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Calendrier hégirien

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Calendrier de 1280 (1863 de l'ère chrétienne), musée Linden, Stuttgart.

Le calendrier hégirien ou calendrier islamique[1] est un calendrier lunaire synodique non solaire[1],[2],[3], fondé sur une année de 12 mois lunaires de 29 à 30 jours chacun. Une année hégirienne compte 354 ou 355 jours. Elle est donc plus courte que l'année solaire d’environ 11 jours. La dénomination du calendrier apparaît tardivement, dans le dernier quart du xe siècle; l'adjectif « hégirien » dérive de « hégire » (arabe: hijra, « expatriation, exil »), terme qui désigne ici le départ, en septembre 622, de Mahomet de sa ville natale de La Mecque pour l'oasis de Yathrib. Cet événement marque le point de départ du comput musulman des années.

Aujourd'hui 15 novembre 2024 nous sommes le 13 Joumada al oula 1446 dans le calendrier hégirien.

L'observation à l'œil nu de la nouvelle lune signale le début du mois pour les musulmans, et non le calcul astronomique, d'où des différences de début de mois entre les pays. La date de début de chaque mois dépend de ce qui est visible dans chaque lieu. Par conséquent, les dates varient d'un pays à l'autre, généralement d'un jour ou deux seulement. De ce fait, le calendrier musulman fondé sur l'observation mensuelle de la nouvelle lune à l'œil nu ne peut pas répondre aux besoins des populations musulmanes qui voudraient l'utiliser, puisqu'il ne permet pas de gérer des activités à long terme, de prévoir, de programmer et d'organiser à l'avance tout ce qui doit l'être. Ces faiblesses ressortent encore plus nettement lorsque chaque État et communauté musulmane de la planète procède à l'observation mensuelle individuelle de la nouvelle lune, débouchant sur une panoplie de calendriers dont les données pour le même jour diffèrent d'un pays à l'autre. À titre d’illustration, le 1er chawwal 1426, jour de célébration de l’Aïd el-Fitr, correspondait au mercredi 2 novembre 2005 en Libye et au Nigeria, au jeudi 3 novembre dans 30 pays dont l’Algérie, la Tunisie, l’Égypte, l’Arabie saoudite et une partie des États-Unis, au vendredi 4 novembre dans 13 pays dont le Maroc, l’Iran, le Bangladesh, l’Afrique du Sud, le Canada, une partie de l’Inde et une partie des États-Unis, et au samedi 5 novembre dans une partie de l’Inde[4].

Cet état des choses n’est nullement exceptionnel, il se renouvelle chaque mois. En conséquence, le calendrier islamique fondé sur l’observation de la nouvelle lune n’est utilisé dans les sociétés musulmanes contemporaines que pour déterminer les dates associées à des célébrations religieuses. Pour tous leurs autres besoins, les musulmans du monde entier utilisent, depuis environ deux siècles, des calendriers solaires : le calendrier grégorien ou le calendrier persan, fondés sur des calculs astronomiques et sans doute depuis bien plus longtemps (au moins le XVIe siècle) le calendrier julien en Afrique du Nord pour les travaux agricoles[5].

On indique qu’une date est donnée dans ce calendrier en ajoutant la mention calendrier musulman, calendrier hégirien, ère musulmane, ère de l’hégire ou, en abrégé, H ou AH (du latin anno hegiræ).

Histoire

Calendriers préislamiques

La question du calendrier en usage à La Mecque ne fait pas consensus. Depuis l'article Mémoire sur le calendrier arabe avant l'islamisme publié en 1843 par Armand Pierre Caussin de Perceval, l'opinion dominante[note 1] défend un calendrier préislamique lunaire compensé d'un mois supplémentaire tous les trois ans, ce qui impliquerait un décalage d'un jour par an avec le calendrier solaire[6]. Pour Chebel, les prédécesseurs du calendrier de l'hégire étaient des calendriers luni-solaires qui comportaient des mois lunaires synchronisés avec le cycle solaire par l'intercalation d'un treizième mois, nommé nasīʾ, le différé. Ce mois, dans la péninsule arabique, était ajouté par certaines tribus entre le dernier et le premier mois de l'année et par les tribus juives selon les indications des autorités de Palestine, puis de Babylonie[7] Pour Robin, l'article de Caussin de Perceval repose sur des "arguments et des présupposés illusoires". Pour l'auteur, aucun calendrier du Proche-Orient ne dérive, par rapport à l'année solaire, à partir de l'ère chrétienne[6].

Pour Robin[note 2], le calendrier de La Mecque dérivait probablement de ses voisins, et sans doute de celui d'Himyar et ne dérivait pas par rapport à l'année solaire. Si le 1er Muharram de l'an 11, date traditionnelle du pèlerinage de l'Adieu et de la proclamation du nouveau calendrier, marque bien le début d'un cycle, alors le nouvel an préislamique devait tomber le 29 mars, ce qui correspond approximativement à l'équinoxe de printemps et à la renaissance de la végétation[6]. Pour l'auteur, "Non seulement l’Arabie des « rois » de Kinda était sous la tutelle de Ḥimyar, mais une tradition d’Ibn al-Kalbī rapporte explicitement que ces princes kindites avaient autorité sur le calendrier"[8]. Pour Déroche, l'Arabie du Sud, à l'inverse, utilisait un calendrier solaire[9].

Pour Robin, "il apparaît que la tradition savante arabo-musulmane n’a rien retenu de la manière d’identifier les années chez les Arabes préislamiques, si on excepte quelques vagues réminiscences concernant Makka."[10] Les traditionnistes attribue les noms des mois al-mu᾿tami-burak à un calendrier de populations disparues depuis longtemps. Cette information a été modifiée dans une optique apologétique pour renvoyer celui-ci à un temps ancien. "En effet, aux premiers siècles de l’Islam, la conviction s’était installée que le temple de Makka rayonnait sur toute l’Arabie depuis des siècles et que, en conséquence, son calendrier était le seul qui était utilisé dans toute la Péninsule"[10]. Basé sur un postulat faux, cette théorie d'un usage généralisé du calendrier de Makka "n'a rien d'historique"[6].

