Svastika

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Svastika.

Le svastika ou swastika , mot sanskrit dérivé de su (« bien ») et de asti (« il est »)[1], avec la variante orthographique sauvastika[2] parfois attribuée à son symétrique , est un symbole que l'on retrouve en Europe, notamment dans l'art chrétien, en Afrique, en Océanie, aux Amériques (Amérique précolombienne chez les Mayas et amérindiens Navajos et kunas) et en Asie jusqu'en Extrême-Orient. Il apparaît à l'époque néolithique pour la première fois dans la préécriture de la culture de Vinča. Cette ubiquité temporelle et spatiale lui a parfois valu le nom de « symbole universel ». On peut le décrire comme une croix composée de quatre potences prenant la forme d'un gamma grec en capitale (Γ), d'où le nom de croix gammée qui lui est parfois donné.

Ce symbole est actuellement utilisé en Asie et tout particulièrement en Inde, il est le symbole premier du jaïnisme, considéré par ses adeptes comme le plus favorable de tous les symboles. Pour les hindous il symbolise, parmi d'autres sens, le dieu Ganesh qui est fort populaire, c'est toujours un symbole omniprésent chez les bouddhistes. En Chine il symbolise l'éternité.

Dans l'Occident moderne, le svastika pointant vers la droite, et généralement incliné de 45 degrés, avait été adopté comme emblème par le parti national-socialiste allemand et le troisième Reich, il a par conséquent acquis après la Seconde Guerre mondiale une forte connotation politique le liant aux crimes de guerre allemands et à l'idéologie raciste. Certains groupes politiques extrémistes l'utilisent encore pour se rattacher à cette idéologie (voir Croix gammée nazie).

Étymologie

Il est de coutume en Inde de tracer un svastika sur la tête rasée d'un enfant initié au Véda (tradition sacrée hindoue).

Le nom svastika (स्वस्तिक) est un terme sanskrit apparaissant pour la première fois dans les épopées « Rāmāyana et « Mahābhārata ».

On peut l'analyser comme un mot composé de svasti et du suffixe diminutif -ka. Le sens de svasti est « bonne santé, bonne fortune » (c'est aussi une interjection équivalent au français « vive... ! ») ; il est lui-même formé de su, « bon » (cf. grec ancien εὗ, indo-européen commun * h₁su-) et de asti, « existence » (radical indo-européen du verbe être, soit * h₁es-, que l'on retrouve tel quel en français, tu es). Svastika peut donc se traduire comme « ce qui apporte la bonne fortune, ce qui porte chance ». Une autre décomposition possible est su « bon » suivi du suffixe -tika « signe », soit « bon signe », lecture reprise par un homonyme indien moderne, « śubhṭīkā » (शुभटीका). En tout état de cause, le nom est celui d'un signe de bon augure.

Sens de rotation

Le svastika inscrit dans un carré peut être retourné comme s'il était vu dans un miroir, donnant deux versions de sens opposé. On le qualifie donc de « dextrogyre » (dextro = droite ; gyro = tourne) lorsqu'il tourne dans le sens des aiguilles d'une montre, et de « lévogyre » (ou encore « sénestrogyre ») dans le cas contraire.

Rotation lévogyre (sens inverse des aiguilles d'une montre)

Si l'on considère qu'il s'agit à l'origine de la représentation symbolique d'une rotation (symbole solaire diurne ou, à l'inverse, symbole stellaire nocturne), on a tendance à considérer que celle-ci s'effectue dans le sens inverse de celui indiqué par les pointes ; les coudes de la croix, et non la pointe des barres, indiquent donc le sens de rotation (on peut se le représenter de façon imagée comme s'il s'agissait de quatre petits drapeaux qui sont entrainés vers l'arrière quand la roue tourne). C'est aussi le cas du triskèle, où cette fois les trois branches représentent des jambes pliées dont les genoux sont tournés vers l'avant.

