Utilisateur:Pierusama/Brouillons/Maurice Duplessis

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Maurice Duplessis
Fonctions
16e Premier ministre du Québec

(3 ans, 2 mois et 13 jours)
Élection 17 août 1936
Monarque Édouard VIII
George VI
Lieutenant-gouverneur Ésioff-Léon Patenaude
Gouvernement Duplessis (1)
Prédécesseur Adélard Godbout
Successeur Adélard Godbout

(15 ans et 8 jours)
Élection 8 août 1944
Réélection 28 juillet 1948
16 juillet 1952
20 juin 1956
Monarque George VI
Élisabeth II
Lieutenant-gouverneur Eugène Fiset
Gaspard Fauteux
Onésime Gagnon
Gouvernement Duplessis (2)
Prédécesseur Adélard Godbout
Successeur Paul Sauvé
Biographie
Nom de naissance Maurice Le Noblet Duplessis
Date de naissance
Lieu de naissance Trois-Rivières, Drapeau du Québec Québec
Date de décès (à 69 ans)
Lieu de décès Schefferville, Drapeau du Québec Québec
Nationalité Canadienne
Parti politique Parti conservateur
(1927 - 1936)
Union nationale
(1936-1959)
Père Nérée Le Noblet Duplessis
Mère Berthe Genest
Fratrie Jeanne, Étiennette, Gabrielle, Marguerite
Diplômé de Université Laval de Montréal
Profession Avocat, politicien
Religion Catholicisme
Résidence Château Frontenac, Québec

Signature de Maurice Duplessis

Pierusama/Brouillons/Maurice Duplessis
Premiers ministres du Québec

Maurice Le Noblet Duplessis, né le 20 avril 1890 à Trois-Rivières, et mort le 7 septembre 1959 à Schefferville, est un homme politique québécois, seizième Premier ministre du Québec. Figure centrale du Québec au XXe siècle, il fut le premier ministre au plus long règne de son histoire. Il fut emporté par la maladie vers la fin de son dernier mandat.

Forgeant sa réputation en démasquant la mauvaise conduite et le trafic d'influence du régime libéral de Louis-Alexandre Taschereau, Duplessis fonda l'Union nationale et mit en œuvre une politique d’autonomie provinciale visant à accroître les droits du Québec face au gouvernement fédéral tout en défendant son caractère unique et distinctif au sein de la Confédération canadienne. Parmi ces mesures d'affirmation nationale, on compte la création d'un régime fiscal propre au Québec (impôt provincial), la création d'un ministère de la Santé et d'un ministère des Transports et des Communications, la création de Radio-Québec et l'inauguration d'un nouveau drapeau du Québec.

Duplessis fut aussi un acteur majeur dans le développement économique du Québec d'après la Seconde Guerre mondiale. Partisan d'un État non-interventionniste et d'un capitalisme conservateur, il contribua au développement industriel par la création de nouvelles infrastructures ainsi que par l'exploitation des ressources naturelles et l'investissement étranger. Il favorisa le développement des régions rurales en instaurant des programmes de crédit agricole et d'électrification rurale. Il collabora aussi avec l'Église catholique pour gérer les questions de santé, d'éducation et de mœurs. Malgré l'ampleur de ses contributions et sa très forte popularité, l'historiographie a donné une image particulièrement négative de Maurice Duplessis[c 1][d 1][z 1]. Vers la fin de son règne, l'écart se creusa entre les attentes de la population envers l'État québécois et les politiques de l'Union nationale[d 2]. Ceci mena à un fort mouvement de contestation des élites et des traditions canadiennes-françaises qui prit de l'ampleur et qui aboutit à une importante série de réformes sociales après la mort de Duplessis.

Critiqué par les uns, admiré par les autres, il a laissé une très forte empreinte dans l'histoire et la mémoire collective des Québécois.

Origines familiales[modifier | modifier le code]

Maurice Le Noblet Duplessis vient au monde à Trois-Rivières, le 20 avril 1890. Il est le fils de Nérée Le Noblet Duplessis[z 2], avocat et député conservateur à l'Assemblée législative, et de Berthe Genest. Son père provient d’une famille de cultivateurs de Yamachiche, village du comté de Saint-Maurice, tandis que sa mère est la fille de Laurent-Ubald Genest, greffier de Trois-Rivières, et d’une dénommée Emma MacCallum de Montréal, aux ascendances écossaise et irlandaise.

Maurice Duplessis et ses sœurs Marguerite, Jeanne, Étiennette et Gabrielle.

À la fin du XIXe siècle, les Duplessis de Trois-Rivières sont des habitués des milieux politiques et religieux de la région. Plus particulièrement, on les retrouve dans les cercles des sympathisants conservateurs et ultramontains. Des assemblées politiques sont régulièrement tenues à leur domicile et on y débat des différentes affaires publiques du moment. Parmi les invités, on retrouve de nombreuses figures influentes de l'époque, telles que Louis-Olivier Taillon, Edmund James Flynn, Mathias Tellier, Louis-Philippe Pelletier et Thomas Chapais[a 1]. Le père Nérée Duplessis, un homme très croyant, est un collaborateur de longue date de l’évêque de Trois-Rivières, Mgr Laflèche, agissant notamment à titre de conseiller juridique pour l'évêché de Trois-Rivières. Les liens qui unissent les hommes sont très étroits, et lorsque Nérée Duplessis décide de se présenter comme candidat conservateur dans Saint-Maurice en 1886, Mgr Laflèche lui donne son appui avec enthousiasme. Il le désigne comme son « homme de confiance à l’Assemblée législative »[a 2]. C'est au cours d'un discours tenu devant une assemblée de partisans, pendant la campagne électorale de 1890 que Nérée Duplessis apprend la naissance de son fils, mis au monde par le docteur Éphrem Panneton, un ami de la famille. Il le nommera Maurice en l’honneur de sa circonscription électorale de Saint-Maurice[a 3]. L'enfant est baptisé quelques mois plus tard, par Mgr Laflèche.

Jeunesse et études[modifier | modifier le code]

Maurice Duplessis grandit dans le quartier Ste-Cécile à Trois-Rivières (quartier, d'ailleurs, dans lequel il fera plusieurs de ses discours électoraux, entre autres à l'aréna Laviolette, jadis situé sur la rue Ste-Cécile), dans un foyer modeste, sobre et pieux. Seul garçon de la famille, il était le second de cinq enfants. Son père était un chef de famille bienveillant, mais distant, « attitude qui, en ces temps et lieux, était considérée propre aux affaires de l'Église, de l'État, de la famille et des corporations »[b 1]. En 1898, il quitte sa ville natale pour aller étudier à Montréal, au collège Notre-Dame, alors tenu par les religieux de Sainte-Croix. Le jeune garçon fait la connaissance du frère André, qui en retour se prend d’affection pour lui[b 2]. C’est à son contact que Duplessis développe son culte de saint Joseph – une dévotion personnelle qu’il conservera d’ailleurs toute sa vie et qui influencera ses choix politiques. Excellent élève et vif d’esprit, il remporte régulièrement des prix et des distinctions en français, en histoire, en latin et en philosophie. Pourtant, malgré ses brillants résultats et son caractère studieux, il n’en était pas moins taquin et espiègle. En effet, il jouait volontiers des tours à ses camarades, pour la plupart des fils de cultivateurs, mais aussi à ses sœurs, cachant leurs vêtements, leurs oreillers, attachant des lits de manière à s'écrouler dès qu'on s'y couchait, lançant des seaux d'eau, des tartes, des petits pains et d'autres projectiles bien connus des écoliers[b 3].

Maurice Duplessis, étudiant en droit, 1911.

En 1902, il est transféré au Séminaire de Trois-Rivières pour suivre son cours classique. Son intérêt pour la politique se manifeste très tôt, apprenant par cœur des dates, des résultats et des faits de la politique québécoise et canadienne. Il se démarque dans les débats de classes et en rhétorique. Pendant son adolescence, jusqu'au début de la vingtaine, il se préparera à la vie publique en aidant à l'organisation politique, de circonscription et de clientèle électorale avec J.A. Barrette, député conservateur dans Berthier[b 4]. Il suit aussi son père dans ses campagnes électorales et dans ses assemblées un peu partout à travers la région. Duplessis manifeste alors un intérêt pour les aspects plus pratiques et moins théoriques de la politique. Toutefois, même si la vie publique était attrayante, l'influence du frère André se fit sentir chez Duplessis et il se sentit attiré vers l'Église. Toutefois, les rigueurs de la soutane lui paraissaient trop contraignantes, et il avouera de lui-même, en se confiant à sa secrétaire, quelques années plus tard : « le sacerdoce, c'est trop pour moi »[b 5].

Au début du XXe siècle, un engouement nationaliste traverse le Québec et la popularité de figures politiques telles qu'Henri Bourassa et Wilfrid Laurier se fait ressentir partout. Trois-Rivières et Duplessis n'y sont pas insensibles. C'est ainsi que, fortement influencé par sa famille et cette vague d'effervescence politique, Maurice Duplessis suit les traces de son père et s'engage vers le droit. À l’automne 1910, il s’inscrit donc à la faculté de droit de l’Université Laval à Montréal (l'actuelle Université de Montréal). Cette voie, à l'époque, était le tremplin traditionnel vers la politique, mais aussi vers les affaires. Pendant ses études, il se démarque par sa vivacité, son sens de la répartie, son franc-parler et son entregent[a 4][b 6]. Pour faire son stage requis par la loi, son père le présente à Rodolphe Monty et Alfred Duranleau, deux conservateurs, nationalistes et amis de la famille.

Duplessis est reçu avocat le 14 septembre 1913. Il retourne ensuite dans sa ville natale pour pratiquer le droit. Il s’associe alors à son père pendant peu de temps, jusqu'à ce que celui-ci soit nommé juge le 15 juin 1914. Il ouvre ensuite son propre bureau sur la rue Hart, derrière la demeure paternelle, avec Édouard Langlois, un ancien camarade du Séminaire et mari de sa sœur Gabrielle[a 5]. Plutôt occupé par les affaires de droit civil que de droit criminel, Duplessis développe sa clientèle parmi les petites gens. Rapidement, il se fait une réputation d'avocat compétent, préparant ses causes consciencieusement, attirant une large clientèle. Duplessis devient vite une figure populaire à Trois-Rivières. Il parcourt la ville à bord de sa voiture de luxe de marque Winton (achetée à crédit, au grand désarroi de son père)[b 7]. Sociable et dynamique, il s'implique aussi dans les activités sociales de son milieu (notamment en s'occupant d'une équipe de baseball locale) et fréquente les tavernes à la mode.

Débuts politiques (1923-1927)[modifier | modifier le code]

Malgré les pressions à se présenter sur la scène fédérale, Duplessis était persuadé que le pouvoir devait logiquement s'exercer là où les Canadiens de langue française se trouvaient en majorité.

Maurice Duplessis se présente une première fois comme candidat conservateur dans Saint-Maurice, à l'élection québécoise de 1923, tentant de déloger le libéral Louis-Philippe Mercier, récemment élu deux ans auparavant. Mercier mène une campagne féroce, jouissant d'une organisation libérale bien rodée, dirigée par son mentor, l'ancien maire de Trois-Rivières, Jacques Bureau. Les deux candidats se serrent d'assez près, mais Mercier est finalement élu par 1612 voix contre 1328 pour Duplessis. Ironiquement, le 25 avril suivant, Étiennette Duplessis épouse Édouard Bureau, fils de Jacques.

Entre-temps, Duplessis continue de plaider. Il prend à son service la femme qui le suivra toute sa vie, sa secrétaire, Auréa Cloutier (26 août 1893-1982[1]). Auréa Cloutier avait connu Duplessis vers l'âge de quinze ans. Elle avait été auparavant à l'emploi de son père et de son oncle maternel, le député libéral Richard S. Cooke[2]. Elle a alors vingt-sept ans. Elle lui demande s’il ne la trouve pas trop vieille. Il lui répond simplement : « Vous savez bien que si je voulais en trouver une plus jeune, ce ne serait pas difficile ». Du côté familial, l'état de santé du père Duplessis se délite. Souffrant de diabète et de problèmes de santé chroniques, il ne verra jamais son fils accéder au poste de député. Il meurt à son domicile, le 26 mars 1926, entouré de ses enfants et de ses proches.

Puis, lors de l'élection de 1927, Duplessis est prêt à se battre à nouveau. Cette fois, il a tout préparé et ne laisse rien au hasard. Son organisateur est Robert René, un marchand de chaussures « auquel on reconnaît du jugement et même de la psychologie »[a 6]. Aidé par sa mémoire exceptionnelle des noms et des visages, il visite toutes les familles. Après une campagne serrée lui permettant de recueillir des appuis dans de nombreuses familles ouvrières et bourgeoises, il est finalement élu à 2 622 voix contre 2 496 pour son adversaire libéral Mercier. Sa majorité est faible – 126 voix – mais il s'agit de la première fois en 27 ans qu'un candidat conservateur réussit à remporter la victoire dans cette circonscription, considérée jusqu'alors une « forteresse libérale »[a 7].

Duplessis député des Trois-Rivières (1927-1933)[modifier | modifier le code]

Maurice Duplessis en 1927.

En 1927, Duplessis est l'un de dix conservateurs à gagner l'Assemblée législative. Pour l'ouverture de la session parlementaire, son chef Arthur Sauvé lui confie la tâche de répliquer au nom de l’Opposition au discours d’ouverture. Duplessis accepte. Le 19 janvier 1928, il prononce son discours, passant toutes les questions d'actualité en revue, critiquant avec fermeté les politiques gouvernementales tout en exposant le programme de l'Opposition. L'éloquence de Duplessis est percutante et provoque une vive réaction chez les libéraux. La presse fait écho à ce discours, comme le rapporte Le Nouvelliste : « Quand M. Duplessis termina son discours, à six heures, l'opinion unanime, semble-t-il, était que l'Assemblée législative comptait un autre orateur de premier ordre »[a 8]. Le premier ministre Taschereau se leva et, selon la coutume, serra la main au nouveau venu, tout en déclarant à son entourage : « Surveillez ce jeune homme, il ira loin »[a 9].

Dès l'année suivante, à Montréal, la course à la mairie fut remportée par Camillien Houde, défaisant Médéric Martin, maire depuis quatorze ans. Cette victoire provoqua un retentissement chez les conservateurs. L'influence du nouveau maire était grande, poussant Sauvé vers la porte de sortie. Un congrès fut alors annoncé pour les 9 et 10 juillet 1929 en vue de nommer son successeur. On sollicita Duplessis pour briguer la direction, mais, malgré l'insistance de ses partisans, il refusa catégoriquement de se lancer dans la course[b 8]. Houde remporta la victoire facilement. Personnage imposant et charismatique, ses discours colorés et ses expressions imagées lui donnèrent une réputation d'orateur redoutable. Toutefois, si sa popularité en tant que maire de Montréal était indéniable, ses talents d'organisateur politique s'avéraient moins impressionnants. C'est ce qui se révélait du résultat des quatre élections partielles en 1929, où les conservateurs ne remportèrent aucun siège.

Les élections fédérales de 1930 allaient refléter un changement dans les liens entre conservateurs fédéraux et provinciaux. Avec la défaite du gouvernement libéral de Mackenzie King (largement due au scandale de la Beauharnois), 134 députés conservateurs furent élus, dont 24 au Québec; une première en 39 ans. Parmi ces élus, on trouva l'ancien chef conservateur Arthur Sauvé, ainsi qu'Alfred Duranleau, J.A. Barrette, Onésime Gagnon, camarade d'études de Duplessis, et Armand Lavergne, revenant après une longue absence.

En mars 1930, Duplessis se fait opérer pour une hernie étranglée. Une hémorragie aggrave son état et plusieurs craindront le pire. Toutefois, à la fin mars, Duplessis est déclaré hors de danger et il quitte le Québec pour passer une période de convalescence en Floride. À son retour, à Trois-Rivières, ses électeurs lui organisent un banquet pour souligner son rétablissement. (Rumilly, t. 1 p. 82)

Élection de 1931[modifier | modifier le code]

L'élection de 1931 est marquée par le début de la crise économique des années 1930. Le premier ministre Taschereau mena sa campagne avec énergie, d'un bout à l'autre du Québec, dénonçant le houdisme comme étant « une menace à la modération traditionnelle du Québec » qui ferait régner le désordre et la turbulence « si le Québec avait le malheur de choisir Camillien Houde »[b 9]. Malgré les attaques, le chef conservateur poursuivit sa campagne en mettant l'accent sur le crédit agricole, les droits des travailleurs et la nationalisation de l'électricité.

L'élection fut aussi marquée par une quantité d'irrégularités électorales sans précédent, et ce, à la grandeur de la province[b 10][z 3]. Par exemple, dans la circonscription de Sherbrooke, des observateurs rapportèrent avoir vu des travailleurs d'élection garnir les urnes de bulletins de vote sans talon (afin de mieux les remplir) et que des milliers de travailleurs de la voirie qui avaient été engagés par les libéraux (le jour même de la dissolution de la Chambre) votèrent sans égard aux exigences de résidence[b 11].