Mise en place d'un nouveau calendrier

Mahomet interdisant le mois intercalaire. Copie ottomane du XVIIe siècle -BNF

Plusieurs termes sont utilisés dans le Coran pour évoquer des durées[note 3] ou la mesure du temps. Si la plupart appartiennent à des expressions particulières, comme "Jour du jugement", quelques-uns de ces passages évoquent un décompte du temps ou la fixation de célébrations religieuses. C'est le cas des évocations des mois qui se trouvent principalement dans des passages médinois[9]. Le fondement lunaire du calendrier musulman ainsi est fixé par le verset 5 de la sourate 10 et le terme shahr ("mois") pourrait initialement avoir désigné la nouvelle lune[9]. Se basant sur le système préislamique anwa', l'exégése coranique identifie 28 phases et une révolution complete autour du zodiaque solaire[11]. La sourate 2 (v. 185 et 189) rappelle le rôle particulier de l'observation directe dans la détermination du début du mois et des rites associés (jeunes, pèlerinage)[9]. La fixation du calendrier en 12 mois se trouve dans la sourate 9, au verset 36 : « Le nombre des mois est de douze devant Dieu, tel il est dans le livre de Dieu, depuis le jour où il créa les cieux et la terre. Quatre de ces mois sont sacrés ; c’est la croyance constante. »[note 4],[9]. Ces différents versets liés au temps posent des questions quant à leurs interprétations[12].

Cette sourate évoque une autre quantité de temps, le nasīʾ, Les commentateurs y voit une référence au mois intercalaire des calendriers préislamiques, ce qui interroge quant à la sacralité de ce temps. Le Coran interdit expressément le mois intercalaire, soit pour se différencier de la pratique juive, soit de celle préislamique. Ainsi, le calendrier islamique est purement lunaire, ce qui cause un décalage annuel avec le calendrier solaire[9]. La mise en place de ce calendrier peut correspondre à la volonté de revenir à un décompte primordial du temps mais peut-être aussi de séparer le calendrier des pèlerinages de celui des foires[6].

Le Coran ne donne aucune indication sur une date à partir de laquelle le décompte des années doit commencer. En Arabie préislamique, il est possible de dater une période à partir du début du règne d'un roi, du début d'une magistrature ou à partir d'un événement particulier. Ainsi, l'Arabie du Sud a utilisé des ères comme celle d'Himyar. L'Arabie du Nord a pu utiliser des systèmes des civilisations voisines. C'est le cas des inscriptions de Harrân fixées selon le calendrier de la province romaine d'Arabie[9]. Cette ère, adoptée dans le Sinaï et le Hedjaz, commence en 106 avec l'annexion de la Nabatène par l'Empire romain[8].

L'adoption de ce calendrier, même si des sources plus tardives évoque une prescription plus ancienne[11], et la fixation du début de l'ère de l'Hégire au premier jour du mois de Mouharram de l'année de l'Hégire date du califat d'Umar[9]. Selon al-Birini, le choix de la date de l'Hégire pourrait correspondre au fait que ni celle de la naissance de Mahomet, ni celle du début de la Révélation ne font consensus. Il n'est pas non plus impossible que cela ne reprenne pas une coutume connue ailleurs, celle de dater en fonction d'un règne. Cette seconde option paraît plus plausible à Ch. Robin. Cela impliquerait que la volonté de marquer une nouvelle ère date d'Umar[6]. Des attestations anciennes semblent soutenir une de cette modification calendaire. Ainsi, le papyrus PERF 558 évoque une année 22[13].

Quelle ère ?

« L'un des écueils réside dans le fait que si ces documents indiquent irréfutablement l'utilisation d'un nouveau calendrier, ils ne précisent nullement qu'il s'agisse du calendrier hégirien dans son acception définitive, même si le raccourci est tentant »[13]. Ainsi, Imbert identifie les graffiti donnant une date sous la forme « en l'an 24 », comme étant le calendrier de l'Hégire[14]. Pourtant, cette ère musulmane est restée longtemps sans nom particulier[15].

Le terme hijra n'apparait que tardivement, en 977 pour la première attestation épigraphique et sa date d'apparition dans les colophons est inconnue. Un manuscrit, fini de copié en 989, évoque « l'hégire des Arabes » (hiǧrat al-ʿarab) et un autre de 1314 « l’hégire arabe », ce qui créait une ambiguïté sur l'interprétation comme l'Hégire de Mahomet[15]. Les inscriptions grecques des VIIe et VIIIe siècle évoquent, par exemple, l'ère nouvelle selon le terme « année des Arabes ». De même, les sources syriaques ne rattachent pas l'ère arabe au déplacement de Mahomet[15].

La seule ère ancienne identifiée en arabe est connue par deux papyrus égyptiens (datant de 662-3 et 676-7) : sanat qaḍā’ al-mu’minīn, ce que Ragib traduit par "juridiction des croyants" et qui semble être une "ère lunaire à mois solaires qui associait la chronologie musulmane au calendrier copte" à des fins de perception d'impôts[15]. Cette traduction a fait débat. Donner le traduit par l"'ère des croyants"[16]. Shaddel montre, à partir de chroniques anciennes, que cette formule est construite comme une date de règne de Mahomet comme chef de guerre. Elle pourrait être liée davantage à la fondation d'une communauté qu'à l'Hégire, même si ces deux faits sont chronologiquement contemporains[17]. Pour Tillier et Vanthieghem, en 2019, la découverte de nouveaux documents renforce le point de vue de Ragib. Ces auteurs préfèrent l'hypothèse selon laquelle « c'était un nom du calendrier impérial officiel, qui à l'origine pouvait ne pas faire référence à l'exode vers Médine de Mahomet, mais plutôt vers l'affirmation de sa souveraineté suite au traité d'al-Ḥudaybiyya »[18].

Pour Crone, ce n'est que quelques générations plus tard que l'Hégire va acquérir de l'importance et devenir le point de départ du calendrier. Cette identification du point de départ du calendrier avec l'Hégire pourrait, pour Donner, être une "coranisation" du vocabulaire potitico-administratif à l'époque des marwanides. Elle illustre l'importance pris par cet événement[17].

Les mois

Le calendrier musulman comporte douze mois de vingt-neuf ou trente jours. Excepté le mois de ramadan, le Coran ne fournit pas les noms de ces mois. Le calendrier musulman repose donc sur des traditions préislamiques[9]. De même, le Coran n'énonce pas le fait que Mouharram soit le premier mois de l'année. Cela provient d'une pratique préislamique[9].

