Histoire d'Amiens

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Ceci est une version archivée de cette page, en date du 19 janvier 2015 à 22:59 et modifiée en dernier par 90.58.234.237 (discuter). Elle peut contenir des erreurs, des inexactitudes ou des contenus vandalisés non présents dans la version actuelle.

L'Histoire d'Amiens commence au Paléolithique selon les vestiges archéologiques mis au jour depuis le XIXe siècle qui démontrent que le site de double confluence où s'est construit Amiens était occupé par l'homme, il y a 500 000 ans. Mais c'est Jules César qui nomma pour la première fois le lieu dans La Guerre des Gaules. Au Ier siècle, les Romains fondèrent la ville de Samarobriva qui devint Amiens au IVe siècle.

Armoiries d'Amiens :
La devise et les armoiries d'Amiens, dans leur forme actuelle, datent du XVe siècle.
Les armoiries de la ville d'Amiens se blasonnent ainsi:
de gueule au lierre diaprant d'argent, au chef d'azur semé de fleurs de lis d'or.
Le tenant et le support sont deux licornes (la licorne est le symbole des vertus chevaleresques de pureté et d'attrait pour la beauté et la délicatesse).
le soutien est de feuilles d'acanthe, tandis que
le cimier est un château donjonné de cinq pièces.
Devise :
« Liliis tenaci vimine jungor » (Un lien puissant m'unit au lis).
Ornements extérieurs :
Légion d'honneur, Croix de guerre 1914-1918 avec palme et Croix de guerre 1939-1945 avec palme[1].
Façade occidentale de la cathédrale Notre-Dame d'Amiens Patrimoine mondial Patrimoine mondial (1981)
Fichier:Amiens France Tour-Perret-01.jpg
La Tour Perret Logo monument historique Inscrite MH (1975)

Préhistoire

Paléolithique : la civilisation acheuléenne

En 2007, des fouilles archéologiques, rue du Manège, ont mis au jour à Amiens les toutes premières traces d'occupation humaine dans une nappe alluviale perchée à 35 mètres au-dessus du fond de la vallée actuelle. L'âge des vestiges recueillis lors de cette intervention est daté d'environ 500 000 à 550 000 ans.

La présence d'hommes Homo heidelbergensis vraisemblablement, il y a 450 à 300 000 ans, est attestée dans la Somme grâce à des fouilles archéologiques réalisées à Abbeville, Amiens (Jardin archéologique de Saint-Acheul) et à Cagny, village voisin.

Biface en silex de Saint-Acheul

En 1853, des « haches taillées », selon le terme de l’époque, sont recueillies dans les anciennes alluvions de la Somme dans le quartier Saint-Acheul, à l’est de la ville. Cette découverte passionna les plus grands spécialistes internationaux de l’époque, Joseph Prestwich, Hugh Falconer, Charles Lyell ou John Evans, qui se pressent sur le site. En août 1859, Albert Gaudry y découvrit neuf « haches taillées » qui attestaient, selon lui, de la grande antiquité de l’humanité.

Albert Gaudry, Gabriel de Mortillet et Victor Commont comptent parmi les principaux préhistoriens ayant étudié le gisement préhistorique de Saint-Acheul à Amiens. En 1872, Gabriel de Mortillet donna le nom d'Acheuléen à la civilisation du Paléolithique ancien caractérisée par les silex taillés identiques à ceux trouvés dans la quartier Saint-Acheul. Des gisements acheuléens ont été retrouvés près de la Ferme de Grâce près de Montières (quartier d'Amiens), dans plusieurs sites de la vallées de la Somme et de ses affluents. On retrouve cette civilisation en Europe et en Asie.

Ces découvertes marquèrent le début de la grande période de Saint-Acheul qui dura plus de trois-quarts de siècle. Entre 1860 et 1880, 20 000 bifaces sont ainsi recueillis. Saint-Acheul, dont la renommée est devenue internationale, accueille de très nombreux spécialistes et collectionneurs français et étrangers. Ce succès donnera naissance à un commerce lucratif de faux silex taillés.

Vers 35 000, l'Homo sapiens arriva au Paléolithique supérieur. On a retrouvé des sites d'occupation humaine et de débitage de silex du Magdalénien et du Périgordien dans la vallée de la Somme. À Amiens, dans le quartier de Renancourt, a été mise au jour, en juillet 2014, dans les vestiges d'un campement, une statuette féminine aux attributs sexuels très prononcés, datant de 23 000 ans avant notre ère. La Vénus de Renancourt, en pierre calcaire, est comparable aux 244 Vénus paléolithiques retrouvées à ce jour, en Europe et jusqu'en Sibérie[2].

Mésolithique

Le mésolithique est une période de la préhistoire situé entre le paléolithique et le néolithique qui débute vers 9 600 et prend fin vers 5 500 avant notre ère. En 2006, des fouilles archéologiques ont permis de découvrir des sites mésolithiques sur des positions d’anciennes berges de la Somme et de la Selle[3].

Néolithique

Un important gisement du Néolithique a été mis au jour dans le secteur Montières-Etouvie livrant une abondante industrie en silex jaune. Les briqueteries de Renancourt (quartier d'Amiens) ont également révélé d’importants vestiges attribuables au Néolithique ou au Chalcolithique comme en témoigne la hache bipenne naviforme exposée au musée de Picardie.

Âge du fer

La Tène : arrivée des Ambiens

La période de La Tène, l'usage du fer se généralise, on a retrouvé un peu partout y compris dans des fermes isolées, des bas-fourneaux.

Au IIIe siècle avant notre ère, le territoire de l'actuelle département de la Somme est occupé par un peuple gaulois, les Belges, divisé en plusieurs tribus : les Ambiens occupent les environs d'Amiens jusqu'au littoral, et les Viromanduens la partie est du département. Cette population exploite densément le territoire, avec l'implantation d'un réseau de fermes. À partir du IIe siècle av. J.-C., des oppidums sont fondés : L'Étoile, La Chaussée-Tirancourt, Méricourt-sur-Somme, etc.

Les Ambiens ont frappé des monnaies s'inspirant des statères de Tarente, en Grande Grèce, ce qui tend à prouver la prospérité de cette tribu et ses liens économiques avec la Méditerranée. Le monnayage ambien servit de modèle aux Parisii et aux Bellovaques[4].

Antiquité

La conquête romaine

Denier commémorant les conquêtes gauloises de Jules César (vers 48 av J.C.)

Jules César passa un hiver avec ses légions sur le territoire des Ambiens dans un lieu qu'il désigne sous le nom de Samarobriva dans son ouvrage De Bello Gallico (La guerre des Gaules).

Il y explique qu'après sa première tentative de conquête de la Bretagne (l'actuelle Grande-Bretagne) il a pris ses quartiers d'hiver à Samarobriva de l'automne 54 av. J.-C. au printemps 53 av. J.-C.. Il y a convoqué deux fois un concilium Galliae (un conseil de représentants de tribus gauloises)

« [...] Quand il eut fait mettre les navires à sec et tenu à Samarobriva l'assemblée de la Gaule, comme la récolte de cette année avait été peu abondante à cause de la sécheresse, il fut obligé d'établir les quartiers d'hiver de l'armée autrement que les années précédentes, et de distribuer les légions dans diverses contrées[5]. »

« [...] César renvoya Fabius dans ses quartiers avec sa légion, et résolut d'hiverner lui-même aux environs de Samarobriva avec trois légions dont il forma trois quartiers. Les grands mouvements qui avaient eu lieu dans la Gaule le déterminèrent à rester tout l'hiver près de l'armée[6]. »

César établit donc un camp militaire à Samarobriva qui perdura jusqu'aux premières années du règne d'Auguste. Selon toute vraisemblance, aux abords du ou des camps successifs, se développèrent des habitats civils gaulois, des canabae, ce qui incita sûrement les Romains à établir en ces lieux la capitale de la cité des Ambiens[7].

Haut Empire : fondation de Samarobriva

Statue d'un dieu gaulois à l'oreille de cervidé, (Ier siècle), Amiens, Musée de Picardie.

Dans le courant du Ier siècle, les Romains fondèrent les premières villes, Samarobriva (Amiens) fut l'une d'entre elles qui était traversée par plusieurs voies romaines dont la plus importante la Via Agrippa de l'Océan reliait Lugdunum (Lyon) à Gesoriacum (Boulogne-sur-Mer).

Le territoire de l'actuelle ville d'Amiens et celui de l'actuel département de la Somme fut intégré par les Romains dans la province de la Gaule belgique dont la capitale fut Durocortorum (Reims), sous le règne d'Auguste.

Bas Empire : Samarobriva devient Ambianorum

À partir du milieu du IIIe siècle, le nord de la Gaule subit des raids de marins saxons et francs. Des invasions de Francs et d'Alamans se produisirent en 275-276. Les élites municipales délaissèrent progressivement les villes et se réfugièrent dans leur villae à la campagne. Les villes réduisirent leur taille et s'entourèrent de remparts comme à Amiens. À la charnière des IIIe et IVe siècles les villes prirent le nom du peuple gaulois dont elles étaient le chef-lieu, ainsi Samarobriva devint Ambianorum.

Début de la christianisation : la Charité de Saint Martin

En mai 346, à Ambianorum (Amiens), un légionnaire romain, Martin, partagea, aux portes de la ville, son manteau avec un pauvre, puis se convertit au christianisme. La région fut évangélisée à cette période et la tradition chrétienne fait de Firmin d'Amiens, Fuscien, Victoric d'Amiens et Gentien de Sains-en-Amiénois (Somme) les premiers propagateurs les propagateurs de la foi nouvelle. Le premier évêque d'Amiens dont l'existence est historiquement attestée, en 346, fut Euloge.

Anarchie militaire du IVe siècle et déclin d'Ambianorum

Fichier:148 Magnentius.jpg
Monnaie frappée par Magnence

En 350, un général romain d'origine barbare, Magnence, né à Amiens en 303, se souleva contre les fils de Constantin, Constant et Constance II. Proclamé Auguste par la troupe, il fut reconnu empereur par la plupart des provinces occidentales de l'empire. Il créa à Amiens un atelier monétaire. Battu militairement, Magnence mourut à Lyon en 353.

En 367, Valentinien Ier s'installa à Amiens et y fit acclamer Auguste, son fils Gratien.

Les invasions barbares : Amiens est dévastée

A partir du début du Ve siècle, l'histoire de la ville d'Amiens entre dans l'obscurité tant les sources écrites font défaut. Selon Saint Jérome, Amiens fut mise à sac par des peuples germaniques ainsi que d'autres villes de la Gaule belgique (Reims, Arras, Thérouanne, Tournai) et leurs habitants emmenés en Germanie. Les Huns auraient eux aussi dévasté la ville d'Amiens[8].

Les Francs occupèrent la ville d'Amiens à partir de 435. La liste des évêques s'interrompit jusque vers 500 environ[9].

Moyen Âge

Haut Moyen Âge

Période mérovingienne : des temps obscurs pour Amiens

Au Ve siècle, l'histoire d'Amiens entre dans une période obscure faute de sources écrites, mais, à partir du début du VIe siècle, une reconquête chrétienne et une remise en ordre de la région s'effectuèrent à partir d'Amiens.

La ville resta enserrée dans les remparts du bas-empire et garda une superficie de 20 ha ce qui en faisait la plus étendue des villes de la région devant Boulogne (10 ha), Beauvais (10 ha), Soissons (12 ha), Arras (8,5 ha)...

À l'époque mérovingienne, se développa le culte des martyrs. À la fin du VIe siècle, l'évêque Sauve d'Amiens aurait fait transférer d'Abladène (aujourd'hui quartier Saint-Acheul) le corps de Firmin d'Amiens dans la cathédrale intra muros. Au VIe siècle Grégoire de Tours signalait la présence à Amiens d'un débarcadère pour les bateaux sillonnant la Somme. Un atelier monétaire fonctionna durant les VIe et VIIe siècles.

