Califat fatimide

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Dynastie des Fatimides
(ar) الدولة الفاطمية (al-Fātimiyyūn)
(ber) Ifāṭimiyen

9091171

Drapeau
Drapeau des Fatimides
Description de cette image, également commentée ci-après
Extension maximale de l'empire fatimide en 969[Interprétation personnelle ?]
Informations générales
Statut Califat
Capitale Raqqada / Kairouan(909-918)
Mahdia (918[1]-969)
al-Qâhira (969-1171)
Langue(s) Arabe
Monnaie Dinar et dirham
Histoire et événements
909 Établissement
969 Conquête de l'Égypte, déplacement de la capitale vers Le Caire
1014 Sécession des Hammadides
1048 Sécession ds Zirides
1091 Perte de la Sicile
fin XIe siècle Constitution des États latins d'Orient
1171 Démantèlement et proclamation de la dynastie ayyoubide
Calife
(1e) 909-934 Ubayd Allah al-Mahdi
(De) 1160-1171 Al-Adid

Les Fatimides (également appelés Obeydides depuis le Manifeste de Baghdad) ont formé une dynastie califale chiite ismaélienne qui régna, depuis l'Ifriqiya (entre 909 et 969) puis depuis l'Égypte (entre 969 et 1171), sur un empire qui englobait une grande partie de l'Afrique du Nord, la Sicile et une partie du Moyen-Orient.

Issus de la branche religieuse chiite des ismaéliens — pour laquelle le calife doit être choisi parmi les descendants d'Ali, cousin et gendre du prophète de l'islam Mahomet, les Fatimides considèrent les Abbassides sunnites comme des usurpateurs de ce titre.

Histoire

Période maghrébine

Les Fatimides tracent leurs origines de Fatima, la fille du prophète Mahomet et 'Ali Ibn Abi Talib. Les tribus berbères Kutama d'Algérie nouvellement converties au chiisme ismaélien (ismaélisme). La dynastie a été fondée en 909 par Ubayd Allah al-Mahdi - qui prétend être de lignée alawide ismaélide - qui a commencé le mouvement en s'appuyant sur les tribus Kutamas de petite Kabylie[2],[3] qu'il a converties à l'islam chiite.

À l'origine du mouvement fatimide on trouve le dâ`i ismaélien Abu Abd Allah ach-Chi'i qui est un arabe de Yémen qui, entre la fin du IXe siècle et le début du Xe siècle, prêche au profit des Fatimides depuis Ikjane, en Kabylie, où il trouve un écho favorable, parvenant à se rallier de nombreux partisans chez les Berbères, et à partir de laquelle il lance une révolte contre les Aghlabides de Kairouan[4].

En 909, Abu Abdallah parvient à délivrer l'imam ismaélien Ubayd Allah et à l'introniser. Ce dernier, contrôlant une grande partie du Maghreb, de l'extrémité est du Maroc à la Libye (aujourd'hui Algérie, Tunisie, Libye) est alors suffisamment puissant pour contester l'autorité du calife de Bagdad. Il choisit une capitale en fondant la ville de Mahdiyya, sur une presqu’île du Sahel tunisien, où il se proclama lui-même calife en 909. Ceci devait d'ailleurs encourager l'émir de Cordoue à faire de même en 929, établissant un califat omeyyade en Espagne.

Période égyptienne

En 969, les Fatimides conquirent l'Égypte, grâce au général Jawhar al-Siqilli, sur ordre du calife al-Mu‘izz. Le général entra à Fustât le 7 juillet 969, dans un pays désorganisé et en proie à la famine. Ils fonderont, près de cette ville, une nouvelle capitale qu'il nommèrent al-Qâhira (Le Caire), ce qui signifie « la Victorieuse ». Le Caire deviendra la capitale des Fatimides, qui s'y déplacent à la suite d'un soulèvement en Ifriqiya, mené par un chef berbère du nom d'Abu Yezid, laissant les Zirides en tant que gouverneurs de leurs territoires en Afrique du Nord.