L'étude la poésie pré-islamique permet d'affirmer que le calendrier al-mu᾿tami-burak était, avant l'islam, utilisé dans toute l'Arabie, à la différence de celui de Makka qui ne l'était pas[10]. Certains de ces noms sont attestés par l'épigraphie, la poésie préislamique ou les compilations arabes. Dans cette liste, quelques variantes existent selon les traditionnistes qui la rapporte[8].

no  Nom
(calendrier dit "de Makka")
Autres noms préislamiques[8]
1 al-muḥarram al-mu᾿tami
2 ṣafar nājir
3 rabī῾ al-awwal khawwān
4 rabī῾ al-ākhir (al-)ṣuwān/buṣān/wabṣān
5 jumādà ᾿l-ūlà (al-)ḥanīn/(al-)zabbā
6 jumādà ᾿l-ākhira (al-)zabbā᾿/rabba/rina
7 rajab (al-)aṣamm
8 sha῾bān ῾ādil/῾ādila ouwa῾l/waghl/wāghil
9 ramaḍān nāfiq/nātiq
10 shawwāl wa῾l/waghl/wāghilou ῾ādil/῾ādila
11 dhū ᾿l-qa῾da huwā῾ ou ranna/ warna
12 dhū ᾿l-ḥijja burak

Chaque mois démarre au moment où le premier croissant de lune, hilal, est visible. Il doit être aperçu avant qu'il ne disparaisse à l'horizon dans les lueurs crépusculaires du coucher du soleil. Selon l’endroit d’où est effectuée cette observation, le mois peut démarrer plus ou moins tôt. Le mois de ramadan, par exemple, ne commence et ne termine pas le même jour pour tous les musulmans du monde. Ainsi, si le ciel est nuageux et ne permet pas l'observation visuelle du croissant de lune, le soir du 29e jour de chaabane, dans un pays musulman, alors ce jour est défini comme jour de doute Yawm shakk. Le mois de chaabane sera déclaré comme ayant 30 jours, avant de déclarer le début du mois de ramadan. De même, l'année qui commence le premier jour du premier mois de mouharram, ne débute pas au même moment dans tous les pays musulmans[réf. nécessaire].

Mois sacrés

Quatre mois sont sacrés pour l'islam[19]. Trois d'entre eux sont consécutifs : les deux derniers de l'année (dhou al qi`da et dhou al-hijja) et le premier de l'année suivante (mouharram) ; le quatrième est le septième mois hégirien (rajab)[8]. Deux textes byzantins du VIe siècle font référence à des mois sacrés. Ces passages montrent que ces mois sacrés ne sont pas qu'une institution de la Mecque[20]. La tribu du Hijaz Banu Murra b. 'awf possédait, elle, une trève de 8 mois[20].

Nicolas Sinaï a soulevé des difficultés de la sourate 9 sur la question des mois sacrés. En effet, cette sourate évoque au verset 5 des "mois sacrés", au verset 2 quatre mois de grâce et au verset 36 quatre mois sacrés[12]. Ces quatre mois, du verset 36 sont souvent considérés comme correspondant aux mois sacrés préislamiques (dhou al qi`da, dhou al-hijja,mouharram et rajab). L'auteur interroge le lien avec les autres versets[12]. Pohlmann considère que le verset 5 est l'ajout le plus récent de ce passage et le v.2 pourrait appartenir à la strate la plus ancienne de ce passage, les deux correspondant à des contextes différents[21].

Selon une tradition musulmane, les mois du verset 2 correspondent à ceux du versets 5 et à une période de quatre mois consécutifs de trêve. En cela, ils doivent donc être différent de la période non-consécutive évoquée dans le verset 36. Cette hypothèse repose sur la proximité des v.2 et v.5 est fragilisée par l'usage du même terme pour désigner les mois dans le v.5 et le v.36. Une autre approche est de dire que le v.5 et le v.36 évoque une même durée, différente de celle évoquée au v.2. Rubin, quant à lui, défend l'identité entre les trois durées[12].

Certains rites sont liés à des mois particuliers. Ainsi, le Hajj doit prendre place, selon Q 2:197, pendant les "mois connus", ce qui a posé des problèmes d'interprétations. Certains exégètes ont défendu l'idée que ces mois soient ceux de Rajab ou de Dhu l-Hijja sans qu'ils n'aient été capables d'expliquer l'usage de la forme plurielle et non de la forme duelle[22]. Pour Tabari ou Ibn Kathir, cette forme plurielle renvoi aux deux mois précédant Dhu l-Hijja mais cette explication n'a pas de fondement solide. La majorité des commentateurs pensent que cette expression désigne les trois mois de Dhou al qi`da, Dhou al-hijja, Mouharram et parfois Rajab. Si de nombreux chercheurs acceptent cette interprétation même si elle pose question[22].

Début de mois : calcul ou observation ?

Les bédouins étaient habitués à observer la position des étoiles, de nuit, pour se guider dans leurs déplacements à travers le désert, et à observer l’apparition de la nouvelle lune pour connaître le début du mois. Quand ils interrogèrent le prophète de l'islam (Mahomet) sur la procédure à suivre pour déterminer le début et la fin du mois de jeûne, il leur recommanda de commencer le jeûne du mois du ramadan avec l’observation de la naissance de la nouvelle lune (au soir du 29e jour du mois) et d’arrêter le jeûne avec la naissance de la nouvelle lune (du mois de chawwal). « Si le croissant n'est pas visible (à cause des nuages) comptez jusqu'à 30 jours[23]. »

La recommandation confortait dans ses habitudes ancestrales une communauté qui ne savait ni écrire ni compter et qui n’avait pas d’accès, de toute façon, à d’autres méthodes de suivi des mois. À l'époque, les données astronomiques n’étaient pas communément disponibles pour être utilisées par la population de manière pratique, en tous lieux, comme c’est le cas aujourd’hui grâce aux agendas et aux calendriers.