À Montréal, Houde fut défait dans les deux circonscriptions où il se présentait. À Trois-Rivières, Duplessis fut réélu de justesse à 3 812 voix contre 3 771 pour son adversaire libéral Philippe Bigué – une majorité de seulement 41 voix[a 10]. Alors que la majorité des observateurs du moment prédirent une victoire des conservateurs[b 12], au final, à la surprise générale, les libéraux remportèrent l'élection avec 79 députés contre 11 pour les conservateurs.

En 1932, Albert Tessier, ami de Duplessis, mène un mouvement de régionalisme trifluvien, inspiré du régionalisme mistralien, "aux confins du nationalisme" (Rumilly t. 1, p. 119).

Taschereau propose d'exporter l'électricité. Duplessis, malin, invoque un argument employé par le premier ministre en 1926, vantant l'embargo sur l'électricité comme étant un moteur du développement économique du Québec. (Rumilly t. 1, p. 121).

L'ampleur de la corruption lors de ce scrutin atteint un tel niveau que le ministre Dillon fut chargé par son parti pour déposer un projet de loi mettant fin à l'enquête des tribunaux examinant la contestation des élections. Cette loi, nommée la loi Dillon, souleva la colère des conservateurs et de leur chef, qui déclara dans la presse : « On m'a volé mes élections »[b 13]. Profondément déçu et marqué par la défaite des élections et l'humiliation de la loi Dillon, Camillien Houde quitte la direction du parti le 20 septembre 1932. Le 7 novembre suivant, Maurice Duplessis devient chef par intérim.

Une convention pour désigner le successeur de Houde est annoncée pour l'automne 1933. Celle-ci se déroulera à Sherbrooke. Voir Rumilly t. 1 p. 125 pour voir la stratégie organisée par Jean Mercier, Noël Dorion, Louis Francoeur et Pierre "Pit" Bertrand.

Au cours de ce congrès, Camillien Houde écrira une lettre publique condamnant l'action de Duplessis ayant «mené à la loi Dillon». Laurent Barré, partisan de Houde, reprochera à Duplessis sa mollesse en matière de réformes sociales. D'autres comme Charles Ernest Gault et J.-L. Baribeau (député fédéral) veulent plutôt d'un chef qui fera bloc avec les conservateurs d'Ottawa. Frédéric Dorion, Marie-Louis Beaulieu et Bona Arsenault feront campagne pour Onésime Gagnon. C.A. Smart (qui a emprunté de l'argent à Duplessis et qui lui est reconnaissant) appuie le chef de l'opposition intérimaire.

Les partisans d'Onésime Gagnon sont clairs : il leur faut un chef qui marchera avec le premier ministre Bennett à Ottawa. Il n'est donc pas question d'avoir un nationaliste, agitateur dangereux, comme chef de parti. (Rumilly t. 1 p. 129-132)

Dans cette course à la chefferie, deux candidats s'affrontent : Maurice Duplessis et Onésime Gagnon, député fédéral de Dorchester et membre du cabinet Bennett. Duplessis se présente comme un réformateur et un candidat des jeunes. Populaire, bon orateur et comptant sur l'appui de la majorité des députés conservateurs, il est sans contredit le candidat favori. Gagnon représente l'aile plus traditionnelle du parti et bénéficie du soutien des anciens partisans de Houde. La convention, d'une durée de deux jours, le 3 et 4 octobre, est ponctuée de quelques accrochages entre les deux clans. Toutefois, Duplessis remporte aisément la victoire, recueillant 332 voix contre les 214 de Gagnon[b 14]. Après la victoire de Duplessis, Gagnon se rallie à lui en l'appelant « mon chef ». Sous une vibrante ovation, Gagnon déclare : « Je remets mes soldats à M. Maurice Duplessis. Je sais qu'ils seront entre bonnes mains ». De son côté, le nouveau chef élu déclare : « La convention est terminée, mais c'est la lutte qui commence pour délivrer la province, non pas des libéraux, mais d'un régime qui n'a rien de libéral, d'un régime malsain et néfaste qui a coûté à la province des sacrifices inouïs ».

Cette image d'harmonie au sein des conservateurs est légèrement ternie par l'ancien chef Camillien Houde, qui confie aux journalistes : « L'élection de Duplessis comme chef veut dire tout simplement la mort du Parti conservateur du Québec »[z 4]. Les relations entre Duplessis et Houde resteront ainsi pendant les années à suivre.

Chef de l'Opposition officielle (1933-1936)[modifier | modifier le code]

À la suite de la convention de Sherbrooke, les députés Aimé Guertin (Hull) et Laurent Barré (Rouville) prennent leur distance avec Duplessis. Ceux-ci sont d'anciens partisans de Camillien Houde, déçus du déroulement de la convention. À eux se joignent Charles-Ernest Gault, député de Montréal–Saint-Georges. Duplessis tente de réparer les ponts en les invitant à son bureau de Montréal, en vue du début de la session, en décembre 1933. Ils refusent «parce qu'on ne les a pas invités dans les petits "caucus" tenus depuis la convention» (R. Rumilly, t. 1, p. 141). Duplessis insiste, mais ceux-ci continuent de refuser ses invitations. Duplessis décide alors de les mettre hors du parti. Martin Fisher approuve. Entretemps, Duplessis coupe ses liens (officiels) avec la Shawinigan Water & Power et ferme son cabinet d'avocat à Trois-Rivières. Il gagne sa dernière cause devant le juge Aimé Marchand, le 4 janvier 1934(Rumilly t. 1 p. 142).

Maurice Duplessis, jeune député.

Tandis que Duplessis prend les commandes de son parti, le Québec connaît ses pires épisodes de la crise économique des années 1930. En 1933, plus de 75 municipalités incapables de surmonter leurs problèmes financiers doivent être mises en tutelle. Devant des perspectives d'avenir très sombres, la jeunesse, ainsi que la classe agricole, étudiante et ouvrière sortent pour manifester. On dénonce principalement le manque d'emplois, le trafic d'influence ((appelé patronage dans la langue de l'époque), les abus des trusts de l'amiante, du textile et de l'électricité, la surcapitalisation des grandes entreprises, le piétinement de la colonisation et l'inefficacité du gouvernement à trouver une sortie de crise[a 11]. Pour y remédier, l'un des premiers projets présentés par Duplessis en tant que nouveau chef est en fait un vaste programme d'aide à la classe agricole, dont les deux parties les plus importantes sont le crédit agricole et l'électrification rurale[a 12][N 1]. Toutefois, le régime Taschereau renouvelle son opposition au crédit agricole (préférant s'en remettre aux caisses populaires) et le projet de loi est défait. Duplessis réclame aussi une réforme du processus d'octroi des contrats de travaux publics. En déposant la liste des travaux publics accordés sans soumission, Duplessis a déniché un amendement des libéraux, datant de 1895, époque où ils étaient encore dans l'opposition, et taxant les contrats sans soumission « d'encouragement à la malhonnêteté »[a 13].

Pendant ce temps, pour combattre le chômage, le ministre de la Colonisation Irénée Vautrin met de l'avant un plan de 10 000 000 $ visant à établir 10 000 colons en deux ans et 10 000 jeunes cultivateurs sur des terres, en plus de leur fournir des subventions, des écoles, des chapelles, des presbytères, des grains de semence à distribuer, des agronomes et des arpenteurs. Toutefois, ce plan de colonisation est critiqué par l'opposition pour son inefficacité. En effet, la colonisation avait été bloquée suite à des réserves forestières créées par le gouvernement au profit de compagnies industrielles, forçant les colons à s'établir sur des terres impropres à la culture, et parfois à vivre dans des conditions déplorables, sans même percevoir la prime due. En parallèle, le gouvernement écarte l'étatisation de l'électricité une fois de plus, préférant créer une commission permanente, chargée de réglementer les tarifs, la production et la distribution de l'électricité, ce qui attire les critiques de Philippe Hamel et Oscar Drouin, qui voient dans la nationalisation de l'électricité la clé de la libération des Canadiens-français[a 14].


En 1934, des rumeurs commencent à circuler concernant l'apparition d'un nouveau parti à l'Assemblée législative. En effet, l'intellectuel Paul Gouin, fils de l'ancien premier ministre, cherche à appliquer le programme de l'École sociale populaire des Pères Jésuites qu'il a aidé à élaborer. Entouré d'un groupe de réformistes et de nationalistes hostiles aux politiques conservatrices du Parti libéral, Gouin prépare la fondation d'un nouveau parti : l'Action libérale nationale. Les réactions fusent de toutes parts. Le premier ministre Taschereau, dans La Presse, exprime sa vieille conviction que deux partis suffisent, l'un pour gouverner, l'autre pour surveiller : « Les tiers partis ne vont jamais loin »[a 15]. Duplessis émet aussi ses réserves, croyant aussi qu’« un bon et un mauvais » partis suffisent[a 16]. Pour tenter de rallier ses troupes et contenir l'influence d'un tiers parti, Duplessis entame une série d'assemblées à travers le Québec. Rapidement, ces assemblées prennent une saveur électorale. Faisant le tour des régions agricoles avec les députés Antonio Élie, Hortensius Béique et Pierre « Pit » Bertrand, Duplessis vante son programme agricole adopté lors de la convention de Sherbrooke l'année précédente. On dénote aussi que lors de ces assemblées, Duplessis se présente en portant un vieux chapeau, délavé et cabossé. Ce geste voulu par Duplessis cherche à lui donner un air plus humble, plus près de la foule[a 17]. Duplessis visite les écoles et les universités, puis se rend jusqu'à New Carlisle en Gaspésie avec son candidat Bona Arsenault, en passant par Montmagny et Rimouski.

Ces assemblées ont parfois pris des tournures amusantes. « Pit » Bertrand, de formation bien modeste, manque d'instruction. Orateur au style un peu maladroit, il appelle par erreur le recteur de l'Université Laval le « rectum » de l'université[a 18]. Ce défaut de style amuse Duplessis, mais heureusement ne nuit pas à sa popularité[a 19].

Toutefois, l'Action libérale nationale remporte un succès rapide. Se joignent d'anciens conservateurs déçus de la convention de 1933, des membres de la Jeunesse libérale, des fonctionnaires fédéraux, des étudiants, des intellectuels, des prêtres, des nationalistes et, surtout, des organisateurs ou sympathisants libéraux mécontents.

Fondation de l'Union nationale[modifier | modifier le code]

Tandis que des candidats de l'Action libérale nationale et du Parti conservateur sont choisis dans les différentes circonscriptions, les chances d'obtenir la victoire dans une lutte à trois semblent minces pour les partis d'opposition[a 20]. Si la poussée en faveur d'une entente, dans les deux camps, vient de la base, les heurts viennent plutôt du haut. Les souscripteurs de la caisse électorale de l'Action libérale nationale pressent Gouin de se rapprocher des conservateurs, ne voulant pas payer deux fois, et des pressions analogues s’exercent sur Duplessis, pour s'unir et renverser le régime libéral. Après des négociations laborieuses, deux semaines avant le scrutin, une entente est enfin conclue. On annonce le 7 novembre 1935 la formation de l'alliance Gouin-Duplessis : l'Union nationale.

Le même jour, Duplessis et Gouin se rencontrent à l'hôtel Ritz de Montréal. Leur entrevue est décrite comme étant très cordiale[a 21] et malgré leurs divergences, les deux hommes se respectent grandement. Ils signent alors deux accords ; l'un public, et l'autre, secret. Chaque circonscription comptera un candidat, soit de l'Action libérale nationale, soit de l'opposition conservatrice. Après la victoire, Maurice Duplessis deviendra premier ministre, mais avec des collègues en majorité désignés par Paul Gouin et pris dans les rangs de l'Action libérale nationale. Pour l'accord secret, le texte est identique à l'accord public, à l'exception qu'il contient un passage précisant les proportions des candidats des deux partis :

« Il est évident que les meilleurs intérêts de la Province exigent l'écrasement du régime Taschereau et que pour atteindre ces fins patriotiques la collaboration de tous les hommes désintéressés ayant à coeur le bien de notre chère province est essentielle. Afin de ménager toutes les susceptibilités et pour éviter tout froissement dont pourrait profiter ce régime néfaste, il est entendu que lors de la prochaine élection provinciale il y aura de 25 à 30 conservateurs et pour la balance [une soixantaine] des candidats de l'Action libérale nationale offrant toutes garanties de sincérité et de succès, et tous combattant sous le même drapeau et supportant l'alliance Gouin-Duplessis.[a 22][z 5] »

Les libéraux réagissent fortement à la création de cette alliance. La presse officieuse annonce « l'accolade des traîtres dans la nuit » et dénonce « l'abjection servile » de Duplessis qui « abdique lâchement » devant Paul Gouin, qui, lui-même, est accusé de commettre « l'ignoble félonie » de livrer une tranche du Parti libéral au chef de l'opposition.[a 23]. À la veille des élections, un revers ébranle l'alliance : le Parti conservateur fédéral n'accorde pas les fonds espérés pour la campagne. Édouard Masson, organisateur en chef, propose que chaque candidat paie de sa poche, selon ses moyens[a 24].

Élection de 1935[modifier | modifier le code]

Maurice Duplessis et Paul Gouin en 1935.

Duplessis ouvre sa campagne à Trois-Rivières en compagnie d'Ernest Ouellet, un ancien ministre du cabinet Taschereau, ce qui soulève beaucoup d'enthousiasme. Il doit surveiller sa propre circonscription, où il a remporté une majorité d'à peine 41 voix lors du dernier scrutin. Il affronte l'avocat Léon Lajoie, presque un parent puisqu'il est le fils d'une Bureau et cousin par alliance d'Étiennette, sœur de Maurice.

Le partage des circonscriptions entre les deux partis se fait sans accrochage. Paul Gouin se présente dans L'Assomption; Fred Monk dans Jacques-Cartier ; François Leduc dans Laval ; John Bourque dans Sherbrooke ; Oscar Drouin dans Québec-Est ; Philippe Hamel dans Québec-Centre ; Bona Dussault dans Portneuf[a 25].

Du côté des libéraux, on présente de nouveau les députés sortants dans un grand nombre de comtés. Taschereau compte sur l'appui des libéraux fédéraux victorieux, particulièrement celui d'Ernest Lapointe, ministre de la Justice. Toutefois, l'excitation de l'Action libérale nationale provoque quelques dissidences. Dans Laval, Médéric Martin, prédécesseur de Camillien Houde à la mairie de Montréal, appuie un candidat indépendant contre Joseph Filion, député libéral sortant. Dans Gaspé-Sud, deux libéraux, Wilfrid Malloy et le Dr Camille Pouliot sont écartés suite à une convention truquée où Alexandre Chouinard, député sortant, conserve la nomination[a 26]. Toutefois, Camille Pouliot compte sur l'appui de son cousin, Jean-François Pouliot.

À Montréal, la tension monte. Alors qu'une foule massive et se déplace pour voir les candidats de l'Union nationale conspuer les ministres du Travail et de la Colonisation, les cris et les chants troublent le discours d'Irénée Vautrin. On ferme les fenêtres, mais celles-ci sont aussitôt brisées à coup de pierres[a 27]. Des manifestations troublent aussi les discours d'Alexandre Taschereau et d'Athanase David. Lors d'une assemblée au marché Saint-Jacques, l'agitation se répand dans les salles d'audience. La police provinciale expulse les manifestants, sous les éclairs des photographes. À l'extérieur, des étudiants huent les ministres. L'assemblée est ratée. Les ministres gagnent leur voiture et quittent les lieux, tandis que la police à cheval balaie les trottoirs, exaspérant la foule. On compte dix-huit arrestations et de nombreux commerces et véhicules vandalisés[a 28].

À l'approche du scrutin, le nombre d'irrégularités augmente considérablement[b 15]. Dans plusieurs circonscriptions, on distribue de l'alcool et de l'argent. La police provinciale est aussi déployée sur tout le territoire pour gérer la surveillance des bureaux de vote[a 29]. Le ministère de la Colonisation envoie même une masse de chèques en retard - des primes impayées depuis plusieurs mois. En Gaspésie, la distribution des chèques aux chômeurs, comme les octrois pour la construction des bateaux de pêche, sert à la corruption électorale[a 30].

Le soir de l'élection, Duplessis est réélu avec une majorité augmentée à 1 202 voix. Paul Gouin remporte L'Assomption, défaisant le vétéran Walter Reed. Henry Auger bat le ministre Vautrin dans Montréal—Saint-Jacques. Leduc et Monk remportent respectivement Laval et Jacques-Cartier. John Bourque prend Sherbrooke à Jacob Nicol, malgré l'influence de son journal La Tribune. En Gaspésie, l'organisation libérale triomphe grâce à l'action de John Hall Kelly et de l'organisateur libéral influent Jules Brillant.

Au final, les libéraux remportent la victoire avec 48 sièges, mais se retrouvent face à une opposition forte de 42 élus unionistes (16 conservateurs et 26 actionnistes). Ces résultats ont l'effet d'un coup de tonnerre. Pour la première fois en près de quarante ans, le régime libéral est ébranlé.

Comité des comptes publics[modifier | modifier le code]

Pendant la première moitié de 1936, Duplessis prépare minutieusement une attaque qui portera le coup de grâce au gouvernement libéral de Taschereau.