Les Fatimides continuèrent à étendre leurs conquêtes jusqu'à la Syrie et parvinrent à s'établir à Malte et en Sicile, et à mettre temporairement un pied en Italie méridionale. Devenue cité impériale, avec les deux palais et la mosquée al-Azhar, le Caire est entouré d'un rempart de calcaire, à la fin du XIe siècle, par les architectes byzantins. Un siècle après, miné par la peste et l'inflation, l'empire fatimide s'effondre sous les coups du royaume franc de Jérusalem.

Les Fatimides acceptèrent dans leur administration, non sur des critères d'appartenance tribale, ethnique ou même religieuse, mais principalement sur le mérite et la compétence, les membres des autres obédiences de l'islam. Elles étaient admises aux plus hautes fonctions, et cette tolérance était même étendue aux juifs et aux chrétiens. Il subsista en Égypte une importante minorité copte, de religion chrétienne qui a pu s’épanouir.

Mosquée de al-Hâkim au Caire
Commencée sous le règne d'al-Azîz Billâh, elle fut terminée en 1013, sous celui de son fils al-Hâkim, dont elle porte le nom

L'empire continua à prospérer jusqu'au calife al-Hâkim dont le règne commença par l'achèvement au Caire de la grande mosquée entre al-Bâb al-Futuh et al-Bâb an-Nasr (la mosquée d'al-Hâkim), commencée sous le règne de son prédécesseur, al-Azîz Billâh. Contrairement à la tradition, il se mêlait au peuple pour mieux en apprécier les sentiments.

On lui doit la fondation de la Maison de la sagesse (en arabe : "Dâr al-Hikma", ou encore "Dâr al-‘ilm"), dans laquelle sera favorisée l'étude des sciences hellénistiques. Juristes, médecins, astronomes, mathématiciens fréquentent son importante bibliothèque.

La seule exception à la politique de tolérance religieuse des Fatimides était sous le règne d'al-Hâkim. Ce dernier est très mal dépeint dans les sources sunnites (Ibn al-Athîr, Ibn Khallikân, Ibn al-Sayrafî...) souvent comme un dictateur et un tyran ce qui rend l'étude de son règne très difficile. P.K. Hitti dans The Origins of Druze People and Religions, prend une attitude critique vis-à-vis de ces sources qu'il trouve trop négatives pour être entièrement vraies.

Selon l’historien al-Maqrîzî (m. 1442), la vie économique et sociale s’était détériorée à cette époque. Le dâ`i ismaélien Hamîd al-dîn Kirmânî (m. 1021), dans son traité Al-risâlat al-wâ‘iza, a décrit cette période critique où une grande famine sévissait de 999 à 1005. D'après P.J. Vatikiotis, plusieurs des mesures hostiles prises temporairement par al-Hâkim pouvaient être expliquées par le contexte historique, dans lequel plusieurs membres de la population étaient extrêmement perturbées par la prospérité croissante des Ahl al-Kitâb (juifs et chrétiens) et leur puissance démesurée dans l'État. Al-Hâkim voulait probablement contrecarrer l'Empire byzantin, qui menaçait la Syrie septentrionale. En 1009, al-Hâkim ordonnera la destruction de l'Église du Saint-Sépulcre à Jérusalem.

L'attitude rigide d'al-Hâkim prise temporairement vis-à-vis des femmes faisait suite à une intrigue de palais montée principalement par sa sœur Sitt al-Mulk. Selon al-Maqrîzî, en confisquant la propriété des femmes, al-Hâkim désirait restreindre sa mère et sa sœur qui, dépourvues d'argent, ne pourraient fomenter de nouvelles intrigues. Si l’on considère toute la période fatimide dans son ensemble, on doit souligner que les musulmans, les juifs et les chrétiens ont vécu paisiblement et ont travaillé ensemble pour le bien-être de l'Empire dans tout l'Ifrîqiyya.