Or, le croissant lunaire ne devient généralement visible que quelque 15 à 18 h après la conjonction, et sujet à l’existence de conditions favorables résultant de facteurs tels que le nombre d’heures écoulées depuis la conjonction ; les positions relatives du Soleil, du croissant lunaire et de l’observateur ; l’altitude de la Lune au coucher du soleil ; le lieu où l’on procède à l’observation ; l’angle formé avec le Soleil au moment du coucher ; les conditions d’observation (pollution, humidité, température de l’air, altitude) ; la limite de détection de l'œil humain ; etc.[24]

Selon les mois et les saisons, les conditions favorables d’observation de la nouvelle lune seront réunies en des sites différents du globe terrestre. Des astronomes musulmans de renom, des temps médiévaux, tels qu'Ibn Tariq (en) (VIIIe siècle), Al-Khawarizmi (783-850), Al-Battani (855-923), Al-Bayrouni (973-1048), Tabari (XIe siècle), Ibn Yunus (XIe siècle), Nasir ad-Din at-Tusi (1201-1274), etc. ont contribué de manière importante, pendant plusieurs siècles, au développement des connaissances théoriques et appliquées dans le domaine de l'astronomie. Ils ont accordé un intérêt particulier à l’étude des critères de visibilité de la nouvelle lune, dans le but de développer des techniques de prédiction fiables du début d’un nouveau mois.

Le ‘alim et le calendrier

Le Coran n'interdit pas l'usage du calcul astronomique. Mais, le consensus des oulémas s'est forgé solidement, pendant 14 siècles, autour du rejet du calcul, à part quelques juristes isolés, dans les premiers siècles de l'ère islamique, qui prônèrent l'utilisation du calcul pour déterminer le début des mois lunaires[25]. Sur le plan institutionnel, seule la dynastie (chi'ite) des Fatimides, en Égypte, a utilisé un calendrier fondé sur le calcul, entre les Xe siècle et XIIe siècle, avant qu'il ne tombe dans l'oubli à la suite d'un changement de régime.

L'argument majeur utilisé pour justifier cette situation se fonde sur le postulat des oulémas, selon lequel il ne faut pas aller à l'encontre d'une prescription de Mahomet[26]. Ils estiment qu'il est illicite de recourir au calcul pour déterminer le début des mois lunaires, du moment que Mahomet a recommandé la procédure d'observation visuelle[27].

De nombreux oulémas soulignent, de plus, que le calendrier fondé sur le calcul décompte les jours du nouveau mois à partir de la conjonction, laquelle précède d'un jour ou deux l'observation visuelle de la nouvelle lune. S'il était utilisé, le calendrier fondé sur le calcul ferait commencer et s'achever le mois de ramadan, et célébrer toutes les fêtes et occasions religieuses, en avance d’un jour ou deux par rapport aux dates qui découlent de l'application du hadith de Mahomet, ce qui ne serait pas acceptable du point de vue de la charia[28].

Mais, depuis le début du XXe siècle, de plus en plus de penseurs islamiques, ainsi qu'une poignée d'oulémas de renom, remettent en cause de tels arguments.

À leur avis, Mahomet a simplement recommandé aux fidèles une procédure d’observation de la nouvelle lune, pour déterminer le début d'un mois nouveau. Les bédouins se basant sur la position des étoiles pour se guider dans leurs déplacements à travers le désert et pour connaître le début des mois, Mahomet n'avait fait que les conforter dans leurs habitudes ancestrales (et il ne prononce rien sous l'effet de la passion ou par simple conformité ancestrale).

L'observation du croissant n'était qu'un simple moyen, et non pas une fin en soi, un acte d’adoration (‘ibada). Le hadith relatif à l'observation n'établissait donc pas une règle immuable, pas plus qu'il n'interdisait l'utilisation du calendrier astronomique.

D'après certains juristes, le hadith ne parle même pas d'une observation visuelle de la nouvelle lune, mais simplement de l'acquisition de l'information, selon des sources crédibles, que le mois a débuté[29]. Cela ouvre naturellement de toutes autres perspectives dans la discussion de cette question.

Unité ou multiplicité des « matali'e » (horizons) ?

L'observation de la nouvelle lune à l'œil nu n'est pas une affaire simple. Elle dépend de nombreux paramètres astronomiques et de facteurs atmosphériques, qui peuvent être favorables en un lieu donné, à un moment donné, et défavorables ailleurs, ou en d'autres saisons. Une fois la nouvelle lune observée de manière fiable, quelque part, comment cette information sera-t-elle portée à la connaissance de populations vivant sur de vastes territoires, ou parfois même en des régions très éloignées (comme l'Espagne par rapport à l'Arabie) ? À qui cette information devra-t-elle s'imposer avec toutes ses implications (telles que commencer le jeûne, célébrer la fin du ramadan, etc.)[30] ?

Les différentes écoles juridiques prirent en considération les différents facteurs qui leur semblaient s'imposer, qu'ils soient d'ordre astronomique, théologique, juridique ou pratique. Du vaste éventail de réponses qu'elles fournirent se dégage un noyau central de principes fondamentaux, qui sont d'un grand intérêt aujourd'hui.

  • D'une manière générale, l'observation de la nouvelle lune ne peut être prise en compte que par les communautés auxquelles l'information parvient.
  • L'observation de la nouvelle lune dans un pays d'Orient marque, sur le plan théorique, le début du nouveau mois pour tous les pays situés à l'ouest du lieu de cette observation[31]. Car, au fur et à mesure que l'âge de la nouvelle lune augmente, entre le moment de sa naissance (à la conjonction) et son premier coucher, la possibilité de l'observer s'améliore. C'est le cas en allant d'est en ouest, de La Mecque vers Casablanca, par exemple, du fait que la nouvelle lune est âgée de 3 h de plus à son coucher au Maroc qu'à son coucher en Arabie saoudite.
  • Une observation de la nouvelle lune doit être considérée comme nulle, lorsqu'elle est rapportée alors que la conjonction n'a pas encore eu lieu[32].
  • Mais, par-delà toutes ces considérations, et compte tenu des difficultés de communication entre les communautés musulmanes, sur le plan géographique, les oulémas déclarèrent que les habitants de chaque pays devaient appliquer la décision des autorités nationales, concernant le début des mois lunaires.

Ces règles n'avaient, à l'époque, qu'une portée limitée, parce que l'information sur l'observation de la nouvelle lune ne pouvait être véhiculée que sur des zones géographiques restreintes, proches du lieu d’observation. Mais, aujourd'hui, les données de la situation ont changé, avec la multiplication des États et des communautés islamiques à travers le monde, et le développement des moyens de communication modernes.

Ainsi, le même début de mois est, parfois, égrené comme un chapelet, en plusieurs jours successifs, dans différents pays. Ce fut le cas d'« eid al fitr » ou 1er chawal 1429, qui fut célébré en cinq jours différents à travers le monde : dans un pays le , dans 19 pays le , dans 25 pays le , dans cinq pays le , et dans une communauté le [33].