Depuis le VIIe siècle, au moins, le roi franc était représenté à Amiens par un comte aux pouvoirs étendus. La fondation de l'abbaye de Corbie, en 657, à qui le roi attribua la moitié nord du comté d'Amiens, soustraite à l'autorité du comte, réduisit considérablement sa puissance[9].

Période carolingienne : Amiens, entre Vikings et féodaux

Bibliothèques d'Amiens Métropole, Enluminure du Psautier de Corbie

En 779, dans un diplôme de Charlemagne l'accordant aux moines de Saint-Germain-des-Prés, le tonlieu d'Amiens est cité parmi les plus importants du royaume franc.

La paix carolingienne est à Amiens et ses envions d'assez courte durée. Après le Partage de Verdun de 843, Amiens et sa région font partie du royaume de Francie occidentale. Au IXe siècle, les Vikings ravagent la ville d'Amiens et ses alentours en 859 et 881. En 883, les Vikings établissent leur camp à proximité de la ville pour y passer l'hiver et y restent jusqu'en octobre 884. En 891, ils s'établissent dans la ville même, pendant plusieurs mois, tenant en échec le roi Eudes. En 925, les Normands de Rouen envahissent à nouveau l'Amiénois et incendient Amiens. Les Normands assagis, le pouvoir royal étant considérablement affaibli, ce sont les féodaux qui viennent troubler la paix dans la région.

Après 925, la ville d'Amiens et son comté tombèrent aux mains d'Herbert II de Vermandois qui possèdait déjà Saint-Quentin, Soissons et Reims. En 932, pour affaiblir la puissance de ce grand seigneur, Hugues le Grand fit le siège d'Amiens. Puis Louis IV d'Outremer, parvint à entrer dans la ville et à en chasser Eudes, fils d'Herbert II de Vermandois. En 949, les Amiénois livrèrent leur ville à Arnoul Ier de Flandre qui resta maître de la cité jusqu'à sa mort en 965. En 950, Hugues le Grand subit un second échec en assiégeant le Castillon, la forteresse du comte d'Amiens[9].

Moyen Âge classique

La féodalité : la puissance des comtes d'Amiens

Motte castrale (Xe siècle) et ruines du château féodal des seigneurs de Boves, comtes d'Amiens

L'affaiblissement du pouvoir royal renforça le pouvoir politique local des comtes et des seigneurs, ce fut la naissance de la féodalité. Du IXe au XIe siècles, naquirent de puissantes familles nobiliaires comme celle d'Enguerrand Ier de Coucy (1042-1116), comte d'Amiens. La ville était partagée entre plusieurs autorités. Le comte qui possédait la forteresse du Castillon dominait la partie occidentale.

L'évêque exerçait son autorité sur le quartier épiscopal situé à l'est de la cité. Outre la cathédrale, le cloître canonial, l'évêque possédait une tour dans l'angle nord-est de la cité et avait la charge de la garde des remparts et des portes. Il avait également dans sa dépendance, un groupe d'hommes, les « hommes de Saint-Firmin » exemptés de tonlieu contre une redevance de 4 deniers par an, cette clientèle s'élargit peu à peu à l'ensemble de la bourgeoisie. Il pouvait également compter sur le vidame qui était son bras armé. Ainsi l'évêque pouvait-il tenir tête au comte depuis le milieu du IXe siècle.

En 965, le roi Lothaire récupéra le comté d'Amiens et le remit à Gautier Ier de Vexin, comte de Valois et de Vexin. Cette famille garda le comté d'Amiens jusqu'en 1077 sans parvenir à constituer une principauté territoriale comme celle des comtes de Flandre ou de Champagne par exemple. Le pouvoir comtal, cependant, parvint à se redresser, preuve en est, l'élection entre 992 et 1077 de trois fils de comtes sur le siège épiscopal d'Amiens Foulques de Vexin, Foulques d'Amiens et Guy d'Amiens. Le plus remarquable seigneur de cette période fut Raoul IV de Vexin, comte de Vexin, de Valois et d'Amiens. Il posséda jusqu'à sept comtés, à la mort du roi Henri Ier, il épousa - bien qu'étant déjà marié - sa veuve, Anne de Kiev et devint le tuteur en fait du roi Philippe Ier encore enfant. Il fut redouté dans toute la France du nord mais sa principauté sans continuité territoriale ne lui survécut pas. Sa succession fut chaotique et le comté d'Amiens échut entre 1095 et 1104 à Enguerrand de Boves dont la lignée jusque là était restée discrète[9].

La commune d'Amiens

Le beffroi d'Amiens Patrimoine mondial Patrimoine mondial (2005).

La ville d'Amiens connu grâce à la paix retrouvé un essor dès le début du XIe siècle comme en témoignent la construction d'églises Saint-Nicolas et Saint-Martin aux Jumeaux, près de la cathédrale, Saint-Rémi, Saint-Marin au bourg et d'un nouveau quartier situés au nord de la ville entre les différents bras de la somme, le quartier Saint-Leu où prospérèrent différentes activités industrielles : moulin à blé, moulin à guède, moulin à taillant (à fer) etc. En 1077, l'évêque Gui de Ponthieu fit don de douze moulins aux chanoines de la cathédrale à chage pour eux d'entretenir les berges et les ponts. C'était le domaine des meuniers et des bateliers. Au XIIe siècle s'installèrent les métiers à tisser, le peuplement du quartier se densifia.

À partir de la fin du XIe siècle, l'essor urbain entraîna le mouvement communal par lequel les bourgeois des villes obtinrent, pacifiquement ou de manière conflictuelle, de leur seigneur une charte de commune, avec le plus souvent, l'appui du roi de France :

Amiens bénéficia, vers 1095, d'une ébauche d'organisation municipale ; la commune fut jurée en 1113 avec l’accord de l’évêque mais le comte d’Amiens, Enguerrand de Boves et son fils Thomas de Marle refusèrent de reconnaître la commune. En 1115, le roi Louis VI le Gros vint en personne soutenir la rébellion des bourgeois soutenus par l'évêque Geoffroi, contre leurs seigneurs[9].

Amiens, lieu de résolution de conflits féodaux

Saint Louis médiateur entre le roi d'Angleterre et ses barons, Georges Rouget, 1820.

C'est au XIIe siècle que la puissance féodale entama son déclin. Le pouvoir royal s’appuyant sur le mouvement communal tenta de l'affaiblir.

Par le Dit d'Amiens du 23 janvier 1264, saint Louis prononça, dans la cathédrale Notre-Dame d'Amiens encore en construction, un arbitrage dans un conflit opposant le roi Henri III d'Angleterre à ses barons révoltés autour de Simon V de Montfort; cet arbitrage rendu fut en faveur du roi d'Angleterre.

Le Traité d'Amiens de 1279 entre le roi de France Philippe III le Hardi et le roi d'Angleterre Édouard Ier régla le différend qui les opposait à propos de la possession de l'Agenais et de la Saintonge.

La présence de l’Église catholique à Amiens

Au début des années 1020, Amiens participa au mouvement patronné par l’Église appelé la Paix de Dieu. Un pacte fut signé avec Corbie pour éviter à l'avenir tout affrontement en cas de litige. Il fut convenu qu'une fois l'an, le jour de la saint Firmin, les litiges seraient évoqués devant le comte et l'évêque. Cette assemblée se tenait dans la plaine de Daours au bosquet de l'Indict. Les deux populations se rendaient en procession derrière des reliques, après les prêches, les autorités religieuses réglaient seules les conflits. Une monnaie épiscopale fut frappée.

Croix reliquaire (première moitié du XIIIe siècle), Amiens, Musée de Picardie.

Au début du XIIIe siècle, la ville d'Amiens comptait douze paroisses : Saint Germain l'Ecossais, Saint Firmin le Confesseur, Saint Martin aux Waides, Saint Rémy, les plus anciennes, Saint-Firmin en Castillon, Saint-Firmin à la Porte, Saint Michel, dans l'enceinte primitive, Saint Leu et Saint Sulpice, dans les nouveaux quartiers du nord, Saint Maurice, Saint Pierre, Saint Jacques dans les faubourgs.

La présence monastique fut plutôt mince à Amiens au Moyen Âge. Un seul prieuré dépendant de l'abbaye de Marmoutiers en Touraine, était situé à Saint-Denis-des-Prés (actuel square Saint-Denis), hors les murs. L'ordre canonial par contre était très nombreux. Les chanoines séculiers d'abord : le chapitre cathédral était le plus nombreux avec cinquante prébendes auxquelles s'ajoutaient les huit de la collégiale Saint-Nicolas, les six de la collégiale Saint-Firmin-le-Confesseur. Les chanoines réguliers ensuite, à la vie plus austère : abbaye Saint-Martin-aux-Jumeaux, abbaye de Saint-Acheul, Abbaye Saint-Jean-des-Prémontrés d'Amiens. Au XIIIe siècle, les ordres mendiants arrivèrent dans la cité, les cordeliers ou franciscains en 1233, les jacobins ou dominicains en 1245, les augustins, enfin un béguinage fondé dans les années 1260, accueillait les femmes seules laïques voulant vivre religieusement.

Une école épiscopale assurait la formation intellectuelle du clergé du diocèse. Les plus doués poursuivaient des études à Paris dans des collèges comme celui des Cholets ou celui du cardinal Lemoine. Pour les laïcs, un enseignement en langue vulgaire était assuré par les petites écoles paroissiales qui enseignaient aux enfants de la bourgeoisie, la lecture, l'écriture et le calcul[9].

Amiens, ville drapante aux XIIe et XIIIe siècles

La croissance de la ville d'Amiens fut marqué par l'essor de l'industrie textile, Amiens fut l'une des principales « villes drapantes », l'industrie drapière connut une véritable prospérité grâce à la teinture des draps de laine obtenue à partir d'une plante la waide cultivée massivement dans la région. Elle faisait partie de La hanse des dix-sept villes, qui était en fait avant 1230, une ghilde de marchands drapiers de villes des Pays-Bas et de la France du Nord (dont le nombre dépassa, largement, dix-sept), fréquentant les foires de Champagne. Cette association disparut avec le déclin de celles-ci.

La cathédrale d'Amiens ou l'apogée de l'art gothique

Plan initial de la cathédrale réalisé par Eugène Viollet-le-Duc

L'art gothique est né pour une large part en Picardie. L'essor économique et la paix intérieure permirent l'éclosion et la diffusion de cette architecture nouvelle. La construction de la cathédrale d'Amiens fut l'événement artistique majeur du XIIIe siècle. L'évêque Evrard de Fouilloy écida de la reconstruction de la cathédrale incendiée en 1218. La direction des travaux fut confiée à Robert de Luzarches, formé à Paris, Thomas de Cormont poursuivit son œuvre et après lui son fils Thomas de Cormont. Pour réaliser cette grandiose église, le quartier épiscopal fut remodelé : le rempart fut repoussé plus à l'est, l'Hôtel-Dieu fut démoli et reconstruit sur la chaussée aux bleds (actuelle rue Saint-Leu), l'église Saint Firmin le confesseur fut démolie et reconstruite un peu plus au nord. Contrairement à l'usage, on commença la construction par la nef qui fut achevée ainsi que les parties basse de la façade occidentale en 1245. En 1269, les voûtes du chœur étaient achevées. Le labyrinthe de la nef posé en 1288 marque l'achèvement de la construction. Ce fut le chapitre catédral qui assura l'essentiel du financement. La cathédrale d'Amiens brille également par son décor sculpté datant des années 1225-1240, dont les auteurs furent formés sur les chantiers parisiens. Le chef-d’œuvre de ce décor est le Beau Dieu, emprunt de classicisme et d'idéalisme. Au XIVe siècle furent ajoutées des chapelle latérales sur les côtés de la nef, les tours furent achevées.