Le Comité des comptes publics, examinant les dépenses des différents ministères, n'avait pas siégé depuis dix ans. En fouillant les comptes de tous les départements du gouvernement (décrits par Martin Fisher comme « un fouillis où les plus experts n'arrivent pas à se dépêtrer »[a 31]), Duplessis en apprend alors très long sur toutes les structures du régime libéral. Ce travail, mené entièrement seul, lui permet d'explorer jusque dans les moindres détails les sources de revenus et les pratiques de favoritisme du gouvernement. Il démontre alors sa mémoire exceptionnelle en apprenant par cœur la législation, les précédents et les règlements de tous les ministères et en assemblant une volumineuse documentation (renfermant beaucoup de matière à controverse) qui constituera son tremplin pour attaquer le gouvernement. Armé de ces documents, Duplessis convoque le Comité des comptes publics. La première séance est alors tenue le 7 mai 1936[z 6].

Irénée Vautrin.

Le premier témoin à comparaître est le sous-ministre de la Colonisation, Louis-Arthur Richard[3]. Au cours de son interrogatoire, Duplessis fait admettre au sous-ministre que d'anciens candidats libéraux ont figuré sur des listes de paie pour des projets de voirie ou de travaux publics sans fournir aucun travail. Bientôt, les séances portent presque entièrement sur les dépenses de l'ancien ministre de la Colonisation, Irénée Vautrin. À la troisième séance, le 12 mai, il est révélé que l'ancien ministre avait fait décorer son bureau à prix coûteux, en plus de s'être payé de l'équipement de golf à même les fonds de son ministère, et qu'il « utilisait l'automobile du ministère pour se rendre au golf, à des assemblées politiques, ou pour entreprendre, avec sa famille, des voyages d'agrément »[a 32]. Vautrin, qui se défend avec vigueur, est toutefois éclaboussé par l'ampleur de ses largesses : l'interrogatoire révèle qu'il faisait payer ses frais de séjour à Québec (dans le cadre de ses fonctions) par l'administration, ainsi que les dépenses d'hôtel, de repas et d'alcool des colons, des agents de colonisation et des prêtres qui venaient lui rendre visite lors de ses voyages d'inspection. Étonnamment, la dépense la plus marquante sera celle d'une paire de culottes (breeches) portée par Vautrin lors de ses voyages d'inspection[a 33]. Perçues comme le symbole de toute la corruption du régime Taschereau, les « culottes à Vautrin » deviennent aussitôt un sujet de blague très populaire[z 7].

Charles Lanctôt.

Parmi les principaux témoins cités par Duplessis, on compte aussi l'Assistant procureur général Charles Lanctôt. Cet homme, tiré à quatre épingles, est un proche conseiller du premier ministre et il est perçu par plusieurs comme l'éminence grise du régime libéral[a 34][b 16]. Dans les faits, Lanctôt est aussi le véritable responsable du département du procureur général. Toutefois, ce que Duplessis cherche à faire avouer à Lanctôt est qu'il est aussi l'avocat de compagnies exploitant les richesses naturelles du Québec (pâtes et papiers, électricité, etc.) et traitant avec l'État provincial, notamment : la Shawinigan Water and Power, la Beauharnois Light, Heat and Power, la Canadian International Paper, la St. Regis Paper et la Price Brothers Ltd. Peu habitué à se faire brusquer ainsi, Lanctôt eut de nombreuses prises de bec avec Duplessis, à commencer lorsque celui-ci l'appela un serviteur[a 35]. Les libéraux vinrent à la défense du témoin, déléguant Peter Bercovitch à la tâche. Ses objections, maintenues par le président du comité, furent émises à toutes les questions de Duplessis, prétextant que la juridiction du comité ne touchait que les dépenses du gouvernement et non les affaires personnelles de M. Lanctôt. Duplessis dressa ensuite une liste des causes plaidées par Lanctôt au nom de la province, en insistant sur les causes perdues (malgré le grand nombre de causes gagnées), particulièrement celles de l'aviation et du Labrador. Le 30 mai, un autre témoin affirma que Lanctôt avait reçu près de 140 000 $ du gouvernement pour des frais de voyage depuis 1928[z 8]. Pendant ce temps, le mécontentement de la population continue à grandir. En plus des manifestations devant l'Assemblée législative, les ministres, leurs parents et leurs partisans se font quotidiennement insulter par le public venant assister aux séances du comité[a 36]. On note aussi que des bagarres éclatent régulièrement dans les rangs des spectateurs et les policiers sont obligés d'intervenir fréquemment pour calmer la foule[a 37].

Finalement, Duplessis cite le comptable de l'Assemblée législative Antoine Taschereau, frère du premier ministre. Au cours de son interrogatoire, on découvre qu'Antoine Taschereau déposait les fonds de l'Assemblée législative à trois banques différentes, notamment à la Banque canadienne nationale de Donnacona où le gérant n’était nul autre que Jean-Thomas Taschereau, son propre fils. En déposant l'argent cette succursale, Taschereau espérait ainsi donner de meilleures chances d'avancement à son garçon. Contrairement à la normale, où les intérêts se composaient tous les six mois, ceux-ci se composaient tous les mois, et lorsque des inspecteurs émettaient des observations à Jean-Thomas Taschereau, celui-ci se déclarait d'accord avec Henri Desrivières, le surintendant de la banque – et neveu du premier ministre. Toutefois, après avoir juré quelques jours auparavant que personne n'avait touché d'intérêts sur les fonds de l'Assemblée législative déposés à la banque, plusieurs séances, Antoine Taschereau finit par avouer qu'il touchait personnellement les intérêts sur ces fonds, grâce à un arrangement spécial fait auprès des banques. Pour se justifier, il offrit deux explications : la chose se pratiquait avant lui, et les banques lui avaient suggéré cette méthode parce qu'ainsi « elles ne payaient pas d'intérêt au gouvernement »[a 38]. Duplessis apprend aussi que tous les comptes bancaires de Taschereau portaient la mention « frère de l'hon. L.-A. Taschereau ».

La crise connaît alors son dénouement. Le 11 juin, accompagné d'Honoré Mercier fils, Louis-Alexandre Taschereau se rend chez le lieutenant-gouverneur pour remettre sa démission. Adélard Godbout lui succède comme premier ministre et forme un nouveau cabinet avec les ministres n'ayant pas été éclaboussés par les scandales. Il reste en poste durant environ un mois avant de dissoudre les Chambres. Les élections sont alors fixées au 15 août (mais seront finalement reculées au 17 août).

Rupture de l'alliance Gouin-Duplessis[modifier | modifier le code]

Les milieux politiques attendent le divorce politique entre Duplessis et Gouin d'un jour à l'autre. Le 18 juin, Gouin propose de renouveler l'accord du 7 novembre 1935. Toutefois, Duplessis, fort de sa popularité, de son ascendant au sein du parti et de sa présence lors du Comité des comptes publics, se montre conscient de son mérite et exige un renversement des proportions de l'accord secret : les deux tiers des candidatures seront à son choix et le tiers sera à celui de Gouin[a 39]. Cette demande, s'ajoutant aux conceptions différentes de la politique de Gouin et de Duplessis, entraîne la rupture de leur alliance[a 40]. Cette rupture est rendue officielle le lendemain par Gouin, lors d'une conférence de presse. Entre-temps, une réunion s'organise à Sherbrooke où se présentent 33 députés, dont 19 conservateurs et 14 actionnistes. John Bourque passe officiellement dans le camp de Duplessis, ainsi qu'Oscar Drouin, Ernest Grégoire (maire de Québec et député de Montmagny) et Philippe Hamel. Drouin est alors désigné organisateur en chef de l'Union nationale pour l'élection, tandis qu'Hamel défend son chef chaleureusement sur toutes les tribunes, brandissant un papier portant la signature de son chef, s'engageant à combattre tous les trusts dans la province[a 41]. Le Parti conservateur et l'Action libérale nationale disparaissent pour former un seul parti : l'Union nationale.

À l'approche de la date de mise en candidature, Paul Gouin décide de se retirer de la vie politique, tout en reprochant à Duplessis d'avoir accaparé l'organisation commune, au bénéfice du Parti conservateur plus ou moins déguisé[a 42][z 9]. Toutefois, malgré la scission, un puissant courant d'opinion se range derrière Duplessis, mobilisant les cultivateurs, la jeunesse (notamment les disciples de l'abbé Lionel Groulx), de même que les milieux nationalistes et intellectuels. En difficulté, les libéraux mettent tous leurs espoirs sur l'appui des députés fédéraux[a 43].

Élection de 1936[modifier | modifier le code]

L'élection de 1936 survient à peine huit mois après la précédente. Le Parti libéral, maintenant mené par Adélard Godbout, fait alors face à une contestation sans précédent. Les plus anciens ministres quittent la scène politique. Comptant sur la scission entre Gouin et Duplessis, Godbout présente une série de candidats – des « hommes nouveaux » – sans passé politique, ainsi que quelques mesures de réformes, pour tenter de se distancer du nom de Taschereau.

Cette élection décisive oppose deux partis avec des ressources très inégales[z 10]. Le Parti libéral dispose d'une machine électorale très efficace et qui a fait ses preuves. Les libéraux comptent aussi sur l'appui des députés libéraux fédéraux, une partie de la radio et des grands quotidiens, une aile jeunesse et surtout d'une caisse électorale bien pourvue. Sans compter d'autres contributions importantes, chaque comté dispose alors d'un budget de 25 000 $ à 50 000 $. De son côté, l'Union nationale dispose de moyens bien plus modestes – une équipe plus petite et un système de financement populaire lui offrent un mince 3 000 $ par comté. Toutefois, le mécontentement de la population face au régime libéral favorise l'Union nationale, menant une campagne agressive attaquant les en présentant Duplessis comme le « libérateur de sa province »[z 11]. Les principales réformes promises par Duplessis sont l'instauration d'un crédit agricole, l'électrification rurale, la fin des trusts, l'obligation des partis politiques à publier une liste de leurs souscripteurs, l'assainissement des finances de l'État (en mettant fin au favoritisme et au trafic d'influence), la création d'une Hydro provinciale et la réorganisation de l'administration publique[a 44][b 17][z 12].

Boudée par la presse (qui se rallie largement derrière le Parti libéral), l'Union nationale se démarque par son usage de la radio[z 13] et surtout par la publication d'un manifeste qui passera à l'histoire : le Catéchisme de l'électeur. S'inspirant du Petit catéchisme de l'Église catholique, ouvrage connu de tous les électeurs francophones de l'époque, ce manifeste d'une trentaine de pages attaque le gouvernement libéral et présente le programme de l'Union nationale sous forme de questions et de réponses[z 14] :

20. Le gouvernement Taschereau qui dirige la province est-il libre?
- Non, le gouvernement de la province n'est pas libre.
21. Pourquoi le gouvernement de la province n'est-il pas libre?
- Parce qu'il est sous la domination des puissances d'argent[z 15].

Malgré la campagne d'Adélard Godbout et l'intervention des libéraux fédéraux, la majorité des observateurs prédisent une victoire éclatante de l'Union nationale[a 45][b 18][z 16]. Leurs prédictions s’avéreront exactes. Le 17 août 1936, après une longue lutte parsemée d'embûches, d'alliances et de trahisons, l'Union nationale remporte la victoire avec 76 élus contre 14 pour les libéraux, mettant ainsi fin à un règne libéral de 39 années consécutives[b 19]. Quelques ministres sortants parviennent à conserver leur siège, avec de très minces majorités, notamment Cléophas Bastien, réélu par une seule voix[b 20].

Premier ministre du Québec — premier mandat (1936-1939)[modifier | modifier le code]

Maurice Duplessis, 1936.

Formation du cabinet[modifier | modifier le code]

Au lendemain de l'élection, Duplessis est confronté au problème de la nomination des ministres de son cabinet. Philippe Hamel, l'un des candidats-vedettes de l'élection de 1936, s'est engagé en politique expressément pour la nationalisation de l'électricité au Québec. Il exige donc de Duplessis un ministère lui permettant de commencer la nationalisation immédiate de la centrale de Beauharnois. Bien que le premier ministre reconnaisse qu'il mérite une place au conseil des ministres, celui-ci cherche plutôt à lui offrir la présidence de la Chambre ou encore la présidence du futur Conseil économique[a 46]. Surpris, Hamel rétorque qu'il n'a « pas été élu pour [se] pavaner en Chambre avec une robe et un bonnet, mais pour [se] battre jusqu'au bout pour me battre contre les ennemis du peuple ». Duplessis reste sur ses positions, croyant que la nationalisation de l'électricité « aurait entraîné des complications inter-provinciales, fédérales et même internationales, qu'il faudrait procéder à un inventaire des finances, et qu'une telle décision devait être prise par tous les membres du cabinet et non par eux seuls »[b 21]. Pour l'homme qui attendait ce moment depuis 1931, la déception est profonde. Duplessis offre ensuite des postes à ses deux disciples Ernest Grégoire et Ernest Ouellet. À Grégoire, il offre le portefeuille des Affaires municipales, du Commerce et de l'Industrie, mais lui demande en échange de renoncer à son poste de maire de Québec. Malgré les offres de Duplessis, Grégoire et Ouellet refusent d'entrer au conseil des ministres sans Hamel. Tentant un compromis, Duplessis offre un ministère sans portefeuille au député de Québec-Centre, mais celui-ci insiste : « il veut le portefeuille qui lui permettrait de nationaliser – immédiatement – l'électricité »[a 47]. Le cabinet est finalement assermenté le 26 août 1936, en l'absence de Hamel, Ouellet et Grégoire. Ces trois hommes décident alors de se séparer du gouvernement.

Toutefois, l'exclusion des trois députés de Québec provoque immédiatement une vive réaction au sein du parti. Rejoint par d'autres députés, dont René Chaloult, sympathiques à leur cause, le groupe de dissidents se réunit au Palais Montcalm de la Place d'Youville à Québec pour prononcer des discours devant une foule de partisans, dénonçant Duplessis. Ils condamnent notamment la présence anglophone au sein du cabinet et ils soupçonnent Duplessis d'être corrompu par les trusts de l'électricité pour avoir retardé une fois de plus la nationalisation[a 48]. Les esprits continuent à s'échauffer jusque tard dans la nuit et un groupe de protestataires se rend manifester devant le Château Frontenac, où Duplessis loge lors de ses séjours à Québec. La manifestation se termine en un affrontement avec la police du Canadien Pacifique et les gardes de sécurité de l'hôtel. Malgré la protestation, Duplessis refuse de se laisser intimider : « Je ne me suis jamais laissé conduire par les extrémistes, et je ne le ferai pas davantage. Je ne me suis jamais soumis à l'intimidation et je ne m'y soumettrai pas maintenant... J'ai déclaré que j'étais le chef et que j'entendais le demeurer... Il ne s'agit pas de portefeuilles personnels, mais d'un portefeuille collectif, honnêtement et justement distribué »[a 49]. Le lendemain de l'assermentation, Duplessis s'installe dans son nouveau bureau de premier ministre et reçoit son premier visiteur : le Frère André. La même journée, à Montréal, Camillien Houde remet sa démission comme maire de la ville afin de protester contre l'attitude du nouveau premier ministre[a 50]. Pourtant, malgré la dissidence des trois députés et la démission du maire de Montréal, la plupart des journaux approuvent l'attitude de Duplessis[a 51].

Il est intéressant de noter que, malgré une forte présence conservatrice dans son cabinet, Duplessis fait aussi une place considérable aux anciens actionnistes. S'y retrouvent Joseph Bilodeau, John Bourque, Oscar Drouin, Bona Dussault, François Leduc et Albiny Paquette. Ce dernier, nommé secrétaire provincial, travaillera à l'une des plus importantes réformes de ce gouvernement : la création d'un Ministère de la Santé[a 52].

Premières réformes et dissidences internes[modifier | modifier le code]

Le cabinet Duplessis en compagnie du lieutenant-gouverneur Ésioff-Léon Patenaude, octobre 1936.

