Théâtre de l'Odéon

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Théâtre de l'Odéon
Description de cette image, également commentée ci-après
Façade du théâtre
Type Théâtre
Lieu Paris, France
Coordonnées 48° 50′ 58″ nord, 2° 20′ 19″ est
Inauguration 1782
Capacité 800
Anciens noms Théâtre-Français du faubourg Saint-Germain (1782-1789)
Théâtre de la Nation (1789-1793)
Théâtre de l'Égalité (1794-1796)
Théâtre de l'Impératrice et Reine (1808-1818)
Second Théâtre-Français (1819-1990)
Statut juridique Théâtre national
Direction Luc Bondy (mars 2012)
Protection Logo monument historique Classé MH (1947)
Site web www.theatre-odeon.eu

Carte

Le théâtre de l'Odéon, également appelé Odéon–Théâtre de l'Europe, est un théâtre public parisien situé place de l'Odéon (6e arrondissement), inauguré en 1782 pour accueillir la troupe du Théâtre-Français.

L'Odéon est depuis septembre 1971 un des six théâtres nationaux. Son directeur actuel est Luc Bondy (depuis mars 2012[1]).

Sur le plan architectural, il s'agit d'un théâtre « à l'italienne » (scène de forme cubique et salle en demi-cercle) et l'extérieur est de style néoclassique. Il est classé au titre des monuments historiques depuis le [2].

Son histoire a été ponctuée par quelques événements : deux incendies (1799 et 1818), mais aussi la création du Mariage de Figaro en 1784, et plus récemment, la direction de Jean-Louis Barrault ainsi que l'occupation des locaux lors des évènements de Mai 1968.

Histoire

La première salle (1782-1799)

Façade du premier théâtre de l'Odéon
Les projets

En 1767, le marquis de Marigny, alors directeur des Bâtiments du Roi, demande à Marie-Joseph Peyre et Charles de Wailly[3] de travailler à un projet de nouvelle salle pour le Théâtre-Français.

Le 26 mars 1770, un arrêt du Conseil du Roi ordonne l'exécution du chantier sur le terrain du jardin de l'hôtel du prince de Condé, dont celui-ci souhaite se défaire afin de s'installer au palais Bourbon.

Deux autres projets sont alors élaborés : celui des architectes des Menus-Plaisirs du roi, Denis-Claude Liégeon et Jean Damun, soutenus par la troupe des Comédiens-Français, et celui de l'architecte de la ville de Paris, Pierre-Louis Moreau-Desproux. Mais Peyré et de Wailly l'emportent définitivement à l'automne 1778, grâce à la protection de Monsieur, frère du roi et du comte d'Angiviller, directeur général des Bâtiments du Roi.

L'emplacement du théâtre est très légèrement modifié par rapport au projet initial, de manière à le rapprocher du palais du Luxembourg, demeure de Monsieur, frère du Roi, pour qu'il soit « un nouvel agrément pour leur habitation ». Devant l'opposition des Comédiens-Français, le Parlement de Paris leur signifie « qu'on leur retirerait leurs privilèges et pensions et qu'on formerait une autre troupe, s'ils persistaient dans leur opposition ».

Architecture et urbanisme

Les travaux débutent en mai 1779. Peyre est principalement responsable des extérieurs et de Wailly des intérieurs. L'extérieur est d'une sobriété qui confine à l'austérité. Inspirée de Palladio, la façade originelle est flanquée de pavillons reliés par une arche, comme à la villa Pisani. De plan demi-circulaire, la salle du théâtre est la première salle « à l'italienne » pourvue d'un orchestre (alors appelé parterre) pourvu de bancs, alors que jusqu'alors le public assistait debout à la représentation. Cette innovation, qui répond aux théories nouvelles concernant l'architecture des théâtres, est vivement critiquée.

L'édifice est également conçu comme point le focal d'un nouveau quartier, aménagé lui aussi sur les plans de Peyre et de Wailly : un faisceau de cinq rues (les rues Racine, Casimir-Delavigne, de l'Odéon, Crébillon et Regnard) convergent vers la scène du théâtre et aboutissent sur une vaste place semi-circulaire, la place de l'Odéon, qui dessert et met en valeur le bâtiment. Ce quartier offre des facilités de circulation et de stationnement remarquables pour l'époque.

Le théâtre jusqu'en 1789

Les Comédiens-Français sont installés dans leurs nouveaux murs le 16 février 1782 et la salle est inaugurée par la reine Marie-Antoinette le 9 avril.

Le 27 avril 1784, Le Mariage de Figaro de Beaumarchais est créé par Dazincourt, toujours devant la reine et la cour.

Le comédien Talma y fait ses débuts le 21 novembre 1787.

La période de la Révolution

Par un décret de juillet 1789, l'Assemblée nationale rebaptise la salle Théâtre de la Nation.