De nombreux dirigeants musulmans critiquent un tel dérapage du calendrier musulman et réclament le respect des principes énoncés par les oulémas concernant les « matali'e »[34]. Ainsi, concernant « eid al fitr » ou 1er chawal 1429, la conjonction eut lieu le 29 septembre 2008 à 8 h 12 GMT mais, d'après les observatoires astronomiques, la nouvelle lune ne pouvait être observée nulle part sur Terre, ce jour-là. L'observation annoncée par l'Arabie saoudite, le soir du 29 septembre, était donc erronée. Par contre, le soir du 30 septembre, la nouvelle lune pouvait être observée dans de nombreuses régions du monde[35]. La nouvelle d'une telle observation, où que ce soit sur Terre, au soir du 30 septembre, aurait pu être portée immédiatement à la connaissance de l'ensemble de la planète, grâce aux moyens de télécommunication modernes. Toutes les communautés musulmanes du monde auraient donc pu célébrer « eid el fitr » le même jour, le 1er octobre, compte tenu des principes formulés par les premiers oulémas sur ces questions[36].

Des études, de plus en plus nombreuses, réalisées par des astronomes musulmans au cours des dernières années, démontrent par ailleurs que les débuts de mois décrétés dans les pays islamiques sur une période de plusieurs décennies étaient souvent erronés, pour les raisons les plus diverses[37]. Il est clair, de ce point de vue, que lorsque le mois fondé sur l’observation de la nouvelle lune débute en des jours différents dans des pays islamiques différents, un seul début de mois fondé sur ce critère peut être considéré comme fondé sur le plan astronomique, tous les autres étant erronés.

L'écart entre les discours méthodologiques et les pratiques nationales

Dans le souci d’affirmer leur souveraineté, de nombreux États musulmans ont défini leurs propres procédures en matière de détermination du début des mois lunaires. Celles-ci sont, parfois, sans rapport avec la méthode d'observation préconisée par les oulémas, comme c'est le cas de la Libye. Ou bien, elles sont, dans certains cas, associées à des paramètres d'ordre astronomique, qui ont pour but d'améliorer la fiabilité de l'observation[38].

L'Arabie saoudite applique, ainsi, deux méthodes pour la détermination du début du nouveau mois. Elle utilise, à des fins administratives, un calendrier annuel, fondé sur le calcul, connu sous le nom de calendrier d'Umm al Qura[39], qui tient compte à la fois de la « conjonction » et des horaires de coucher du soleil et de la lune aux coordonnées de La Mecque, le soir du 29e jour de chaque mois. Le coucher de la lune après celui du soleil indique le début du nouveau mois. Dans le cas contraire, le mois en cours aura une durée de 30 jours.

Mais, l'État saoudien estime qu'il n'est pas conforme à la charia d'utiliser le calendrier d'Umm al Qura pour déterminer le début des mois associés à des célébrations religieuses (1er muharram, 1er ramadan, 1er chawal, 1er dhul hijja…). Des commissions spécialisées sont chargées, en de telles occasions, de scruter le ciel à l'œil nu pour apercevoir la nouvelle lune, avant que le Haut Conseil judiciaire d’Arabie saoudite ne décrète le début du nouveau mois.

En Inde, au Pakistan, au Bangladesh, à Oman, au Maroc, au Nigeria, à Trinidad, etc., l'observation de la nouvelle lune doit être attestée par un cadi (juge) ou une commission officielle spécialisée.

En Égypte, le nouveau mois débute après la conjonction, lorsque la nouvelle lune se couche cinq minutes au moins après le coucher du soleil.

En Indonésie, en Malaisie et à Brunei, il débute après la conjonction, lorsque l'âge de la nouvelle lune est supérieur à 8 h, l'altitude < 2° et l'élongation > 3° .

Il débute, en Turquie, après la conjonction, quand la nouvelle lune forme un angle de 8° au moins avec le soleil, à une altitude d'au moins 5°.

En Libye, le nouveau mois débute si la conjonction se produit avant l'aube (« fajr »), heure locale.

L'étude de cas spécifiques démontre, cependant, l'existence d'un écart important entre les règles que les différents États et communautés islamiques affirment appliquer et leurs pratiques. Cela ressort clairement de l'analyse du cas du 1er ramadan 1426, qui fut célébré en quatre jours différents à travers le monde : le lundi 3 octobre 2005 au Nigeria ; le mardi 4 octobre dans 22 pays, dont l'Arabie saoudite, l'Algérie, la Mauritanie, la Libye et l'Égypte ; le mercredi 5 octobre dans 23 pays ; et le jeudi 6 octobre dans trois pays[40].

D'après les observatoires astronomiques, les observations annoncées par le Nigeria, l'Arabie saoudite, l'Algérie, la Mauritanie et l'Égypte étaient erronées[41]. Elles n'étaient possibles ni le 2 octobre au Nigeria (la veille de la conjonction) ni le 3 octobre 2005 (au soir de la conjonction), en Arabie saoudite ou en Algérie, compte tenu des paramètres astronomiques applicables à ces régions[42]. L'Égypte ne pouvait pas, non plus, avoir observé le coucher de la Lune 5 minutes après celui du Soleil, conformément à la procédure qu'elle disait appliquer. Mais, bien que ces données astronomiques aient été largement connues des experts, et aient été absolument défavorables à toute observation visuelle de la nouvelle lune, les États concernés n'en ont tenu aucun compte, en procédant à l'annonce des observations, pour des raisons inexpliquées.

L’opinion juridique du cadi Shakir

Le cadi Ahmad Muhammad Shakir est un juriste éminent(référence nécessaire) de la première moitié du XXe siècle, qui occupa en fin de carrière les fonctions de président de la Cour suprême de la charia d’Égypte (tout comme son père avait occupé la même fonction au Soudan), et qui reste, de nos jours encore, un auteur de référence en matière de science du hadith[43].

Il a publié, en 1939, une étude importante et originale axée sur le côté juridique de la problématique du calendrier islamique, sous le titre : « Le début des mois arabes… la charia permet-elle de le déterminer en utilisant le calcul astronomique ? »[44].

D’après lui, Mahomet a tenu compte du fait que la communauté musulmane de son époque était « illettrée, ne sachant ni écrire ni compter », avant d’enjoindre à ses membres de se baser sur l’observation de la nouvelle lune pour accomplir leurs obligations religieuses du jeûne et du hajj.