Rotation dextrogyre (sens des aiguilles d'une montre)

Mais on peut suivre l'illusion perceptive créée par la courbure des branches et considérer que le sens de rotation est indiqué par la pointe de la barre supérieure. C'est le cas notamment dans le symbole basque ("lauburu", qui signifie en basque "quatre têtes"), où les branches peuvent représenter des têtes de serpent qui pointent vers l'avant.

Aucun point de vue ne fait l'unanimité et le débat reste ouvert. Dans la suite de l'article, le suffixe "gyre" signifiera, non une hypothétique rotation, mais le sens d'inclinaison de l'extrémité des bras supérieurs, tournés vers la droite ou vers la gauche. Les svastikas seront décrits comme « pointant vers la droite » (卐), ou dextrogyre, ce qui devra s'interpréter comme « pointant en haut vers la droite et en bas vers la gauche » en forme de S (svastika auspicieux indien, japonais, et croix gammée) ; et « pointant vers la gauche » (卍), ou lévogyre, ce qui devra s'interpréter comme « pointant en haut vers la gauche et en bas vers la droite » en forme de Z (svastika boudhique et coréen de l'illustration).

Selon Salomon Reinach, le svastika serait un oiseau stylisé.

Origine et signification

Poterie minoenne.
Collier décoré de svastikas ; fouilles de Kaluraz, Gilan, Iran, Ier millénaire av. J.-C. Musée national d'Iran.
Représentation de comètes sur un manuscrit de Mawangdui, Chine, IIe siècle av. J.-C..

C'est l'un des plus anciens symboles de l'humanité que l'on retrouve sous plusieurs formes dans la majorité des civilisations du monde, bien qu'il n’ait pas toujours la même signification. Les différentes graphies inspirées de la forme du svastika ont pu naître indépendamment les unes des autres, bien que certaines soient liées historiquement (svastikas indien et bouddhique, svastika indien et svastika du XXe siècle européen).

Les premiers svastikas connus se trouvent en Ukraine à Mezin vers 10000 av. J.-C. Puis viennent ceux retrouvés sur des poteries de la culture de Samarra, établie sur le moyen Tigre et jusqu'au moyen Euphrate, sur la céramique Vinca de Transylvanie et datant du Ve millénaire av. J.-C., suivis par ceux des poteries de Sintashta au Sud de l'Oural datant du IIe millénaire. Leur présence se fait plus importante à partir de l'âge du bronze. Les principales occurrences du svastika en Europe et en Asie centrale sont : dans le Caucase (culture de Koban), en Azerbaïdjan, chez les Scythes et leurs parents les Sarmates, chez les Hittites, les Celtes (triskell), les Grecs (grecque), et les peuples germaniques (notamment les Goths ; fibule). Plus tard, on en trouve en Islande deux versions, le marteau de Thor (elle apparaît aussi sur la ceinture de Thor sur le tableau de M. E. Winge (1872) où il affronte les géants) tournoyant dans le ciel et représentant le soleil, et le Þórshamar des grimoires ; le lauburu est typique du Pays basque. Le svastika apparaît également dans de nombreuses cultures d'Asie, d'Afrique et d'Amérique. On le trouve dans deux idéogrammes chinois ou plus couramment , signifiant « dix mille » (c'est-à-dire l'éternité) ou « le cœur de Bouddha ».

Différentes hypothèses ont été avancées pour expliquer l'ubiquité du svastika. Une explication triviale est qu'il s'agit d'un motif décoratif facile à exécuter. Une autre, qui fait appel aux fonctions symboliques communes à tous les humains, suggère qu'il s'agirait à l'origine d'une représentation d'un mouvement rotatif : rotation apparente du soleil dans sa course diurne, comme celle de la lune et des planètes, de gauche à droite dans l'hémisphère Nord (soit dans le sens des aiguilles d'une montre) ; rotation du ciel nocturne autour de l'étoile polaire (rotation inverse, due au changement de point de vue de l'observateur, tourné vers le Nord et non plus vers le Sud). D'autres corps célestes ont été proposés, une comète par exemple, selon l'astronome Carl Sagan, au vu de celle représentée dans un manuscrit chinois de Mawangdui. Chez les Navajos, il s'agit de la rotation d'une bûche.