Al-Hâkim disparaîtra le , lors d'une promenade nocturne sur le mont Muqattam, après s'être éloigné de deux écuyers auxquels il avait donné l'ordre de l'attendre. Cinq jours après, on retrouva ses vêtements lacérés de coups de poignards. Il aurait été assassiné à l'instigation de sa sœur Sitt al-Muk ou assassiné par un inconnu.

Les Druzes, qui de nos jours subsistent au Liban, en Syrie, en Jordanie et en Israël, croient à une occultation (ghayba) d'al-Hâkim qui est resté célèbre pour le caractère divin que certains de ses partisans lui attribuèrent et qui devint le centre de la foi druze.

Déjà en 1017, deux Persans avaient affirmé qu'al-Hâkim était la manifestation de l'intellect divin. Sa disparition renforça la croyance et c'est ainsi qu'est née la religion des Druzes. Pour eux, al-Hâkim est le Messie (Mahdî) dont on attend le retour.

Déclin

À partir de 1060, le territoire des Fatimides se réduit jusqu'à ne plus comprendre que l'Égypte. Aux Hammadides, indépendants depuis 1018, s'ajoutent les Zirides qui s'émancipent de la tutelle fatimide en 1048 et reconnaissent le Califat abbasside de Baghdad. En représailles, les Fatimides provoquent l'invasion du Maghreb par les Banu Hilal.

En 1098 les Fatimides ont vaincu les Turcs et se sont emparés de Jérusalem. Mais dès l'année suivante, les premiers Croisés chassaient les Fatimides de Jérusalem. Vingt jours après la prise de Jérusalem par les Croisés, l’armée d’Al-Afdhal, vizir fatimide d'Égypte, forte de trente mille hommes, atteint la Palestine et prend place près d'Ascalon, où le calife fatimide Al-Mustansir Billah avait fait construire l'année précédente un mechhed (arabe: مَشْهَد mašhad, « lieu d'un martyr ») pour y recevoir le crâne de Husayn, troisième imam chiite.

Le vizir Al-Afdhal envoie des émissaires à Godefroy de Bouillon, lui proposant un arrangement si celui-ci quitte la Palestine. Ce dernier refuse et marche sur l'armée égyptienne, qu'il met en déroute le , faisant 10 000 victimes. Au bout d'un long siège, les Croisés parviennent à s'emparer temporairement d'Ascalon, en 1102. Neuf ans plus tard, le frère cadet de Godefroy de Bouillon, Baudouin Ier roi de Jérusalem, réussit à obtenir un tribut du gouverneur fatimide d'Ascalon. Mais, en juillet 1102, ce dernier est assassiné, et la population se révolte contre les Croisés, qui ont pris contrôle de la ville. Reprise par les Fatimides, Ascalon fut leur dernier bastion en Palestine, repris par les Croisés lors d'un second siège, en 1153, au cours duquel le maître de l'Ordre du Temple, Bernard de Tramelay, meurt avec tous les Templiers sous ses ordres.

À la mort du dernier calife fatimide al-Adîd, le 13 septembre 1171, Saladin annexera le califat à celui de Bagdad, le rendant ainsi au sunnisme. Il reprend Ascalon à Baudouin III puis à Richard Cœur-de-Lion en échange d'un traité de paix avec les Croisés.

La culture sous la dynastie fatimide

L'arrivée de la dynastie fatimide, marque un renouveau culturel important. Les Fatimides portent un grand intérêt aux livres, aux bibliothèques et à la littérature. Ils installent une grande bibliothèque à l'intérieur même de leur palais, où ils accueillent de nombreux écrivains, historiens, juristes, savants et poètes, qui viennent se documenter, pour écrire des ouvrages de littérature, d'histoire, de sciences ou des recueils juridiques. Véritables mécènes, ils entretiennent ainsi un grand nombre d'intellectuels, écrivains ou poètes, à qui ils attribuent d'importantes sommes d'argent et de nombreux cadeaux.

