Grotte des Fées (Arcy-sur-Cure)

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Grotte des Fées d'Arcy-sur-Cure
Porche triangulaire, grotte des Fées
(carte postale ancienne).
Localisation
Coordonnées
Pays
France
Région
Département
Massif
Vallée
Vallée de la Cure
Localité voisine
Voie d'accès
D237 puis route des Grottes
Caractéristiques
Type
Longueur connue
2 820 m
Période de formation
Miocène supérieur
(11 à 5 Ma)
Cours d'eau
Occupation humaine
Patrimonialité
Site web
Localisation sur la carte de France
voir sur la carte de France
Localisation sur la carte de Bourgogne
voir sur la carte de Bourgogne
Localisation sur la carte d’Yonne (département)
voir sur la carte d’Yonne (département)

La grotte des Fées est l'une des cavités du site des grottes d'Arcy-sur-Cure, qui sont situées sur la commune d'Arcy-sur-Cure dans le département de l'Yonne en Bourgogne, région administrative Bourgogne-Franche-Comté, France.

C'est un site archéologique préhistorique. Un vestige de Néandertalien y a été découvert en 1859, qui a rendu célèbres les grottes d'Arcy.
La grotte est inscrite comme Monument historique depuis 1992.

Le réseau Grotte des Fées - Moulinot, auquel appartient la grotte, forme la plus longue cavité naturelle souterraine de l'Yonne.

Situation[modifier | modifier le code]

La grotte est située dans la vallée de la rivière Cure à environ 180 km au sud-est de Paris à vol d'oiseau, dans le sud du département de l'Yonne entre Auxerre (30 km au nord) et Avallon (20 km au sud-est), à 1,3 km au sud d'Arcy-sur-Cure (2 km par la route) et à moins de 10 km au nord du parc naturel régional du Morvan[2],[n 1].

Elle se trouve à quelque 380 m en amont de la Grande grotte[n 2]. Son entrée est à environ 130 m d'altitude et est donc à moins de 5 m au-dessus du niveau actuel de la Cure[2] (Parat donne son plancher à 3 m au-dessus de la vallée et 5 m au-dessus de l'étiage[3]).

Description[modifier | modifier le code]

Son développement[n 3] est de 2 820 m[n 1]. Son "plancher" est à 3 m au-dessus de la vallée et 5 m au-dessus de l'étiage de la rivière[4].

Elle a été creusée à partir d'une diaclase à peu près verticale, ce qui lui a donné un porche triangulaire (à la différence des grottes comme la Grande grotte ou la grotte de la Hyène, creusées à partir de jonction entre des strates géologiques et qui ont des porches surmontés d'un linteau)[5].

Par ailleurs, son substrat rocheux est fait de marnes qui, plus dures que le calcaire, engendrent des profils plus tourmentés. Les porches qui se trouvent dans cette roche sont restés à peu près intacts (un autre exemple du même type à Arcy est celui de la grotte des Ours)[6].


Entre la rivière et la grotte des Fées, l'abbé Parat a trouvé un mur gallo-romain qui fermait le seuil de la grotte ; sous ce mur, un chemin surélevé au-dessus du niveau de la rivière et au même niveau que les champs sur l'autre rive ; et les signes d'un remblai du bas de l'escarpement à un endroit où les éboulements avaient bloqué le passage le long de la rivière. Les blocs servant à ce remblai proviennent de la carrière antique de la Roche Taillée[n 4] située plus haut dans le même escarpement que les grottes d'Arcy, à peu près à l'aplomb de la grotte des Fées[n 5]. Parat pense que les pierres taillées dans la carrière étaient glissées le long de la pente jusqu'à ce chemin, plutôt que de les sortir en les montant jusqu'en haut de la falaise[7]. De fait, l’abbé Breuil mentionne que la carrière « était desservie par (quatre chemins pratiqués à travers le rocher et) deux glissières reliant l'exploitation à un chemin (le long de la rivière) »[8].

Histoire récente[modifier | modifier le code]

La première mention écrite sur la grotte des Fées est celle en 1666 par Jacques de Clugny[9], ami de Colbert et lieutenant-général de Dijon, envoyé en mission officielle[10] dans le cadre de la rédaction des « Mémoires des Intendants »[11]. Ses descriptions partielles de la Grande grotte et de la grotte des Fées sont accompagnées de plans[12] mais pas de croquis ni de dessins. Plutôt que de lui adjoindre un dessinateur, Colbert l'a fait accompagner par deux marbriers[13] (ce qui indique une visite à but d'exploitation).