Mais la communauté musulmane a évolué de manière considérable au cours des siècles suivants. Certains de ses membres sont même devenus des experts et des innovateurs en matière d’astronomie. En vertu du principe de droit musulman selon lequel « une règle ne s’applique plus, si le facteur qui la justifie a cessé d’exister », la recommandation de Mahomet ne s’applique plus aux musulmans, une fois qu’ils ont appris « à écrire et à compter » et ont cessé d’être « illettrés ».

Les oulémas d’aujourd’hui commettent donc une erreur d’interprétation lorsqu’ils donnent au hadith de Mahomet sur cette question la même interprétation qu’au temps de la révélation, comme si ce hadith énonçait des prescriptions immuables, alors que ses dispositions ne sont plus applicables à la communauté musulmane depuis des siècles, en vertu des règles mêmes de la charia.

Ahmad Muhammad Shakir rappelle le principe de droit musulman selon lequel « ce qui est relatif ne peut réfuter l’absolu, et ne saurait lui être préféré, selon le consensus des savants. » Or, la vision de la nouvelle lune par des témoins oculaires est relative, pouvant être entachée d’erreurs, alors que la connaissance du début du mois lunaire basée sur le calcul astronomique est absolue, relevant du domaine du certain.

Il rappelle également que de nombreux juristes musulmans de grande renommée ont pris en compte les données du calcul astronomique dans leurs décisions, citant à titre d’exemples Cheikh Al-Mraghi, président de la Cour suprême de la charia d’Égypte, Taqiddine Assoubaki et Takiddine bin Daqiq al-Eid.

Shakir souligne, en conclusion, que rien ne s’oppose, au niveau de la charia, à l’utilisation du calcul pour déterminer le début des mois lunaires et ce, en toutes circonstances, et non à titre d’exception seulement, comme l’avaient recommandé certains ulémas.

Il observe, par ailleurs, qu’il ne peut exister qu’un seul mois lunaire pour tous les pays de la Terre, fondé sur le calcul, ce qui exclut la possibilité que le début des mois diffère d’un pays à l’autre[45]. L’utilisation du calendrier fondé sur le calcul rendra possible la célébration le même jour, dans toutes les communautés musulmanes de la planète, d’événements à caractère hautement symbolique sur le plan religieux, tels que le 1er muharram, le 1er ramadan, l’Aïd al-Fitr, l’Aïd al-Adha ou le jour de Arafat, lors du hajj. Cela renforcera considérablement le sentiment d’unité de la communauté musulmane à travers le monde.

Cette analyse juridique du cadi Shakir n’a jamais été réfutée par les experts en droit musulman, plus de 70 ans après sa publication. Le professeur Youssef al-Qaradâwî s’est récemment rallié formellement à la thèse du cadi Shakir. Dans une importante étude publiée en 2004, intitulée : « Calcul astronomique et détermination du début des mois » (en arabe)[46], al-Qaradawi prône pour la première fois, vigoureusement et ouvertement, l’utilisation du calcul pour l’établissement du calendrier islamique, une question sur laquelle il avait maintenu une réserve prudente jusque-là. Il cite à cet effet avec approbation de larges extraits de l’étude de Shakir.

La décision du Conseil du Fiqh d’Amérique du Nord (CFAN)

Le Conseil du Fiqh d’Amérique du Nord (en) (CFAN (en)), qui s’est senti depuis des années interpellé par cette question, a annoncé au mois d’août 2006 sa décision mûrement réfléchie d’adopter désormais un calendrier islamique fondé sur le calcul, en prenant en considération la visibilité du croissant où que ce soit sur Terre.

Utilisant comme point de référence conventionnel, pour l’établissement du calendrier islamique, la ligne de datation internationale [International Date Line (IDL)], ou Greenwich Mean Time (GMT), il déclare que désormais, en ce qui le concerne, le nouveau mois lunaire islamique en Amérique du Nord commencera au coucher du soleil du jour où la conjonction se produit avant 12 h GMT. Si elle se produit après 12 h GMT, alors le mois commencera au coucher du soleil du jour suivant[47].

La décision du CFAN est d’un grand intérêt, parce qu’elle conjugue avec une grande subtilité les exigences théologiques des ulémas avec les données de l’astronomie. Le CFAN retient le principe de l’unicité des matali’e (horizons)[45], qui affirme qu’il suffit que la nouvelle lune soit observée où que ce soit sur Terre, pour déterminer le début du nouveau mois pour tous les pays de la planète. Après avoir minutieusement étudié les cartes de visibilité du croissant lunaire en différentes régions du globe, il débouche sur la conclusion suivante :

Si la conjonction se produit avant 12 h GMT, cela donne un temps suffisant pour qu’il soit possible d’observer la nouvelle lune en de nombreux points de la Terre où le coucher du soleil intervient longtemps avant le coucher du soleil en Amérique du Nord. Étant donné que les critères de visibilité de la nouvelle lune seront réunis en ces endroits, on pourra considérer qu’elle y sera observée (ou qu’elle aurait pu l’être si les conditions de visibilité avaient été bonnes), et ce bien avant le coucher du Soleil en Amérique du Nord.

Par conséquent, sur ces bases, les stipulations d’observation de la nouvelle lune seront respectées, comme le prescrit l'interprétation traditionnelle de la charia, et le nouveau mois lunaire islamique débutera en Amérique du Nord au coucher du soleil du même jour. Si la conjonction se produit après 12 h GMT, alors le mois commencera en Amérique du Nord au coucher du soleil du jour suivant.

Vers un calendrier islamique universel aux paramètres du calendrier saoudien d'Umm al Qura ?

La proposition du Conseil du Fiqh d’Amérique du Nord (CFAN) suscita l’intérêt des autorités politiques et religieuses dans de nombreux pays à majorité musulmane. Des astronomes de diverses nationalités se réunirent au Maroc, en novembre 2006, pour étudier plus en détail la possibilité de l'adopter comme base d'un calendrier islamique universel.

