Carillon

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Représentation ancienne d'un carillon.

Un carillon est un instrument de musique composé de cloches, accordées à des fréquences différentes et émettant chacune leur son propre. Pour des carillons de grande taille, les battants des cloches sont actionnés par le carillonneur au moyen d'un clavier manuel et éventuellement d'un pédalier. D'autres sortes de carillon proches du carillon tubulaire et du chimes appelés carillons éoliens et semblables à des mobiles, tels que le fūrin japonais ou le tintinnabulum de la Rome antique, sont généralement composés de multiples tubes en bois ou métal suspendus qui produisent du son en s'entrechoquant à cause de la force du vent.

Le mot carillon est une forme altérée de l'ancien français, issue du gallo-roman *QUADRINIONE, elle-même altération du bas latin quaternio, désignant un « groupe de quatre ». Un carillon comporte donc un ensemble d'au moins quatre cloches consonantes entre elles. Dans un carillon, les cloches restent immobiles, et c'est un marteau (ou battant) qui vient les frapper.

Cloches[modifier | modifier le code]

Les Sonneurs, 1841
Alexandre-Gabriel Decamps
musée du Louvre.
Nouvelles cloches du carillon de la paix d'Aarschot
Nouvelles cloches du carillon de la paix d'Aarschot (Belgique).
Console de carillon (clavier + pédalier).

La Fédération mondiale du carillon ne prend en compte que les carillons d'au moins 23 cloches (c'est-à-dire une étendue de deux octaves), mus par claviers manuels à bâtons. Cependant, en France la dénomination "carillon" peut être employée pour des instruments ayant au moins 4 cloches ("quadrillon").

Dans beaucoup de régions de France et en Suisse, on rencontre des carillons de taille plus modeste (3 à 22 cloches) dont le carillonneur ne joue pas forcément sur un clavier. Ce dernier actionne alors les battants des cloches directement en tirant sur leurs cordes. Pour certains carillons, le joueur saisit alors simplement les cordes à la main comme on peut le voir dans le tableau Les Sonneurs d'Alexandre-Gabriel Decamps[1].

Dans d'autres cas, il les accroche à ses coudes, ses genoux et ses pieds et en manipule deux autres à la main, puis, assis sur un banc, il carillonne par de grands gestes coordonnés (usage répandu également dans les églises orthodoxes). Il existe tout de même des carillons de taille modeste, mais étant confectionnés comme les instruments de 23 cloches et plus, avec clavier, pédalier, etc.

L'art du carillon est un art flamand dans un sens large, englobant le nord de la France, la Belgique et les Pays-Bas. Son apogée a été atteinte au XVIIe siècle. Malheureusement, la Révolution a eu des conséquences désastreuses sur le patrimoine campanaire, tout comme toutes les guerres précédentes. Avant 1788, on pouvait dénombrer 6 carillons à Cambrai, 8 à Lille et 11 à Valenciennes. Le décret de la Convention du 6 février 1793, ordonnant la fonte des cloches pour la fabrication de canons, a scellé le destin de presque tous les anciens carillons[2].

Ces traditions de sonner manuellement sur petits carillons tendent à disparaître, du fait de l'électrification des cloches et du remplacement des sonneurs par des programmateurs électroniques. Nous pouvons cependant remarquer une tendance à remettre ces instruments au goût du jour en restaurant les petits ensembles campanaires manuels, particulièrement dans le sud de la France.

Les carillonneurs possèdent une technique similaire à celle des organistes, car ils jouent aussi bien avec leurs mains qu'avec leurs pieds. Le clavier de carillon le plus ancien dont on a connaissance est celui d'Audenaarde, datant de 1510. Bien que la plupart des carillonneurs aient été remplacés par des systèmes automatisés, il y avait encore en 2001 16 carillonneurs dans le Nord de la France[2].

Localisation[modifier | modifier le code]

Le plus grand carillon à clavier en France est celui de Chambéry (Château des Ducs de Savoie) qui comporte 70 cloches. Le plus grand carillon du monde se trouve au monastère de Mafra au Portugal avec 120 cloches. Le pays qui possède le plus grand nombre de carillons à clavier d'au moins 23 cloches sont les Pays-Bas, avec 189 instruments. La France possède 63 instruments d'au moins 23 cloches.