L'arrivée au pouvoir de l'Union nationale entraîne une série de réformes. Tout d'abord, elle amène une transformation en profondeur de la fonction publique québécoise. Cette transformation commença par le changement de la quasi-totalité du personnel composant la fonction publique. Cette masse de licenciements s'explique par le fait que, à l'époque, la nomination des fonctionnaires était entièrement laissée à la discrétion du parti au pouvoir. Cette pratique, répandue non seulement au Québec mais ailleurs au Canada et dans d'autres pays, faisait en sorte que les employés de l'État étaient non seulement choisis en fonction de leurs compétences mais aussi en fonction leurs allégeances politiques. Cela voulait donc dire que l'entièreté de la fonction publique était politisée et que sa composition dépendait entièrement des membres du gouvernement[a 53][d 3]. Comme le Québec sortait d'un régime libéral de plus de 39 ans, avec toutes les révélations faites au cours de l'enquête du Comité des comptes publics, ce genre de favoritisme pouvait donner des avantages aux partisans au détriment de l'intérêt public et donc entraîner des abus et du gaspillage, surtout lorsqu'un parti restait au pouvoir pendant plusieurs années. En conséquence, puisque tous les employés en place avaient été nommés par les libéraux, on remplaça tout le personnel de tous les départements de la fonction publique, sauf quelques exceptions[a 54][d 4]. Dans certains cas, les démissions se font au lendemain de l'élection, comme pour le chef de la Sûreté de Montréal Louis Jargailles et pour le président et le conseil d'administration de la Commission des liqueurs[b 22]. Parmi les nominations les plus remarquables, on dénote celle du juriste Édouard Asselin au poste d'Assistant procureur général, remplaçant Charles Lanctôt, de l'ancien président de l'Union catholique des cultivateurs Albert Rioux au poste de sous-ministre de l'Agriculture, et de l'économiste Esdras Minville au poste de conseiller spécial du ministre du Commerce et de l'Industrie. À l'ouverture de la session, le premier ministre fait placer un crucifix au-dessus du trône de l'orateur[a 55]. Malgré les changements, dans les faits, Duplessis maintient une culture de favoritisme politique très similaire à celui entretenu par Taschereau, mais qui est dans les faits en vigueur depuis bien plus longtemps[z 17]. Le favoritisme de l'Union nationale se distingue surtout du favoritisme du Parti libéral dans la mesure où, au lieu de favoriser les grandes entreprises, il tend plutôt à favoriser les petites et moyennes entreprises. Il décentralise le pouvoir administratif dans une certaine mesure mais en contrepartie il centralise les choix majeurs, proprement politiques, auxquels la participation était fort réduite pour ne pas dire inexistante, non seulement de la part des forces d'opposition, mais aussi à l'intérieur même de l'Union nationale[z 18].

L'arrivée au pouvoir de l'Union nationale signifiera aussi la fin pour beaucoup d'entreprises ayant des contrats avec l'ancien gouvernement. Par exemple, le journal Le Soleil, d'obédience libérale, avait reçu de l'ancien gouvernement des contrats d'impression très lucratifs. À son arrivée au pouvoir, Duplessis mettra un terme à ces contrats, et les donnera plutôt au Devoir et à L'Action catholique[4].

Le nouveau gouvernement modèle en bonne partie sa politique sur la philosophie personnelle de Duplessis[b 23]. L'agriculture est conçue comme la base de la prospérité, l'agriculteur comme le travailleur par excellence et la famille en milieu rural comme la cellule de la société canadienne-française[a 56]. En droite ligne avec cette philosophie, l'une des premières réformes entamées est la mise en place d'un crédit agricole, le 12 novembre 1936. À cause de la crise économique, le financement privé était devenu très difficile à obtenir et les caisses populaires s'avéraient incapables de garantir un crédit de cette envergure. En s'inspirant du régime mis en place en Ontario, l'État provincial procède à une injection massive de crédit jugée nécessaire par les spécialistes des questions agricoles. Le crédit agricole offre donc des prêts à plus long terme, avec des taux d'intérêt réduits et en assumant les risques inhérents à ces prêts[a 57]. Cela permettrait ainsi d'agrandir les exploitations, de mécaniser les équipements et de voir émerger de nouvelles productions[z 19]. Le projet de loi, parrainé par Albert Rioux, est opposé par le chef parlementaire libéral T.-D. Bouchard, mais finalement adopté, sous les applaudissements de plusieurs députés libéraux[a 58].

Le gouvernement présente aussi quelques projets de loi de réformes sociales, comme la Loi sur les pensions aux mères nécessiteuses. Cette loi permettait aux mères de famille répondant aux critères du gouvernement de recevoir une part d'argent afin de subvenir aux besoins de leur famille. Malgré les conditions sévères exigées par la loi, celle-ci marque un tournant dans l'histoire des politiques sociales au Québec, annonçant une plus grande prise en charge par l'État de ce qui était autrefois laissé aux soins des œuvres de charité. Ensuite, le gouvernement modifia la Loi sur les accidents de travail, réalisant ainsi une promesse de campagne en donnant aux accidentés le droit de choisir leur médecin. Avant ce changement, les employés victimes d'un accident ou contractant une maladie causée par leur emploi étaient contraints de se faire examiner par un médecin désigné par leur entreprise. Souvent peu au courant de leurs droits, et avec une législation ouvrière insuffisante en matière de normes de sécurité, les ouvriers se faisaient alors souvent donner des diagnostics biaisés (par exemple, atténuant la gravité d'une blessure ou ne reconnaissant pas les symptômes éprouvés par un ouvrier malade comme étant ceux d'une maladie provoquée par l'environnement de travail) ne reflétant pas réellement leur état de santé. Cela exemptait ainsi les entreprises à verser des compensations requises par la loi aux employés victimes de maladie ou d'accident. En choisissant leur propre médecin, les ouvriers pouvaient obtenir des indications claires sur leur état de santé, sans pression de la part des patrons, et ainsi se faire verser les indemnités dues.

Parmi les autres mesures de sécurité sociale importantes adoptées par le gouvernement Duplessis, on trouve la participation du Québec au régime fédéral de pensions de vieillesse. Bien que, selon la constitution, ce domaine incombait aux gouvernements des provinces, l'aide financière du gouvernement fédéral permettait de donner un peu d'oxygène aux provinces afin qu'elles puissent utiliser leurs ressources financières pour aborder des problèmes plus pressants. Une autre mesure importante se fera avec l'aide d'Albiny Paquette : l'établissement d'un ministère de la santé. Le « Service provincial d'hygiène », qui était jusque là un service mineur rattaché au secrétaire provincial, ne suffisait plus aux besoins de la population[a 59]. Malgré les progrès importants en matière d'hygiène et de santé publique durant les premières années de pouvoir de Taschereau, les infrastructures étaient depuis tombées en désuétude. Le Dr Paquette se retrouve donc devant la tâche de superviser l'organisation de l'assistance publique, de créer des unités sanitaires, de lutte à la tuberculose et, surtout, de voir à la construction de plusieurs nouveaux hôpitaux, notamment dans les régions rurales comme l'Abitibi et la Gaspésie[a 60]. Ce nouveau ministère de la Santé disposera d'un budget modeste au départ, mais qui permettra de créer un certain nombre minimal d'infrastructures, plus adaptées aux nouveaux besoins.

Toutes les réformes ne sont pas approuvées toutefois, et ce, même si elles viennent du gouvernement ; le député de Gaspé-Sud, Dr Camille Pouliot, le député de Missisquoi, François-A. Pouliot, et le ministre Gilbert Layton demandent de modifier la loi électorale afin d'accorder le droit de vote aux femmes. La motion est rejetée par 49 voix contre 23[a 61].

Après quelques mois, de plus en plus de députés manifestèrent leur lassitude à l'égard de Duplessis, dénonçant le manque d'action concernant les grandes réformes promises pendant la campagne électorale, à savoir la nationalisation de l'électricité, la lutte aux trusts et la fin de nombreuses traditions politiques dites « humiliantes », notamment le fait de toujours nommer un anglophone au poste de trésorier provincial. La nomination de Martin Fisher, de même que les accords conclus avec des financiers affiliés à sir Herbert Holt (président de la Banque Royale et représentant notoire des trusts que Gouin et Hamel cherchaient à combattre) sont perçus par une bonne partie de l'électorat nationaliste comme un reniement des promesses de celui qui se présentait comme un réformateur et un défenseur de sa nation[a 62]. De plus, le refus de créer une commission hydroélectrique québécoise et la timidité du gouvernement en matière de réformes sociales soulèvent beaucoup de mécontentement parmi ceux qui s'étaient engagés dans l'Union nationale pour combattre les trusts et pour nationaliser l'électricité[a 63]. Au début de 1937, Oscar Drouin, inspiré par le trio Hamel, Grégoire et Ouellet, laisse planer le doute sur son engagement au sein de l'Union nationale. Alors que le discours du trône est en rédaction, Drouin s'absente des rencontres du conseil des ministres. Finalement, le 22 février, il remet sa démission comme ministre des Terres et Forêts et organisateur en chef de l'Union nationale.

Lutte contre le chômage[modifier | modifier le code]

Malgré une légère reprise économique provoquée par la menace d'un conflit armé en Europe, le chômage demeure élevé et l'économie tarde à se redresser. Pour s'attaquer aux problèmes de chômage, Duplessis agit en continuité avec le gouvernement précédent en maintenant les secours directs versés aux chômeurs, mais se démarque en redonnant la priorité aux travaux publics. Cette dernière politique, populaire dans plusieurs pays occidentaux touchés par la crise, s'avère une mesure importante dans la lutte contre le chômage, car elle permet non seulement de construire et de moderniser les infrastructures du Québec (écoles, hôpitaux, routes, etc.), mais aussi de redonner du travail et de l'espoir à des milliers de personnes dans le besoin. Ainsi, à Montréal, on voit se dessiner le prolongement de la rue Sherbrooke, la réfection des terres-pleins du boulevard Pie-IX et l'aménagement du Jardin botanique, d'après des plans du Frère Marie-Victorin[a 64]. À ces mesures s'ajoutent la mise en place de nouveaux programmes d'aide à la colonisation afin de favoriser le développement de régions éloignées comme l'Abitibi, le Lac Saint-Jean et la Gaspésie. Il viendra d'ailleurs en aide aux Gaspésiens à plusieurs reprises, en appuyant la réouverture de moulins de pâtes et papiers de Chandler et en inaugurant le Parc de la Gaspésie en 1937.

Pour tenter de remédier aux problèmes de conditions de travail des ouvriers, le ministre du Travail présente le projet de Loi des salaires raisonnables, fixant les conditions de travail minimales pour les travailleurs, en plus d'agir comme tribunal d'arbitrage lors des conflits[z 20]. Désormais, tous les salariés de l'industrie et du commerce n'ayant pas déjà de conditions de travail fixées par une convention collective recevront un salaire minimum de 0,15 $ à 0,25 $ de l'heure. Cette loi permet aussi au gouvernement de fixer les salaires et les conditions de travail en temps de grève, ce qui vient limiter l'influence des syndicats dans les relations de travail et donner la priorité aux prérogatives patronales. En ce sens, la loi reflète tout à fait la position personnelle du premier ministre sur les syndicats : « Les patrons doivent diriger leur industrie avec justice, intégrité, bonté, mais à la tête. Les ouvriers, à leur place, sachant obéir aux ordres, accomplissant leur tâche de leur mieux. Eux aussi doivent être justes, honnêtes et bons. Les unions, à leur place, doivent protéger leurs membres, mais pas en les persuadant que le patron est un ennemi, et n'intimidant pas ceux qui ne veulent pas être unionistes. Il est impossible qu'une association puisse forcer un individu à en faire partie et à lui faire payer une taxe pour avoir le droit de gagner sa vie »[a 65].

Lutte au communisme et Loi du cadenas[modifier | modifier le code]

En 1937, le gouvernement décide de mener une lutte aux groupes communistes au Québec à l'aide d'un nouveau cadre juridique : la Loi du cadenas.

Alors que la misère rongeait le peuple, que les dictatures s'installaient un peu partout en Europe et en Amérique du Sud et que la menace d'un nouveau conflit mondial approchait, le communisme devint l'une des principales questions d'actualité au Québec. Si la présence communiste se fait généralement discrète dans l'ensemble du Québec, elle se concentre principalement à Montréal dans certains quartiers ouvriers et surtout dans les milieux intellectuels juifs et anglophones. Les communistes, comme les syndicats, étaient alors perçus comme des éléments perturbateurs par les gouvernements.

La lutte au communisme avait débuté en catimini sous le gouvernement Taschereau, et elle avait mené à quelques affrontements entre syndicats et policiers, notamment lors de la grève des « Fros » de la Noranda Mines en Abitibi, en juin 1934. Toutefois, elle s'intensifia sous Duplessis. En effet, dès 1936, des publications telles que le journal Clarté avaient décrit l'arrivée au pouvoir de son parti comme « l'avènement d'un gouvernement fasciste » au Québec[a 66][z 21]. Le mouvement communiste au Québec, bien que marginal, était majoritairement un fait anglophone à cette époque et voyait plutôt l'idéologie d'un point de vue pancanadien et international, réticent à tout attachement à la religion catholique et ignorant les problèmes et les aspirations particulières des Canadiens-français. Toutefois, l'opinion publique de l'époque se montra nettement plus hostile au communisme qu'au fascisme. Suivant les déclarations du pape Pie XI condamnant le Front populaire en France, une imposante manifestation s'organisa sur le Champ-de-Mars de Montréal le 25 octobre 1936, où l'évêque Mgr Georges Gauthier prit la parole devant plus de 120 000 manifestants pour dénoncer les périls du communisme comme idéologie anti-catholique, ennemie de la liberté et de la culture canadienne-française[a 67]. Une manifestation fut aussi organisée à Québec, au Colisée, où le cardinal Villeneuve, Adélard Godbout, le maire Ernest Grégoire et Maurice Duplessis vinrent tour à tour prendre la parole. Duplessis professa sa foi catholique et s'engagea à réprimer la propagande communiste[z 22].

Multipliant les déclarations anticommunistes, Duplessis établit rapidement la mollesse des libéraux comme une façon d'encourager le communisme au Québec[a 68]. Répondant ainsi aux pressions du clergé et à une demande populaire de plus en plus grandissante, Duplessis présente le 17 mars 1937 le projet de Loi protégeant la province contre la propagande communiste. Cette loi permettrait au procureur général d'ordonner la fermeture, pour un an, de tout édifice consacré à la distribution ou à la production de propagande communiste ou bolcheviste, de confisquer et détruire tout matériel de propagande, et d'emprisonner toute personne ayant imprimé, publié ou diffusé ce genre de document pendant un an, sans appel [z 23]. Adoptée à l'unanimité[a 69], la loi prit le surnom de Loi du cadenas en raison du fait qu'elle donnait le droit de fermer (cadenasser) les établissements soupçonnés de propagande communiste. L'adoption de cette loi, bien accueillie par le clergé, soulève des protestations parmi les éléments avancés, surtout à l'extérieur du Québec, et verra l'apparition d'une campagne antiduplessiste, à tournure antiquébécoise, dans certaines provinces, ce qui alarmera le clergé catholique et plus d'un grand patron. Le Comité central du CCF, réuni à Toronto, exigera une intervention du gouvernement fédéral afin de casser la loi. Une assemblée de protestation contre la loi se tient à l'Aréna Mont-Royal où Robert Calder conseille la résistance à la loi. En revanche, de nombreux débats entourant la légalité de cette loi émergeront durant les années suivantes, notamment du fait que le texte de loi ne définit aucunement le communisme et le bolchevisme et qu'elle nie à l'accusé son droit à la présomption d'innocence[z 24].

Au final, la Loi du Cadenas sera très importante dans la carrière politique de Maurice Duplessis, car elle aura un effet considérable sur la politisation des forces policières et dressera contre lui non seulement le Parti communiste mais une large frange de sympathisants antifascistes et une notable fraction de l'opinion anglaise (la Civil Liberties Union, le Clarion de Toronto, la Clarté de Montréal, etc.) (voir Rumilly t. 1 p. 380-382).

Relations avec les ouvriers[modifier | modifier le code]

Malgré les efforts du gouvernement, les difficultés de l'emploi persistent et de nombreuses grèves sont déclenchées dans l'industrie minière et manufacturière, et surtout, au Québec comme au Canada, dans le domaine du textile. Aux fermetures d'usines et aux emplois précaires s'ajoutent des conditions de travail très médiocres, incluant des ateliers mal ventilés, des aménagements minimaux inexistants, de longues heures de travail, des semaines de six jours et des salaires nettement insuffisants[z 25]. C'est pourquoi de nombreux ouvriers font des grèves et réclament l'aide du gouvernement pour mettre fin à cette situation devenue intenable. Toutefois deux grèves importantes donneront le ton aux relations entre le gouvernement Duplessis et les milieux ouvriers et syndicaux pendant les années à venir.

La première se déroule en mai 1937 et oppose les travailleurs des chantiers navals de la Marine Industries à la famille Simard de Sorel, contrôlant de nombreuses industries dans cette ville et jouant un rôle primordial dans l'économie locale. Les grévistes réclament la reconnaissance de leur syndicat, l'annulation du congédiement des dirigeants syndicaux et une hausse des salaires. Peu après le déclenchement de cette grève, les grévistes sont rejoints par les ouvriers des usines métallurgiques, autre propriété des Simard, ainsi que par une partie de la population venant manifester dans les rues pour donner son appui aux grévistes. Quoique les élus municipaux étaient opposés à la grève, les autorités religieuses dont le curé Desranleau (futur évêque de Sherbrooke) donnèrent leur appui moral aux travailleurs, dénonçant « une ingérence politique malsaine, qui mérite les malédictions du Ciel »[z 26]. Au bout de plusieurs mois de conflit, les grévistes retourneront au travail sans gain majeur, faute d'organisation et de soutien de la part de la Confédération des travailleurs catholiques du Canada (CTCC).