Bas Moyen Âge

Amiens et les débuts de la Guerre de Cents ans

Bibliothèque nationale de France, Chroniques de Jean Froissart, enluminure, Hommage d’Édouard III d'Angleterre à Philippe VI de Valois pour la Guyenne en 1329

En 1329, dans la cathédrale d'Amiens, Édouard III d'Angleterre prêta l'hommage au roi de France pour ses possessions de Guyenne. Cependant quelque temps après, le roi d'Angleterre disputa à son cousin, Philippe VI de Valois, le trône de France qu'il estimait lui revenir en tant que petit-fils de Philippe IV le Bel et neveu du roi Charles IV le Bel. Une première campagne en 1339 le rendit maître du Ponthieu dont il était héritier par sa mère, fils de Philippe IV le Bel. Mais en 1342, les Abbevillois, se révoltèrent contre la lourdeur des impôts que les Anglais levaient sur eux et les chassèrent de la ville.

Le lendemain de la Bataille de Crécy, le 27 août 1346, les milices communales d'Amiens, Beauvais et Rouen, ignorant l'issue des combats furent taillées en pièce par l'armée anglaise qui les surprit à proximité du champ de bataille. Une assemblée générale des habitants se réunit à Amiens et décision fut prise de construire un rempart pour protéger les faubourgs au sud de la ville. De 1346 à 1355, la commune aurait englouti dans la construction de ce rempart la somme colossale pour l'époque de 60 000 livres.

Les bourgeois d'Amiens prennent le parti du roi de Navarre

Charles le Mauvais, roi de Navarre, prétendait au trône de France, en vertu des droits de sa mère, Jeanne II de Navarre, fils du roi de France, Louis X le Hutin. Sur ordre du roi Jean le Bon, il fut arrêté et emprisonné au château d'Arleux, sous la garde du bailli d'Amiens, Tristan de Fiennes. La défaite de Poitiers et la captivité du roi donna force aux opposants au pouvoir royal, dont Étienne Marcel, prévôt des marchands de Paris.

Réconciliation de Charles V et Charles de Navarre, Grandes Chroniques de France.

Jean de Picquigny se rendit alors à Arleux et délivra Charles le Mauvais qui arriva à Amiens la 9 novembre 1356, accueilli favorablement par le maïeur Firmin de Cocquerel et le capitaine de la ville, Jean de Saint-Fuscien. Les échevins d'Amiens décernèrent à Charles le Mauvais le titre de « bourgeois d'Amiens » - ce qui ne s'était jamais vu pour un prince de sang royal - il put ensuite regagner Paris. Le dauphin Charles se rendit à Corbie et demanda à s'entretenir avec le maïeur et les échevins d'Amiens car il gardait dans la ville des partisans parmi les bourgeois et les artisans. Jean de Picquigny tenta alors de s'introduire dans la ville nuitamment le 16 septembre 1358 mais les partisans du dauphin les contenirent. Cependant les faubourgs Saint-Jacques, Saint-Rémi, Saint-Michel ainsi que l'abbaye Saint-Jean furent pillés et incendiés par les insurgés. Le lendemain, le maïeur et le capitaine de la ville furent appréhendés, les échevins démis de leur fonction. Le 17 septembre 1358, dix-sept personnes, maïeur, échevins, capitaine et bourgeois furent décapités sur la place du Grand Marché selon Froissart. D'autres bourgeois furent bannis, eurent leurs biens confisqués ou s'enfuirent.

Par le Traité de Pontoise de 1359, le dauphin se réconciliait avec Charles le Mauvais, les familles des bourgeois suppliciés d'Amiens obtinrent des lettres de rémission et rentrèrent en possession de leurs biens[8].

Les états généraux d'Amiens

Par le Traité de Brétigny, Édouard III d'Angleterre rendit la liberté à Jean II le Bon. En échange des otages furent envoyés à Londres, parmi eux se trouvaient des bourgeois d'Amiens : Pierre de Coquerel de la bannière des waidiers et Jean Dippre de la bannière des taverniers. Restait à payer les 2 400 000 écus d'or de la rançon. Le roi repartit pour Londres, le 3 janvier 1364, pour renégocier le Traité de Brétigny sa rançon n'étant toujours pas payée. Avant de partir, il réunit les états à Amiens fin décembre 1363 pour leur faire part de sa décision. Les états d'Amiens confirmèrent les taxes établies et votèrent la levée du fouage, contribution directe et personnelle afin que le Dauphin puisse enrôler 6 000 hommes pour lutter contre les Grandes Compagnies et Charles le Mauvais[8].

Amiens et la fin de la Guerre de Cent ans

A la mort de Charles V, son fils Charles VI, âgé de 12 ans lui succède. La régence est exercée par ses oncles : Jean de Berry et Philippe le Hardi.

Le 17 juillet 1385, le roi Charles VI épousait dans la cathédrale d'Amiens, Isabeau de Bavière, fille d'Étienne de Wittelsbach, duc de Bavière.

Modèle:Message galerie

Amiens dans la guerre civile

La Guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons pendant la folie du roi Charles VI eut des répercussions en Picardie et à Amiens. Les partisans du duc de Bourgogne Philippe le Hardi, oncle de Charles VI et régent du royaume de 1380 à 1388 puis de son fils Jean sans Peur s'opposèrent à Louis d'Orléans, frère du roi qu'il firent assassiné le 14 novembre 1407 à Paris. Cet assassinat déclencha les hostilités entre les deux partis. Le fils du duc assassiné, Charles d'Orléans avait épousé Bonne d'Armagnac fille du connétable Bernard VII d'Armagnac.

Par le Traité de Troyes du 21 mai 1420, le successeur désigné du roi Charles VI de France était son gendre le roi Henri V d'Angleterre et la couronne de France serait transmise à ses descendants. Or Henri V mourut quelque temps après Charles VI en 1422. Le duc de Bedford, régent d'Angleterre et de France, fit venir à Amiens, Jean V de Bretagne et le duc Philippe III de Bourgogne qui y signèrent, le 17 avril 1423, un traité de de triple alliance entre les trois princes pour lutter contre Charles VII réfugié à Bourges.

La querelle entre armagnacs et bourguignons s'apaisa avec la signature du Traité d'Arras de 1435 qui donnait les Villes de la Somme, dont Amiens, au duc de Bourgogne.

Fin du XIVe - milieu du XVe siècles : déclin d'Amiens

Le renforcement des remparts avait sérieusement grevé les finances de la villes. Le règne de Charles V avait été marqué par une aggravation de la pression fiscale. En 1380, les maïeurs de bannières, dénonçant la mauvaise gestion des échevins, en appelèrent à la justice royale. L'enquête révéla un endettement de la ville s'élevant à 24 000 livres parisis équivalent à deux voire trois fois le budget annuel de la cité. La grande bourgeoisie et les maîtres artisans s'opposèrent pour la première fois. Les échevins appartenant à la grande bourgeoisie préconisèrent la perception d'aides (taxes) sur le vin de la guède (waide) les deux piliers du commerce amiénois, les artisans préféraient la levée d'une taille qui frapperait les personnes en fonction de leur fortune. Le Parlement de Paris trancha le 4 janvier 1382 en faveur de la perception des aides. L'agitation sociale se poursuivit à Amiens et dans d'autres villes de Picardie et de Flandre. Mais la victoire de Roosebeke remportée sur les révoltés flamands, renforça la position de Charles VI qui fit rétablir l'ordre. En 1383, condamnations à mort, bannissement et amendes s'abattirent sur les Amiénois révoltés, les mairies de bannières furent supprimées, l'oligarchie avait triomphé. Seules les métiers les plus prospères gardèrent un rôle politique, les métiers plus modestes ne jouèrent plus aucun rôle politique.

Pendant cette période, l'économie amiénoise connut de sérieuses difficultés. De 1380 à 1429, la ville exportait en moyenne 1 100 tonneaux de guède par an. À partir de 1429, les exportations tombèrent à 200 tonneaux. La guerre ne fut pas seule responsable de cette catastrophe. La montée de la concurrence a été déterminante. Le Brabant et la Rhénanie produisaient de la guède et profitèrent de l'interruption du trafic liée à la guerre pour établir leur position. Mais c'est la production du pastel toulousain au pouvoir colorant plus élevé qui attira les marchands anglais ruinant la production picarde.

Les effets de la dépression économique conjugués aux dégâts provoqués par les Navarrais et à la mortalité accrue liée à la Grande Peste qui fut à son paroxysme en 1349, firent que la population d'Amiens diminua pendant cette période, se maintenant à un peu plus de 10 000 habitants, au début du XVe siècle.

Amiens entre France et Bourgogne

Louis XI, portrait anonyme du XVe siècle, Brooklyn Museum, New York.

Les villes de la Somme furent rachetées par Louis XI, le 20 août 1463, à Philippe le Bon contre 400 000 écus, afin de protéger la frontière nord du royaume par une série de place fortes. Il s'agissait des villes de : Saint-Quentin, Corbie, Amiens, Doullens, Abbeville, Montreuil-sur-Mer, Rue, Saint-Valery, Le Crotoy, Saint-Riquier, Crèvecœur-en-Cambrésis et Mortagne-du-Nord ainsi que des châtellenies de Roye, Péronne et Montdidier.

La Ligue du Bien public réunit en 1465, les opposants à Louis XI sous la houlette de Charles le Téméraire héritier de Bourgogne. Par le Traité de Conflans du 5 octobre 1465, le duc de Bourgogne récupérait les villes de la Somme, notamment Amiens, Abbeville, Guînes et Saint-Quentin, mais aussi le comté de Boulogne.

En octobre 1468, craignant une résurrection de la Ligue du Bien Public et le débarquement d'une armée anglaise pour la soutenir, Louis XI vint à Péronne, quartier général bourguignon pour y discuter d'un accord de paix. En échange Charles le Téméraire souhaitait obtenir une confirmation de la ligne de la Somme et une juridiction souveraine sur ses fiefs français.

Alors que les négociations étaient sur le point d'aboutir, Charles apprit, avec colère, que Liège s'était à nouveau révoltée à l'instigation du roi de France, pensa-t-il. Louis XI, captif et craignant pour sa vie, fut contraint d'accepter de signer le Traité de Péronne qui confirmait le Traité d'Arras de 1435 et le Traité de Conflans de 1465. La ligne de la Somme restait la frontière entre la France et les terres bourguignonnes, les villes de la Somme sont confirmées possessions du duc de Bourguigne qui en outre obtint le droit de nommer les echevins d'Amiens

Cependant, en 1471, les Amiénois se rallièrent à Louis XI. Amiens fut aussitôt assiégée par Charles le Téméraire mais la ville résista malgré la violence des bombardements de l'artillerie bourguignonne. Au Traité du Crotoy, la ville d'Amiens fut promise au duc de Bourgogne, mais le traité ne fut jamais appliqué.

La mort de Charles le Téméraire en 1477 mit fin à la rivalité franco-bourguignonne, Louis XI récupérant le duché de Bourgogne et les villes de la Somme. la Picardie se trouva définitivement rattaché au royaume de France. Cette rivalité se ranima au XVIe siècle avec les descendants de Marie de Bourgogne, fille du Téméraire et de Maximilien de Habsbourg, les Habsbourg d'Autriche et d'Espagne.

Le renouveau économique d'Amiens à la fin du XVe siècle

En 1476, Louis XI ordonna la destruction du rempart datant du XIIe siècle et de renforcer le rempart du XIVe siècle situé plus au sud. De ce fait, l'espace urbain se trouva modifié, le centre de gravité de la ville bascula vers le sud, le rempart détruit laissant place à l'actuelle rue des Trois Cailloux, aujourd'hui principale artère du centre ville. Un marché au blé fut construit dans ce nouveau quartier et Amiens devint le principal marché au blé de Picardie.