Un carillon peut être intégré à un monument : clocher d'église ou de cathédrale, campanile, beffroi d'hôtel de ville, etc. On en trouve plus fréquemment dans le nord de la France, aux Pays-Bas, en Belgique, en Suisse ou dans le Sud de l'Allemagne.

France[modifier | modifier le code]

La culture du carillon *
Image illustrative de l’article Carillon
Campanile du carillon de Cambrai
Domaine Musiques et danses
Lieu d'inventaire France
Hauts-de-France
Champagne (province)
Bourgogne-Franche-Comté
Auvergne-Rhône-Alpes
Pays d'Oc
* Descriptif officiel Ministère de la Culture (France)
Carillon automatique sur le toit de la cathédrale de Reims.

En France, les plus grands carillons sont en général placés dans les clochers des églises et les beffrois communaux. Sur tout le territoire de l'Occitanie, les carillons sont très nombreux mais de taille plus réduite : généralement une à deux octaves.

On trouve des carillons remarquables à Albi, Bergues, Blois, Bourbourg, Bourg-en-Bresse, Cappelle-la-Grande, Carcassonne, Castelnaudary, Castres, Chambéry, Dijon, Douai, Dunkerque, Forcalquier, Hondschoote, Le Creusot, Lisieux, Lyon, Narbonne, Orchies, Pamiers, Paris (Sainte-Odile), Rouen, Saint-Amand-les-Eaux, Saint-Gaudens, Saint-Vincent-de-Paul (Landes), Saint-Quentin, Saint-Saturnin-lès-Apt, Seclin, Taninges, Toulouse, Tourcoing...

Les plus grands carillons de France sont :

Un carillonneur, Mayo Clinic
Carillon de l'église de Clelles.

La culture du carillon est une pratique qui a été classé à l'inventaire du patrimoine culturel immatériel en France en 2012[4].

Canada[modifier | modifier le code]

Carillon de l'oratoire Saint-Joseph

Il existe 11 carillons de plus de 23 cloches au Canada[5].

Suisse[modifier | modifier le code]

En Suisse, il y a 6 carillons à clavier mécanique de plus de 23 cloches, dont 5 en Suisse Romande (à côté des dates, on trouvera le nom du fondeur des cloches):

Canton de Genève:

  • Carouge, église Sainte-Croix, 36 cloches (fa#3, sol#3 - fa#6; 1 Aubry XVII, 1 Piton 1789, 1 Kervand 1839, 33 Rüetschi 2001) ;
  • Genève, cathédrale, 37 cloches (mi3, la3, si3 - la6; 1 Fribor vers 1460, 16 Paccard/Rüetschi 1931, 1 Rüetschi 1991, 19 Paccard 2011) ;

Canton de Vaud:

Canton du Valais:

  • Lens, Église Saint-Pierre-aux-Liens, 24 cloches (do3, fa3, sol3, la3 - fa5; 2 Rüetschi 1958, 21 Rüetschi 1967, 1 Rüetschi 1995) ;
  • Saint-Maurice, Abbaye, 49 cloches (sol#2, do#3, ré#3 - do#7; 2 Dreffet 1818, 1 Rüetschi 1947, 1 Paccard 2010, 45 Eijsbouts 2003), pour un poids total d'environ 14 tonnes de bronze, ce qui en fait le plus grand instrument de Suisse, inauguré le  ;

Canton d’Argovie:

  • Zofingue, Stiftsturm, 25 cloches (do4 - do6; Rüetschi 1983/1985/1989/1996/1997/2005).

Un carillon monumental de 23 cloches est édifié devant l'église de Morgins en 2000, pour la paix dans le monde.

Belgique[modifier | modifier le code]

La sauvegarde de la culture du carillon : préservation, transmission, échange et sensibilisation *
Image illustrative de l’article Carillon
Le carillon de Gand.
Pays * Drapeau de la Belgique Belgique
Liste Registre des meilleures activités de sauvegarde
Année d’inscription 2014
* Descriptif officiel UNESCO

Il existe 99 carillons de plus de 23 cloches en Belgique[6].

