenois Edme Poterat (1612-1687)[203]. Ce dernier installe sa fabrique rue d'Elbeuf à Rouen, dans le quartier Saint-Sever[204].

La production de la faïencerie Poirel-Poterat se distingue d'emblée par la qualité de son émail et par l'usage du décor dit a compadiario d'origine italienne et déjà employé dans les réalisations de Nevers[204]. Poterat utilise également le décor en semis et les figures en camaïeux de bleu en vogue dans le milieu du siècle[205].

C'est à partir de la période suivante, sous le règne de Louis XIV, que la faïence de Rouen prends son véritable essor.

La verrerie

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L’émail peint

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Attribué à Jehan II Limosin, miroir Portrait du jeune Louis XIII, émail, Limoges, vers 1615, Musée du Louvre.

















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Notes et références

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Références

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Bibliographie

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Dictionnaires

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Ouvrages généraux sur les styles

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  • Jean Bedel, Le Grand guide des styles, Paris, Hachette pratique, , 223 p. (ISBN 2-01-236936-7). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • Sylvie Chadenet, Maurice Espérance et Annie Morand, Tous les styles : du Louis XIII à l'Art Déco, Paris, Elina : Sofédis, coll. « L'encyclopédie des styles d'hier et d'aujourd'hui », , 191 p. (ISBN 2-9503698-3-9). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
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  • Pierre Faveton, Reconnaître les meubles de style, Paris, Éditions Massin, coll. « Les Essentiels du patrimoine », , 192 p. (ISBN 978-2-7072-0878-1). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article

Ouvrages généraux concernant le style Louis XIII

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  • Jean-François Barrielle, Le Style Louis XIII, Paris, Flammarion, coll. « La Grammaire des styles », , 63 p. (ISBN 2-08-010343-1). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • Stéphane Castelluccio, Le Style Louis XIII, Paris, Les éditions de l’Amateur, coll. « Des styles », , 142 p. (ISBN 2-85917-344-7). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article

Ouvrages concernant l'architecture

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  • Jean-Marie Pérouse de Montclos, Histoire de l'architecture française. Volume 2, : De la Renaissance à la Révolution, Paris, Editions Mengès : caisse nationale des monuments historiques et des sites, coll. « Histoire de l'architecture française », , 511 p. (ISBN 2-85620-374-4). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • Pasquale Vergara et Giuseppe M.D. Tomasella, Guide des styles architecturaux : de la préhistoire à l'architecture contemporaine, Paris, De Vecchi, , 165 p. (ISBN 2-7328-0233-6). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article

Ouvrages concernant le décor intérieur

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Ouvrages et articles concernant l'ameublement et le mobilier

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  • Daniel Alcouffe, « La naissance de l'ébénisterie : les cabinets d'ébène », dans Daniel Alcouffe, Emmanuel Coquery, Gérard Mabille, Marie-Laure de Rochebrune (dir.), Un temps d'exubérance : les arts décoratifs sous Louis XIII et Anne d'Autriche : Paris, Galeries nationales du Grand Palais, 9 avril - 8 juillet 2002, Paris, Réunion des musées nationaux, , 479 p. (ISBN 2-7118-4390-4). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • Claude Bouzin, Meuble et artisanat, XIIIe-XVIIIe siècle, Dijon, Éditions de l'Amateur, , 207 p. (ISBN 2-85917-374-9). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
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  • Anne-Marie Quette, Le mobilier français : Louis XIII, Louis XIV, Paris, Éditions Massin, coll. « Le Mobilier français », , 93 p. (ISBN 2-7072-0294-0). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article

Ouvrages et articles concernant les textiles

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  • Emmanuel Coquery, « La tapisserie et ses bordures », dans Daniel Alcouffe, Emmanuel Coquery, Gérard Mabille, Marie-Laure de Rochebrune (dir.), Un temps d'exubérance : les arts décoratifs sous Louis XIII et Anne d'Autriche : Paris, Galeries nationales du Grand Palais, 9 avril - 8 juillet 2002, Paris, Réunion des musées nationaux, , 479 p. (ISBN 2-7118-4390-4). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
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Ouvrages et articles concernant les arts du métal

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  • Véronique Alemany-Dessaint, « L'orfèvrerie d'étain », dans Daniel Alcouffe, Emmanuel Coquery, Gérard Mabille, Marie-Laure de Rochebrune (dir.), Un temps d'exubérance : les arts décoratifs sous Louis XIII et Anne d'Autriche : Paris, Galeries nationales du Grand Palais, 9 avril - 8 juillet 2002, Paris, Réunion des musées nationaux, , 479 p. (ISBN 2-7118-4390-4). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
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  • Gérard Mabille, « L'orfèvrerie française de 1610 à 1660 », dans Daniel Alcouffe, Emmanuel Coquery, Gérard Mabille, Marie-Laure de Rochebrune (dir.), Un temps d'exubérance : les arts décoratifs sous Louis XIII et Anne d'Autriche : Paris, Galeries nationales du Grand Palais, 9 avril - 8 juillet 2002, Paris, Réunion des musées nationaux, , 479 p. (ISBN 2-7118-4390-4). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article

Ouvrages et articles concernant les arts du feu

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  • Gilles Granjean, « Rouen, le renouveau de sa production de faïence », dans Daniel Alcouffe, Emmanuel Coquery, Gérard Mabille, Marie-Laure de Rochebrune (dir.), Un temps d'exubérance : les arts décoratifs sous Louis XIII et Anne d'Autriche : Paris, Galeries nationales du Grand Palais, 9 avril - 8 juillet 2002, Paris, Réunion des musées nationaux, , 479 p. (ISBN 2-7118-4390-4). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • Marie-Laure de Rochebrune, « L'art de la céramique en France au siècle de Louis XIII », dans Daniel Alcouffe, Emmanuel Coquery, Gérard Mabille, Marie-Laure de Rochebrune (dir.), Un temps d'exubérance : les arts décoratifs sous Louis XIII et Anne d'Autriche : Paris, Galeries nationales du Grand Palais, 9 avril - 8 juillet 2002, Paris, Réunion des musées nationaux, , 479 p. (ISBN 2-7118-4390-4). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • Musée national de Céramique, L'art de la terre vernissée, du Moyen-Age à l'an 2000 : [exposition] Musée national de céramique, Sèvres, 1er octobre 1999-10 janvier 2000, Musée des beaux-arts, Arras, 4 février-30 avril 2000, Paris, Réunion des Musées Nationaux, , 245 p. (ISBN 2-7118-3859-5). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article

Articles connexes

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Liens externes

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Style Louis 13