La signification et l'importance du svastika varient selon les cultures et les époques. Il peut n'être qu'un signe parmi d'autres comme sur les poteries Vinca, ou un symbole religieux prééminent comme dans l'hindouisme et le bouddhisme. De nos jours, par exemple, le svastika levogyre (卍) est utilisé pour marquer les temples bouddhistes sur les plans de ville japonais. Au XXe siècle, les svastikas ont été utilisés par le régime nazi et sont devenus tabous dans le monde occidental, même le svastika bouddhique pointant vers la gauche, à l'inverse du svastika indien et de la croix gammée. Des tombes bouddhiques appartenant à des familles indochinoises furent vandalisées après la guerre ; plus récemment, des cartes Pokémon portant un svastika bouddhique durent être retirées de la vente au Japon. La circulation de l'information et l'intérêt accru pour les civilisations asiatiques n'ont pas suffi à réhabiliter le svastika dans le monde occidental. Son interdiction est même proposée, au regret des hindous vivant en Europe[3].

Autre signification

Pour René Guénon, le mouvement circulaire exprimé par ce symbole est utilisé pour mettre en évidence l'axe de la figure, seule partie immobile et symbole de l'immuabilité d'un principe transcendant. Affirmant que cette croix doit être considérée comme une figure horizontale il y voit un « signe du Pôle », qui serait un des symboles les plus anciens de la « tradition primordiale », d'origine polaire et mère de toutes les autres traditions. Ce symbole aurait ainsi été conservé, en oubliant plus ou moins son sens, par les religions actuelles. Pour lui le sens de rotation n'a pas d'importance dans ce symbolisme et peut être considéré comme la vision d'un même objet par une face ou par l'autre. Quant au terme de « sauvastika » il n'y voit qu'un adjectif dérivé de « svastika » qui désigne simplement, en sanscrit, ce qui a un rapport avec ce symbole[4].

Le svastika dans les religions

Fronton d’un temple coréen.

Comme l'indique son nom sanskrit, le svastika est dans les mystiques orientales un signe de bon augure. Bien que se retrouvant dans toutes les cultures de l'humanité préhistorique, son utilisation systématique vient de l'Inde, correspondant à la compréhension hindoue du monde, et est donc utilisé aussi par le bouddhisme et surtout par le jaïnisme, qui sont toutes deux des religions d'origines indiennes.

Il est principalement un symbole cosmique mettant en scène le mouvement perpétuel de rotation autour d'un point fixe, celui de l'univers qui subit toutes les évolutions, de tous les cycles, de la transcendance. Il représente plusieurs forces positives, comme Ganesh dans l'hindouisme, dieu que l'on invoque pour tout commencement comme étant celui qui écarte les obstacles, parfois représenté sur un lit de svastikas. Chez les bouddhistes il représente la connaissance ésotérique et la roue du dharma.

Hindouisme

Symbole Jaïn ; le svastika est un symbole majeur et omniprésent dans le jaïnisme, religion de la non-violence. Ici, les quatre points bleus entre les branches du svastika représentent les quatre mondes : en haut à gauche, le monde des hommes ; en haut à droite, le monde des dieux ; en bas à gauche, le monde des animaux et des plantes ; en bas à droite, le monde des démons : seul le monde des hommes est ouvert à la délivrance, grâce aux trois joyaux (en vert) du jaïnisme (vision juste, connaissance juste, conduite juste), qui permet d'accéder à la libération du cycle des réincarnations (le candra-bindu : en jaune).