Cependant, le CFAN (en) modifia sa position en 2007, et décida de s’aligner sur une décision du Conseil européen pour la fatwa et la recherche (CEFR), utilisant les paramètres du calendrier saoudien d'Umm al-Qura (en)[48] pour déterminer le début des mois musulmans (en utilisant comme paramètres que la « conjonction » se produise « avant le coucher du soleil aux coordonnées de La Mecque », et « que le coucher de la lune ait lieu après celui du soleil » aux mêmes coordonnées). D’après le CFAN, le choix des paramètres d'Umm al Qura a pour objectif de favoriser le développement d'un consensus, dans les pays musulmans, au sujet de l'utilisation de ce calendrier fondé sur le calcul, et dont les données ne diffèrent que de manière marginale de celles obtenues par l’application de la méthodologie du CFAN d’août 2006.

Les décisions du CFAN et du CEFR ont déjà eu les retombées suivantes :

  • le principe d’utilisation du calendrier fondé sur le calcul est officiellement parrainé par des responsables religieux connus et respectés de la communauté musulmane[49],[50],[51] ;
  • il est adopté officiellement par des organisations islamiques dont nul ne conteste la légitimité[52] ;
  • les communautés musulmanes d’Europe et d’Amérique sont disposées à l’utiliser pour la détermination du début de tous les mois, y compris ceux associés à des occasions à caractère religieux.

Sur le plan opérationnel, l'initiative du CFAN et du CEFR de 2007 semble être bien suivie par la majorité des communautés musulmanes d'Europe et d'Amérique, comme en témoigne leur comportement à l'occasion du début du mois de ramadan en 2010.

De même, en France, après des années de débats, le Conseil français du culte musulman (CFCM) a-t-il officiellement adopté en mai 2013 le calendrier lunaire basé sur le calcul pour déterminer les dates associées à toutes les grandes manifestations religieuses de l'année musulmane, dont le début et la fin du mois de ramadan.

Mais, la nouvelle direction du CFCM, élue immédiatement après l'adoption de cette décision, a décidé de l'ignorer et de continuer de se baser sur la traditionnelle méthode d'observation de la nouvelle lune pour déterminer le début et la fin du mois de ramadan 2013.

Elle a agi de même en 2014, annonçant que le CFCM tiendra une réunion le 27 juin 2014 (correspondant au 29 chaâbane 1435) à l'occasion de la « nuit du doute », pour déterminer à quel jour de la semaine correspondra le 1er ramadan 1435, sur la base des observations de la nouvelle lune qui seront effectuées.

L'initiative du CFAN et du CEFR semble aussi avoir encouragé de nombreux États musulmans à revoir leur politique en matière de proclamation du début des mois lunaires, comme il ressort clairement d'un état des lieux effectué à l'occasion du 1er ramadan 1433 (juillet 2012).

Une étude de cas : l'état des lieux au 1er ramadan 1433 (juillet 2012)

Cinq ans après l'adoption des décisions du CFAN et du CEFR, un état des lieux a été dressé, sur la base des annonces faites par différents États et organismes musulmans, à l'occasion du 1er ramadan 1433 (juillet 2012)[53]. Il en ressort qu'il subsiste des différences majeures entre les principaux États et organisations musulmanes concernées, que ce soit au niveau du principe d'utilisation d'un calendrier basé sur le calcul ou en ce qui concerne les paramètres et spécifications à associer à un calendrier musulman destiné à être d'une vocation universelle.

Ainsi, en application de sa politique déclarée, le Conseil du Fiqh d'Amérique du Nord (CFAN) a annoncé au début de juillet 2012, que « le premier jour du ramadan 1433 correspondrait au vendredi 20 juillet, 2012 et l'Aïd al-Fitr, au dimanche 19 août 2012. »

Le CFAN a expliqué que :

  1. il reconnaissait le calcul astronomique comme une méthode acceptable, dans le cadre de la charia, pour déterminer le début des mois lunaires, y compris ceux de ramadan et shawwal ;
  2. il utilisait Makkah Al-Moukarrama comme le site au niveau duquel les calculs astronomiques devaient être effectués, et
  3. la conjonction devait avoir lieu avant le coucher du soleil à La Mecque et la lune devait se coucher après le soleil. « Sur la base de cette méthode, les dates du ramadan et Eid Fitr pour les 1 433 ans AH étaient établies comme suit : 1er ramadan le vendredi 20 juillet 2012 et le 1er shawwal le dimanche 19 août 2012 »[54].

Mais, le Conseil européen de la fatwa et de la recherche (CEFR), qui est basé à Dublin, semble avoir changé de position, du moins pour le moment, par rapport à sa décision de 2007. Il a également annoncé, bien à l'avance, que le 1er ramadan 1433 serait le vendredi 20 juillet 2012, mais a expliqué que cette conclusion était « fondée sur des critères de calcul postulant qu'il doit y avoir la possibilité d'observer le croissant à l'œil nu ou à l'aide d'un télescope en un endroit quelconque de la Terre ». Pour que cette possibilité d'observation du croissant dans un quelconque endroit de la Terre puisse être vérifiée, les conditions suivantes doivent être réunies :

  1. la lune doit se coucher après le coucher au site où cette observation doit être possible ;
  2. l'altitude de la lune au coucher du soleil doit être d'au moins 5 degrés ;
  3. l'élongation (angle virtuel formé entre le Soleil, l'observateur et la Lune) doit être d'au moins 8 degrés[55].

Les autorités saoudiennes, quant à elles, continuent d'affirmer qu'elles s'appuient exclusivement sur l'observation visuelle de la nouvelle lune afin de déterminer les dates des événements associés à des cérémonies religieuses. Elles ont ainsi annoncé, dans la soirée du jeudi 19 juillet 2012, que la nouvelle lune avait été observée et que le jeûne du Ramadan débuterait le vendredi 20 juillet[56].

La déclaration saoudienne contredisait les déclarations faites par les astronomes dans les sites spécialisés, affirmant qu'il serait impossible d'observer la nouvelle lune dans la région du Moyen-Orient dans la soirée du jeudi 19 juillet. Toutefois, sur la base de l'annonce saoudienne, quelque 70 pays et communautés musulmanes à travers le monde ont entamé le jeûne du Ramadan le vendredi 20 juillet. Cela constituait un record historique du nombre de pays musulmans commençant le jeûne à la même date. Trente-deux pays et communautés entamèrent le jeûne le samedi 21 juillet, après avoir observé la nouvelle lune la veille au soir.

