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Pietro Badoglio

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Pietro Badoglio
Illustration.
Pietro Badoglio en 1924.
Fonctions
Président du Conseil des ministres d'Italie

(10 mois et 14 jours)
Monarque Victor-Emmanuel III
Gouvernement Badoglio I et II
Prédécesseur Benito Mussolini
Successeur Ivanoe Bonomi
Biographie
Nom de naissance Pietro Badoglio
Date de naissance
Lieu de naissance Grazzano Monferrato (Italie)
Date de décès (à 85 ans)
Lieu de décès Grazzano Badoglio (Italie)
Nationalité Drapeau de l'Italie Italien
Parti politique Indépendant

Pietro Badoglio
Présidents du Conseil italien

Pietro Badoglio, né le à Grazzano Monferrato (Piémont) où il est mort le (la ville ayant été rebaptisée Grazzano Badoglio en son honneur en 1939), est un militaire et homme d'État italien, président du Conseil de 1943 à 1944.

Maréchal, il commande l'armée italienne pendant la guerre d'Éthiopie et devient président du Conseil du royaume d'Italie après la chute de Mussolini en 1943.

Biographie

Les débuts militaires

Pietro Badoglio est le fils de Mario Badoglio, modeste propriétaire terrien et Antonietta Pittarelli, issue d’une famille bourgeoise. En , Pietro Badoglio est admis à la Regia Accademia di Savoia (Académie royale de Savoie), école militaire ayant son siège à Turin où il obtient, le , le grade de sous-lieutenant et celui de lieutenant, le . Il participe aux guerres coloniales que mène l'Italie dans la corne de l'Afrique (1896). Sous les ordres du général Antonio Baldissera, il prend part à l'expédition d'Agridat pour libérer du siège le major Marcello Prestinari. Il reste en garnison sur les hauts plateaux érythréens jusqu'en 1898.

De retour en Italie, il est promu capitaine, le , et participe à la guerre de Libye dès 1911, au cours de laquelle il est décoré de la médaille de la valeur militaire pour avoir organisé l'opération d'Ain Zara. Il est promu major pour avoir planifié l'occupation de l'oasis de Zanzur.

Il prend part à la Première Guerre mondiale et est nommé lieutenant-colonel dès le début du conflit, le . Pietro Badoglio est affecté à l'état major de la 2e armée et commande la 4e division. Il se retrouve stationné vers le fort du monte Sabotino alors aux mains des Autrichiens, fort réputé imprenable. En , Badoglio est promu colonel et devient chef d'état major du 6e corps d'armée, tout en conservant le commandement de la 4e division.

En , il s'illustre par la prise du fort et est promu major général, le . En novembre, il prend le commandement de la brigade Cuneo avant de prendre le commandement du 2e corps d'armée juste avant le début de la dixième bataille de l'Isonzo, au cours de laquelle il conquiert des positions extrêmement difficiles, les monts Vodice et Kuk, actuellement en Slovénie. Luigi Capello, commandant de la 2e armée le propose au grade de lieutenant général et lui obtient, lors de la onzième bataille de l'Isonzo, le commandement du 27e corps d'armée.

Bien que son rôle lors de la défaite de Caporetto () ait été discuté, il devient général et un des proches collaborateurs du généralissime Diaz.

Les débuts politiques

Après la guerre, il devient sénateur tout en continuant d'assumer un rôle militaire. Il est ainsi chargé en par le président du Conseil Francesco Nitti de faire le blocus de Fiume occupée par les arditi de Gabriele d'Annunzio. Lors de la montée du fascisme, en , il assure le président du Conseil Luigi Facta de la fidélité de l'armée[1], d'où une certaine disgrâce après la marche sur Rome et la prise de pouvoir par Mussolini. Il est envoyé au Brésil comme ambassadeur. Il se rallie au nouveau régime dès 1924 et retrouve des fonctions à l'état-major de l'armée. Il est nommé maréchal en , puis, de 1928 à 1933, gouverneur de Libye, où il met fin à la résistance à l'occupation italienne.

Campagne d'Éthiopie (1935-1936)

En [2], il succède en tant que commandant en chef en Éthiopie à Emilio De Bono, jugé trop timoré, et prend la direction des opérations (avec, entre autres, des attaques chimiques au gaz moutarde, mais qui ne lui vaudront jamais d'être jugé après la guerre) et lance des offensives contre Addis-Abeba, où il entre le . Il est alors nommé vice-roi d'Éthiopie, avec aussi sous son autorité l'Érythrée et la Somalie italienne. Il est rapidement remplacé par Rodolfo Graziani, mais devient chef d'état-major de l'armée.

