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L’abbaye de Cherlieu était une abbaye cistercienne. Il n’en reste que des ruines, situées au hameau de Cherlieu, dans la commune de Montigny-lès-Cherlieu, département de la Haute-Saône (France).
La ferme du Ferry, ancienne dépendance de l'Abbaye de Cherlieu
Fondation
Prieuré en 1127
Avant l’abbaye il existe un petit prieuré d’Antonins, sur la colline de St Antoine, entre Cherlieu et Marlay ; il en restait des vestiges jusqu’au XIXe siècle.
Création de l’abbaye
La création de l’abbaye est attestée par une charte d’Anséric, archevêque de Besançon, envers Germain, prieur de Cherlieu en 1127. Les premiers bienfaiteurs seront les nobles de Jussey, et Renaud III, comte de Bourgogne, alors même que le prieur et ses compagnons, miséreux, sont contraints à manger des feuilles de chêne.
Il est issu de Clairvaux et vient à Cherlieu en janvier 1131 avec 12 religieux ; plus tard, il aura jusqu’à 600 moines sous son autorité ; ce sera un des prélats les plus distingués de Bourgogne.
Cherlieu sera à l’origine de nouveaux monastères :
Le comte Renaud III et les chanoines de Besançon favorisent les progrès de l’ordre ; l’abbé Guy a néanmoins à subir la haine de Pierre de Traves et de l’abbé de Faverney ; saint Bernard prend fait et cause pour Guy et porte l’affaire à Rome. Le séjour du saint à Cherlieu est attesté à plusieurs reprises par différents prodiges sur des malades.
Les cisterciens reçoivent de nombreuses largesses des seigneurs du voisinage.
À la mort de Guy, vers 1157, l’abbaye, attachée à l’ordre de Cîteaux, a assis son influence et s’est assurée la protection des papes Innocent II et Eugène III.
De 105 mètres de long et de 54 mètres de large au niveau du transept, elle possède une voûte à 22 mètres ; des rosaces ornent la façade et le transept, et 50 fenêtres laissent passer la lumière. Sept chapelles entourent le maître-autel, de lui séparées par huit colonnes et une boiserie en chêne de 4 mètres de haut. Le clocher est situé au centre du transept.
Othon IV, mort en 1303 et inhumé à Cherlieu, le , en même temps que son frère Jean de Bourgogne, cérémonie en présence de 1 500 personnes, dont de nombreux dignitaires :
Sous Charles le Téméraire, la comté de Bourgogne est tourmentée par les Français de Louis XI sous la conduite de Pierre de Caron, les Allemands, les Suisses ; Cherlieu n’échappe pas à ces tueries, pillages, incendies, notamment en mai 1475 ; l’abbé Gilles de la Cour, fait prisonnier par les Allemands en 1476, est libéré contre rançon.
XVIe et XVIIe siècles, le désastre continue
La décadence s’accentue dans le monastère, avec les abus liés à la commende.
En mai 1569, il ne reste de l’abbaye que l’église, quoique incendiée ; les champs sont dévastés, les fermiers réduits à l’aumône.
Le monastère restera désert pendant 30 ans. En février 1595, le lorrain de Tremblecourt ravage tout. En 1598 sept religieux sont envoyés de Cîteaux.
L’abbé Ferdinand de Rye s’attache à faire restituer à Cherlieu la plupart de ses titres et biens, augurant une période de calme. Une croix visible de nos jours y fait référence, construite en 1613.
En 1636, lors de la guerre de 10 Ans, les Français s’abattent sur le monastère ; en 1637, ce sont les Suédois de Bernard de Saxe-Weimar, puis à nouveau les Français de Du Hallier (maréchal de l'Hôpital) en 1641. L’abbaye est dévastée, elle ne compte plus que huit religieux.
En 1701, on construit un nouveau cloître ; en 1773, c’est un nouveau palais monastique qui voit le jour. La communauté est alors la plus riche de la province, même si la piété n’est plus de mise à Cherlieu.
En 1789, les 30 villages qui dépendent de Cherlieu viennent réclamer les titres de redevances seigneuriales. Les moines doivent signer, mains liées, corde au cou sous le glaive, sur la place de Montigny, la renonciation à leurs droits. Les archives brûlent.