L'un des poètes les plus connus de cette époque s'appelle Ibn Hâni’ al-Andalusî (m.973), qui vécut sous le règne du calife al-Mu‘izz. Il était réputé pour faire des descriptions très imagées, ainsi que pour son art des louanges, qu'il exprimait dans des hagiographies, pas très fidèles à la réalité. Un autre poète dont l'histoire a retenu le nom, Emara al-Yamane, vécut à l'époque du calife Al-Fâ’iz, qui régna de 1154 à 1160. Il fit l'éloge du calife, ainsi que celui de son ministre Al-Sâlih Talâ'i‘ Ibn Ruzzîk. Le grammairien ‘Uthmân Ibn al-Wazzin (m. 957), ‘Alî Ibn Muhammad al-Ayadi (m.976), ou encore Muhammad Ibn Ja‘far Al-Kazzaz Tamîmî (m. 956), sont quelques-unes des figures marquantes de cette littérature fatimide.

L'art fatimide

Liste des califes fatimides

Dynastie des Fatimides

Notes et références

  1. D'après Ibn Khaldoun ; cf traduction de Slane de lHistoire des Berbères", tome II, p.525
  2. QuelleHistoire.com
  3. Encyclopédie Encarta
  4. Institut du monde arabe (France), L'Algérie en héritage: art et histoire, 2003, p. 240

Annexes

Bibliographie

  • al-Makrîzî, Taqiyy al-Dîn Abû al-‘Abbâs Ahmad b. Alî, Kitâb al-Mawâ'iz wa al-I'tibâr bi Dhikr al-Khitat wa al-Âthâr, Beirut, n.d.
  • 1923 D. L. O'Leary, Short History of the Fâtimid Khalifate.
  • 1930 Tritton, A.S., The Caliphs and Their Non-Muslim Subject, Oxford.
  • 1955 Vatikiotis, P.J.. “Al-Hakim Bi-Amrillah: The God-King Idea Realised”. Islamic Culture. (janvier): 1-8.
  • 1959 Dodge, Bayard.. “Al-Ismā`īliyya and the Origin of the Fātimids”. Muslim World. vol. 49 : 296-305.
  • 1965 Canard, Marius. "Fâtimides". Encyclopédie de l’Islam, seconde édition, vol. 2: 870-882.
  • 1971 Canard, Marius. "Al-Hâkim bi-Amr Allâh". Encyclopédie de l’Islam, seconde édition, vol. 3 : 79-84.
  • 1974 Assaad, Sadik A., The Reign of al-Hakim bi Amr Allah (966-1021), Beirut.
  • 1974 (1964) Henry Corbin, Histoire de la philosophie Islamique, Paris, Gallimard.
  • 1979 Bosworth, C.E., "The Protected Peoples (Christians and Jews) in Medieval Egypt and Syria", Bulletin of the John Rylands University Library of Manchester, 62, pp.11-36.
  • 1990 Farhad Daftary. The Ismâ‘îlî: Their History and Doctrines. Cambridge University Press.
  • 1991 Lev, Yaacov, State and Society in Fatimid Egypt, Leiden.
  • 1997 C. El Briga, « Fatimites », dans Encyclopédie berbère, vol.18, Edisud, 1997, p. 2732-2736
  • 1998 Marianne Barrucand, « Fâtimides : les trésors du Caire », dans Muséart, n°81, avril, p. 38-45
  • 1998 Marianne Barrucand, « L’architecture fâtimide et son rayonnement en Afrique du Nord », dans L'Égypte - L’âge d’or des Fâtimides, Les Dossiers d'archéologie, n° 233, mai, p. 42-49.
  • 1999 Marianne Barrucand, L'Égypte fâtimide, son art et son histoire, Presses universitaires de France, Paris, 1999
  • 2001 Michael Brett, The Rise of the Fatimids, Brill, Leyde, 2001
  • 2002 Diana Steigerwald. « The Multiple Facets of Isma‘ilism. » Sacred Web: A Journal of Tradition and Modernity. Vol. 9, pp. 77-87.
  • 2002 Diana Steigerwald. « The Tolerance of the Fâtimids Toward ‘The People of the Book’ (Ahl al-Kitâb) ». The Ismaili U.S.A. (December 13): 16-17.

Articles connexes

Liens externes