En 1791, l'interdiction par Louis XVI de la pièce de Marie-Joseph Chénier Charles IX, provoque un conflit entre les comédiens fidèles au roi et ceux favorables à la République, ce qui conduira au départ de ces derniers, menés par Talma, pour la nouvelle salle du Théâtre de la République au Palais-Royal.

Arrêtés durant la Terreur, les comédiens restés à la Nation rouvrent le théâtre le 27 juin 1794 sous le nom de Théâtre de l'Égalité, pour des représentations données « par et pour le peuple », dans une salle transformée en amphithéâtre égalitaire tendu de draperies bleu-blanc-rouge. Il devient le 13 juillet 1796, sous la direction de MM. Poupart et Dorfeuille l'Odéon, en référence aux édifices de la Grèce antique.

À la suite de l'incendie survenu le 18 mars 1799, la troupe rejoint celle de la Comédie-Française, salle Richelieu.

La deuxième salle (1808-1818)

L'incendie de l'Odéon en 1818

Le théâtre de l'Odéon, cédé par Napoléon au Sénat et restauré à l'identique par l'architecte Chalgrin, rouvre en juin 1808 sous le nom de Théâtre de Sa Majesté l'Impératrice et Reine. Le privilège est concédé à Alexandre Duval. Louis-Benoit Picard lui succède en 1815, mais la salle est à nouveau détruite par un incendie le 20 mars 1818.

La troisième salle (1819 à nos jours)

Affiche d'Eugène Grasset pour le Théâtre national de l'Odéon, 1890

Reconstruit par l'architecte Pierre Thomas Baraguay, adjoint de Chalgrin et architecte du palais du Luxembourg voisin, la nouvelle salle est inaugurée en septembre 1819 et placée par Louis XVIII sous la tutelle de la Comédie-Française, en tant que Second Théâtre-Français. Picard la dirige jusqu'en 1821. L'année 1827, sous la direction de Thomas Sauvage, verra le triomphe d'une troupe de comédiens anglais qui fera dire à Berlioz « Shakespeare, en tombant sur moi à l'improviste, me foudroya. Je reconnus la vraie grandeur, la vraie beauté, la vraie vérité dramatiques... Je vis... je compris... je sentis... que j'étais vivant et qu'il fallait me lever et marcher. »

Pendant les journées des « Trois Glorieuses », en juillet 1830, le théâtre est au centre de l'insurrection de la jeunesse révolutionnaire. « À ce moment, sous l'arcade Molière, arrive un groupe d'hommes armés ; au coin du théâtre, un élève de l'école polytechnique, monté dans une charrette, est occupé à faire transporter des barriques de poudre... » En 1832 les arches de liaison sur les rues latérales sont démolies. Les deux bâtiments latéraux sont vendus et n'appartiennent plus au théâtre.

Sarah Bernhardt avait fait ses débuts à l'Odéon dans le rôle d'Aricie du Phèdre de Racine donné pour la fête de l'Empereur le 15 août 1866. Mais c'est en 1869, dans un petit acte de François Coppée, Le Passant, qu'elle entre, sous le costume du « chanteur florentin », dans sa glorieuse carrière. En 1870, pendant le siège de Paris, elle obtient du Ministère de la guerre l'autorisation d'installer une ambulance militaire dans le foyer du théâtre. La République proclamée, l'Odéon rouvre ses portes. En 1872, Sarah Bernhardt triomphe dans Ruy Blas de Victor Hugo, avant de rejoindre la Comédie-Française. De Chilly, directeur du théâtre, meurt en fêtant la centième de la pièce. Félix Duquesnel lui succède.

Soucis de confort et sécurité occuperont le dernier quart du XIXe siècle : la scène et la salle sont chauffées par deux immenses calorifères, les foyers sont garnis de portraits de comédiens, bustes et médaillons ; on construit une terrasse d'évacuation pour le public. Duquesnel s'illustre par la création de pièces nouvelles et le soutien aux jeunes auteurs, justifiant ainsi le bien-fondé de la subvention de l'État, « seule garantie contre les tentations d'entreprises facilement lucratives » ; il inaugure également les matinées classiques du dimanche après-midi.

Le triomphe du règne de Paul Porel (nommé en 1884), homme de théâtre complet et charismatique, c'est la création en 1885 de l'Arlésienne d'Alphonse Daudet sur une musique de Georges Bizet avec l'orchestre Édouard Colonne, spectacle qui renflouera cinquante ans durant les caisses du théâtre, à chaque période difficile.

Direction :

Le décret du 27 février 1946 offre sa deuxième scène à la Comédie-Française. L'Odéon "Salle Luxembourg" passe sous administration de la rue de Richelieu pendant treize ans. C'est l'époque de la conférence d'Antonin Artaud au Vieux-Colombier et de la première "Semaine d'Art" en Avignon créée par Jean Vilar en juillet 47. À l'Odéon, on rénove les parties publiques d'une salle devenue annexe plus contemporaine aux armes de la maison-mère où l'on donne en priorité les oeuvres inscrites au répertoire moderne, mais aussi quelques grandes reprises du répertoire classique. Ainsi, on notera des créations de pièces de Courteline, Feydeau, Rostand, Pirandello, Jules Romains, Montherlant, Audiberti, Cocteau...