Dans la religion hindoue, les deux sens de rotation sont associés à l'activité du dieu Brahma constructeur de l'univers : le svastika proprement dit pointant vers la droite représente la construction, la croissance (प्रवृत्ति Pravritti), alors que celui pointant vers la gauche, appelé sauvastika (सौवस्तिक), représente l'involution, la destruction (निवृत्ति Nivritti). Inscrit dans un carré à base horizontale (graphie nettement plus fréquente que la position à 45°), il représente la stabilité, ses branches indiquant les quatre orients. Il peut également être le symbole du dieu solaire Surya. Le svastika pointant vers la droite, auspicieux et bénéfique, est presque seul représenté et jouit d'une popularité inaltérée par les événements en Europe. On le retrouve même sur des objets non proprement religieux. Le sauvastika, considéré comme lié au temps (connoté négativement), n'est en général pas employé. Au Bengale, Svastika est un prénom courant.

Jaïnisme

Le svastika y joue un rôle encore plus important que dans l'hindouisme et représente le Tirthankara Suparsva, septième « faiseur de gué » du jaïnisme. C'est l'une des 24 marques auspicieuses. Tous les temples et textes jaïns portent ce symbole, qui est dessiné sept fois avec du riz autour de l'autel avant chaque cérémonie.

En Inde

Svastika sur un instrument de musique.

En Inde, c'est un symbole omniprésent, non seulement sur les temples, mais aussi sur les maisons, dans les rues, les objets, en tant que symbole religieux, spirituel et métaphysique du cosmos et de la vérité (ekam satya, aneka panthi est un vers du Véda qui signifie « Une seule vérité, plusieurs chemins », ce que représente la croix gammée). Le Svastika représente d'ailleurs la « société noble » (ârya samaj) pour les Hindous, composée des brâhmanes (savants), kshatriya (Défenseur), vaïshya (paysan-artisan) et shûdra (serviteur), ou comme le définit le Manusmriti (lois de Manu) :

« 62. La mort, sans l’espérance d’une récompense, pour les Brâhmanes et les vaches, ou dans la défense de femmes et d’enfants, garantit la béatitude à ceux ne faisant pas partie de la communauté Ârya (les Vahya). 63. L'ahimsâ (respect impérieux de la Vie, non-violence), la véracité, l'abstention de s'approprier les biens d'autrui, la pureté et le contrôle des sens, Manu a ainsi déclaré que tout cela peut être considéré comme le résumé du Dharma pour les quatre Varna d'Ârya (« noble »). (Livre X) »

Enfin, les Jaïns — le jaïnisme étant une religion morale qui a pour premier credo la non-violence (ahimsâ) — utilisent tout spécialement le svastika pour symbole de l'Harmonie cosmique, et bien sûr à chacune de leur cérémonie : le centre du svastika (ou croix gammée) symbolise l'âme libérée du cycle des réincarnations, tandis que les quatre branches représentent : 1. le monde des démons ; 2. le monde des végétaux ; 3. le monde des animaux (l'homme fait partie du règne animal) ; et 4. le monde des divinités ; l'âme libérée est au centre car elle est en paix éternelle – délivrée des naissances et des morts en ces différents corps et destins de démons, de végétaux, d'animaux et de divinités, grâce à la pratique de la non-violence et de l'ascèse absolues (pour le jaïnisme, le svastika ordonne ainsi la Non-violence directe et indirecte envers toutes les créatures, qui ont toutes la même âme, la même vie, le même vouloir-vivre dans des conditionnements différents et éphémères).

Bouddhisme

Svastikas décoratifs sur un sūtra.
Blasons du samuraï Tsunenaga Hasekura, chef d’une ambassade en Europe au XVIIe siècle.

Le svastika a été utilisé par les bouddhistes probablement dès la fondation de cette religion aux alentours du VIe siècle av. J.-C. En dehors de l'Inde, svastika et sauvastika ont d'abord été indifféremment utilisés, les deux formes étant considérées comme aussi favorables l'une que l'autre. Néanmoins, l'apparition du sinogramme wan 卍 vers l'époque des Liao a favorisé la forme pointant vers la gauche, plus fréquemment employée. Après la Seconde Guerre mondiale, le stigmate nazi du svastika pointant vers la droite l'a pratiquement fait disparaître en Europe.