Toute l’abbaye est vendue le , durant 11 jours ; le cloître est démoli ; l’église, démontée, sert de carrière pendant plus d’une trentaine d’années, et se dégrade au cours des décennies ; les tombes, dont celle d’Othon IV, alors restaurée, sont mises en pièces.
Ne subsistent aujourd’hui que des restes du cloître du XVe siècle et des bâtiments conventuels des XVIIe et XVIIIe siècles, transformés en ferme, ainsi que le logement du portier ; de l’église, seul est encore debout un mur du transept.
À la ferme du Ferry, un calvaire du XVIIe siècle témoigne encore de l’histoire religieuse des lieux.
À Marlay, on voit encore des éléments de la tuilerie et du four à chaux ; les bâtiments datent du XVIe siècle.
À Agneaucourt des témoins du broyage du minerai de fer extrait à Noroy subsistent.
La vie quotidienne de l’abbaye
La « grange »
C’est l’entité de base qui subvient aux nécessités quotidiennes ; elle se suffit à elle-même. Les moines y travaillent ; ce sont essentiellement des frères convers. Elle a un but purement agricole et pastoral.
Les bâtiments comportent généralement, en dehors des éléments agricoles, une chapelle, un dortoir, un réfectoire, un chauffoir.
Elle ne doit pas être éloignée de plus d’une journée de marche de l’abbaye, de façon que les frères convers puissent y venir à la messe du dimanche.
Elle cultive essentiellement des céréales : froment, avoine, seigle, voire des fèves. Des vignes sont localisées à Craies (de Montigny à Chazel), et à Purgerot.
L’élevage
Il s’exerce sous forme de droit de pâturage.
On trouve des bœufs, (traction des charrettes, charrues…), des porcs (pour la viande, le parchemin…) qui bénéficient de la glandée et de la fagine, des moutons.
Le paysage est également constitué de bois, friches, jachères, vaine pâture.
Cherlieu bénéficie d’une grande liberté de mouvement, par l’exemption de péage sur certains ponts, la gestion en propre des bacs de Miévillers et de Port d’Atelier, le libre passage à Port-sur-Saône et Scey-sur-Saône.
L’abbaye est présente sur les marchés de la région.
Lieux liés à la vie de l’abbaye
Lieux cités dans les documents et disparus aujourd’hui
Marlay, Agneaucourt, Montigny, Romain et Fontain (vers Preigney), Velotte (vers Montigny), Grange-Neuve (vers le moulin du Battant), Les Craies (Jussey),
les terres : le journal, surface travaillée par un homme en une journée, soit environ 33 ares ; l’arpent (220 pieds ~ 71,5 mètres)
les prés : la fauchée, surface fauchée en une journée, soit environ 50 ares ; l’andain : surface fauchée par un agriculteur lors d’un passage dans le pré
la vigne : l’ouvrée, la surface travaillée en une journée soit environ 4,5 ares ; le muid ( = 288 pintes ~ 275 litres…alors que le muid de Jussey est estimé à 320 litres), la feuillette (144 pintes ~ 137 litres)
Les vestiges de l'abbaye bénéficient de multiples protections au titre des monuments historiques[2]: une inscription en 1984 pour les façades et toitures des bâtiments conventuels subsistants, un classement en 1984 pour les ruines de l'église et le calvaire et une inscription en 1998 pour le logement du portier.
Le site de l'abbaye est un site classé par décret du pour son caractère historique et pittoresque[5].
Bibliographie
abbé Louis Besson, Mémoire historique sur l'abbaye de Cherlieu, Bintot, (lire en ligne)
L'abbaye de Cherlieu XIIe – XIIe siècles. Économie et société par Jean-Pierre Kempf, 1976
↑(la) Leopold Janauschek, Originum Cisterciensium : in quo, praemissis congregationum domiciliis adjectisque tabulis chronologico-genealogicis, veterum abbatiarum a monachis habitatarum fundationes ad fidem antiquissimorum fontium primus descripsit, t. I, Vienne, , 491 p. (lire en ligne), p. 112-113.
↑Jules Finot, Essai historique sur les origines de la gabelle et sur l'exploitation des salines de Lons-le-Saunier et de Salins jusqu'au quatorzième siècle, (lire en ligne), p. 65.