Depuis le dernier tiers du XIVe siècle, la concurrence de la draperie anglaise provoqua une crise de l'industrie textile en Picardie. La reprise fut amorcée par l'implantation d'une nouvelle industrie textile, la sayetterie. Les sayetteurs furent chasser d'Arras en 1480 sur ordre de Louis XI. Ils s'installèrent à Amiens. Le roi Louis XI autorisa, par lettres patentes, la tenue à Amiens de deux foires annuelles, afin de dynamiser le commerce local et de freiner la fuite des devises du royaume, en raison de l'attractivité des foires d'Anvers et de Bruges.

La bourgeoisie commerçante étendit son emprise sur le monde rural par la possession de terres et son pouvoir politique par l'achat d'offices de justice ou de finances. Elle accéda ainsi aux plus hautes fonctions municipales et aux honneurs.

Époque moderne

De la Renaissance aux décennies précédant la Révolution, Amiens fut à la fois le théâtre permanent de luttes de frontières, illustrées par l'édification de citadelles par Jean Errard et le cadre d'un essor de l'industrie textile favorisé grâce, en autres, à la politique de Colbert, ministre de Louis XIV.

Au nombre des épisodes douloureux pour la population, il faut citer la grande disette de 1562 et de nouveau la peste en 1587 ainsi qu'en 1596.

Militairement, les Espagnols envahirent la Picardie à la fin du XVIe siècle, Amiens fut prise en 1597. L'année 1636 et celles qui suivirent fut catastrophiques pour l'ensemble de la province. La paix ne revint qu'en 1659 avec la signature du Traité des Pyrénées.

Renaissance

La Renaissance, en Picardie, est synonyme de guerre civile et d'invasion étrangère.

La diffusion du protestantisme à Amiens

Dans le courant du XVIe siècle, le protestantisme calviniste connut un certain succès à Amiens. Le premier prêche public eut lieu en 1533, il était le fait de Jean Morand, chanoine du chapitre cathédral qui fut chassé en 1534. Entre 1/7e et 1/8e de la population est protestant dans les années 1560. On rencontre des protestants dans toutes les catégories sociales: des échevins, des artisans embrassèrent la religion réformée et on trouva des sympathisants dans les ordres mendiants et parmi le haut clergé local. Cependant, les protestants furent plus nombreux parmi les sayeteurs et les houpiers de même que parmi les marchands du textile. La dépression économique des années 1540-1560 explique en partie les conversion de même que l'opposition séculaire entre l'échevinage et les sayeteurs.

Les persécution contre les protestants d'Amiens débute dès 1534. En 1540, 70 Amiénois furent arrêtés car suspectés de lire clandestinement la Bible. Trois d'entre eux furent exécutés. Cependant, le protestanisme n'était pas sans appui. condé gouverneur de Picardie, Séparpont, son lieutenant, le vidame d'Ailly de Picquigny étaient protestants. Ce dernier accueillait dans sa demeure amiénoise des assemblées protestantes. Une certaine Madame d'Heucourt de Saint-Deliz faisait de même dans une grange du faubourg de Hem. La politique de tolérance du chancelier Michel de l'Hôpital permit la tenue d'assemblées protestantes de plus en plus nombreuses dans la ville à partir de 1561, année où la majorité des échevins élus étaient protestants. Cependant, en 1553, arriva à Amiens, Nicolas Griveau, clerc de Paris qui fut élu doyen du chapitre cathédral, il fut l'artisan de la reconquête catholique de la ville

Au printemps 1562, la première guerre de religion éclata. La majorité catholique d'Amiens réagit. Sous la conduite de l'évêque, des chanoines et des bourgeois restés catholiques, la réaction était en marche. Ils demandèrent et obtinrent du pouvoir royal la destitution des échevins sympathisants de la religion réformée. Perquisitions à domicile et expulsion de suspects se multiplièrent. En 1568-1569, le temple du faubourg de Hem fut détruit[10].

Amiens, la rebelle

La diffusion du protestantisme en France et à Amiens suscita une réaction de princes catholiques qui reçurent le soutien de l'Espagne. En 1568, le gouverneur de Péronne, Jacques d'Humières, refusa de remettre la ville aux protestants, fonda la Ligue avec l'appui de seigneurs des picards qui lancent à Péronne, en juin 1576, un appel aux princes et prélats du royaume, afin de rétablir la religion catholique et « l’obéissance de Sa Majesté ». Le mouvement s’étendit à toute la Picardie ralliant les villes d'Abbeville, Amiens, Saint-Quentin, Beauvais, Corbie...

Le 31 mars 1585, la « Proclamation de Péronne » relança l'action de la Ligue dont le chef était Henri de Guise dit « Le Balafré ». Elle déclarait vouloir rétablir la religion unique (le catholicisme), soustraire le roi Henri III à l'emprise de ses favoris, et l'obliger à faire appel régulièrement aux États généraux.

Cependant, les interventions de plus en plus insistantes du pouvoir royal dans l'administration municipale: des officiers royaux siègent désormais à l'échevinage, la création d'offices, la pression fiscale de plus en plus élevée mécontentèrent l'oligarchie marchande. Le 20 mai 1588, les notables d'Amiens proclament leur adhésion à la Ligue. L'assassinat du duc de Guise radicalisa l'échevinage qui fit arrêter le 20 décembre 1588, 28 royalistes. Le 31 décembre est créé la « Chambre du Conseil pour les affaires de Picardie » émanation de l'échevinage qui entend diriger toute la province. Une Recette générale pour la Picardie est créée où devait être versés les impôts royaux détournés par les rebelles. Des contingents militaires sont envoyés dans tous les points stratégiques de la province, le serment de fidélité à l Ligue est exigé des capitaines et des soldats. Le duc d'Aumale neveu du duc de Guise est proclamé gouverneur de Picardie à la place du gouverneur royal. Amiens se proclama « capitale ville de Picardie » devenue province autonome. Cependant, les autres villes de Picardie refusèrent de se soumettre aux directives amiénoises : les Ligueurs picards étaient divisés. L'autoritarisme du duc de Mayenne, nouveau chef de la Ligue, la lassitude des catégories populaires les plus touchées par les mauvaises récoltes, la famine, la peste, la guerre, le chômage firent basculer la ville dans le camp du roi, Henri IV ayant abjuré la foi protestante. Le 9 août 1594, la ville faisait sa reddition[11].

Prise d'Amiens par les Espagnols

Henri IV au siège d'Amiens (1597), Annonyme

Le 11 mars 1597, Les Espagnols prirent par surprise la ville d'Amiens. Selon le récit des événement transmis par la tradition, avec trois chariots, les Espagnols avancèrent et pénétrèrent sous l’une des portes de la ville, renversèrent un chariot rempli de noix, pour créer un encombrement. Le chariot renversé les bourgeois accoururent, houspillant le paysan maladroit, tout en se jetant sur les noix. C’est alors que les soldats espagnols déguisés prirent leurs armes et tuèrent les sentinelles et firent rentrer les 500 soldats mis en embuscade et quatre compagnies de cavalerie qui pénétrèrent dans la ville.

Aussitôt la nouvelle de la prise d'Amiens connue, le roi Henri IV confia au Maréchal de Biron le soin de reprendre la ville en l'assiégeant. Henri IV lui-même et sa cour fit attaquer la ville par l'artillerie au début du mois d'avril. Après plusieurs sortie des assiégés, plusieurs attaquent des assiégeants, l'échec de l'armée de secours espagnole, le gouverneur espagnol d'Amiens se rendit le 25 septembre 1597.

La frontière nord du royaume se trouvait dégagée pour un temps de la pression espagnole. Henri IV chargea Jean Errard d'édifier une citadelle au nord de la ville. La Citadelle d'Amiens garda un rôle militaire jusqu'à la fin du XXe siècle.

La sanction politique fut sévère pour la ville d'Amiens. L'édit du 18 novembre 1597 réduisait l'échevinage de 27 à 7 membres, surveillé par quatre conseillers de ville choisis par le roi ou le gouverneur. La fonction de mayeur fut remplacée par celle de premier échevin nommé par le roi. L'Hôtel de ville perdit l'essentiel de son pouvoir de justice, de police et de défense, la milice bourgeoise réorganisée échappait à l'autorité municipale[12].

Amiens au XVIIe siècle

Amiens dans la Guerre franco-espagnole

La Guerre de Trente ans avait débuté en 1618. La France était restée en dehors du conflit, ce n'est qu'en 1635, que la France entra en guerre avec la Maison de Habsbourg c'est-à-dire l'Autriche et l'Espagne. Le 2 juillet 1636, Les troupes espagnoles commandées par le prince Thomas de Savoie-Carignan et Jean de Werth franchirent la frontière nord du royaume et prirent La Capelle, le 8 juillet. Les Espagnols prirent ensuite Bohain-en-Vermandois, Vervins... Le 25 juillet Le Catelet tomba à son tour. Le comte de Soissons avec 10 000 hommes de troupe fut dépéché par Louis XIII pour empêcher les troupes espagnoles de franchir la Somme. Bray-sur-Somme résista mais fut détruit par les bombardements. Cependant, la Somme fut franchie par l'ennemi à Cerisy[13].

Les Espagnols pillèrent et incendièrent Saleux, Salouël et Longueau, Amiens et ses faubourgs étaient directement menacés. Jean de Werth prit Roye, Ottavio Piccolomini et ses troupes ravagèrent les campagnes entre Somme et Oise. Ils firent des incursions jusque Pontoise. Seule Montdidier résistait. Fuyant la menace espagnole, les religieuses frontevristes de l'abbaye de Moreaucourt abandonnèrent leur monastère et se réfugièrent à Amiens où fut édifié leur nouveau couvent.

La place de Corbie était commandée par Maximilien de Belleforière, marquis de Soyécourt qui disposait d'une garnison de 1 600 hommes. Face à eux, l'armée espagnole comptait 30 000 hommes. Belleforière préféra négocier une reddition pour éviter le pillage de la ville. La capitulation eut lieu le 15 août. Les assiégés conservèrent leur vie et leurs biens, la garnison put sortir avec armes et bagages et rejoindre Amiens.Richelieu dirigea les opérations de siège. Le marquis de Soyécourt, réfugié en Angleterre, fut condamné à mort par contumace et brûlé en effigie à Amiens le 29 octobre 1636. Les Espagnols firent leur reddition le 14 novembre 1636 et retournèrent en Artois. La Picardie et Paris n'étaient plus sous la menace étrangère, cependant la guerre avec l'Espagne se poursuivit jusqu'en 1659. La Paix des Pyrénées fit reculer la frontière nord du royaume aux confins de l'Artois et de la Flandre, depuis lors, Amiens n'est plus une ville frontière.

Économie et société : les débuts de l'industrialisation

Les lettres et les arts à Amiens au XVIIe siècle

Les Lumières à Amiens

Jean-Baptiste Gresset, membre fondateur de l’Académie d’Amiens

Dans le courant du XVIIIe siècle, la Picardie fut sensible aux Lumières. Des académies se créèrent comme l'Académie des sciences, des lettres et des arts d'Amiens créée en 1746 par Jean-Baptiste Gresset ou la Société d'émulation d'Abbeville fondée en 1797.

L'Intendant de la généralité d'Amiens, Bruno d'Agay en fut membre. Il y prit part à des discussions sur la vaccine les paratonnerre ou les améliorations concernant l’agriculture et l’industrie. Il y prononça des discours sur l’utilité des Sciences et des Arts (1774) et sur Les avantages de la navigation intérieure (1782). En 1751, le Jardin des plantes d'Amiens fut créé et des cours de botanique y furent dispensés.

Des loges maçonniques se créèrent à Amiens à partir de 1774.

Après son passage triomphal à Amiens en 1767, Jean-Jacques Rousseau passa les six dernières semaines de sa vie, en 1778, à Ermenonville (Oise).