Le caractère chinois, il existe deux formes, la forme traditionnelle : , est inversée par rapport à la forme simplifiée : (pinyin wàn, équivalent de , « 10 000, myriade »), représente directement un svastika pointant vers la gauche ; il symbolise dans le bouddhisme chinois la réalisation des dix mille mérites, qui promettent le nirvâna (voir le sūtra ci-contre) ; le Bouddha, ainsi que le bodhisattva Guanyin (bodhisattva de la compassion) les portent d'ailleurs parfois, dans l'iconographie chinoise, sur la poitrine ou sur le front. Dans le bouddhisme zen, c'est le « sceau de l'esprit de Bouddha ». Ce symbole est utilisé pour noter les temples bouddhiques sur les plans de ville à Taïwan et au Japon. La valeur de « soleil » lui fut attribuée par l'impératrice Wu Zetian lors de sa tentative de création de nouveaux sinogrammes. Au Japon, les deux formes de svastika sont quelquefois associées aux deux composantes de l'illumination : le svastika pointant vers la gauche, en japonais omote manji (svastika externe) ou simplement 卍 (まんじ, manji?) représente l'amour et la compassion (associés au bouddha Amitabha), alors que le svastika pointant vers la droite, ura manji (svastika interne) ou gyaku manji (svastika inversé) représente la sagesse et l'énergie associées à Akshobhya.

Chez les Tibétains, le svastika est appelé གཡུྒདརུྔ (g.yung-drung), ce qui signifie « éternel ». Traditionnellement, les bouddhistes tibétains adoptent le svastika pointant vers la droite comme les Indiens, tandis que les bonpos, pratiquants de l'ancienne religion tibétaine prébouddhique Bön, utilisent le svastika pointant vers la gauche. Chez les bouddhistes tibétains bonnets rouges - titre donné aux écoles du bouddhisme tibétain portant une coiffe noire, Kagyüpa, Sakyapa, Nyingmapa.– école dont sont issus les karmapas et autres grands maîtres du bouddhisme originel - , le svastika est sénestrogyre, c’est-à-dire qu’il tourne dans le sens inverse des aiguilles d’une montre ; au contraire, chez les bonnets jaunes, école étant la seule à porter une coiffe jaune – dont sont issus les dalaï-lamas et les panchen-lamas - , le svastika est dextrogyre, c’est-à-dire qu’il tourne dans le sens des aiguilles d’une montre. En ce cas il représente la renonciation, mais symbolise aussi la course visuelle du soleil[5]. Ce caractère est également utilisé dans l'écriture dongba, prononcé ɯ33 et représentant le bien, le bon[6], de la minorité Naxi, reflétant au Tibet des restes toujours vivants de la culture Bön et des traditions tibétaines prébouddhiques.

En Corée, le svastika est très courant dans les rues où il indique un lieu bouddhiste.

Au début des années 1920, le mouvement religieux syncrétiste Dao Yuan (道院 Maison du Dao) fonda en Chine l'organisation charitable du Svastika rouge, dont les activités s'interrompirent après 1949 ; les branches de Hong Kong et Singapour, encore actives, patronnent des écoles et des hôpitaux.

Mythologie basque

Représentation moderne de Sugaar comme serpent dans le lauburu, par Josu Goñi.

Dans la mythologie basque, Sugaar est le pendant mâle d'une déité préchrétienne basque associée aux orages et à la foudre. Il est en général représenté par un dragon ou un serpent. Contrairement à son épouse Mari, il subsiste hélas peu de légendes à son propos. Il est représenté dans une forme similaire au svastika, le lauburu, mot qui signifie littéralement « quatre têtes ». Ce symbole remonterait au moins au Néolithique, à l'époque pré-indo-européenne.

Autres spiritualités et cultures

Tissage navajo.
Mola, broderie traditionnelle kuna.