  • Nieuport (Flandre Occidentale), Onze-Lieve-Vrouwekerk, 67 cloches
  • Peer (Limbourg), Sint-Trudokerk), 64 cloches
  • Lommel (Limbourg), Sint-Pietersbandenkerk), 63 cloches
  • Louvain (Brabant Flamand), Bibliothèque de l'université, 63 cloches
  • Tournai (Hainaut), Beffroi, 56 cloches
  • Gand (Flandre Orientale), Beffroi, 54 cloches
  • Halle (Brabant Flamand), Cathédrale, 54 cloches
  • Alost (Flandre Orientale), Beffroi, 52 cloches
  • Turnhout (Anvers), Sint-Pieterskerk, 52 cloches
  • Aarschot (Brabant Flamand), Onze-Lieve-Vrouwekerk, 51 cloches
  • Enghien (Hainaut), Saint-Nicolas, 51 cloches
  • Dinant (Namur), Collégiale, 50 cloches
  • Gembloux (Namur), Saint-Nicolas, 50 cloches
  • Harelbeke (Flandre occidentale), Sint-Salvatorkerk, 50 cloches
  • Hoogstraten (Anvers), Sint-Catharinakerk, 50 cloches
  • Liège, Saint-Barthélemy, 50 cloches
  • Malines, (Anvers), (Onze-Lieve-Vrouw-over-de-Dijlekerk), 50 cloches
  • Wavre (Brabant Wallon), Saint-Jean-Baptiste, 50 cloches
  • Namur, Cathédrale Saint-Aubain, 49 cloches
  • Anvers, Cathédrale, 49 cloches
  • Ath (Hainaut), Saint-Julien, 49 cloches
  • Bruxelles, Cathédrale Saints-Michel-et-Gudule, 49 cloches
  • Florenville (Luxembourg), Eglise de l'Assomption, 49 cloches
  • Huy (Liège), Collégiale, 49 cloches
  • Louvain, Sint-Geertruikerk, 49 cloches
  • Liège, Cathédrale Saint-Paul, 49 cloches
  • Mons (Hainaut), Beffroi, 49 cloches
  • Renaix (Flandre Orientale), Collégiale Saint-Hermès, 49 cloches
  • Soignies, Saint-Vincent, 48 cloches
  • Braine-le-Comte, Saint-Géry, 47 cloches
  • Bruges (Flandre Occidentale), Beffroi, 47 cloches
  • Charleroi, Hôtel de Ville, 47 cloches
  • La Louvière, Saint-Joseph, 47 cloches
  • Nivelles, Sainte-Gertrude, 47 cloches
  • Malmedy, Saints-Pierre-Paul-et-Quirin, 40 cloches
  • Verviers, Notre-Dame des Récollets, 40 cloches
  • Bruxelles, Parlement fédéral, 37 cloches
  • Huy, Hôtel de Ville, 37 cloches
  • Liège, Saint-Jean-l'Evangéliste, 35 cloches
  • Chimay, Eglise Saints-Pierre-et-Paul, 26 cloches
  • Antoing, Église décanale Saint-Pierre, 25 cloches
  • Thuin, Beffroi, 25 cloches
  • Bruxelles, Mont des Arts, 24 cloches

Carillon (pièce de musique)[modifier | modifier le code]

En plus de leur répertoire propre, les carillons de cloches ont inspiré plusieurs musiciens à travers les époques. Tant au clavecin, à l'orgue, au piano qu'à l'orchestre, les compositeurs ont tenté de suggérer ou d'évoquer les sonorités des carillons dans des œuvres pittoresques. Quelques exemples :

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. « Les Sonneurs », sur Base Joconde (consulté le ).
  2. a et b Le patrimoine des communes du Nord, Flohic, (ISBN 978-2-84234-119-0, lire en ligne), p. 32
  3. [1]
  4. « Culture du carillon », sur culture.gouv.fr, (consulté le ).
  5. Encyclopédie du Canada
  6. [2]

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • L-R Aram, sous la direction de Laurent PIE, Chants des cloches, voix de la terre, Carillons et traditions en Languedoc-Roussillon, Max Chaleil Éditeur. s.d.
  • H. Garnier Les carillons de France, Dijon 1985.
  • J. Goguet Le carillon des origines à nos jours, Paris, 1958.
  • E. Sutter, Ressources documentaires concernant les cloches, clochettes et carillons, Paris, [SFC], 3e édition, 1996.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

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Liens externes[modifier | modifier le code]