De 1781 à 1784, Roland de La Platière fut à Amiens, inspecteur des manufactures, il publia des ouvrages: L'Art du fabricant d’étoffes en laine, L’Art du fabricant de velours de coton et L'Art du tourbier, en 1782. Son épouse Manon Roland, passionnée de botanique, herborisa le long des canaux aux abords de la ville. Elle constitua un herbier aquatique.

À la veille de la Révolution française, existait un service de diligences et de messageries avec départ de Paris, les mardis et jeudis à 11 h 30 et arrivée à Amiens, les mercredis et dimanches à 8 h. Il desservait Chantilly, Creil, Laigneville, Clermont-en-Beauvaisis, Saint-Just-en-Chaussée, Breteuil-sur-Noye, Flers-sur-Noye et Hébécourt. Les diligences pouvaient transporter dix personnes (dont deux au cabriolet) pour un montant de 25 livres, 15 sols par personne.

Époque contemporaine

Amiens dans la Révolution française

Récession économique et disette à Amiens (1788-1789)

Les difficultés économiques s'accumulèrent à la fin de l'Ancien Régime, Le traité de libre-échange franco-anglais de 1786, accentua les difficultés de l'industrie textile amiénoise, provoquant chômage et misère. Des ateliers de charité furent ouverts par la municipalité d'Amiens en décembre 1788 qui employèrent jusque 3 000 chômeurs à des travaux de voiries. En avril 1789, ces ateliers furent fermés. A cela s'ajoutait une crise frumentaire en 1788 et 1789 qui provoqua, le 29 avril 1789, une émeute populaire, du fait de la cherté du pain et du manque de grains. Cette émotion populaire s'amplifia en juillet au moment de la soudure à cause de la disette. En juillet 1789, Ambroise-Léopold Jourdain de l'Eloge riche négociant amiénois, acheta à Hambourg et à Dantzig des céréales, les fit livrer à Amiens à bas prix, et les vendit dix à vingt livres au-dessous du cours du marché. Il avait établi des procédés de moutures économiques de grains et s'engagea à moudre gratuitement les grains que distribuait l'Association civique de la ville. Mais l’émotion populaire étant à vif à cause de la disette, Jourdain de L’Éloge fut suspecté d'être unaccapareur par les habitants, sa maison fut pillée, ses moulins envahis il ne dut son salut qu’à la fuite. En août, le procureur de la commune, Michel Saladin, parvint avec l'aide de la garde nationale, à contenir de nouvelles émeutes.

Amiens pendant la Monarchie constitutionnelle

En mars 1790, Amiens devint le chef-lieu du département de la Somme et chef-lieu de district. Le 24 mai de la même année, fut créé une Société des Amis de la Constitution qui devint la Société des Amis de la Liberté et de l’Égalité en 1792, puis Société populaire en l'an II, soit le Club des jacobins de la ville qui réunit les notables modérés qui accaparèrent la quasi totalité de la gestion des affaires publiques. Le 14 juillet 1790, 51 délégués de la ville et du district d'Amiens participèrent à Paris à la Fête de la Fédération au milieu d'un épanchement patriotique.

Cependant, la constitution civile du clergé devait diviser le clergé local : l'évêque, Mgr de Machault, refusa de prêter serment suivit par la majorité des curés; il émigra en Belgique. Il fut remplacé par Mgr Desbois de Rochefort élu en mars 1791; en septembre 1791, il fut élu député à l'Assemblée législative.

Amiens pendant la Terreur

L'exécution de Louis XVI, Amiens, Musée de Picardie.

La guerre déclarée en avril 1792, les armées furent partout en recul, le territoire national était envahi par les armées étrangères. En juillet 1792, l'Assemblée nationale proclama la « Patrie en danger ». Les sans-culottes amiénois tentèrent de s'organiser de manière autonome en créant en juillet 1792, une Société du bonnet rouge mais cela ne pesa guère sur le pouvoir municipal. après l'exécution de Louis XVI et le renversement des girondins, la Terreur fut décrétée par la Convention nationale.

De l'été 1793 au printemps 1794, l'envoyé en mission, André Dumont, député à la Convention mena dans tout le département de la Somme une campagne de déchristianisation appuyée par les notables amiénois qui se coupèrent encore plus du petit peuple fidèle à sa foi catholique. Le maire sans-culotte d'Amiens, le perruquier illettré, Alexandre Lescouvé, en fut le porte-parole, il cacha les reliques de Saint Jean-Baptiste lorsque la cathédrale fut transformée en Temple de la Raison, le 20 novembre 1793, puis Temple de l’Être suprême, en juin 1794. La chute de Robespierre et la réaction thermidorienne laissèrent les catégories populaires désorientées.

Amiens à la fin de la Révolution

La grave disette de 1795 provoqua des émeutes frumentaires en germinal an III (avril 1795) pendant lesquelles le représentant en mission Nicolas Blaux, envoyé dans la Somme, le 14 germinal an III, pour acheminer des subsistances à Paris, faillit être assassiné, le 3 avril 1795. Assailli par une bande de huit à neuf cents hommes et femmes, qui lui arrachèrent son costume, « un tiers de ses cheveux », ses souliers, son mouchoir et un assignat de 25 francs, il refusa de crier : « Vive Louis XVII ! » Alors on lui cracha au visage, et on faillit l'étrangler - dit son rapport - avec la cravate de son chapeau. Jeté par les émeutiers dans la prison de l'évêché, il ne fut délivré que six heures plus tard. Trente-trois séditieux furent déférés devant le tribunal criminel d'Amiens, qui les acquitta. L'agitation était soutenue par les royalistes. À partir de l'été 1795, le culte catholique fut rétabli et les églises rouvertes.

La ville d'Amiens envoya des centaines de volontaires combattre aux armées, elle accueillit des réfugiés venus du département du Nord, soigna dans les hôpitaux militaires les soldats blessés. Éprouvés par l'effort de guerre, les habitants accueillir avec soulagement le coup d'Etat de Napoléon Bonaparte, le 18 brumaire an VIII (9 novembre 1799)[14].

Consulat et Premier Empire

La Paix d'Amiens de Jules-Claude Ziegler (1853)

En 1802, fut signé la Paix d'Amiens entre la France et le Royaume-Uni. Ce traité ne rétablit la paix que pour une courte durée, en 1805, la guerre reprenait.

Au début du XIXe siècle, Amiens est encore fortement marquée par son caractère médiéval. Le ville est encore enserrée par des remparts qui limitent son extension. Les activités commerciales sont regroupés autour de la mairie, les notables résident aux alentours de la cathédrale et du Palais de Justice. Dans la ville basse, le quartier Saint-Leu, parcouru par des bras de la Somme, se concentrent les activités industrielles : teintureries, tanneries, tissage et l'habitat ouvrier fait de maison de torchis. Les faubourgs de Noyon, de Beauvais, de La Hotoie, de Hem, Saint-Maurice et Saint-Pierre gardent un aspect champêtre et restent peu peuplés[9].

Après la victoire des coalisés à la bataille de Waterloo (18 juin 1815), le département est occupé par les troupes britanniques de juin 1815 à novembre 1818.

La Restauration

Louis XVIII débarqua à Calais, le 24 avril 1814, grâce aux armées de la coalition et gagna Paris. Il octroya aux Français une Charte constitutionnelle et restaura la monarchie sans retour à l'Ancien Régime.

En 1815, les jésuites établirent à l'abbaye de Saint-Acheul d'Amiens, l'un de leur six collèges qui fut l'un des moteur de la renaissance de la Compagnie de Jésus en France.

De 1814 à 1848, François-Auguste Cheussey fut architecte de la ville d'Amiens. On lui doit outre la restauration de la cathédrale, le nivellement des fortifications est achevé à la fin des années 1820, elles sont remplacées par une ceinture de boulevards dits "boulevards intérieurs". La Bibliothèque municipale est édifiée en 1825.

Sous la Restauration fut achevée la construction du Canal de la Somme, commencée en 1786 et achevée en 1827. Il fut inauguré par Charles X.

La Révolution des Trois Glorieuses, les 27, 28, 29 juillet 1830 qui provoqua l'abdication de Charles X, fut accueilli favorablement dans les villes et provoquèrent quelques incidents à Amiens.

La Monarchie de Juillet

La Monarchie de Juillet fut pour la Somme une période de construction des premières lignes de chemin de fer:

La gare d'Amiens fut construite par l'architecte Alfred Armand et mise en service le 20 juin 1846.

Des rues radiales convergeant vers le centre sont percées de 1830 à 1848. La Caisse d'épargne est construite en 1833. Des activités industrielles sont repoussés à la périphéries: les abttoire en 1833, l'usine à gaz en 1836, l'usine textile Bonvalet dans le faubourg Saint-Maurice, l'usine Maberly, dans le faubourg de Hem. Sous la Restauration et la Monarchie de Juillet, la ville est un perpétuel chantier, préfigurant l'haussmanisation[9].

Seconde République et Second Empire

Seconde République

La Révolution de février 1848 rencontra un certain écho en Picardie, on planta des arbres de la liberté dans les villes mais lors des Journées de juin 1848, l'opinion s'inquiéta et de nombreux Picards s'enrôlèrent dans la Garde nationale pour mater l'insurrection parisienne.

À l'élection du Président de la République des 10 et 11 décembre 1848, Louis-Napoléon Bonaparte rassembla, en Picardie, une très grande majorité de suffrages (plus de 80 %).

Le coup d’État du 2 décembre 1851 ne suscita guère d'opposition dans la Somme.

Second Empire

Le Second Empire fut pour la Picardie une période de prospérité avec le développement de l'industrie et le prolongement du réseau ferré : en 1867 mise en service de la ligne Amiens-Laon et de la ligne Amiens-Rouen.

IIIe République

La défaite de Sedan du 2 septembre 1870, provoqua un soulèvement des Parisiens, la République fut proclamée le 4 septembre. Un Gouvernement de la Défense nationale prend la direction du pays et organise la défense du territoire mais le 19 septembre, Paris est encerclé par l'armée prussienne. Léon Gambetta, ministre de l'Intérieur et Eugène Spuller s’échappèrent de Paris en ballon et atterrir sur le territoire de la commune d'Épineuse dans le département de l'Oise. De là il gagnèrent Amiens puis Tours d'où ils organisèrent les armées françaises.

Amiens dans la Guerre de 1870

Lors de la Guerre franco-prussienne de 1870, le département de la Somme fut envahi et occupé par les Prussiens. Des combats se déroulèrent en particulier à Amiens, Longpré-les-Corps-Saints et Pont-Noyelles. De nombreuses communes durent contribuer aux exigences imposées par l'ennemi, en particulier par la fourniture de matériel (chevaux, chariots, foin).

Le 28 novembre 1870, les Prussiens entrèrent dans la ville d'Amiens. Le commandant Jean-François Vogel, retranché dans la citadelle d'Amiens avec 450 mobiles ne disposait que de 22 pièces d'artillerie. Le 29, il fut mortellement blessé. Le commandant Woirhaye prit alors le commandement de la citadelle et entama des négociations, en vue de la reddition, avec le général von Gœben commandant le VIIIe Corps d'Armée prussien. Le 1er décembre 1870, la citadelle d'Amiens capitulait. Les Prussiens rendirent au commandant Vogel les honneurs militaires.

Amiens, ville républicaine

Après le succès initial des royalistes aux élections législatives de 1871, les républicains progressèrent à chaque élection jusqu'à devenir majoritaires à la Chambre des députés et au Sénat en 1879. À Amiens, Jules Barni, René Goblet, Frédéric Petit furent les principaux chefs de file des républicains. René Goblet devint même ministre et Président du Conseil en 1886-1887, il fut un membre actif de la fondation du Parti radical et radical-socialiste en 1901.