Deux ans plus tard, conscient de l’impréparation militaire et économique de l’Italie au seuil de la guerre, il rédige en un rapport à Mussolini signalant la faiblesse du matériel militaire[1]. Il est opposé à toute intervention dans la guerre qui s'annonce, mais ne démissionne pas de son poste. Pour les mêmes raisons, il s’oppose à l’attaque contre la Grèce en et, après l’échec de la campagne, il est congédié en raison du mécontentement des milieux fascistes. Il cesse toute activité politique fin .

Chef du gouvernement italien en 1943-1944

Il devient président du Conseil après la chute de Mussolini le et annonce d'abord, sans parvenir à tromper Hitler, que son gouvernement continue la guerre aux côtés de l'Allemagne, tout en négociant secrètement avec les Alliés. Il conclut avec eux un armistice, annoncé le . Devant l'occupation de l'Italie par les troupes allemandes du maréchal Kesselring, il se réfugie avec le roi et une partie de ses ministres à Pescara et Brindisi, sous la protection des troupes alliées débarquées au sud de Naples le , et y reforme son gouvernement. Le , tandis que Mussolini libéré et remis en place par les Allemands organise dans le nord du pays la République sociale italienne, le royaume d'Italie déclare la guerre à l'Allemagne. Au printemps 1944, Palmiro Togliatti, leader du parti communiste italien, rentre d’URSS et se déclare disposé à collaborer avec la monarchie. Le , Badoglio peut constituer un troisième gouvernement, avec l'appui des antifascistes. Mais au lendemain de la libération de Rome, les formations politiques du Comité de libération nationale refusent de reconduire Badoglio au pouvoir et il est remplacé par Ivanoe Bonomi.

Retraite et mort

Sa ville natale, Grazzano Monferrato, est renommée Grazzano Badoglio en son honneur en 1939. Il s'y retire lors de sa retraite et il meurt en 1956 après avoir raconté ses souvenirs à Vanna Vailati qui publie un livre, Badoglio racconta (« Badoglio raconte »), en 1955. Son épouse Sofia est décédée en 1942.

Badoglio et la franc-maçonnerie

Sa carrière fulgurante, le manque absolu de sanction après la défaite de Caporetto et ses longs rapports institutionnels avec Mussolini ont été expliqués par l'appartenance de Badoglio à la franc-maçonnerie, bien qu'aucun document officiel ne la confirme[3]. La revue officielle du Grand Orient d'Italie, Rivista Massonica, dans un numéro de 1976 à la page 247, confirme l'affiliation de Badoglio à une loge du Grand Orient d'Italie[4]. De l’appartenance de Badoglio à la maçonnerie était convaincu le général Luigi Cadorna (Chef de l’État major de l'armée), qui le 6 mars 1917 écrit à son fils Raffaele « A Capello ho dato Badoglio come desiderava. Così sono in pieno tre puntini! Almeno non mi diranno che ho delle prevenzioni! » (trad : « J'ai donné Badoglio à Capello comme il le désirait. Je suis ainsi en plein trois points ! Au moins on ne me dira pas que j'ai des préventions ! »)[pas clair][5].

Un personnage politique très controversé

Badoglio fut l'objet de très vives critiques de la part de la propagande de l'Axe, ce qui est somme toute normal, et son nom y était utilisé comme synonyme de « traître » ou de « retourneur de veste ». Ainsi, par exemple, dans la rhétorique des officiers japonais ultra-bellicistes qui tentèrent jusqu'au bout d'empêcher la capitulation du Japon, le Premier ministre Kantarō Suzuki, ancien amiral, qui savait la guerre perdue et avait conseillé à l'empereur Hiro-Hito d'accepter les termes de la capitulation proposés par les Américains, était qualifié de « Suzuki-Badoglio »[6].

En Italie, qui était, au moment de sa prise de pouvoir, en voie de partition (République de Salo au nord et zone d'occupation alliée au sud), Badoglio était aussi très violemment contesté. Dans un pays en proie à une quasi-guerre civile, où existaient de puissants mouvements de maquisards (partigiani) réfugiés dans les Alpes et faisant le coup de feu contre les tenants de Mussolini réfugié à Salo, les deux camps lancés dans une lutte fratricide se rejoignaient dans une commune détestation de Badoglio et du roi Victor Emmanuel III, à qui les fascistes de Salo ne pardonnaient pas d'avoir orchestré en sous-main la destitution de Mussolini (l'ordre du jour Grandi).