La seconde grève se déroule pendant tout le mois d'août 1937 et paralyse les six filatures de la Dominion Textile à Montréal, Valleyfield, Sherbrooke, Magog, Drummondville et Saint-Grégoire-de-Montmorency. L'entreprise, qui est alors le plus gros employeur manufacturier du Québec (50 000 ouvriers), contrôle les deux tiers de l'industrie du coton au Canada. Ses employés (en majorité des femmes) travaillent de 55 à 60 heures par semaine pour un salaire hebdomadaire d'environ 15 $. Cette situation, et la montée de l'organisation syndicale dans les usines (plus particulièrement la CTCC, à laquelle les employés sont affiliés) créait un contexte favorable à une négociation des conditions de travail. D'autant plus que la Commission royale d'enquête sur l'industrie du textile (créée plus tôt en 1937) venait de mettre en lumière l'exploitation des ouvrières du textile. La CTCC se croit ainsi en bonne posture pour presser la Dominion Textile de signer un contrat avec elle en tant que représentante des ouvriers. Après la tenue d'un vote de grève, les travailleurs appuient à 95 % l'arrêt de travail qui sera déclenché le 2 août. Les principales revendications sont l'augmentation des salaires, la diminution des heures de travail de 60 heures à 50 heures et la reconnaissance du syndicat. Après deux semaines de grève, l'entreprise tente de rouvrir trois de ses filatures, ce qui provoque de la violence sur les lignes de grève. Le premier ministre s'oppose à l'attitude des chefs syndicaux et favorise plutôt l'arbitrage – une décision soutenue par le cardinal de Québec Mgr Rodrigue Villeneuve. Cela n'a pour conséquence que d'aggraver la situation et d'augmenter la violence des affrontements entre les grévistes et l'entreprise, qui finit par embaucher des briseurs de grève. Finalement, après 25 jours de conflit, la Dominion Textile et les ouvriers finissent par accepter la médiation offerte par le gouvernement. Encore une fois, les grévistes obtiennent peu de concessions. La semaine de travail est abaissée à 50 heures, le salaire est majoré de 5 % et les machines seront arrêtées lors des repas, mais le syndicat ne sera pas officiellement reconnu par l'employeur. Le conflit prend fin le 27 août 1937[z 27].

Dans les deux cas, le premier ministre Duplessis s'est vivement opposé au recours à la grève et a critiqué l'attitude des chefs syndicaux, les voyant comme responsables de la violence et de la rupture dans les négociations. Aussi, pour faire face aux mouvements populaires, Duplessis n'hésite pas à faire appel à la Police provinciale afin de disperser les grévistes et protéger les briseurs de grève. La dureté de ces affrontements marquera fortement la mémoire des grévistes et sera utilisée comme étant l'un des premiers exemples de l'attitude antisyndicale reprochée à Duplessis.

Il est aussi important de noter que durant cette période, les milieux ouvriers québécois assistent à une importante lutte interne entre les syndicats internationaux et les syndicats catholiques. Cette opposition se révèle notamment lors de la grève d'avril 1937 des 5000 ouvrières de l'Union Internationale des Ouvriers de Vêtements pour Dames affiliées au CIO américain[a 70]. Malgré la nature des revendications des grévistes, les chefs de la grève (les Américains Bernard Shane et Rose Pesota) recevront les critiques du président de la CTCC, Alfred Charpentier, de l'aumônier général des syndicats catholiques de Montréal, Jean Bertrand (recommandant leur déportation) et de l'évêque Mgr Gauthier, qui demande à Duplessis de protéger les membres de la Ligue des Ouvrières de l'Industrie de l'Aiguille contre les pressions de ce syndicat perçu comme mouvement de tendance communiste[a 71]. Après 25 jours de grève, les ouvrières remportent la victoire en obtenant un salaire moyen de 16 $ pour 44 heures de travail sur 5 jours et demi, et l'établissement de règles encadrant les heures supplémentaires, le travail à la pièce et les procédures de grief. En même temps, aux États-Unis, John L. Lewis, chef du CIO, défie la prépondérance de la Fédération américaine du Travail et provoque une grève à la General Motors d'Oshawa. Cette grève, appuyée par le Daily Clarion de Toronto, est sévèrement condamnée par le premier ministre ontarien Mitchell Hepburn, aux prises avec des conflits de travail similaires avec des syndicats affiliés au CIO. Hepburn finira d'ailleurs par signer un accord qui répondra aux revendications des grévistes, sans toutefois reconnaître leur syndicat.

Enquêtes et suite du Comité des comptes publics[modifier | modifier le code]

Au même moment où les séances du Comité des comptes publics reprennent, le 7 avril 1937, Duplessis ordonne la tenue d'une enquête au sein de la Commission de chômage à la suite d'allégations de gaspillage.

Réforme de la police provinciale et menace de conflit mondial[modifier | modifier le code]

L'une des réformes importantes de l'Union nationale, entreprise peu de temps après son arrivée au pouvoir, elle celle de la police provinciale. Le nouveau directeur, Philippe Aubé, un des rares employés à rester dans l'organisation après les masses de licenciements, a pour tâche de mener une enquête au sein de la Commission de chômage, l'organisme responsable de la gestion et de la distribution des chèques de secours direct remis aux chômeurs, afin d'y trouver des preuves d'influence communiste[z 28]. Après son enquête, il sera remplacé par le lieutenant-colonel Philippe-Auguste Piuze au printemps 1937. (voir Rumilly t. 1 p. 379)

Par la suite, l’Union nationale procèdera à une refonte de l’organisation policière. Auparavant, il existait quatre services de polices provinciales différentes au Québec : la Police judiciaire, la Gendarmerie, la Police de la route et la Police des liqueurs (service de surveillance rattachée à la Commission des liqueurs). Le gouvernement prend donc la décision de rassembler toutes ces forces sous un seul commandement, jetant ainsi les bases d'une organisation plus moderne. L’année 1938 voit ainsi la création d'un nouveau corps de police provinciale : la « Sûreté provinciale du Québec ». La division du territoire en deux grands secteurs appelés « districts », l’un à Montréal et l’autre à Québec, sera maintenue.

Profitant du débat sur la conscription attisé par la déclaration de guerre du Canada suite à l'invasion de la Pologne par Hitler, Duplessis déclenche des élections hâtives le 25 septembre 1939.

Élection de 1939[modifier | modifier le code]

Deux semaines après la déclaration de guerre du Canada à l'Allemagne, Duplessis crée la surprise en déclenchant des élections en espérant prendre les libéraux par surprise et d'exploiter la question de la participation canadienne à la Seconde Guerre mondiale.

Duplessis se montre confiant. Toutefois, les réalisations du nouveau premier ministre et de son gouvernement ne sont pas à la hauteur des attentes de 1936. La peur de la conscription ne joue pas en faveur de l'Union nationale et, suite aux menaces de démission des députés québécois en cas de défaite libérale, l'opinion publique se retourne contre Duplessis. L'élection est remportée par le Parti libéral mené par Adélard Godbout et l'Union nationale réduite à 15 députés est renvoyée sur les bancs de l'Opposition.

Retour dans l'Opposition et « traversée du désert » (1939-1944)[modifier | modifier le code]

Adélard Godbout, premier ministre du Québec de 1939 à 1944.

Maladie[modifier | modifier le code]

Durant l'hiver 1941-1942, Maurice Duplessis tomba gravement malade. Souffrant de diabète, d'alcoolisme et d'une hernie étranglée, il passa près de mourir à plusieurs reprises sous sa tente à oxygène. Ses ennuis de santé le forcèrent à s'absenter de l'Assemblée législative durant de longs mois et, pour la durée de cette période, on nomma Onésime Gagnon à titre de chef par intérim. À l'intérieur du parti, des débats sur la possibilité de le remplacer comme chef firent surface. Plusieurs députés exprimèrent alors avec une certaine véhémence leur mécontentement à l'égard du chef de l'opposition et lui jetèrent le blâme pour la défaite du parti lors de la campagne précédente, notamment du fait de son alcoolisme. Le député des Îles-de-la-Madeleine, Hormisdas Langlais, proposa de convoquer une course à la chefferie. On approcha certains députés afin de trouver des successeurs potentiels, notamment Paul Sauvé[N 2]. Toutefois, le rétablissement de Duplessis et la préparation de la prochaine campagne électorale réussissent à rétablir l'ordre au sein du parti.

Élection de 1944[modifier | modifier le code]

Lorsque la campagne électorale fut déclenchée, Duplessis était prêt à se battre. La crise de la conscription était le talon d'Achille du gouvernement Godbout et Duplessis s'en servit à son avantage. Le mécontentement de la population à l'égard des libéraux était grand, malgré leurs mesures progressistes bien accueillies.

!!!!Le slogan utilisé par l'Union nationale lors de cette élection était : Nous voulons être maîtres chez nous. Cette phrase était déjà apparue dans une affirmation du chanoine Lionel Groulx en 1932. Voir Conrad Black t.1 p. 429.

Malgré un nombre de votes inférieur à celui du Parti libéral, l'Union nationale remporta l'élection avec 48 sièges. Duplessis conserva le pouvoir durant les quinze années suivantes, jusqu'à sa mort. Au total, il a été député pendant neuf mandats consécutifs et premier ministre durant cinq mandats, les quatre derniers étant consécutifs. Après lui, il s'est écoulé presque 50 ans avant qu'un parti politique ne réussisse à remporter trois mandats consécutifs lors d'élections provinciales québécoises, soit les libéraux de Jean Charest.

Premier ministre du Québec — second mandat (1944-1959)[modifier | modifier le code]

Fichier:Gouvernement Maurice Duplessis (2).jpg
Le second cabinet Duplessis, septembre 1944.

Fin de la guerre[modifier | modifier le code]

À son retour au pouvoir, Duplessis mettra sur pied une immense machine électorale afin de conserver une certaine indépendance financière par rapport aux grandes institutions financières canadiennes.

Un développement économique et industriel sans précédent[modifier | modifier le code]

Le 26 juillet, John Bourque est nommé à la tête du nouveau ministère des Ressources hydrauliques, chapeautant le développement des futures centrales d'Hydro-Québec essentielles pour alimenter les nouvelles mines et industries de la région de l'Ungava et de la Côte-Nord. Quelques jours plus tard, le 6 août, Ottawa annonce son intention de garder le contrôle exclusif des impôts sur le revenu, les corporations et les successions que lui avaient abandonné les provinces durant la guerre.

Relations fédérales-provinciales sur fond de tensions constitutionnelles[modifier | modifier le code]

En début d'année 1946, Duplessis rencontre ses partisans au Club Renaissance à Québec. Il veut, dit-il, défendre «les libertés et les prérogatives provinciales» contre les «centralisateurs et [l]es assimilateurs». Il ne faut pas céder aux mirages des subventions fédérales qui affaibliraient l'État québécois. «Vous ne crucifierez pas la province de Québec, même sur une croix d'or», lance-t-il alors – en référence au célèbre discours de William Jennings Bryan – à l'adresse des autorités fédérales[z 29].

Le retour au pouvoir de Duplessis à l'automne de 1944 annonce le début d'une nouvelle ère dans les relations fédérales-provinciales. Comme les autres provinces qui avaient temporairement cédé certains de leurs droits constitutionnels pendant la guerre, conformément à son entente avec Ottawa, le gouvernement du Québec s'attendait à les retrouver dans leur intégralité une fois le conflit terminé. Toutefois, alors que la guerre tirait à sa fin, il devenait de plus en plus évident que le gouvernement fédéral ne voudrait pas mettre un terme à ses politiques développées depuis 1939[a 72]. Cette décision provoqua une vague de protestations dans les parlements provinciaux, en Ontario et au Québec surtout. Se tenant à une lecture stricte de la constitution en matière de répartition des compétences, Duplessis durcira le ton avec le gouvernement fédéral. Cette attitude d'affirmation défensive face aux tentatives de centralisation des pouvoirs par le gouvernement fédéral sera qualifiée d'autonomiste. Parallèlement, en Ontario, le gouvernement conservateur de George Drew (et plus tard, Leslie Frost) partageait les mêmes craintes face au gouvernement fédéral. Toutefois, en saupoudrant ses discours d'attaques antiquébécoises, George Drew nuisit considérablement à toute forme d'alliance entre le gouvernement de Toronto et celui de Québec (Rumilly, t. 2, p. 26).

Paul Sauvé est nommé à la tête d'un nouveau ministère du Bien-être social et de la Jeunesse en 1946. Ce ministère a la responsabilité de voir au développement et à la gestion des écoles de métiers et des instituts techniques[z 30].


Grève à Valleyfield (1946)[modifier | modifier le code]

Voir Robert Rumilly, Maurice Duplessis et son temps, t. 2, pp. 160-161.

Lutte antisubversive[modifier | modifier le code]

Affaire Roncarelli[modifier | modifier le code]

En 1946, l’organisation des Témoins de Jéhovah publie une brochure intitulée La haine ardente du Québec pour Dieu, pour le Christ et pour la liberté est un sujet de honte pour tout le Canada. Sa distribution fait scandale, et des centaines de Témoins de Jéhovah sont arrêtés. Frank Roncarelli, un restaurateur de Montréal, lui-même Témoin de Jéhovah, paie les cautionnements de nombreux d’entre eux. Répondant aux pressions du clergé et de l'opinion publique, Duplessis décide de révoquer le permis de vente d'alcool de Roncarelli, entraînant la fermeture de son commerce. Par la suite, en mars 1947, pour continuer à s'opposer à la propagande des Témoins de Jéhovah, le gouvernement Duplessis dépose une loi permettant aux municipalités de réglementer la distribution de tracts.

Roncarelli intentera des poursuites contre le premier ministre. La cause prendra de nombreuses années et se rendra jusqu'en Cour suprême.

Grèves du textile de 1947[modifier | modifier le code]

Le 10 avril 1947, plus de 700 travailleurs et travailleuses de la laine affiliés aux Ouvriers unis du textile d'Amérique (OUTA) livrent une grève de cinq mois à la compagnie Dominion Ayers. Ce conflit, qui se terminera le 22 septembre, n'apportera pas d'amélioration significative à la situation des ouvriers. L'intervention policière et l'arrestation des meneurs syndicaux Madeleine Parent et Azellus Beaucage ponctuent cet arrêt de travail[z 31].

Le 10 septembre, plus de 700 employés de la laine de l'Associated Textile Company se mettent en grève. L'employeur accepte finalement la quasi-totalité des demandes de la CTCC (à l'exception de la rétroactivité) et la grève prend fin le 27 septembre. Les ouvriers obtiennent une augmentation de 5 ¢ l'heure, ce qui leur permet de gagner environ 110 $ par semaine. Faisant suite aux deux conflits syndicaux, le 17 décembre, la CTCC présente au gouvernement un mémoire demandant l'adoption d'un Code du travail par l'Assemblée législative.

Impôt sur les corporations[modifier | modifier le code]

Nouveau drapeau du Québec[modifier | modifier le code]

Le 21 janvier 1948, le fleurdelisé devient le nouveau drapeau officiel du Québec.

Duplessis fit une de ses contributions les plus durables au Québec le 21 janvier 1948, avec l'adoption par décret du drapeau du Québec, le fleurdelisé, qui remplaça l'Union Jack au sommet de l'hôtel du Parlement. Au moment de son adoption, le drapeau de Carillon moderne comporte des fleurs de lys pointant vers le centre. Il sera rebaptisé « fleurdelisé » quelques jours plus tard, lorsque ses lys seront repositionnés verticalement[z 32]. Ce nouveau drapeau sera finalement sanctionné par loi le 9 mars 1950.

Élection de 1948[modifier | modifier le code]

Duplessis déclenche les élections le 9 juin 1948. La longue campagne – s'échelonnant sur plus d'un mois et demi – permet aux deux partis principaux de compléter leurs mises en candidature et de tenir leurs premiers rassemblements publics. Le Bloc populaire s'étant dissout l'année précédente, la campagne oppose principalement l'Union nationale et le Parti libéral. L'Union des électeurs, menée par Réal Caouette, présente cette fois des candidats dans toutes les circonscriptions (dont le nombre est passé de 91 à 92 en 1945). Les libéraux commencent leur campagne le 13 juin à L'Islet, fief d'Adélard Godbout, tandis que les unionistes se réunissent le 20 juin à Trois-Rivières.

L'Union nationale dresse un portrait positif de son mandat, mettant l'accent sur les surplus budgétaires ainsi que sur l'électrification rurale, les constructions d'hôpitaux, d'écoles et de routes. Les unionistes profitent également de l'occasion pour mettre en évidence dans les assemblées le nouveau drapeau québécois, adopté plus tôt dans l'année.

Le Parti libéral défend pour sa part un programme en 18 points touchant une multitude de domaines, dont les logements, la santé, la fiscalité et les pensions de vieillesse. On attaque l'intégrité du gouvernement en dénonçant les privilèges accordés aux entreprises exploitant les ressources naturelles du Nouveau-Québec ainsi que le gaspillage et le favoritisme dont profitent les sympathisants de l'Union nationale.

Le 28 juillet, avec 51,2% des voix, l'Union nationale remporte une victoire écrasante en prenant 82 des 92 sièges. Malgré leurs 36,2% du vote populaire, les libéraux doivent se contenter de 8 sièges, la plus faible députation de leur histoire. Ce résultat étonnant éclipse presque totalement dans la presse le score de l'Union des électeurs qui, sans faire élire de député, obtient malgré tout 9,2% du vote, avec ses 140 000 voix.