Jules Verne en 1892.

En 1872, l'écrivain Jules Verne s'installa à Amiens, ville natale de son épouse. Dans une lettre à son ami Charles Wallut, il s'exprimait ainsi :

« Sur le désir de ma femme je me fixe à Amiens, ville sage, policée, d’humeur égale, la société y est cordiale et lettrée. On est près de Paris, assez pour en avoir le reflet, sans le bruit insupportable et l’agitation stérile. Et pour tout dire, mon Saint-Michel reste amarré au Crotoy. »

En 1888, Jules Verne fut élu au conseil municipal d'Amiens sur la liste républicaine (gauche modérée) conduite par Frédéric Petit. Il fut en tant que conseiller municipal un partisan déterminé de la construction du cirque municipal, inauguré le 23 juin 1889 pour le centenaire de la Révolution française. Jules Verne écrivit plusieurs de ses œuvres à Amiens. Il y mourut le 24 mars 1905.

Amiens connaît des transformations économiques et sociales

L'essor de l'industrie se manifesta dans la somme dans la seconde moitié du XIXe siècle jusqu'aux années 1970. Le textile fut la première industrie amiénoise avec la confection de velours de coton pour l'habillement et de velours d'ameublement. Tandis que le développement du réseau ferré provoquait l'essor de villes cheminotes comme Longueau.

Plaque commémorative de la charte d'Amiens à l'entrée de l’École publique du Faubourg de Noyon, rue Rigollot.

La population quitta les campagnes pour les villes, à partir de la seconde moitié du XIXe siècle, avec le développement des chemins de fer et de l'industrie. Dixième ville française au début du XXe siècle, la population d'Amiens doubla entre 1800 et 1900 en passant de 41 000 à plus de 90 000 habitants. Cette mutation sociale s'accompagna d'une évolution politique, le mouvement socialiste s'enracina progressivement, comme à Amiens, à la création de la SFIO, avec l'élection du typographe Lucien Lecointe au conseil municipal, en 1900, au conseil général de la Somme, en 1904 et à la chambre des députés, en 1909.

En 1906, la CGT tint congrès à Amiens. Ce congrès adopta une motion connue sous le nom de Charte d'Amiens, le 13 octobre 1906, par lequel la C.G.T. se déclarait indépendante des partis politiques.

Les Amiénois et la colonisation

La colonisation ne fut pas sans influence en Picardie. En 1906, se déroula à Amiens une exposition internationale. Dans ce cadre, fut inauguré le 14 mai, « Le village noir », en présence de Mamdou Sek, chef de tribu, maître-bijoutier à Gorée (Sénégal), recruté par des imprésarios français, entouré de sa femme et de ses enfants. Les visiteurs affluèrent. Le grand bal « noir et blanc » du 14 juillet fut un succès[15]. Ainsi le village sénégalais tentait-il de sensibiliser les Picards aux « bienfaits » de la colonisation[16].

Amiens à la Belle Époque

Un concert au kiosque Montplaisir vers 1908.

Devant la nécessité de loger les nouveaux arrivants, la ville se transforma et s'étendit vers le sud-est par le faubourg de Noyon et la quartier Saint-Acheul, au sud-ouest par le faubourg de Baeuvais, au nord, par le faubourg Saint-Pierre et le faubourg Saint-Maurice où se construisent de nombreuses maisons « amiénoises ».

Un réseau de tramway hippomobile fut créé en 1888, remplacé en 1899 par un tramway électrique qui fonctionna jusqu'aux bombardements aérien de mai 1940.

En 1913, la ville comptait 38 entreprises de confection. Les quartiers Saint-Leu, Saint-Pierre ainsi que le faubourg de Hem, où prédominzit l'industrie textile, contrastaient avec la prospérité du centre-ville et du quartier bourgeois d'Henriville. Les Nouvelles Galeries, qui ouvrirent leurs portes en 1895, rue des Trois-Cailloux, concurrencèrent le petit commerce. En 1902, l'Amiénois Henri Devred y installa son premier magasin de prêt-à-porter.

La capitale picarde était alors une cité animée, riche d'activités sportives et culturelles. En 1913, se déroula, à Amiens, le Grand Prix automobile de France qui réunit 100 000 spectateurs[17]. Une grande activité intellectuelle a cours dans la ville avec plusieurs sociétés savantes influentes comme la Société des antiquaires de Picardie, une presse variée et un théâtre.

Modèle:Message galerie

Amiens et Première Guerre mondiale

Au début de la Grande Guerre, de fin août à début septembre 1914, la ville d'Amiens fut occupée par l'armée allemande. Le maire Alphonse Fiquet fut retenu prisonnier et douze membre du conseil municipal furent emmené comme otages jusqu'au versement d'une indemnité de guerre par la ville.

Durant le conflit, la ville d'Amiens, située à proximité du front fut un carrefour où passèrent de nombreuses troupes notamment britanniques et des matériels militaires. De 93 000 habitants à l'entrée en guerre, la population passa à 110 000

En 1917, vingt-cinq grèves, vingt-cinq se déroulèrent dans la ville.

Vue générale d'Amiens en mai 1918

Au printemps 1918, la ville d'Amiens subit de violents bombardements allemands qui occasionnèrent d'importantes destructions. Face aux bombardements réguliers, la municipalité mit en place dès 1915 la protection des monuments historiques, comme la cathédrale. Fin mars 1918, une vague de bombardements intense détruisit la gare du Nord, les Nouvelles Galeries et la Halle aux blés. La population fut évacuée ; la municipalité se réfugia à Neufchâtel-en-Bray. La ville échappa à une seconde occupation allemande par l'intervention décisif du corps expéditionnaire australien à Villers-Bretonneux.

Le bilan humain des victimes civiles fut pour la période 1914-1918 de 152 tués et 213 blessés, celui des dégâts matériels fut de 731 immeubles complètement détruits et près de 3 000 endommagés[18].

Amiens dans l'Entre-deux-guerres

L'Entre-deux-guerres est une période de reconstruction pour Amiens. À partir de mars 1919 Louis Duthoit, son cousin; Pierre Ansart et Joseph Mallet, furent chargés de préparer un plan de rénovation urbaine pour la ville d’Amiens. Jugé trop onéreux par l'État, la demande de dommages de guerre formulée par la municipalité fut rejeté en 1924. Les édiles picards réduisirent le projet à un simple redressement de voirie, de reconstruction et d’alignement d’immeubles.

Des Années folles à la dépression des années 1930

Sur le plan politique la période fut marquée en Picardie par une certaine stabilité politique jusqu'en 1936. Le radicalisme s'était implanté dans les campagnes et à partir de 1920, un acteur politique nouveau, le Parti communiste français, fit son apparition après sa scission d'avec la SFIO au Congrès de Tours. En 1925, la cité cheminote de Longueau, élisait un maire communiste.

Avec la crise de 1929 et la montée du chômage des années 1930, Amiens vécut des temps difficiles, les ligues d'extrême droite firent leur apparition telle les Chemises vertes d'Henri Dorgères.

Le Front populaire à Amiens

La victoire du Front populaire, en 1936, marqua un net glissement à gauche de l'électorat picard. Amiens élisait deux députés communistes Jean Catelas et Louis Prot à Amiens. Un large mouvement de grève éclata dans de nombreuses entreprises de la ville. L'agitation sociale cessa après le signature des Accords de Matignon.

Seconde Guerre mondiale

Drôle de guerre

Le 3 septembre 1939, débutait pour la France la Seconde Guerre mondiale. Après la Drôle de guerre, l'attaque allemande débuta le 10 mai 1940 ; le passage de la Meuse à Sedan débuta le 14 mai, l'objectif des blindés allemands étaient d'atteindre Abbeville le plus vite possible.

Bataille de France (1940)

Sur le sol de la Picardie se déroulèrent plusieurs batailles importantes de la Bataille de France. Les 18 et 19 mai 1940, la ville d'Amiens subit de très violents bombardements aériens et fut occupée dès le 20 mai par les Allemands. Du 20 mai au 8 juin 1940, de durs combats se déroulèrent autour d'Amiens, dans la vallée de la Somme et sur le plateau du Santerre pour tenter de dégager la ville et freiner la marche de la Wehrmacht vers Paris[19].

L'Occupation : Amiens à l'heure allemande

Les rigueurs de l'Occupation se firent sentirent dès le mois de juillet 1940. La Somme servait de limite entre deux zones d'occupation: au nord la zone interdite, au sud la zone occupée, il fallait un Ausweiss (laissez-passer) pour aller d'une zone à l'autre. La ville d'Amiens fut ainsi coupée en deux

La population manquait de tout: produits alimentaires, carburant, charbon, gaz etc. Des tickets de rationnement furent distribués par les mairies. Les rations alimentaires, fin 1942, se limitaient dans la Somme à 1 200 calories par jour pour un adulte. La ration de viande était fixée à 120 g de viande par semaine et par personne en avril 1943[20].

La presse locale était étroitement contrôlée par les Autorités d'Occupation qui supervisaient le contenu des articles et leur mise en page. Elle ne pouvait publier que des articles favorables à l'Allemagne ainsi le quotidien Le Progrès de la Somme de juin 1940 à août 1944[21].

La Collaboration séduit une toute petite minorité d'Amiénois

Les bureaux de placement pour le travail en Allemagne firent appel aux chômeurs. Des permanences s'ouvrirent à Abbeville, Albert, Amiens, Friville-Escarbotin, Montdidier, Péronne et Roye, mais le succès ne fut pas au rendez-vous malgré des primes alléchantes[22]. La loi du 16 février 1943 institua le Service du travail obligatoire (S.T.O.) qui frappait tous les jeunes gens du même classe d'âge ; 5 000 Picards du département de la Somme furent concernés.

La Collaboration décidée à l'Entrevue de Montoire, entre Hitler et Pétain, le 24 octobre 1940 n'eut guère de succès en Picardie. Les partis politiques collaborationniste ne recrutèrent qu'une centaine de personnes chacun dans le département de la Somme. En 1943, le Parti franciste créa une section féminine à Amiens qui offrait aux mère une garderie pour leurs enfants sans grand succès là encore. Seul le Parti populaire français (PPF) eut une certaine audience en organisant des séances de cinéma où furent projeter des films comme Le Péril juif, Les Forces occultes etc., à Amiens et à Albert, le PPF put imprimer ses propres tracts. Il milita pour que des Picards s'engagent dans la Légion des volontaires français contre le bolchevisme (LVF) à partir de 1941. Les actions violentes des collaborationnistes se limitèrent à des bris de bustes de Marianne dans certaines mairies et le renommage de quelques rues de certaines villes[21].

Au printemps 1944, la Collaboration avec les Allemands entra dans une phase plus active. Elle se consacra à la recherche des réfractaires au STO et des Résistants. La Milice ne fut active dans la Somme qu'à partir de mai 1944 mais le Débarquement de Normandie, le 6 juin 1944 eut tôt fait de calmer les ardeurs des plus convaincus, beaucoup de collaborationnistes démissionnèrent, se cachèrent ou cherchèrent à entrer dans la Résistance[21].

La Résistance amiénoise

Le général Leclerc pendant la Seconde Guerre mondiale

Le Picard, Philippe de Hautecloque, capitaine de l'armée française, parvint à s'échapper des griffes allemandes en juin 1940 et à gagner l'Angleterre via le Portugal pour rejoindre la France libre du général de Gaulle. Il prit le nom de Général Leclerc et fut l'un des plus glorieux chefs militaires de la Résistance extérieure.

La Résistance intérieure dans la Somme, débuta dès 1940 par la collecte et la transmission de renseignements pour l'Angleterre et la France libre, la constitution de réseaux d'évasion pour les soldats des armées en déroute et des aviateurs alliés dont l'avion avait été abattu, la diffusion de tracts et de journaux clandestins, des actions de sabotage.