Le géographe François Pasumot visite également la Grande grotte et la grotte des Fées, qu'il décrit en partie et dont il fait le plan en 1763[12].

Des ossements et des silex ayant été découverts dans la grotte des Fées, Robineau-Desvoidy et le propriétaire des grottes y font quelques fouilles en 1853 ; ils distinguent deux couches archéologiques qu'ils attribuent à l'invasion des Barbares[14].

Jusqu'au milieu du XIXe siècle les vignerons d'Arcy faisaient les veillées d'hiver à la grotte des Fées[15].

Archéologie[modifier | modifier le code]

Le marquis de Vibraye y trouve en 1859 une mandibule attribuée à un Néandertalien[16],[17], et un peu plus tard une prémolaire (PM1) droite[18].
Cette mandibule mérite qu'on s'y attarde, car elle a fait la célébrité du site d'Arcy[14]. De Vibraye a décrit trois couches :

  • pour la couche inférieure, un repaire d'ours associé à des vestiges de mammouth, d'ours spéléen (Ursus spelaeus ou ours des cavernes), de Rhinoceros tichorhinus (rhinocéros laineux) et de renne.
  • La couche médiane est teintée de rouge et contient des silex.
  • La couche supérieure est le sol de superficie[16], un dépôt accompagné de poteries[14].

Et il écrit aussi que la mandibule vient de la couche inférieure. Elle doit donc être attribuée au Moustérien, mais il est difficile de la dater plus précisément[16]. Cependant, venant deux ans après la découverte de la calotte crânienne de l'homme de Néandertal, elle confirme la cohabitation de l'homme antique et d'espèces animales disparues[14], ce qui est une nouveauté pour le XIXe siècle.

La couche 30[n 6] de cette grotte a livré une dent de cervidé de très grande taille[19].

Le « Périgordien supérieur » (Gravettien) de la grotte des Fées a également livré des coquillages d'origines éloignées variées[20].

Par ailleurs, la grotte des Fées contenait une grande quantité d'os d'ours des cavernes - un véritable ossuaire, selon D. Baffier et M. Girard[21].

En 1993 Jean-Claude Liger y trouve une fibule à tambour hallstattienne, provenant peut-être d'une tombe. Il semble que la grotte ait été utilisée pour plusieurs inhumations, dont une de l'âge du bronze découverte par Ficatier en 1889 et rappelée par G. Gaucher[22].

Hydrogéologie[modifier | modifier le code]

Le , le Groupe Spéléologique et Préhistorique Parat (G.S.P.P.) procède à la coloration qui met en évidence la liaison rivière des Fées-grotte de Barbe-Bleue[23].

En 1967 le G.S.P.P. quitte le département et devient le Spéléo-Groupe des Hauts-de-Seine. Le Groupe Spéléologique Yonne-Vercors lui succède à Arcy-sur-Cure. Explorant le réseau des Fées, il dévoile ainsi la plus longue grotte connue de l’Yonne[12].

En Arnold Haid et Philippe Radet, assistés par Gilles Souchet, J.-Claude Liger et Christophe Petitjean, effectuent la première traversée souterraine complète du massif corallien, entre la grotte des Fées au sud et la résurgence du Moulinot au nord[24]. À un tiers du parcours (depuis le Moulinot), ils trouvent une galerie qui pourrait rejoindre la grotte du Cheval[25].

Grilles au fond de la première salle de la grotte des Fées.

Faune vivante[modifier | modifier le code]

Le fond de cette grotte, qui sert de sanctuaire pour quelque 300 chauves-souris de 11 races différentes, a été fermé par une lourde grille pour préserver l'habitat de ces animaux[26].

Protection[modifier | modifier le code]

La grotte des Fées d'Arcy-sur-Cure est l'une des seize[n 7] cavités, grottes et galerie du site d'Arcy conjointement inscrites comme Monument historique en 1992[1].