Création d'un code du travail : le « bill 5 » (1949)[modifier | modifier le code]

Voir les explications de Robert Rumilly sur le bill 5, en 1949, visant à créer un nouveau Code du travail dans Rumilly, Duplessis, t. 2, pp. 238, 243-247. Duplessis cherchait à réformer le Code du travail depuis 1948. La version qu'il présenta à l'automne mobilisa une campagne d'hostilité particulièrement virulente dans la population. Au dernier moment, Duplessis décidera de retirer le projet de loi du Feuilleton. En février 1949, le bill 5 est de nouveau présenté par l'Union nationale. Toutefois, cette version révisée sera jugée comme trop laxiste par les syndicats. Une nouvelle vague de protestation se lèvera, chez les syndicats, les étudiants et autres. Le ministre du Travail, Antonio Barrette, expliquera que le projet de loi sera finalement retiré : « Si nous retirons le projet, ce n’est pas par manque de courage ou par crainte de l’opposition, mais parce que, bien qu’ayant le pouvoir de procéder ultérieurement avec les amendements que la Législature aurait jugés appropriés et justes, nous voulons donner une preuve additionnelle de notre bonne volonté et de notre désir de doter la province de la législation la meilleure et la mieux mûrie »[z 33].

Grève d'Asbestos[modifier | modifier le code]

Le 13 février 1949, 2000 travailleurs de l'amiante d'Asbestos déclenchent une grève et sont vite rejoints par 3000 mineurs de Thedford Mines. D'une violence sans précédent au Québec, le conflit syndical donnera lieu à un affrontement entre le premier ministre Duplessis et Mgr Joseph Charbonneau, l'archevêque de Montréal[z 34].

Problèmes constitutionnels (1950)[modifier | modifier le code]

Deux conférences fédérales-provinciales se tiennent en 1950 : la première porte sur l'établissement d'un nouveau système de pensions de vieillesse. La seconde porte sur les réformes constitutionnelles, thème central de la période Duplessis dans les relations entre Québec et Ottawa.

Grève de Shawinigan[modifier | modifier le code]

En 1951, il y a une grève de l'aluminium à Shawinigan.

On résume généralement les relations ouvrières de l'époque de Duplessis par les trois grandes grèves de 1949, 1952 et 1957. Toutefois, les conflits de travail étaient beaucoup plus nombreux : «On compte en moyenne 35 grèves par année pour la période de 1945 à 1959, comparativement à 70 sous la gouvernance du Parti libéral d'Adélard Godbout, de 1940 à 1944. Tout de même, pour les années 1951-1952, plusieurs grèves d'importance sont enclenchées, soit celle à la compagnie d'aluminium de Shawinigan (24 février 1951), celle à la Singer Manufacturing de Saint-Jean-sur-Richelieu (6 juin 1951) et celle à l'Imperial Tobacco de Montréal (14 août 1951). En décembre 1951, la Wabasso Cottons de Shawinigan ferme son usine à la suite d'un conflit de travail avec le syndicat de la Confédération des travailleurs catholiques du Canada (CTCC), qui compte le syndicaliste Michel Chartrand parmi ses membres. La Fédération du travail de Québec s'oppose alors aux "unions de boutique", inféodées par le patronat. Le cabinet de Duplessis demande, en réaction, à la Commission des relations ouvrières, de vérifier l'indépendance des formations syndicales». Histoire parlementaire du Québec, p. 462.

Élection de 1952[modifier | modifier le code]

Maurice Duplessis s'adressant à la foule lors de la campagne électorale de 1952.

Grève de Louiseville[modifier | modifier le code]

Préambule à la grève[modifier | modifier le code]

La grève de Louiseville fut l’une des plus longues et des plus coûteuses de tout le règne Duplessis[d 5]. Le 10 mars 1952, les 800 tisserands de l’Associated Textile Company affiliés à la CTCC déclenchent une grève. Cette grève des employés des manufactures de textile a été marquée par la violence des affrontements entre les syndicats et la police, entraînant beaucoup de dégâts ainsi que certains épisodes de torture. Cette grève est fréquemment citée comme l’exemple par excellence de l’attitude antisyndicale de Duplessis et des politiques conservatrices et répressives qui ont caractérisé le récit sur la Grande noirceur[d 6].

La grève prend fin le 10 février 1953[d 7].

Conséquences de la grève[modifier | modifier le code]

Description des conséquences de la grève pour les ouvriers.

Description des conséquences de la grève pour les patrons.

Description des conséquences de la grève pour le gouvernement.

Description des conséquences de la grève pour le Québec.


Lorsque le conflit dégénère, Rumilly appuie sans retenue l’action des policiers, insistant sur les gestes illégaux des grévistes : (comme l’a bien démontré le procès de René Roque, plus description des conditions des policiers) t. 2, p. 259-260, 272, 273-274*, 282-283*


Début de la grève, p. 244 Pressions faites pour que la grève s’arrête p. 252 Le certificat des syndicats affiliés à la Fédération est révoqué 21 fév 1949 Intimidation p. 266 Les syndicats organisent des grèves comme les partis organisent des élections p. 268 Curé Camirand transforme son sous-sol en qg de guerre p. 271 Grévistes attaquent la police p. 272 Policiers attaqués, martyrisés p. 273-274 Rumilly dénonce que le Devoir présente les grévistes en victimes plutôt que les policiers p. 275 Cette grève pour une lutte pour la survie des syndicats catholiques p. 276-277* Rumilly explique le schéma de négocation. Bernique! P. 278-279 La compagnie ne veut pas réembaucher des criminels, ni renvoyer ses nouveaux employés p. 279-280 Améliorations amenées par la compagnie dans les conditions de travail p. 280-281 Reprise du travail dans certaines usines p. 281 Compagnie reconnaît Duplessis, le cardinal Roy et Barrette comme les 3 responsables du règlement de la grève + tortures des policiers par les grévistes p. 282-283 Conclusion de la grève célébrée par « l’intelligentsia gauchiste » du Devoir p. 283 À la clôture du banquet de l’après-grève, sur la question de savoir si les syndicats ont le droit de co-gérer le personnel avec les patrons, Duplessis répond que les lois sociales au Québec sont les meilleures, les plus avancées, etc. puis dénonce les monopoles tout en faisant l’éloge de l’entreprise privée; bref, beaucoup de blabla, rien de concret p. 292 Arbitrage se poursuit p. 301 Les syndicats catholiques sont désavantagés par rapport aux internationaux, Duplessis abaisse la majorité requise – il faudrait abandonner leur caractère confessionnel, ce qu’ils refusent évidemment p. 301 Règlement final de la grève d’Asbestos p. 307-310


Un État dans l’État, t. 2, p. 26.

Commission Tremblay sur les problèmes constitutionnels[modifier | modifier le code]

En 1953, Maurice Duplessis nomme le juge Noël Tremblay afin de présider une Commission royale d’enquête sur les problèmes constitutionnels, mieux connue sous le nom de Commission Tremblay. Cette commission d'enquête sera chargée d'étudier « le problème des relations fédérales-provinciales au Canada du point de vue fiscal, dans le cadre de la lutte menée par Québec contre la politique centralisatrice d’après-guerre du gouvernement fédéral »[z 35].

En parallèle de cette commission d'enquête, une loi crée les postes d'adjoints parlementaires, « afin de freiner les ambitions des jeunes députés ministériels » Robert Rumilly t. 2, p. 516.

Impôt provincial[modifier | modifier le code]

Le 14 janvier 1954, le ministre des Finances Onésime Gagnon dépose un projet de loi créant un impôt provincial sur le revenu. La loi est rétroactive au 1er janvier[z 36].

Bill 34[modifier | modifier le code]

En 1954, l'Union nationale fait modifier la loi électorale afin qu'un seul énumérateur (au lieu de deux) soit choisi pour constituer les listes électorales. Cette loi controversée a permis de faire des listes qui discriminaient les électeurs favorables aux libéraux[b 24].

Création de l'Université de Sherbrooke[modifier | modifier le code]

Nouvel affrontement sur la législation ouvrière (1954)[modifier | modifier le code]

Cinq ans après les événements de la grève d'Asbestos, le gouvernement qui avait dû reculer, suite à la controverse du bill 5, revient sur le dossier des relations ouvrières en présentant côte à côte deux nouveaux projet de loi, les bills 19 et 20, permettant de retirer l'accréditation à un syndicat comptant des sympathisants communistes parmi ses membres, et ce, même de façon rétroactive[z 37].

Grève au Devoir Rumilly t. 2, p. 524-525.

Élection de 1956[modifier | modifier le code]

Fin de la Loi du cadenas[modifier | modifier le code]

En mars 1957, huit des neufs juges de la Cour suprême déclarent que la « loi du cadenas » outrepasse la compétence de la province en ce qui concerne la limitation de la liberté d'expression. Le juge Rand résume l'affaire ainsi : « L'objet de la législation, comme en témoigne la désignation, consiste à prévenir la propagation du communisme et du bolchevisme, mais pourrait aussi bien viser la suppression de tout autre doctrine ou théorie politique, économique ou sociale »[z 38]. En ce qui concerne le droit à la libre expression, ainsi que la capacité du gouvernement provincial de la limiter, il ajoute : « La liberté est aussi essentielle à l'esprit humain que l'est la respiration à l'existence physique de l'être humain. Comme elle est inhérente à l'individu, elle est inhérente à sa citoyenneté. Par exemple, toute mise hors la loi, par le retrait du statut civil et l'annulation de la citoyenneté, concerne uniquement une société à charte fédérale »[z 39]. Seul le juge Taschereau se montrera dissident. Il prétend qu'il s'agit d'une loi foncière, et non d'une loi pénale, conçue pour régir l'utilisation des propriétés et non les comportements criminels. Mais ses propos seront en vain ; la loi est déclarée anticonstitutionnelle le 8 mars 1957.

Grève de Murdochville[modifier | modifier le code]

La grève de Murdochville oppose les mineurs des Métallurgistes Unis d'Amérique, affiliés à la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ), à la Gaspé Copper Mines, filiale de la Noranda Mines. Celle-ci refuse de reconnaître le syndicat et utilise les tribunaux pour empêcher la Commission des relations ouvrières (CRO) de lui accorder un certificat d'accréditation. La grève est déclenchée lorsque le président du syndicat, Théo Gagné, est temporairement mis à pied. La grève durera plus de sept mois et sera ponctuée de violences, d'interventions de la Police provinciale ainsi que d'une marche de solidarité du mouvement ouvrier, le 19 août. Le conflit se dénouera le 5 octobre alors que 80 % des 300 travailleurs présents à une assemblée syndicale accepteront de retourner au travail. Plusieurs travailleurs perdront tout de même leur emploi au profit des briseurs de grève engagés par la compagnie pendant le conflit. Par sa longueur, sa dureté et l'implication de la population qui soutient les ouvriers en leur envoyant des vivres, la grève de Murdochville est souvent considérée comme le dernier grand conflit syndical avec le gouvernement de Maurice Duplessis.

Grève étudiante de 1958[modifier | modifier le code]

En 1958 se produit la première véritable grève étudiante au Québec.

Affaire du gaz naturel[modifier | modifier le code]

Le 13 juin 1958, Le Devoir met en lumière une affaire qui caractérisera à jamais la fin du régime de Duplessis. Le reportage rapporte que des fonctionnaires de l'Hydro-Québec auraient reçu des faveurs afin de faciliter la vente du réseau de gaz à une compagnie privée dont certains actionnaires seraient des ministres du gouvernement. Duplessis ne sera pas personnellement éclaboussé par le scandale, mais le gouvernement lui-même sera frappé d'un grand discrédit. Parmi les ministres impliqués, on retrouve John Bourque, Antonio Barrette, Paul Dozois et Daniel Johnson.

Dénouvement de l'affaire Roncarelli[modifier | modifier le code]

Le 27 janvier 1959, la Cour suprême donne finalement raison à Frank Roncarelli, mettant fin au conflit qui l'oppose au premier ministre depuis treize ans. Cette décision fera jurisprudence en matière de liberté de religion au Canada.

Mort de Duplessis[modifier | modifier le code]

À l'automne 1959, le président de la compagnie Iron Ore, J. H. Thompson, et l'ingénieur minier, Jules R. Timmins, invitent le premier ministre à faire un voyage dans la région de l'Ungava pour visiter les mines et les chantiers de la compagnie. Le 2 septembre, à dix heures du matin, Duplessis prend l'avion à Québec en compagnie de cinq compagnons : Gérald Martineau, son neveu Jacques Bureau ainsi que trois députés : Lucien Tremblay, Maurice Custeau et Gérard Thibeault. Le 3 septembre, Duplessis et son groupe se lèvent de bonne heure. Tandis que le maire de Schefferville conduit un groupe à une partie de pêche, Duplessis, Martineau et d'autres vont visiter les mines de fer de l'Iron Ore. Duplessis semble avoir moins d'entrain que d'habitude. Après la visite, le groupe entre au chalet de la compagnie. Duplessis fume un cigare en parlant avec des amis tandis que Martineau se retire pour aller se reposer. Accoudé à la fenêtre, Duplessis s'écroule soudainement, foudroyé. On le transporte sur un divan. On appelle alors par téléphone le Dr Horst Rosmus, médecin d'origine allemande de l'Iron Ore et seul médecin de Schefferville. Le médecin prononce son diagnostic : paralysie cérébrale. Gérald Martineau croyant à une crise de diabète, tente d'atténuer la situation, mais rien à faire. Après avoir reçu l'Extrême-Onction, Duplessis fait trois autres attaques.

Le samedi, d'autres docteurs viennent avec des infirmières pour évaluer l'état du malade. La situation est sans espoir. La nouvelle se répand alors et des journalistes s'amassent près du chalet pour tenter d'obtenir plus d'informations. Un cordon de police doit être établi autour du chalet pour préserver la tranquillité. Le dimanche, la respiration devient irrégulière et l'état s'aggrave.

Le lundi, quelques minutes après minuit, Maurice Duplessis rend le dernier soupir, entouré de sa sœur madame Bureau, de son neveu Jacques, de son ami Martineau, du médecin, d'une garde-malade, du chef cuisinier, son fils et son fils. On emprunte un drapeau fleurdelysé à la Commission scolaire pour envelopper son cercueil.

À sa mort, il laisse une dette de 42 000 $ à la Banque provinciale du Canada. Quatre jours plus tard, Paul Sauvé lui succède comme chef de l'Union nationale et premier ministre du Québec.

Caractère[modifier | modifier le code]

De son vivant, Maurice Duplessis était une figure très populaire auprès de la petite bourgeoisie francophone et de la classe pauvre du Québec. Orateur habile, il se démarquait par ses calembours et ses mots d'esprit, de même que par ses références à la religion catholique et par ses expressions imagées tirées de la vie de tous les jours. Dans sa biographie, Conrad Black le décrit de cette manière :

Pour résumer, c'était un homme à l'allure distinguée selon le modèle traditionnel de la haute bourgeoisie française provinciale, le visage anguleux, le nez proéminent, un sourire splendide, une chevelure épaisse, et une moustache mince et soignée. Il faisait cinq pieds neuf pouces, s'habillait avec goût, portait toujours des complets sobres, bruns ou bleus et rarement plus extravagants que le veston croisé, aux larges revers, le gilet, la cravate de soie et la pochette assortie […] Duplessis prit du poids en vieillissant et son pas se ralentit mais il garda jusqu'à la fin l'intensité foudroyante de son regard[b 25]

.
Pierre Laporte écrivit à propos de Duplessis : « Étonnamment vifs et intelligents, ses yeux étaient le miroir fidèle de toutes les impressions désagréables ou agréables qui se bousculaient dans ce cerveau toujours en ébullition... Les yeux de monsieur Duplessis avaient, enfin, un magnétisme inexprimable, irréel. Que de fois des députés ont critiqué entre eux certaines attitudes du chef, se sont encouragés les uns les autres à protester, ont décidé de s'en ouvrir carrément à monsieur Duplessis. Une fois devant lui, ils ont été sans voix pour exposer leurs griefs. Ils n'avaient pu soutenir le regard de ce meneur d'hommes »[z 40].

Formé aux principes catholiques et conservateurs de la bourgeoisie canadienne-française de la fin du XIXe siècle, Duplessis croyait fermement en l'autorité absolue de l'Église et en son rôle de premier plan dans la gestion des questions sociales. Une alliance entre l'Église et l'État reflétait non seulement l'état des choses depuis les premiers temps, mais elle permettait aussi la survie d'une identité canadienne-française par ses traditions et ses coutumes renforcées par leur caractère intemporel. Duplessis concevait la société canadienne-française comme étant principalement francophone, pauvre et catholique. Cette conception consacrait donc la classe agricole comme étant la base de la société canadienne-française et visait à assurer la perpétuité de cette classe en la plaçant au centre des considérations politiques. En cela, Duplessis s'inscrivait tout à fait dans la mentalité de son époque. Un de ses surnoms populaires était « Chef » ou « le Chef », faisant référence à son caractère autoritaire.