Jeanne Fourmentraux, professeure au lycée d'Amiens, entra en résistance dès octobre 1940, avec quelques jeunes gens, récupérant des armes abandonnées. Progressivement, elle entra en relation avec des salariés des PTT et de la SNCF et ce fut la fabrication de faux papiers. Ce groupe se rattacha au Bataillon de la mort de Paris en mars 1941.

Le Parti communiste clandestin, bien implanté dans la Somme, distribuait des tracts depuis août 1940 à Amiens, Longueau et Albert. Le Front national et Front national (FTP) en étaient l'émanation. Le 31 octobre 1941, une gerbe était déposée au monument aux morts d'Amiens par les résistants. Le 24 décembre 1944, à 21 h 30, une explosion retentit au "Royal" restaurant d'Amiens, transformé en Soldatenheim (foyer du soldat allemand) : 37 soldats furent tués et une centaine furent blessés.

Léon Gontier était chef de service à la préfecture de la Somme, militant socialiste, syndicaliste et franc-maçon. Il était dans l'entre-deux-guerres président de la section d'Amiens de la Ligue des droits de l'homme. Il fit partie du petit nombre de personnes avec Louis Sellier, Louis Saillant et Léon Tellier qui se réunirent dès août 1940 pour résister à l'occupant. Il entreprit de reconstituer clandestinement la Fédération SFIO de la Somme et en devint le secrétaire fédéral. En 1941, il fut l'un des cofondateurs du groupe de résistance Libération-Nord à Amiens. Il fut également membre du réseau Brutus chargé du renseignement, fournit des faux papiers aux réfractaires, fit circuler tracts et journaux clandestins. Ce fut un véritable chef qui guida de nombreuses actions contre l'armée d'occupation allemande.

Le « Groupe Michel » était un groupe de résistants affilié au Front national et aux FTP. Il réalisa une série de coups de main audacieux de février à avril 1943 : déraillements de trains par déboulonnage des voies ferrées à Montières, Thézy-Glimont, Remiencourt, Aveluy, Guillaucourt, Fontaine-sur-Somme, Hangest-sur-Somme (ce dernier déraillement faisant 25 tués et 50 blessés parmi les soldats allemands), dynamitage de l'écluse de Sailly-Laurette etc.

Madeleine Michelis, professeure de lettres au lycée de jeunes filles d'Amiens, resta aujourd'hui encore une figure de la Résistance. Elle hébergea alors une jeune juive, Claude Bloch - dont le père, l'architecte Jean-André Bloch, avait été déporté - avant de réussir à lui faire passer la ligne de démarcation. Elle était membre du réseau Libération-Nord et aussi membre du réseau Shelburn, branche du Special Operations Executive des services secrets britanniques. Elle avait pour mission de mettre à l'abri et de d'assurer le rapatriement en Angleterre des parachutistes et des aviateurs alliés. Son action dans la Résistance avait commencé en Normandie avant son arrivée à Amiens[23]-[24].

D'autres réseaux comme l'Organisation civile et militaire (O.C.M.), le réseau Zéro France, se consacrèrent au renseignement et aux filières d'évasion. L'Organisation de résistance de l'armée (O.R.A.), non-gaulliste, était également implantée à Amiens[21].

Répression et déportation des résistants amiénois

Le 12 novembre 1940, furent fusillés dans les fossés de la citadelle d'Amiens, deux hommes originaires de Saint-Valery-sur-Somme : Lucien Brusque, marin-pêcheur, et Émile Masson, batelier, âgé de 18 ans, pour avoir coupé des câbles téléphoniques de l'armée allemande. L'exécution fut prise en photo par un soldat allemand qui fit développer sa pellicule par un photographe amiénois qui transmit un double du cliché à la Résistance. La photo fut publiée dans la presse anglo-saxonne.

Jean Catelas

Jean Catelas, député d'Amiens fut une victime du Régime de Vichy. Au début de la Seconde Guerre mondiale, il défendit le pacte germano-soviétique en 1939 et entra dans la clandestinité, après l'interdiction du Parti communiste. Il participa à la réorganisation clandestine des syndicats de cheminots d'obédience communiste. Après l'entrée des Allemands dans Paris le 14 juin 1940, il participa, aux côtés de Maurice Tréand, aux négociations visant à faire reparaître L'Humanité, sans succès. Membre de la direction du Parti communiste clandestin, il fut arrêté, à Paris, par la police française, le 14 mai 1941 et incarcéré à la prison de la Santé avec Gabriel Péri. Le 9 septembre 1941 le gouvernement de Vichy créait le « Tribunal d'État », juridiction d'exception comme les Sections spéciales, pour juger les opposants politiques sous la pression des Allemands qui, à la suite de l'attentat du 21 août 1941 contre l'aspirant Moser, exigèrent de l'État français l'exécution de six communistes. Jean Catelas fut condamné à mort, le 21 septembre 1941 et guillotiné le 24 à la prison de la Santé[25].

Raymond Gourdain (1920-1942) était un ouvrier électricien, habitant à Amiens dans le quartier Saint-Acheul. Le 1er février 1942, le jeune FTP participa à un attentat contre la permanence de la LVF (volontaires français pour se battre sur le front russe dans la Waffen SS). Arrêté par la police française en uniforme il fut condamné à mort par un Tribunal militaire allemand. Transféré à la prison de Fresnes, il fut fusillé le 21 mars 1942 au Mont Valérien.

Madeleine Michelis

Madeleine Michelis, résistante amiénoise, fut arrêtée par la Gestapo à son domicile, le 12 février 1944, elle fut transférée à Paris, au Lycée Montaigne. Le mercredi 16 février, elle fut amenée vers 13 h 00, à l'Hôtel des États-Unis, boulevard du Montparnasse pour un interrogatoire. Le 21 février 1944, sa famille était officiellement informée de sa mort[23]-[24].

Léon Gontier, résistant amiénois, fut arrêté à Paris, à la gare du Nord, le 13 janvier 1944 et fut incarcéré à Amiens, à la prison de la route d'Albert. Le 18 février 1944, lors de l'Opération Jéricho, Léon Gontier se distingua par son courage en aidant les personnes blessées à gagner la sortie, malgré les pressions de son entourage qui s'incitait à fuir. Il resta, de ce fait, prisonnier des Allemands. Transféré au camp de Royallieu à Compiègne dans l'Oise, il fut ensuite déporté, le 28 juillet 1944 au camp de concentration de Neuengamme, en Allemagne, où il mourut le 31 décembre 1944.

La Citadelle d'Amiens fut un lieu de détention, de torture et d'exécution pour les résistants tombés dans les griffes de la police française ou de la Gestapo. 35 résistants furent fusillés dans les fossés de la citadelle de 1940 à août 1944.

Rafles, internement et extermination des Juifs d'Amiens

Étoile jaune dont le port fut imposé aux Juifs de la Zone occupée à partir du 7 juin 1942.

Le gouvernement de Vichy promulgua le premier statut des Juifs le 3 octobre 1940. Les Allemands avaient promulgué, le 27 septembre 1940, une ordonnance définissant le premier statut allemand des Juifs pour les zones occupées et les dispositions concernant leurs biens : recensement des Juifs dans chaque département, interdiction d'un retour en zone occupée pour les Juifs qui l'avaient quittée...

Dans le département de la Somme, 93 Juifs furent recensés en 1940 mais ce chiffre sous-estime vraisemblablement le nombre réel de Juifs du département car certains noms, absents de cette première liste, apparaissent dans des documents postérieurs. Un certain nombre de Juifs étrangers furent dirigés en décembre 1940 dans les camps du département de l'Yonne, on en retrouva également dans les Pyrénées-Orientales etc. la plus importante rafle de Juifs eut lieu le 4 janvier 1944, certains furent arrêtés le 5. La plupart d'entre eux habitaient Amiens. Les Juifs arrêtés tôt le matin par les Allemands furent amenés à la gendarmerie d'Amiens et y restèrent jusqu'au soir où ils furent acheminés à la gare du Nord d'Amiens pour prendre le train à destination de Drancy, dans la nuit du 4 au 5 janvier. Ils furent, pour la plupart, déportés à Auschwitz-Birkenau, le 20 janvier, par le convoi no 66 et exterminés le 23. Une seule Amiénoise issue de ce convoi a survécu[26]. Trois enfants juifs de la Somme furent déportés par ce convoi aucun d'eux n'est revenu[27] -[28].

La Libération et l'épuration à Amiens

Opération Jéricho, 18 février 1944, 12 h 00

À partir 1942, les bombardements alliés sur la Picardie commencèrent, visant des objectifs militaires allemands, des nœuds ferroviaires etc.

L'opération Jéricho est le nom donné à un raid aérien de la Royal Air Force qui se déroula le 18 février 1944. Il avait pour but de libérer des Résistants incarcérés dans la prison d'Amiens. Cette opération, qui fit 98 morts, fut une action préparatoire à la Libération[29].

En mars 1944, Longueau, important nœud ferroviaire voisin d'Amiens, subit des bombardements d'une violence telle que la ville fut évacuée par ordre des autorités d'occupation. Vingt et un bombardements en trois jours. 1 132 immeubles furent partiellement ou totalement détruits. Toutes les installations ferroviaires furent détruites (sauf la gare de voyageurs).

La ville d'Amiens subit d'importants bombardements comme celui de la Pentecôte du 27 mai 1944 qui fit près de 400 tués parmi la population civile.

Le 31 août 1944, la ville d'Amiens était libérée par les Britanniques après plusieurs combats notamment pour le contrôle des ponts sur la Somme, les FFI réussirent à garder intact le pont Beauvillé, principal point de passage sur la Somme en allant vers le nord[30].

IVe République

La reconstruction d'Amiens

La ville fut reconstruite sur les plans de Pierre Dufau : son plan de reconstruction et d'aménagement fut adopté dès juillet 1942. Il reposait sur la volonté d'améliorer la circulation par l'élargissement des rues et la densification des îlots. La place Gambetta fut aménagée par l'architecte Alexandre Courtois, la place Alphonse Fiquet fut reconstruite par Auguste Perret. Dufau se concentra quant à lui sur la place au Fil et au parvis de la cathédrale[31].

Vie politique : Amiens, une ville de gauche

La vie politique de la ville d'Amiens fut dominée pendant toute la IVe République et jusqu'au années 1980 par la gauche : la municipalité SFIO fut dirigée par Maurice Vast puis Camille Goret dans les années 1945 -1959 puis à nouveau par Maurice Vast de 1959 à 1971, cependant en 1965, ce dernier fit alliance avec le centre et la droite. Le PCF bien implanté depuis le Front populaire avait vu son influence croitre pendant la Résistance. De 1945 à 1958, les électeurs désignèrent deux députés communistes René Lamps et Louis Prot.

Ve République

Échos de la Guerre d'Algérie à Amiens

Au début de la Guerre d'Algérie, le 24 mai 1956, une manifestation de conscrits rappelés se déroula, à Amiens. Un grand meeting fut organisé au cirque municipal, le 31 mai 1956, "Pour la paix en Algérie", par la Ligue des droits de l'homme.

En 1962, des pieds noirs et des harkis furent rapatriés d'Algérie à Amiens.

Le retour au pouvoir du général de Gaulle marqua une évolution de l'électorat qui glissa vers la droite. Aux législatives de 1958, René Lamps député communiste d'Amiens fut battu dans une triangulaire au profit du gaulliste Fred Moore.

La fin des Trente Glorieuses à Amiens

Le vent de contestation qui souffle sur la France et dans le monde à la fin des années 1960, touche également Amiens. D'abord, une manifestation opposée à la guerre du Viêt Nam est organisée le 21 octobre 1967. Ensuite, alors que la Maison de la Culture avait accueilli le ministre de l'Éducation nationale Alain Peyrefitte en mi-mars 1968, à l'occasion d'un colloque sur l'éducation, les étudiants amiénois emboîtent le pas des événements parisiens en défilant les 6 et 7 mai.