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (1996) Alain Couturaud, « De la source du Moulinot vers le réseau des Fées… Un exutoire du système d'Arcy (Arcy-sur-Cure, Yonne) », Sous le Plancher, no 11,‎ , p. 33-37 (lire en ligne, consulté le ).
  • (1997) Dominique Baffier et Michel Girard, « Le karst d'Arcy-sur-Cure (Yonne) et ses occupations humaines paléolithiques », Quaternaire, vol. 8, nos 2-3,‎ , p. 245-255 (lire en ligne, consulté le ). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • (1998) Dominique Baffier et Michel Girard, Les cavernes d'Arcy-sur-Cure, Paris, La Maison des Roches, , 120 p. (ISBN 2-912691-02-8, lire en ligne). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • (2003) Jean-Claude Liger, « Première percée hydrogéologique du massif corallien d’Arcy-sur-Cure », Spelunca, Paris, Fédération française de spéléologie, no 92,‎ , p. 31-38 (ISSN 0249-0544, lire en ligne [PDF], consulté le ). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • (2005) F. David, N. Connet, M. Girard, J.-Cl. Miskovsky, C. Mourer-Chauviré et A. Roblin-Jouve, « Les niveaux du Paléolithique supérieur à la grotte du Bison (Arcy-sur-Cure, Yonne) : couches a à d », Revue archéologique de l’Est (RAE), vol. 54, no 176,‎ (lire en ligne, consulté le ). (Les pages citées correspondent aux paragraphes de l'article.) Document utilisé pour la rédaction de l’article

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. a et b 47° 35′ 26″ N, 3° 45′ 42″ E
  2. Pour les schémas et cartes succinctes montrant les emplacements respectifs des différentes grottes, voir :
  3. En spéléologie, le développement correspond à la longueur cumulée des galeries interconnectées qui composent un réseau souterrain.
  4. La carrière antique de la Roche Taillée a été exploitée jusqu'au XIIIe siècle, atteignant finalement une surface d'exploitation de 85 m linéaires sur une hauteur de 25 m. On y voit encore des sarcophages en cours d'extraction et des « empreintes » de sarcophages extraits. Voir l’article d'Édouard Roussel, « Des carriers d'un autre temps », L'Yonne Républicaine,‎ (lire en ligne [sur scchablis.com], consulté le ) ; et « des photos de la carrière et des « empreintes » de sarcophages », sur petit-patrimoine.com (consulté le ).
  5. La carrière de la Roche Taillée est située selon Henri Breuil au lieu-dit « le Bois des Grottes », à 2 km au sud d'Arcy-sur-Cure (voir Breuil 1957, p. 2). Parat, plus précis, indique qu'elle se trouve « en haut de la côte, en suivant le chemin d'Arcy à Saint-Moré… à 300 pas en aval de la croix de pierre qui domine la côte en bordure de ce chemin… cette croix marque le sentier qui descend à la fontaine de saint Moré… à mi-côte dans une cavité… son eau est recueillie dans un auge de pierre, un vrai sarcophage… » (voir Parat 1897, p. 25).
  6. Pour la numérotation des couches archéologiques, Leroi-Gourhan a d'abord repris celle de l'abbé Parat (en chiffres romains). Il a par la suite établi une autre nomenclature, en chiffres arabes, afin de tenir compte des couches intermédiaires et surtout de faciliter les correspondances entre les couches des différentes grottes. Voir Catherine Girard, Les Industries moustériennes de la grotte de l'Hyène à Arcy-sur-Cure, Yonne, (lire en ligne), p. 19.
  7. Seize des cavités, grottes et galerie du site d'Arcy sont conjointement inscrites comme Monument historique depuis 1992 : Grande grotte, abri du Lagopède, grotte du Cheval, grotte de la Hyène, grotte du Trilobite, grotte des Ours, grotte du Renne et la galerie Schoepflin, grotte du Bison, grotte du Loup, grotte du Lion, grotte des Fées, grotte des Deux Cours, Petit et Grand Abri, grotte des Goulettes. Voir « Grottes préhistoriques », notice no PA00113981, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture.