Certaines tribus indiennes d'Amérique du Nord l'utilisent, particulièrement dans le Sud-Ouest des États-Unis, lui donnant chacune une signification différente. Ainsi chez les Hopis il représente les pérégrinations des clans alors que chez les Navajos c'est la « bûche tournoyante » liée aux rites de guérison. Le svastika a été retrouvé dans les sites archéologiques de la civilisation du Mississippi, dans l'Ohio.

C'est un motif traditionnel chez les Kunas de Panama qui le font figurer sur le drapeau de leur territoire autonome de Kuna Yala.

Dans la mythologie lettone, il est appelé « croix de tonnerre » (zibenkrusts) ou « croix de feu » (ugunskrusts).

Chez les francs-maçons, il est le symbole de l'univers, le centre du svastika représentant l'étoile polaire, tandis les quatre branches symbolisent les quatre points cardinaux.

Des mouvements religieux modernes l'utilisent ou l'ont utilisé de façon emblématique et en référence à sa signification originelle : la religion vietnamienne Cao Dai, le Falung Gong, Ásatrú ; le Mouvement raëlien l’avait combiné avec l’étoile de David dans son logo, changé en 1991 en retirant le svastika par respect pour les juifs qui auraient pu se sentir blessés de voir le svastika lié à l’étoile de David. Le chef spirituel du mouvement raëlien a, par contre, réintégré le svastika en 2007 dans le logo originel (sauf en Israël).

Le svastika indien dans l'Occident moderne

Svastika ornant le mausolée Goblet d'Alviella (Belgique)

La découverte dès le XVIIIe siècle de la parenté entre les langues d'Europe et des langues du Nord de l'Inde avait éveillé beaucoup d'intérêt. L'Inde est devenue pour les intellectuels mal à l'aise avec les religions judéo-chrétiennes une alternative au monde méditerranéen comme source de la civilisation européenne. L'archéologue Heinrich Schliemann, en collaboration avec les spécialistes de sanskrit Émile-Louis Burnouf et Max Müller, fut le premier à proposer que les symboles grecs découverts sur le site supposé de Troie étaient un symbole typiquement indo-européen, avatar du svastika indien, et que les Aryens pouvaient être des ancêtres des Européens. Adolf Hitler s'est servi du svastika indien comme symbole de l'aryanisme, alors que telle n'est pas sa fonction première, car ce symbole n'a jamais été exclusif aux ārya, en sanskrit « noble », terme qui indique en Inde, outre la noblesse dans un sens courant (noblesse de cœur, d'esprit), les quatre varnas hindoues, c'est-à-dire les brâhmanes, les kshatriya (rois), les vaïshya (paysans, artisans) et shudra (serviteurs), ou l'ensemble de la population hindoue, selon les lois de Manu ; néanmoins, le svastika, par ces quatre branches, représente les quatre ordres ci-dessus mentionnés de la société hindoue sacrée (qui n'a pas de base « raciste » mais liée au comportement de chacun), c'est-à-dire ârya ou noble, « aryenne », incarnant l'ahimsâ (non-violence), telle que définie par le législateur de la tradition védique, Manu :

« La mort, sans l’espérance d’une récompense, pour les brâhmanes et les vaches, ou dans la défense de femmes et d’enfants, garantit la béatitude à ceux ne faisant pas partie de la communauté Ârya (les Vahya). L'Ahimsā (respect impérieux de la Vie, non-violence), la véracité, l'abstention de s'approprier les biens des autres, la pureté et le contrôle des sens, Manu a ainsi déclaré que tout cela peut être considéré comme le résumé du Dharma pour les quatre varna d'Ārya (« Nobles » en sanskrit : brahmanes, kshatriya, vaïshya, shudra)[7]. »

— Mānavadharmaśāstra, livre 10, sûtra 62 et 63.