Une chanson emblématique, reprenant l'air d'un classique du répertoire goliard (chansons d'étudiants italiens) créé par un des chefs de la résistance italienne, Nuto Revelli, prend violemment à partie Badoglio et son « digne compère Vittorio » en des termes énergiques, voire franchement insultants et vigoureusement grossiers[7].

Intitulée La Badoglieide[8],[9] (l'épopée de Badoglio, sur le modèle de l'Énéide de Virgile) elle est un réquisitoire à la fois précis et impitoyable des actions de Badoglio, de ses ambiguïtés politiques et de sa compromission très ancienne avec Mussolini et son régime. Elle lui reproche, au fil des couplets, sa complicité avec le fascisme, la vaine gloriole de la conquête d'Éthiopie et du duché d'Addis-Abeba (titre honorifique à lui conféré par le roi d'Italie), le coup de poignard dans le dos que fut la (vaine) campagne des Alpes contre la France déjà vaincue, la sanglante intervention en Grèce, sa « retraite tactique », après démission, dans son village de Gazzano où il « jouait aux boules pendant que les Alpini (chasseurs alpins) crevaient sur le front russe », son attentisme politique, guettant la chute de Mussolini, son recours à des miliciens fascistes, anciennement chemises noires, pour le maintien de l'ordre, en particulier à Milan, où, sur ordre de Badoglio, le très contesté général Enrico Adami Rossi[10] recruta des miliciens fascistes (squadristi) pour maintenir l'ordre, faisant tirer sans discernement sur des grévistes et des civils innocents avant de consigner les soldats dans leurs casernes... et de rendre la ville aux troupes allemandes de Kesselring, sa fuite piteuse avec le roi à Bari, dans l'extrême sud de l'Italie, occupée par les Américains, et finalement, l'ineptie de son gouvernement erratique et dépassé par les événements.

Caractéristiquement, cette chanson, née de la résistance antifasciste, était aussi chantée par les miliciens « reppublichini », les fascistes républicains de la RSI ou république de Salo, qui s'étaient contentés de modifier quelques vers qui ne leur convenaient pas, comme l'allusion à la bataille des Alpes contre la France, considérée comme une infamie dans le texte original et vue par eux comme une épopée glorieuse[11].

De nos jours, La Badoglieide est encore très connue en Italie et a servi de base à des chansons polémiques contre des personnages publics comme Matteo Renzi (La Renzieide[12]), ou le pape François (La Bergogieide)[13]

Notes et références

  1. a et b Mussolini, sous la direction de Catherine et Jacques Legrand, Ed. Chronique SA, 1997
  2. Chronique du XXe siècle, sous la direction de Jacques Legrand, Ed. Chronique SA, Paris, 1985
  3. Mola, Aldo A. Storia della massoneria italiana dalle origini ai nostri giorni, Milano, Bompiani, 1992, p. 435
  4. Rivista Massonica, 976, p. 435, note 30
  5. Carteggio privato Cadorna (propriété de la famille Cadorna), cité par Piero Pieri-Giorgio Rochat, Pietro Badoglio maresciallo d'Italia, Mondadori, 2002, p. 109, et note p. 593.
  6. Alain Decaux, C'était le XXe siècle (tome 3), Paris, Perrin, , 371 p. (ISBN 978-2-262-01179-6), la capitulation du japon.
  7. (it) « √ Rockol - la musica online è qui - Novità Musicali », Rockol (consulté le ).
  8. (it) « La Badoglieide », dans Wikipedia, (lire en ligne).
  9. primula nina, « Primule Rosse - La Badoglieide », (consulté le ).
  10. (it) « Enrico Adami Rossi », dans Wikipedia, (lire en ligne).
  11. (it) giacomo de marzi, Canti di salo (le donne nonci voglio piu bene), Milan, fratelli frilli, , 301 p. (ISBN 978-88-7563-137-6).
  12. MARGOT GALANTE GARRONE, « RENZIEIDE Parole di Margot GG », (consulté le ).
  13. doppiobrodostar1, « La Bergoglieide », (consulté le ).

Voir aussi

Bibliographie

  • Vanna Vailati, Badoglio racconta, 468 p., Ilte, Turin, 1955.

Articles connexes

Liens externes