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b « Grottes préhistoriques », notice no PA00113981, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture.
  2. a et b « Grottes d'Arcy-sur-Cure, carte interactive » sur Géoportail. Couches « Cartes IGN classiques », « Limites administratives » et « Hydrographie » activées. Vous pouvez bouger la carte (cliquer et maintenir, bouger), zoomer (molette de souris ou échelle de l'écran), moduler la transparence, désactiver ou supprimer les couches (= cartes) avec leurs échelles d'intensité dans l'onglet de "sélection de couches" en haut à droite, et en ajouter depuis l'onglet "Cartes" en haut à gauche. Les distances et surfaces se mesurent avec les outils dans l'onglet "Accéder aux outils cartographiques" (petite clé à molette) sous l'onglet "sélection de couches".
  3. Abbé Parat, Les Grottes de la Cure (côte d'Arcy) : La grotte du Trilobite (p. 1-40), la grotte des Nomades (p. 40-41), l’Égouttoir (p. 41), la grotte-aux-Chats (p. 42), , 42 p. (lire en ligne).
  4. (1903) Abbé Parat, Les Grottes de la Cure (côte d'Arcy) : La grotte du Trilobite, la grotte des Nomades, l’Égouttoir, la grotte-aux-Chats, Auxerre, Ch. Milon, , 42 p. (lire en ligne), p. 3.
  5. Dominique Baffier et Michel Girard, « Le karst d'Arcy-sur-Cure (Yonne) et ses occupations humaines paléolithiques », Quaternaire, vol. 8, nos 2-3,‎ , p. 245-255 (lire en ligne, consulté le ).
  6. David et al. 2005, p. 12.
  7. Abbé Parat, « Glanures archéologiques de Saint-Moré et d'Arcy, sépultures gallo-romaines et mérovingiennes (premières glanures) » (en deux parties), Bulletin de la soc. des sc. hist. et nat. de l'Yonne, t. 51,‎ , p. 19-26 (lire en ligne, consulté le ), p. 25.
  8. Breuil, « La caverne ornée de Rouffignac (Dordogne) », dans Fouilles et monuments archéologiques en France métropolitaine, CNRS, (présentation en ligne), p. 2.
  9. Spéléo-club de Chablis, « La Grande Grotte », Fiche d'inventaire, sur scchablis.com (consulté le ).
  10. Jean-Claude Liger, « Les grottes d’Arcy aux XVIIIe et XIXe siècle - La mise en place progressive d’une pensée scientifique sur les cavernes », Colloque International OH2, Dijon « Origines et Histoire de l’Hydrologie »,‎ , p. 2 (lire en ligne [PDF], consulté le ).
  11. Liger 2001, p. 3, note 5.
  12. a b et c « Histoire de la Spéléologie dans l’Yonne », sur scchablis.com (consulté le ).
  13. Liger 2001, p. 3, note 3.
  14. a b c et d Baffier & Girard 1998, Ch. « Cadre naturel et historique des recherches », p. (section 2).
  15. Christian Thévenot, Bourgogne ancienne, Delville, , 253 p. (présentation en ligne), p. 74.
  16. a b et c A. Leroi-Gourhan 1950, p. 278. En note de bas de page, discussion sur l'emplacement et l'âge de la mandibule trouvée par de Vibraye dans la grotte des Fées.
  17. (1860) Paul de Vibraye, « Note sur les ossements fossiles accompagnés d'une mâchoire humaine, trouvés dans les grottes d'Arcy-sur-Yonne », Bulletin de la Société de Géologie Française, t. 17, no 2e série,‎ , p. 462-474.
  18. (1994) Marc Groenen, Pour une histoire de la préhistoire : le Paléolithique, Grenoble, Jérôme Millon, coll. « L'Homme des origines », , 609 p. (ISBN 2-905614-93-5, lire en ligne), p. 259.
  19. André Leroi-Gourhan, « Stratigraphie et découvertes récentes dans les grottes d'Arcy-sur-Cure (Yonne) », Géocarrefour, vol. 27, no 4,‎ , p. 425-433 (lire en ligne, consulté le ), p. 428-429.
  20. Gérard Bailloud, « Coquilles fossiles des niveaux périgordiens supérieurs de la grotte du Renne (Arcy-sur-Cure, Yonne) », Bulletin de la Société préhistorique française, vol. 52, no 7,‎ , p. 435-436 (lire en ligne, consulté le ).
  21. Dominique Baffier et Michel Girard (préf. Gabriel de la Varende), Les cavernes d'Arcy-sur-Cure, La Maison des Roches, coll. « Terres préhistoriques », , 120 p. (lire en ligne), (section : Un locataire incontournable : l’ours des cavernes).
  22. [Nouvel & Poitout 2009] Pierre Nouvel et Bernard Poitout, « Les nécropoles protohistoriques de l'Avallonnais : Apport des découvertes anciennes et récentes », Bulletin de la Société d’Études d’Avallon,‎ , p. 285-312 (lire en ligne [sur academia.edu]).
  23. Spéléo-club de Chablis, « Grotte de Barbe Bleue », Fiche d'inventaire, sur scchablis.com (consulté le ).
  24. Liger 2003, p. 31.
  25. Liger 2003, p. 33.
  26. Marc Charasson, « Les grottes d'Arcy-sur-Cure conservent des secrets », L'Yonne républicaine,‎ (lire en ligne, consulté le ).

Liens externes[modifier | modifier le code]