Le svastika était particulièrement familier des Britanniques ayant servi dans l’armée des Indes, comme Rudyard Kipling, dont les livres étaient protégés par une couverture portant ce signe jusqu'à ce que le symbole ne devienne trop lié au nazisme. L'une des nouvelles de Histoires comme ça (édition 1911), « Le crabe qui jouait avec la mer », incluait une illustration pleine page par l'auteur représentant un socle de pierre en forme de svastika, mentionné dans la légende comme « marque magique », effacé dans les éditions ultérieures.

Sauvastika, forme lévogyre du svastika sur une édition de 1911 de Rudyard Kipling.

À partir de la fin du XIXe siècle et jusque peu avant la Seconde Guerre mondiale, le svastika a joui d'une certaine popularité dans le monde occidental. Il fut employé comme porte-bonheur, par exemple sur des cartes de vœux anglaises ou sur des pendentifs de montre de poche publicitaires émis en 1925 par Coca-Cola. Il fut adopté comme emblème par des clubs sportifs, des organisations, des entreprises et même des unités militaires, mais dans un esprit sans rapport avec l'idéologie nazie.

Les Boy Scouts de Grande-Bretagne adoptèrent pour leurs badges une croix se rapprochant de le svastika, mais qui s'agit en réalité de la Croix potencée dite aussi Croix de Jérusalem. Elle est ornée d'une fleur de lys en son centre, (ancien symbole du Nord sur les cartes) que Baden-Powell ajouta en 1922.

L'armée de l'air lettonne utilisa également un svastika (appelé Pērkonkrusts, « croix du [dieu-]tonnerre ») de 1918 à 1934. D'autres unités l'utilisèrent comme insigne. Des organismes lituaniens, au nombre desquels le mouvement fasciste Perkonkrusts, le choisirent comme emblème.

Le logo de la société suédoise ASEA de 1800 à 1933.

Le svastika fut le logo de la compagnie suédoise ASEA, faisant désormais partie du groupe Asea Brown Boveri, de 1800 à 1933.

La compagnie de navigation islandaise Eimskip, fondée en 1914, utilisait encore récemment un svastika.

Le comte suédois Von Rosen ayant offert son premier avion à l'armée de l'air finlandaise, celle-ci adopta son emblème, une svastika bleue, en 1918.

La tête d'Indien qui sert de symbole à l'Escadrille La Fayette, à l’origine un groupe de volontaires américains arrivés en France en 1916 pour soutenir l'effort de guerre, comporte comme ornement un svastika.

La Société théosophique fondée à New York en 1875 avait adopté le svastika bouddhique dans son sceau.

Des équipes locales canadiennes de hockey ont utilisé le nom « Swastika » (orthographe courante en anglais) : à Edmonton dans l’Alberta vers 1916, à Fernie en Colombie-Britannique vers 1922 et à Windsor en Nouvelle-Écosse, les maillots de cette dernière étaient ornés du symbole.

La présence du symbole dans les traditions religieuses de tribus indiennes explique les nombreuses apparitions du svastika aux États-Unis, dans le Sud-Ouest, dans l’artisanat tribal en particulier. Ainsi, les bornes des routes d'état de l’Arizona portèrent jusqu’en 1940 une pointe de flèche marquée d’un svastika. Charles Lindbergh avait fait peindre un svastika sur le moyeu de l'hélice de son Spirit of Saint-Louis, ce qui n'est pas, a priori, à mettre sur le compte de ses sympathies ultérieures pour le parti nazi. La 45e division d’infanterie de l’armée américaine eut comme emblème un svastika jaune sur fond rouge jusqu’en 1930, année où il fut changé en « oiseau-tonnerre », créature mythologique amérindienne. Au début de la Seconde Guerre mondiale, les tribus Navajos, Apaches, Tohono, O'odham et Hopis renoncèrent officiellement à son usage sur leurs objets usuels et créations artistiques.

À titre anecdotique, il existait encore récemment au Sud de Dublin une entreprise de blanchisserie nommée « Swastika Laundry ».