Aujourd'hui, l'image de Duplessis est très souvent présentée de façon négative. Son nom demeure encore associé à une conception dépassée de la société québécoise, faisant de lui un despote dominant son cabinet et son régime avec une poigne de fer, s'accrochant à des valeurs ou à des principes déconnectés de la réalité[d 8][z 41]. Dans la plupart des cas, Duplessis fait figure de politicien réactionnaire et assoiffé de pouvoir, ennemi de la classe ouvrière et des libertés civiles, multipliant les tactiques de répression et de corruption pour parvenir à ses fins et se maintenir au pouvoir, au détriment de la population. Cette image est grandement due en partie à la controversée loi du cadenas, votée en 1937. Si, à l'époque de sa création, cette loi répondait à une question d'actualité et à une demande véritablement présente au sein de la population demandant au gouvernement provincial de se doter d'une position par rapport à la question du communisme, de nos jours, cette loi est perçue comme l'un des plus forts symboles du caractère autoritaire du régime Duplessis et de sa conception limitée des libertés civiles. À l'origine, cette loi devait servir à mettre un terme aux activités des sympathisants communistes au Québec. Toutefois, son application s'est peu à peu élargie, au point d'être employée non pas seulement contre des gens ayant une forme de sympathie pour la cause communiste mais plutôt envers ceux qui s'opposaient d'une façon ou d'une autre à Duplessis et au régime de l'Union nationale. Malgré la forte contestation dont elle fut l'objet, il importe de rappeler que cette loi fut votée à l'unanimité lorsqu'elle fut présentée en 1937.

L'image négative de Duplessis est aussi due à son attitude peu flexible par rapport aux revendications des syndicats ouvriers.

Même si la recherche a fortement contribué à nuancer cette image depuis la Révolution tranquille, elle demeure fortement présente dans la culture populaire de nos jours.

Vie personnelle[modifier | modifier le code]

Duplessis ne s'est jamais marié et n'a pas eu d'enfants. Toutefois, il n'a pas été célibataire toute sa vie. En effet, comme le rapporte Conrad Black dans sa biographie : « pendant la Première Guerre mondiale, Duplessis fit une cour assidue à Augustine Delisle, fille d'un marchand de charbon prospère. Il est probable qu'ils auraient fini par se marier, n'eût été de la famille Duplessis, y compris les tantes, qui désapprouvaient un mariage l'unissant à une famille de commerçants. Finalement, et non sans amertume, Duplessis déféra aux souhaits de sa famille. Mais par la suite, à chaque fois qu'il mentionnait certains de ses parents, il le faisait d'une façon sarcastique et mordante qui laissait poindre son ressentiment. À compter de ce jour, il sembla avoir pris la décision de ne jamais se marier. Personne n'a souvenance et rien n'indique que, parmi ses nombreuses relations féminines, il y eut jamais la moindre possibilité d'un mariage »[b 26].

Il est toutefois resté un homme de famille et fut très proche de ses sœurs, beaux-frères, neveux et nièces. Il eut divers problèmes de santé. Il souffrit notamment du diabète et dû se faire des injections d'insuline quotidiennement. Aussi, bien qu'il ne fut pas le seul homme public de son temps à en souffrir, il eut pendant une bonne partie de sa vie des problèmes liés à l'alcoolisme. En 1943, il cessa définitivement de boire de l'alcool.

Pour s’occuper dans ses loisirs, Duplessis aimait particulièrement les sports. Il assistait régulièrement aux parties du Canadien et écoutait à la radio les parties de baseball des Yankees de New York durant les séries mondiales. Peu actif physiquement, il aimait toutefois jouer au croquet et entraînait même une équipe de baseball dans son patelin trifluvien.

Malgré l'image publique qu'il donnait de lui-même et certaines rumeurs qui ont persisté longtemps, même après sa mort, Duplessis était aussi un amateur de lecture, de même que d'opéra. S'il aimait en particulier les ouvrages sur l'histoire et la politique, il lisait aussi les grands auteurs classiques de la littérature française et anglaise dont Rudyard Kipling, Tennyson et Shakespeare[a 73]. Enfin, plus tard dans sa vie, il développa un goût pour la peinture et deviendra un collectionneur de tableaux.

Héritage politique[modifier | modifier le code]

La « Grande noirceur »[modifier | modifier le code]

La statue de Maurice Duplessis à côté de l'Hôtel du Parlement, à Québec. L'œuvre, commandée à Émile Brunet par Paul Sauvé, le successeur de Duplessis, fut livrée en 1961 au gouvernement libéral de Jean Lesage et demeura entreposée durant près de 16 ans, avant d'être dévoilée en 1977.

Depuis la mort de Duplessis, la période de son règne a été appelée la « Grande Noirceur ». Cette expression trouve son origine dans les écrits des pamphlétaires d'une revue nommée Cité Libre, dans laquelle de nombreux intellectuels, progressistes et adversaires de Duplessis dénonçaient des pratiques du gouvernement de l'Union nationale, du clergé et de la classe régnante de l'époque, perçues comme arbitraires et abusives. Le terme a ensuite été popularisé par l'historiographie de la Révolution tranquille dans un désir de marquer un rejet d'une époque désormais perçue comme dépassée, opposée au progrès, à la modernité et aux réformes sociales souhaitées. En rejetant l'époque de Duplessis, une époque d'effervescence économique, technologique et culturelle se dessinait et marquait l'émergence d'une société moderne, consacrée dans une affirmation de l'identité francophone dans les plus hautes sphères de pouvoir et influence de la société québécoise.

L'époque de Duplessis représentait désormais l'ancienne société québécoise, et incarnait tout Le jugement de l'histoire a souvent été dur envers Duplessis. Certains font valoir qu'il présida à une longue période d'une forte croissance économique et a déposé 15 budgets équilibrés consécutifs, ce qui n'était pas difficile, considérant qu'il y avait peu de services publics. Le trafic d'influence systématique de son gouvernement est légendaire, mais celui-ci ne différait pas tellement de ce qui se passait sous les libéraux de Taschereau dans les décennies précédentes ; Duplessis ne s'est jamais enrichi personnellement, et il mourut endetté.

Les gouvernements de Duplessis furent caractérisés par l'usage non restreint du trafic d'influence, la lutte anti-communiste, l'emploi de la manière forte contre les syndicats et une machine électorale invincible. Son initiative anticommuniste la plus célèbre fut la Loi protégeant la province contre la propagande communiste[z 42], surnommée « la loi du cadenas ». L'Union nationale jouissait souvent de l'appui actif de l'Église catholique romaine dans les campagnes électorales.

« Bien que le récit de la Grande noirceur ait été remis en question dans le monde académique depuis les années 1970, son influence se fait encore ressentir ; en l’occurrence, on désigne encore aujourd’hui dans la langue commune la période de 1936 à 1960 comme étant la Grande noirceur »[d 9].

Accusations de corruption[modifier | modifier le code]

Accusations de trafic d'influence[modifier | modifier le code]

Globalement, Duplessis a repris le modèle de favoritisme politique en vigueur lors du régime des libéraux de Taschereau, entretenant le statu quo dans certaines potions de la société, afin de se concentrer sur le financement et le développement d'autres projets, notamment au niveau des infrastructures, et aussi surtout pour préserver la faveur des électeurs et des membres de la fonction publique du bord de l'Union nationale. Cette culture politique se manifestait de différentes façons dans la population, menant parfois à des abus de pouvoir mémorables qui ont en bonne partie constitué l'image contemporaine de l'époque de Duplessis. On peut entre autres penser aux promesses de donner des cadeaux en argent, mais aussi des cadeaux sous forme de services (emploi, rénovation domestique, entretien, etc.) ou de biens matériels (électroménagers, télévisions, voitures, etc.).

Voir Vincent Lemieux et Raymond Hudon, Patronage et politique au Québec 1944-1972, Éditions du Boréal Express, Montréal, 1975.

Postérité[modifier | modifier le code]

Dès 1959, l'Union nationale commande au sculpteur Émile Brunet une statue à l'effigie de son chef disparu. Complétée en 1961, cette statue restera toutefois dans l'ombre jusqu'à ce que son emplacement soit révélé par un ancien Assistant procureur général lors d'une émission de télévision, Appelez-moi Lise, en mars 1973, où l'on révèle que la statue se trouvait dans un entrepôt du ministère de la Justice situé au 54 rue Dorchester Ouest, à Québec. Par la suite, une équipe de journalistes de La Presse, accompagnée du ministre de la Justice Jérôme Choquette, se rendra à l'entrepôt en question pour constater ce fait. Il faudra attendre à l'automne 1977 avant que le gouvernement de René Lévesque décide d'installer la statue sur son emplacement actuel, sur le parterre ouest de l'Assemblée nationale.

En 1973, Robert Rumilly publie une biographie en deux tomes, intitulée Maurice Duplessis et son temps. Celle-ci se découpe en deux périodes, soit de 1890 à 1944 et de 1944 à 1959.

En 1976, Conrad Black publie une autre biographie de l'homme politique, intitulée Duplessis. Cette biographie s'inspire du mémoire de maîtrise en histoire de Conrad Black (fait au cours de ses études à l'Université McGill) portant sur la correspondance personnelle de Duplessis entre 1927 et 1939, ainsi que de la biographie écrite par Rumilly.

Puis, en 1977, une série télévisée portant sur la vie de Maurice Duplessis est produite par la Société Radio-Canada. Cette série de sept épisodes, réalisée par Mark Blandford et écrite par Denys Arcand, offre un portrait dramatique de Maurice Duplessis et des personnages qu'il a côtoyés[b 27]. La série découpe la vie de Duplessis en sept épisodes différents, chacun révélant un aspect particulier de la personnalité de l'homme politique[d 10][z 43].

Ce qui caractérise le règne de Duplessis, c'est la naissance d'un mouvement d'affirmation de la majorité francophone qui réclamait un contrôle plus important sur l'économie et la vie intellectuelle et artistique du Québec. Ce mouvement mena entre autres à la montée du syndicalisme et au développement d'une vie intellectuelle qui permettra la Révolution tranquille lorsque le pouvoir politique changera de main. L'opposition de Duplessis à ces changements, son insistance à museler les syndicats et son manque d'ouverture envers les revendications des francophones qui aspirent à contrôler leur destinée, comme celles qui sont résumées dans le manifeste du Refus global (9 août 1948), feront de lui la bête noire des réformateurs. La révolution tranquille, qui cristallisera ces revendications dans la création d'institutions nouvelles et dans un changement en profondeur de l'ensemble de la société, cristallisera aussi un ressentiment des intellectuels envers Duplessis. Ses alliés resteront aussi stigmatisés, puisque désormais ce sera la gauche qui pourra profiter du nationalisme, que le clergé perdra rapidement non seulement son contrôle sur l'éducation francophone et sur les hôpitaux, mais aussi ses fidèles, puisque les églises seront rapidement désaffectées, et qu'enfin la minorité anglophone perdra son monopole sur l'économie du Québec.

Les profonds changements qui bouleversèrent la société québécoise lors de son règne menèrent à l'apparition d'une société moderne qui a pris son essor pendant son règne et après sa mort.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Son projet prévoyait mettre le crédit agricole sous le contrôle d'une commission indépendante, possédant un caractère d'impartialité et de compétence, pouvant émettre des obligations garanties par la province et faisant aux cultivateurs sérieux des prêts à un taux ne dépassant pas l'intérêt payé sur ses propres obligations.
  2. Dans sa biographie consacrée à Duplessis, Bernard Saint-Aubin écrit que cette décision coûtera cher au député Hormisdas Langlais et qu'il ne sera jamais nommé ministre à cause de son rôle dans cette affaire.

Références[modifier | modifier le code]