La direction de Jean-Louis Barrault, de 1959 à 1968, laisse une trace mémorable. José Berghmans, chargé de la direction musicale, compose plusieurs musiques de scène notamment pour Numance de Miguel de Cervantes, adaptée par Jean Cau[4] et mise en scène par Barrault, et présentée au festival d'Avignon puis à l'Odéon en 1965[5]. En mai 1968, L'Odéon est ouvert aux étudiants au cours de la contestation et le théâtre vit un mois d'occupation agitée qui finira par coûter sa place à Jean-Louis Barrault abandonné par André Malraux. Ces événements laissent un théâtre endommagé qui reste fermé plusieurs mois pour des travaux de réfection.

L'Odéon devient « Théâtre National » en septembre 1971. Outre les représentations d'un répertoire contemporain réellement audacieux par la troupe de la Comédie-Française, une place importante est faite aux troupes de la décentralisation, aux grandes compagnies étrangères et au Jeune Théâtre National. Les fins de saison sont consacrées aux enregistrements des spectacles de la Comédie-Française pour la télévision. Pierre Dux et Jean-Pierre Miquel, puis Jacques Toja se succèdent à sa direction. Un décret de 1978 place officiellement l'Odéon sous administration d'un Directeur qui n'est autre que l'Administrateur général de la Comédie-Française.

Ce n'est que le 1er juin 1990, que l'Odéon reprendra véritablement son indépendance vis-à-vis de la Comédie-Française en devenant par arrêté l'Odéon–Théâtre de l'Europe, en hommage au travail et au projet développé par Giorgio Strehler à partir de juin 1983. D'importants travaux de rénovation et de modernisation auront été entrepris au XXe siècle : en 1906 (rénovation de la salle), 1930 (surélévation de la cage de scène), 1965 (installation du nouveau plafond de la salle, réalisé par André Masson) et au XXIe siècle de 2002 à 2006 (désamiantage, réfection générale). En 1995 est également inaugurée la médiathèque Jean-Louis Barrault, spécialisée dans le théâtre.

Ateliers Berthier

Depuis 2003, l'Odéon bénéficie d'une deuxième salle de 390 places, installée dans d'anciens entrepôts de décors de l'Opéra Garnier, boulevard Berthier (XVIIe arrondissement de Paris) et aménagée par l'architecte Jean-Loup Roubert. La salle a été inaugurée en janvier 2003 avec Phèdre de Jean Racine, mis en scène par Patrice Chéreau.

Statut

L'Odéon est un établissement public national régi par le décret no 68–905 du 21 octobre 1968 modifié en dernier lieu par le décret no 2002–108 du 24 janvier 2002.

Accès

Le théâtre de l'Odéon est desservi à proximité par les lignes de métro (M)(4)(10) à la station Odéon ainsi que par les lignes de bus RATP 5863708486878996 et les RER (B) et (C).

Sa deuxième salle, les Ateliers Berthier, est desservie par les lignes de métro (M)(13) et RER (C) à la station Porte de Clichy ainsi que par les lignes de bus RATP : PC31381735474N15N51.

Voir aussi

Article connexe

Bibliographie

  • Christian Genty, Histoire du Théâtre national de l'Odéon : Journal de bord, 1782-1982, Paris : Fischbacher, 1982, 320 p.  (+ 40 pl.) (ISBN 2-7179-0002-0)
  • Jean-Claude Daufresne, Le Théâtre de l'Odéon - Architectures, Décors, Musée, Liège : Mardaga Éditions, Collection : Architecture + recherche, 2004, 297 P. (ISBN 2-87009-873-1)
  • Daniel Rabreau, Le Théâtre de l'Odéon : Du monument de la Nation au théâtre de l'Europe, Naissance du monument de loisir urbain au XVIIIe siècle, Paris : Belin, 2007, 183 P. (ISBN 978-2-7011-3304-1)
  • Antoine de Baecque, L'Odéon, un théâtre dans l'Histoire, Paris : Gallimard, 2010, 309 P. (ISBN 978-2-07-013043-6)

Liens externes

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Notes et références

  1. Décret du 2 mars 2012 portant nomination du directeur du Théâtre national de l'Odéon
  2. Notice no PA00088664, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
  3. De Wailly est le protégé de Marigny, Peyre l'architecte du prince de Condé et l'ami de de Wailly depuis leur séjour commun à Rome.
  4. La pièce de Cervantes a déjà fait l'objet d'une adaptation en français par Barrault lui-même en 1937 au théâtre Antoine.
  5. Les Archives du spectacle