Une localité du Nord de l’Ontario fondée en 1906, aujourd’hui bourgade de Kirkland, porte le nom de Swastika, qu’elle a toujours refusé d’abandonner malgré les pressions. Une société minière, « Swastika Mining Company », y fut fondée en 1908 en vue de la prospection d’or.

Chez les Slaves

La forme svastika était également très présente dans la mythologie préchrétienne slave. Il a été dédié au dieu slave Svarog ou Rod.

Pour les Slaves le svastika est un signe magique manifestant la puissance et la majesté du soleil et du feu. Il a été souvent utilisé comme décorations rituels de culte sur des urnes cinéraires avec les cendres des morts (rece boga). Le svatiska a été utilisée dans les rituels et la construction, la broderie sur les vêtements, les tapis et décorait des articles ménagers. Elle était aussi présente dans les habits orthodoxes. Comme ornement il est encore aujourd'hui très nombreux sur les habits folkloriques traditionnels.

La croix gammée était aussi un symbole héraldique, par exemple sur les armoiries de Boreyko en Pologne, ou encore utilisé par les nobles en Ukraine. Au XIXe siècle, la croix gammée était l'un des symboles de l'empire russe, il a même été mis en pièces comme un arrière-plan à l'aigle russe.

Nazisme

Drapeau nazi.

Le drapeau nazi comprend un(e) svastika incliné(e) à 45 degrés (comme la croix de saint André) de couleur noire sur un disque blanc exactement au centre d'un drapeau rouge. Elle est alors appelée croix gammée[8].

Le svastika dans l’architecture

Minuscules Svastikas parsemant le plafond de l'église Saint-Laurent de Grenoble.

En dehors de sa valeur de symbole religieux, le svastika apparaît souvent comme motif dans des constructions. Dans le monde grec et romain ainsi que dans les lieux de culte des religions abrahamiques, il est difficile de savoir s’il est porteur d’un sens ou n’est qu’un simple ornement. En voici quelques exemples :

En dehors de ces motifs décoratifs, mais de façon beaucoup plus rare, le Svastika peut également apparaître dans le plan au sol d'un édifice constitué de quatre ailes en « L ». On retrouve par exemple ce type de configuration dans un complexe de bâtiments de la base navale de Coronado à San Diego, construit en 1967-70 (architecte : John Mock) (32° 40′ 34″ N, 117° 09′ 28″ O). En 2007 la Navy s'est engagée à apporter des modifications architecturales destinées à cacher cette forme, uniquement visible du ciel.

Bibliographie

Document utilisé pour la rédaction de l’article : Ouvrage ou article utilisé comme source de cet article.

  • Document utilisé pour la rédaction de l’articleGirard De Rialle, « Sur la signification de la croix dite Svastika et d'autres emblèmes de même nature. », Bulletins de la Société d'anthropologie de Paris, III° Série, tome 3, 1880. pp. 13-17.,‎ , p. 13-17 (lire en ligne, consulté le )

Notes et références

  1. Encyclopaedia Universalis article « svatiska »
  2. Trésor de la Langue Française Informatisée sur le portail CNRTL
  3. « Ce n’est pas parce que Hitler a fait un mauvais usage de ce symbole pour propager son régime de terreur, de racisme et de discrimination, qu’il faut en interdire l’usage pacifique », considère Ramesh Kallidai, à propos de l’initiative allemande d’interdire le svastika dans les pays européens. Courrier international no 847
  4. Le Symbolisme de la Croix, chap. X, Véga, 1931
  5. Gilles Van Grasdorff - Opération Shambhala / Des S.S. au Pays des Dalaï-lamas
  6. 东巴常用字典/Naxi Dongba Pictograph Dictionary de He Pingzheng et Xuan Qin aux éditions 云南美术出版社/Yunnan Fine Arts Publishing House Isbn 7-80695-168-7
  7. http://www.sacred-texts.com/hin/manu/manu10.htm
  8. Mein Kampf, tome 2, chapitre VII.

Voir aussi

Articles connexes

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