Robert Rumilly, Maurice Duplessis et son temps, Montréal, Fides, 1973.
  1. t.1, p. 21.
  2. t.1, p. 14.
  3. t.1, p. 15.
  4. t.1, p. 26.
  5. t.1, p. 29.
  6. t.1, p. 56.
  7. t.1, p. 57.
  8. t.1, p. 64.
  9. Id.
  10. t.1, p. 96.
  11. t. 1, p. 144.
  12. t. 1, p. 143. Laurent Barré avait proposé d'instaurer un crédit agricole similaire à celui de l'Ontario, en place depuis 1922, mais Duplessis refusera d'appuyer cette idée.
  13. t. 1, p. 144.
  14. t. 1, pp. 169-170.
  15. t. 1, p. 185.
  16. t. 1, p. 151.
  17. t. 1, p. 153.
  18. Id.
  19. t. 1, p. 154.
  20. t. 1, p. 195. En plus des nombreux traits communs entre les programmes des deux partis, des questions de coûts de campagne électorale et de manque de candidats poussent les partisans à réfléchir à une entente, voire à une fusion. Paul Gouin, homme courtois et posé, est ouvert à la discussion. S'il a grand souci de respecter l'opinion de chacun, il demeure plutôt timide comme chef.
  21. t. 1, pp. 196.
  22. t. 1, pp. 196.
  23. t. 1, pp. 197.
  24. t. 1, pp. 199. Il offrira d'ailleurs un chèque personnel de 1 000 $ à la caisse électorale du parti.
  25. t. 1, p. 199.
  26. t. 1, pp. 200-201.
  27. t. 1, p. 203.
  28. Id.
  29. « Reste à surveiller les urnes. La police provinciale - la police de Charles Lanctôt - s'en charge en théorie, mais avec quel zèle et en quel sens ? À Montréal, dans la division Saint-Laurent, le lord-évêque Farthing, se présentant pour voter, constate que quelqu'un d'autre a déjà voté en son nom [...]. Dans d'autres quartiers, des groupes de mauvaise mine, venus en taxi, entrent en rafale dans les bureaux de vote, s'en emparent, en gardent le contrôle jusqu'à la fermeture », t. 1, p. 205.
  30. Après l'élection, le Dr Camille Pouliot réussit à établir des exemples de corruption et même à faire condamner des agents électoraux. t. 1, pp. 204-205.
  31. t. 1, p. 227.
  32. t. 1, p. 233-236.
  33. t. 1, pp. 236-239.
  34. t. 1, p. 229.
  35. t. 1, p. 230.
  36. t. 1, p. 237.
  37. « Voleurs, bandits, canailles, parjures, guêpes et cochons sont les moindres épithètes décochées aux ministres, à leurs parents et à leurs partisans », t. 1, p. 234.
  38. t. 1, p. 235.
  39. t. 1, p. 243
  40. t. 1, pp. 241-246
  41. « M. Duplessis a pris ce solennel engagement, sur son honneur. Vous n'avez pas le droit de douter de la signature de Maurice Duplessis, surtout après ce qu'il a fait au Parlement. M. Duplessis s'est battu, et il a fait sombrer le régime. J'aime un homme qui se bat, et non un homme qui regarde faire », t. 1 p. 248.
  42. t. 1, p. 251
  43. t. 1, p. 256
  44. t. 1, p. 251.
  45. t. 1, p. 249.
  46. t. 1, p. 266.
  47. t. 1, p. 269.
  48. t. 1, p. 236.
  49. t. 1, p. 236.
  50. t. 1, p. 238.
  51. t. 1, p. 238.
  52. t. 1, p. 268.
  53. « L'arrivée au pouvoir d'un nouveau parti politique entraîne forcément un remue-ménage. Certaines fonctions exigent une atmosphère de confiance entre le titulaire, le chargé d'exécution, et le ministre, son chef, qui fournit les directives et assume les responsabilités. Les libéraux considérant l'administration comme leur fief, avaient placé, du haut au bas de l'échelle, toute une clientèle de parents, amis et partisans », t. 1, pp. 273-274.
  54. t. 1, p. 268.
  55. t. 1, p. 288.
  56. t. 1, p. 277.
  57. La loi, qui est essentiellement l'oeuvre du notaire Poirier, de son ami Guérin, d'Albert Rioux et d'Édouard Asselin, permet à l'Office du crédit agricole d'emprunter jusqu'à dix millions de dollars, avec l'autorisation et la garantie du gouvernement, et de consentir aux cultivateurs des prêts sur première hypothèque jusqu'à concurrence de 75 % de la valeur de chaque ferme, sans dépassé 6000 $. Ces prêts, au taux d'intérêt de 2½ %, sont remboursables en 30 ou 39 ans selon le taux d'amortissement. L'emprunteur ou ses ayants droit peuvent rembourser par anticipation, en tout ou en partie, t. 1, pp. 293-294
  58. « Lucien Lamoureux, député libéral d'Iberville, enthousiasmé par l'annonce du crédit agricole provincial, laisse prévoir son ralliement au gouvernement Duplessis : 'Avant tout, dit-il, je suis un député cultivateur », t. 1, p. 289.
  59. t. 1, p. 277.
  60. t. 1, p. 277.
  61. t. 1, p. 301.
  62. « La 'bonne presse' a souvent dénoncé la tradition 'humiliante' en vertu de laquelle un Anglo-Canadien gère le Trésor provincial. Or les apôtres de 'l'ordre nouveau' formant un cabinet, remettent le Trésor provincial à un bon Anglais des Cantons de l'Est, nomment encore deux ministres de langue anglaise et confient le lancement de l'emprunt, non pas à un financier canadien-français [...] mais à un Anglo-Canadien qui s'abouche à son tour avec sir Herbert Holt, président de la Banque Royale et modèle des trustards canadiens... », t. 1, p. 289.
  63. Les champions de l'ordre nouveau devaient dissiper l'influence de la haute banque et empêcher le cumul des fonctions. Ils font présider le Conseil législatif par le vice-président de la Banque provinciale et confient la défense de leurs mesures à la Chambre haute, à un conseiller qui est en même temps sénateur et qui, tout en démissionnant comme administrateur, reste actionnaire de la Banque canadienne nationale... L'assurance collective des fonctionnaires est enlevée à des compagnies de la province - la Sun Life en avait un fort paquet, la Sauvegarde en détenait 15% - et transférée à la Dominion Life, compagnie ontarienne... », t. 1, pp. 289-290.
  64. t. 1, p. 279.
  65. t. 1, p. 464
  66. t. 1, p. 285.
  67. t. 1, p. 285.
  68. t. 1, p. 325.
  69. t. 1, p. 325.
  70. t. 1, p. 326
  71. t. 1, p. 327
  72. Au cours d'un congrès de l'automne 1944, « Humphrey Mitchell, ministre fédéral du Travail, insiste sur l'utilité du Code fédéral du travail et paraît souhaiter son maintien après la guerre », t.2, p. 16.
  73. t.1, p. 30.
Conrad Black, Duplessis, Montréal, Éditions de l'Homme, 1977.
  1. t.1, p. 15.
  2. t.1, p. 17.
  3. t.1, p. 23.
  4. t.1, p. 25.
  5. t.1, p. 27.
  6. t.1, p. 30.
  7. t.1, pp. 30-32.
  8. t.1, p. 53.
  9. t.1, p. 73.
  10. « L'organisation centrale du parti conservateur évaluait le nombre de votes 'télégraphiés' par les libéraux dans Montréal à 8 000, et à 4 500 dans Québec (votes de personnes qui se font passer pour d'autres au bureau de scrutin, votes de personnes décédées) », t.1, p. 93.
  11. t.1, p. 79.
  12. t.1, p. 73.
  13. t.1, p. 99.
  14. t.1, po. 270-271.
  15. « En dernier ressort, les libéraux, encore plus attentifs aux besoins de l'électorat en cette dernière semaine de campagne qu'ils ne l'étaient d'habitude au moment des élections, ouvrirent grandes les portes de chaque ministère d'où, sous le moindre prétexte, l'argent coulait à flots. On donna des contrats pour la construction de chemins et de travaux publics, on signa des chèques destinés à la colonisation, on augmenta les salaires des fonctionnaires, on distribua bourses, pensions et prestations de chômage, et finalement, des octrois à l'agriculture et aux pêcheries emportèrent ce qui restait du Trésor épuisé, vidé avec une spontanéité qui faisait fi de toute prudence. Les libéraux, au pouvoir depuis quarante ans, « étaient largement avantagés sur le plan financier durant la campagne. Armés d'argent liquide, ils pouvaient se permettre d'aller à la chasse aux votes », t. 1 p. 73.
  16. t. 1, p. 201.
  17. t. 1, pp. 220-226.
  18. t. 1, p. 228.
  19. « L'Union nationale remporta 57,5 % du vote populaire, une augmentation de près de 10 points; quant aux libéraux, ils n'avaient plus que 41 % du vote, 21 % de moins que lors de la victoire de Taschereau en 1927 », t. 1, p. 230.
  20. t.1, p. 228. Le premier ministre Godbout est défait dans L'Islet, alors que T.-D. Bouchard se fait élire par une faible majorité de cinquante-sept voix dans Saint-Hyacinthe et Charles-Auguste Bertrand gagne par seulement quatorze voix.
  21. t. 1, p. 232.
  22. t. 1, pp. 274-277.
  23. t. 1, p. 242.
  24. t. 2, p. 134.
  25. t. 2, p. 553
  26. t.1, p. 31.
  27. p. 103.
Xavier Gélinas et Lucia Ferretti, Duplessis, son milieu son époque, Québec, Septentrion, 2010.
  1. « Il apparaît rationnellement impossible qu'un régime qui ne fut tout de même pas sanguinaire ait pu gouverner le Québec pendant dix-huit ans – en recevant cinq mandats majoritaires – sans que son leader ait eu au moins quelques qualités compensatoires, sans que son administration ait pris au moins quelques bonnes décisions », pp. 20-21.
Pierre Berthelot, Maurice Duplessis : mises en récit d'un personnage historique, Montréal, 2014.
  1. « Parmi les accusations les plus fréquentes, on retrouve la corruption, le despotisme, l'arrogance, l'antidémocratisme, le paternalisme, une conception rétrograde de l'État (avec des conséquences néfastes sur l'éducation, la santé, les services sociaux et l'administration publique), l'anticommunisme délirant (la loi du cadenas) joint à un antisyndicalisme virulent (grèves historiques de 1949, 1952, 1957), la dilapidation des ressources naturelles, le mépris de la démocratie, la complaisance à l'égard de l'Église catholique, et surtout, 'l'autonomisme défensif, frileux, utilisé comme un gri-gri pour flatter le peuple' », p. 8.
  2. « Durant ses dernières années, on dénotait chez Duplessis certaines attitudes quasi monarchiques. Ses victoires politiques répétées, ses sentiments religieux, ses affectations de seigneur le portaient à croire qu'il régnait sur le Québec par un bizarre alliage de volonté populaire, de droit divin et d'aptitude naturelle. […] Ce même Duplessis qui ne pouvait parler d'aucune personne ou d'aucun objet ayant le moindre rapport avec l'Union nationale, qu'il s'agisse de ministres ou de comtés entiers, sans y apposer avaricieusement l'adjectif possessif "mon", continua toujours à se faire le champion de causes populaires d'une façon populaire  », t. 2, p. 560.
  3. Cette façon de faire était répandue au gouvernement provincial, mais aussi dans d'autres provinces, ainsi qu'au niveau fédéral, t. 1, p. 26.
  4. On relève quelques cas d'exception, notamment celui de Léon Lambert, chef de la Sûreté provinciale pour le district de Québec, qui sera gardé en poste jusqu'en 1960. P. 57.
  5. p. 115.
  6. p. 115.
  7. p. 115.
  8. p. 26.
  9. p. 124.
  10. p. 104.
Autres références
  1. Dans son ouvrage, Paul-André Linteau affirme que Duplessis joue « habilement la corde nationaliste en défendant haut et fort l’autonomie provinciale contre les empiétements de la centralisation fédérale [mais] qu’il a peu à offrir en contrepartie et [que] son nationalisme, fortement teinté de traditionalisme, reste purement défensif ». Paul-André Linteau et al. L’Histoire du Québec contemporain : Le Québec depuis 1930, t. 2, Éditions du Boréal, 1989, p. 208.
  2. Selon les recherches de l'historien Marcel Trudel, son ancêtre paternel en ligne directe, Jean-Baptiste Duplessis, était l'esclave Mascoutin de Louis Gastineau Duplessis.
  3. Dans une lettre adressée à Duplessis datée du 28 août 1931, Sasseville Roy, le candidat conservateur défait dans Abitibi décrit les innombrables 'télégraphes' passés de connivence avec le scrutateur : « Nous avons été magistralement roulés à travers la province. Ici, ils l'ont simplement volé ». De semblables rapports affluèrent de tous les secteurs de la province, comme l'indique la correspondance échangée entre Duplessis, Maurice Dubûle, Romuald Dostaler d'août 1931 à février 1932.
  4. Le Devoir, 4 octobre 1933, p.1,3 et 8, et 5 octobre 1933, p.1, 3, 6 et 10.
  5. Extrait de l'accord secret entre Paul Gouin et Maurice Duplessis, 7 novembre 1937.
  6. Compte rendu sténographique de l'Enquête du Comité des Comptes publics par H.-P. Hould et Fernand Ouellet, sténographes officiels.
  7. Robert Rumilly rapporte que dans des assemblées partisanes de cette période, certains se promenaient même en brandissant une paire de culottes au bout d'une perche pour symboliser lesdites « culottes à Vautrin ». Présent édition québécoise, émission radio, 20 février 1974 [1].
  8. « Le régime Taschereau se solidarise avec M. Charles Lanctôt », Le Devoir,‎ , p. 1.
  9. Le Devoir, 10 août 1936
  10. Alain Lavigne, Duplessis, Pièce manquante d'une légende, L'invention du marketing politique, Septentrion, 2012, p. 34.
  11. Alain Lavigne, op. cit., p. 34.
  12. Alain Lavigne, op. cit., p. 36.
  13. Alain Lavigne, op. cit., p. 34.
  14. Il est important de noter qu'il ne s'agit pas de la première occasion où un parti politique québécois s'inspirait de la publication religieuse pour faire connaître son programme. Le Catéchisme politique, publié en 1851 par Antoine Gérin-Lajoie, suivait la même formule religieuse, avec lui aussi une forme de questions et de réponses.
  15. Le catéchisme des électeurs. Montréal, J. B. Thivierge et fils, 1936.
  16. Le Devoir, 17 août 1936.
  17. « On accuse Duplessis d'avoir abusé d'un paternalisme ancré dans l'autoritarisme et le favoritisme. C'était là un comportement revêtant au Québec l'ampleur d'un système en vigueur depuis des temps immémoriaux. Il imprégnait les hauts dignitaires ecclésiastiques, les fondés de pouvoir dans tous les domaines et les élites. Plus près du peuple dont ils étaient issus, les notables locaux faisaient montre de dignité envers la population ». Léon Dion, Québec 1945-2000 Tome II : Les intellectuels et le temps de Duplessis, Presses de l'Université Laval, Québec, 1993, pp. 161-162.
  18. Vincent Lemieux, p. 159.
  19. Réal Bélanger, Richard Jones, Marc Vallières, Les grands débats parlementaires, 1792-1992, Presses de l'Université Laval, Ste-Foy, 1994, pp. 214-215.
  20. Paul-André Linteau et al., op. cit., p. 77.
  21. Christian Blais, Introduction historique, 20e législature, 2e session (24 février 1937 au 27 mai 1937), site Web de l'Assemblée nationale, [2].
  22. Le Devoir, 26 octobre 1936, p. 1.
  23. 1 Geo. VI (1937), chap. 11; S.R.Q. 1941, chap. 52, Loi protégeant la province contre la propagande communiste.
  24. « La Législation communiste dans le monde », Montréal, L'ouvre des Tracts, No 307, août 1939, 32p. pp. 28-31.
  25. En effet, un tisserand touchait un salaire moyen de 15 $ par semaine pour 60 heures de travail. Alfred Charpentier, « La Grève du Textile dans le Québec en 1937 », Relations industrielles / Industrial Relations, vol. 20, n° 1, 1965, pp. 86-127.
  26. Jacques Rouillard, Les grèves de Sorel en 1937. Un bras de fer entre la famille Simard et le curé de Saint-Pierre, Mgr Philippe-S. Desranleau, Sorel, Société Historique Pierre-de-Saurel, Collection Bibeau, 2010, p. 86.
  27. L'année suivante, la Dominion Textile refusera de renouveler la convention collective signée en 1937.
  28. Sylvie Daigle, L'administration du secours direct durant la crise des années 1930 à Montréal : Les enquêtes de 1937, Montréal, 2012, [3]
  29. Anonyme, «La conférence fédérale-provinciale reprendra le 28 janvier» , Le Devoir, 4 janvier 1946, p. 1.
  30. « De 1940 à 1961, 40 établissements de ce genre seront ouverts », Paul-André Linteau et al., op. cit., p. 340.
  31. Accusés de conspiration séditieuse, Parent et Beaucage ne seront acquittés qu'en 1954.
  32. Gazette officielle du Québec, 24 janvier 1948, tome 80, no 4.
  33. http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/assemblee-nationale/23-1/introduction-historique.html?retourVersHistoire=oui
  34. Jean Duceppe, Rodolphe Hamel, Gérard Lachance, Jean-Jacques Lafontaine, Jean-Marie Lemieux, Jean Marchand, Gérard Pelletier, Lionel Villeneuve, Le 60, émission de télévision, Société Radio-Canada, 19 mars 1974. Vingt-cinq ans après l'événement, l'émission Le 60 présente des témoignages de gens qui ont vécu la grève d'Asbestos, dont celui de l'ancien leader syndical Jean Marchand. Des extraits de la pièce Charbonneau et le Chef rappellent aussi les luttes de pouvoir de l'époque. [4]
  35. Dominique Foisy-Geoffroy, « Le Rapport de la Commission Tremblay (1953-1956), testament politique de la pensée traditionaliste canadienne-française », Revue d'histoire de l'Amérique française, vol. 60, no 3, 2007, p. 257.
  36. Jacques Lacoursière. Histoire populaire du Québec, Septentrion, 1997, p. 378.
  37. http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/assemblee-nationale/24-2/introduction-historique.html?retourVersHistoire=oui
  38. Switzman c. Elbling
  39. Switzman c. Elbling
  40. Pierre Laporte, Le Vrai visage de Maurice Duplessis, Éditions du Jour, 1960, p. 45.
  41. Ce dont Duplessis se rendit coupable, c'est d'avoir exploité à fond un système qui réduisait les citoyens au rang de sujets soumis, quémandeurs et obséquieux. […] Les adversaires les plus féroces de Duplessis le traitaient de 'despote', voire de 'totalitaire'. […] S'il y eut ici un pouvoir à tendance totalitaire, ce fut plutôt celui de l'Église. D'ailleurs, ce fut souvent à la demande de cette dernière que Duplessis intervint, généralement pour punir une institution ou une personne dont les idées allaient à rebours du credo religieux ou national de l'ancien régime. Le pouvoir clérical était plus répressif que Duplessis lui-même qui empruntait ses valeurs à l'Église, s'y soumettait en fidèle docile en lui attribuant une portée morale et dogmatique absolue ». Léon Dion, op. cit., pp. 161-162.
  42. (1 George VI c. 11).
  43. Mark Blandford explique : « On a fait en sorte que chacun de ces épisodes nous révèle un aspect particulier de la personnalité de Duplessis. La première émission, c’est l’avocat brillant, avec son côté pourfendeur qu’on apprend à découvrir. Dans le deuxième, ce sera le politicien futé ; et la troisième, le politicien acculé à la défaite. Les cinquième et sixième épisodes nous feront découvrir un Duplessis au faîte de sa puissance, jouissant d’un pouvoir immense et incontesté. La septième et dernière émission, ce sera le politicien un peu dépassé, qui sent la fin venir. Chaque épisode se tient, et nous amène à mieux comprendre qui a vraiment été Maurice Duplessis […] Ce qu’on a recherché [dit Mark Blandford], c’est relancer le débat sur l’homme et le politicien et cela, en présentant des épisodes de sa vie qui, d’un point de vue strictement dramatique, était aussi complet que possible. Denys Arcand a d’ailleurs proposé – et j’ai trouvé ça absolument génial – que l’on respecte dans la mesure du possible la règle des trois unités. Chaque émission va donc se passer durant une période assez restreinte, on va aussi éviter de s’éparpiller dans plusieurs lieux et la trame dramatique va être unique. Il ne faut pas oublier que c’est de la télévision, et que le tournage se fait donc pour la plupart en studio : il est alors préférable de respecter la règle des trois unités ». Jean-Pierre Tadros, « Si Duplessis m’était conté », Le Devoir, 11 février 1978, p. 38.
  1. Claude Hérous, « Un autre livre sur Duplessis »,Le nouvelliste, 1er septembre 1979, Cahier 1, p. 3.
  2. Entrevue avec Auréa Cloutier, Appelez-moi Lise, Société Radio-Canada, 25 avril 1973.
  3. Haut fonctionnaire important dans les gouvernements de Taschereau, Duplessis et Godbout. Voir la rubrique nécrologique dans La Presse, 29 septembre 1965, p. 20
  4. Alfred Hardy, Patronage et patroneux, Montréal, Éditions de l'Homme, 1979, p. 19-20.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • André Benoît, Maurice Duplessis et le duplessisme, mémoire de maîtrise, Montréal, Université de Montréal, 1983, 256 p.
  • Pierre Berthelot, Maurice Duplessis : Mises en récit d'un personnage historique, mémoire de maîtrise, Montréal, Université de Montréal, 2014, 137 p.
  • Conrad Black, Duplessis. Traduit de l'anglais par Monique Benoît. Montréal, Éditions de l'Homme, 1977, 2 vol. Tome 1 : L'Ascension, 487 p. Tome 2 : Le Pouvoir, 623 p.
  • Xavier Gélinas et Lucia Ferretti, Duplessis, son milieu son époque, Québec, Septentrion, 2010, 520 p.
  • Leslie Roberts, Le Chef : une biographie politique de Maurice L. Duplessis. Traduit de l'anglais par Jean Paré. Montréal, Éditions du Jour, 1963, 195 p.
  • Robert Rumilly, Maurice Duplessis et son temps, Montréal, Fides, 1973, 2 vol. Tome 1 : 1890-1944, 722 p. Tome 2 : 1944-1959, 750 p.
  • Bernard Saint-Aubin, Duplessis et son époque, Montréal, La Presse, 1979, 278 p.

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