Les ouvriers de la Somme rejoignent le mouvement de contestation le 17, tandis que le lendemain, les cheminots de Longueau bloquent les aiguillages. Les ouvriers de Ferodo occupent leur usine à partir du 20 mai pour cinq semaines.

Sans connaître d'affrontements comparables aux nuits parisiennes, la ville est rapidement paralysée : l'absence de collecte des déchets ménagers donne aux rues des odeurs nauséabondes, et le département est à court d'essence à partir du 22. Face à ce mouvement de gauche, l'extrême-droite ne reste pas absente : alors que des militants avaient lancé un engin explosif sur la permanence communiste de la ville le 23 décembre 1967, des membres d'Occident s'opposent aux étudiants le 21 mai, devant le cinéma Picardy. Dans la nuit du 27 au 28 mai, les étudiants tentent de prendre la Maison de la Culture. Au lendemain de l'allocution de De Gaulle, ses partisans amiénois défilent le 31 mai, tandis que la reprise s'engage la semaine suivante. La loi Faure promulguée, l'université d'Amiens est créée le 26 octobre suivant[32].

Vie politique : Amiens entre droite et gauche

Les conséquences de ce vaste et profond mouvement de contestation allaient provoquer d'important changements politiques. En 1971, une liste d'union de la gauche conduite par le député communiste René Lamps remporta les élections municipales. En 1978, le maire d'Amiens céda son siège de député à Maxime Gremetz. La victoire de François Mitterrand à l'élection présidentielle de 1981 provoqua aux élections législatives qui suivirent, le reflux communiste, le socialiste Jean-Claude Dessein adjoint au maire d'Amiens arrivé largement en tête au premier tour fut élu député.

Cependant le malaise social grandissant et l'usure de l'équipe municipale de gauche provoqua, en 1989, l'élection de Gilles de Robien à la tête de la municipalité.

Modèle:Message galerie

Préservation de l'environnement et rénovation urbaine à Amiens

En 1975, fut créée sous l'impulsion de Nisso Pelossof, une association pour la sauvegarde des hortillonnages qui devaient être traversés par une route à quatre voies. En 1988, une usine de retraitement des ordures ménagères de l'agglomération d'Amiens fut créée. Les déchets sont traités selon un procédé biologique. Après broyage, les ordures sont entassées dans des cuves où elles se décomposent par fermentation. La production de gaz méthane qui en résulte est vendue comme source d’énergie et les résidus comme compost pour l’agriculture

Dans les années 1980, la rénovation du quartier Saint-Leu au pied de la cathédrale fut entreprise de même que la piétonisation des principales rues du centre ville.

La désindustrialisation : Amiens frappée au cœur

Depuis le milieu des années 1970, la Picardie subit inexorablement un processus de désindustrialisation ; des secteurs entiers de la production industrielle ont presque totalement disparu à Amiens : l'industrie du velours a déserté Amiens. Tout le tissu industriel de la région, jusque là pourvoyeur d'emplois, est touché. Les industries d'équipements automobiles connaissent dans les années 2000 et 2010 d'importantes difficultés des usines ferment à Amiens, les réductions d'emplois dans celles qui restent en activité sont fréquentes. Enfin, le secteur agro-industriel lui aussi connaît certaines difficultés, une coopérative laitière ferme ses portes etc. Il s'en suit un chômage de masse de travailleurs peu qualifiés qui provoque un profond malaise social.

Pour approfondir

Bibliographie

  • François-Hyacinthe Dusevel, Histoire de la ville d'Amiens depuis les Gaulois jusque 1830, Amiens, Imprimerie R. Machart 1832 - disponible sur boooks.google
  • Aimé et Louis Duthoit, Le Vieil Amiens, Amiens, P. Théodore Jeunet, 1874 - réédition, Amiens CNDP-CRDP, 1978
  • Albéric de Calonne, Histoire de la ville d'Amiens, tomes 1, 2 et 3, Amiens, Piteux Frères, 1899, réédition, Bruxelles, Éditions culture et civilisation, 1976.
  • Pierre Dubois, Histoire de l'industrie et du commerce à Amiens et en Picardie des origines à nos jours, Amiens, 1920
  • Pierre Vasselle, La Tragédie d'Amiens mai-juin 1940, Amiens, Librairie Léveillard, 1952
  • Jean Estienne et François Vasselle, Le Bel Amiens, préface de Robert Mallet, Amiens, Étienne et Vasselle Éditeurs, 1967.
  • Ginette Hirtz, Les Hortillonnages sous la grêle, Histoire d'une famille juive en France sous l'Occupation, Paris, Mercure de France, 1982 (ISBN 2 - 7 152 - 0 014 - 5).
  • Paule Roy, Chronique des rues d'Amiens, sept tomes, Amiens, CNDP-CRDP, 1980-1983.
  • Didier Bayard, Jean-Luc Massy, Amiens romain, Samarobriva, Ambianorum, Amiens, Revue archéologique de Picardie, 1983.
  • Pierre Deyon, Amiens capitale provinciale, étude sur la société urbaine au XVIIe siècle, Amiens, CNDP-CRDP, 1986 (ISBN 866 15[à vérifier : ISBN invalide])
  • Ronald Hubscher (sous la direction de), Histoire d'Amiens, Toulouse, Éditions Privat, 1986 (ISBN 2 - 7 089 - 8 232 - X).
  • Raymond Regrain, Michel Gilloir, Joëlle Acoulon, Jean-François Leblond, Yvan Brohard, Michel Lazure, Paul Oudart, Amiens, Paris, Christine Bonneton éditeur, 1989 (ISBN 2 - 86 253 - 090 - 5).
  • Marc Breitman et Rob Krier (sous la direction de), Le Nouvel Amiens, Liège, Pierre Marga, 1989 (ISBN 2 - 87 009 - 368 - 3)
  • David Rosenberg, Les protestants amiénois au milieu du XVIe siècle in Mémoires de la Société des Antiquaires de Picardie, Amiens, 1994
  • Nisso Pelossof, Nisso, d'une île à l'autre suivi de Les hortillonnages : une tradition maraîchère, Amiens, Édition Encrage, 2007, 191 pages, (ISBN 978 - 2 - 911 576 - 74 - 4)
  • Xavier Bailly et Jean-Bernard Dupont (sous la direction de), Histoire d'une ville: Amiens, Amiens, Scérén-C.R.D.P., 2013 (ISBN 978 - 2 - 86 615 - 391 - 5).

Liens internes

Notes et références

Notes

Références

  1. Jacques Estienne et Mireille Louis, Armorial du Département et des Communes de la Somme, préface de Pierre-Marcel Wiltzer, Préfet de la région Picardie, Préfet de la Somme, Abbeville, 1972, Imprimerie F. Paillart
  2. Courrier picard des 13 septembre et 28 novembre 2014
  3. Rapport d'activité 2006 de l’Inrap, p. 102.
  4. Didier Bayard, Jean-Luc Massy, Amiens romain, Samarobriva, Ambianorum, Amiens, Revue archéologique de Picardie, 1983
  5. Jules César, De Bello Gallico, chapitre V, 24.
  6. Jules César, De Bello Gallico, chapitre V, 53
  7. Ronald Hubscher (sous la direction de), Histoire d'Amiens, Éditions Privat, Toulouse, 1986 (ISBN 2 - 7 089 - 8 232 - X)
  8. a b et c Albéric de Calonne, Histoire de la ville d'Amiens, tomes 1, p. 62, Amiens, Piteux Frères, 1899 - réédition, Bruxelles, Éditions culture et civilisation, 1976
  9. a b c d e f g et h Ronald Hubscher (sous la direction de), Histoire d'Amiens, Toulouse, Éditions Privat, 1986 (ISBN 2 - 7 089 - 8 232 - X).
  10. David Rosenberg, Les protestants amiénois au milieu du XVIe siècle in Mémoires de la Société des Antiquaires de Picardie, Amiens, 1994
  11. Ronald Hubscher (sous la direction de), Histoire d'Amiens, Toulouse, Éditions Privat, 1986 (ISBN 2 - 7 089 - 8 232 - X)
  12. Ronald Hubscher (sous la direction de), Histoire d'Amiens, Toulouse, Éditions Privat, 1986 (ISBN 2 - 7 089 - 8 232 - X)
  13. Roger Caron et Madeleine Marleux, Trois cent cinquantième anniversaire du siège de Corbie, 1636-1986, Corbie, Les Amis du Vieux Corbie, 1986
  14. Xavier Bailly et Jean-Bernard Dupont (sous la direction de), Histoire d'une ville: Amiens, Amiens, Scérén-C.R.D.P., 2013 (ISBN 978 - 2 - 86 615 - 391 - 5)
  15. Nadine Laval, http://www.encyclopedie.picardie.fr/Zoo-humain-a-Amiens.html
  16. Jean-Michel Bergougniou, Le village sénégalais à l'Exposition internationale d'Amiens, 1906, Bulletin de la Société des Antiquaires de Picardie, premier trimestre 1999, Amiens, p.175-208
  17. « Le Grand Prix fête son centenaire », Le Courrier picard, (consulté le ).
  18. Albert Chatelle, Amiens pendant la guerre 1914-1918.
  19. Pierre Vasselle, La Tragédie d'Amiens, Amiens, Librairie Léveillard, 1952
  20. Gérald Maisse, Occupation et Résistance dans la Somme, 1940-1944, Abbeville, F. Paillart, , 474 p., chap. 3 (« L'Occupation commence dans la Somme »), p. 97 et suiv. (ISBN 9 - 782 853 - 140 195)
  21. a b c et d Dominique Duverlie, Les Picards face à l'occupation allemande, le département de la Somme du 20 mai 1940 au 3 septembre 1944, thèse de 3e cycle, 1979, Amiens, Eklitra, 2004 (ISBN 978 - 2 - 85 706 - 121 - 2)
  22. René Debrie (dir.), La Picardie, Paris, Les Éditions d'Organisation, coll. « peuple et pays de France », 1981 (ISBN 2 - 7 081 - 0 422 - 5)
  23. a et b Julien Cahon, Madeleine Michelis, une Amiénoise dans la Résistance, Amiens, APHG Picardie - ONAC Somme, 11 octobre 2013
  24. a et b http://www.somme.gouv.fr/content/download/8236/46394/file/Brochure-Michelis.pdf
  25. Gérald Maisse, Occupation et Résistance dans la Somme, 1940-1944, Abbeville, F. Paillart, , 474 p., chap. 7 (« Le destin de Jean Catelas »), p. 167 et suiv. (ISBN 9 - 782 853 - 140 195)
  26. Ginette Hirtz, Les Hortillonnages sous la grêle, Paris, Mercure de France (ISBN 2 - 7 152 - 0 014 - 5)
  27. Claude Watteel, D'Amiens à Auschwitz, Claude Watteel, 2013 (ISBN 978 - 2 - 7 466 - 6 733 - 4)
  28. Françoise Bouygard, Les Bûcherons de Cazaux-Debat des Autrichiens dans la Résistance, Paris, Éditions Tirésias, 2013 (ISBN 2 - 915 293 - 82 - 1)
  29. Colonel Rémy, L'Opération Jéricho, Paris, France-Empire, 1954
  30. Albert Bécard et Jacques Lejosne, La Libération dans la Somme 1944-2014, 70e anniversaire, Camon, Centre de mémoire Somme Résistance et Déportation, août 2014
  31. Joseph Abram, L'Architecture moderne en France. Du chaos à la croissance, 1940-1966, éd. Picard, 1999, p. 28-31.
  32. Antoine Caux, Jean-Christophe Fouquet et Nicolas Lejeune, « 2008, souvenirs de mai », JDA Métropole no 487 du 28 mai 2008.