Pour leur part, les principales associations musulmanes de France ont annoncé, elles aussi, que le 1er ramadan 1433 serait le vendredi 20 juillet 2012. Elles se sont fondées sur un calendrier basé sur le calcul astronomique, en tenant compte des critères de la possibilité d'observation de la nouvelle lune en quelque endroit que ce soit sur Terre[57],[58].

Les musulmans turcs d'Asie Mineure et de nombreuses communautés musulmanes d'Europe de l'Est ont également entamé le jeûne du ramadan 1433 le vendredi 20 juillet 2012, sur la base du calendrier musulman de la Turquie. Ce dernier est calculé des années à l'avance (actuellement jusqu'à 1437 AH/2015 CE) par la présidence turque des affaires religieuses (Diyanet Isleri Baskanligi)[59].

Depuis le 1er muharram 1400 AH (21 novembre 1979), le calendrier lunaire turc est basé sur la règle suivante : « Le mois lunaire est supposé commencer le soir où, quelque part sur Terre, le centre calculé de la nouvelle lune au coucher du soleil local est de plus de 5° au-dessus de l'horizon et l'élongation de plus de 8°[60]. »

Il ressort de cet état des lieux au 1er ramadan 1433 que :

  1. l'utilisation d'un calendrier lunaire musulman basé sur le calcul ne cesse de gagner des adhérents, en particulier au sein des communautés musulmanes d'Amérique du Nord et d'Europe occidentale. Mais il y a encore des différences importantes quant aux spécifications du calendrier lunaire à utiliser, comme en témoignent les différentes méthodologies utilisées par CFAN, CEFR, les associations musulmanes de France ou les musulmans turcs ;
  2. le nombre d'États qui ont entamé le jeûne du ramadan sur la base de l'annonce saoudienne a connu un développement considérable ;
  3. mais, la stratégie et les objectifs de l'Arabie saoudite en matière de détermination des mois lunaires associés à des pratiques religieuses continuent d'être déroutants pour l'observateur. Les autorités saoudiennes annoncent régulièrement l'observation d'une nouvelle lune à des dates où les astronomes professionnels indiquaient clairement, longtemps à l'avance, qu'une telle observation serait impossible à réaliser. Elles utilisent le calendrier d'Umm al Qura (qui est basé sur le calcul astronomique) à des fins civiles et administratives mais, assez régulièrement, elles avancent ou reculent d'un jour la date du début d'un mois associé à des célébrations religieuses, pour des raisons inexpliquées

Ces manipulations du calendrier d'Umm al Qura en réduisent la crédibilité et amenuisent ses chances de servir comme un calendrier musulman à vocation universelle, susceptible d'être adopté par les différentes communautés musulmanes du monde entier. Les communautés musulmanes d'Amérique du Nord et d'Europe ont donc préféré établir leur propre calendrier musulman basé sur le calcul astronomique, en utilisant les paramètres de leur choix. Les promoteurs d'un calendrier musulman à vocation « universelle » dans le monde musulman restent ainsi confrontés à la difficile tâche de déterminer des paramètres qui seraient acceptables pour tous les utilisateurs potentiels d'un tel calendrier. Les deux versions présentées par le CFAN et le CEFR, qui ont été décrites ci-dessus, constituent, à cet égard, deux modèles possibles, tous deux a priori également valables. La sélection d'une version ou de l'autre (ou d'une troisième option) relèvera d'un choix stratégique et politique des différentes communautés musulmanes du monde, plutôt que d'un impératif théologique ou technique[61].

Correspondance du calendrier hégirien avec d'autres calendriers

Une page d'un almanach tunisien, il montre la correspondance du 26e jour de ramadan avec le 14 janvier du calendrier grégorien et le 1 يناير عجمي (1 Yennayer 3ajmi) (en bas) du calendrier berbère.

L'année du calendrier hégirien (ci-après : f(x)) peut être calculée assez précisément en fonction de l'année du calendrier grégorien (ci-après ; x) par la fonction suivante : f(x) = (x − 621,5709) × 1,0306888. 621,5709 correspond à la différence entre les premières années de chaque calendrier, et une année solaire est environ 1,0306888 fois plus longue qu'une année lunaire.

Les jours juliens sont un moyen commode d'établir la correspondance entre le calendrier musulman et les calendriers grégorien, julien et juif.

Curiosité

Pour la seule fois dans l'Histoire, une année hégirienne sera complètement incluse dans une année grégorienne en affichant le même millésime, soit l'année 20 874 ; et seront parfaitement concordantes le 1er mai 20 874 (1er joumada al oula 20 874)[62].

Variantes

Il existe une variation du calendrier musulman, connue sous le nom de calendrier musulman tabulaire ou calendrier fatimide, dans laquelle la longueur des mois est déterminée par des règles de calcul et non par observation ou calcul astronomique. L’année commune de ce calendrier comporte 354 ou 355 jours, répartis en 12 mois de 30 et 29 jours alternativement, dont seul le douzième (dhou al-hijja) compte un nombre variable de jours (29 ou 30).

  • Sont dites communes les années où ce mois compte 29 jours, et où l’année compte 354 jours.
  • Sont dites abondantes les années où ce mois compte 30 jours, et où l’année compte 355 jours.

Les années communes ou abondantes s’intercalent selon un cycle de 30 années comptant 19 années communes et 11 années abondantes. Il existe quatre versions principales de ce cycle trentenaire. Selon la version, sont abondantes les années :

  • 2, 5, 7, 10, 13, 15, 18, 21, 24, 26, et 29 – « algorithme koweïtien » (Kushyar ibn Labban (en), XIe siècle, et Ulugh Beg, XVe siècle) ;
  • 2, 5, 7, 10, 13, 16, 18, 21, 24, 26, et 29 – version la plus commune ;
  • 2, 5, 8, 10, 13, 16, 19, 21, 24, 27, et 29 – tables de conversion d’origine indienne ;
  • 2, 5, 8, 11, 13, 16, 19, 21, 24, 27, et 30 – Al-Marwazi, IXe siècle, Al-Biruni, Xe et XIe siècles, et Élias de Nisibis, XIe siècle.

L’année moyenne au cours de ce cycle de 30 ans est donc de : (19 × 354 + 11 × 355) / 30 = 354,36667 qui ne diffère que de 0,0004 jour (<35 s) de l’« année lunaire vraie » et permet ainsi de garder le calendrier synchronisé sur les lunaisons pour les 2 500 prochaines années.

L’année musulmane ayant 10, 11 ou 12 jours de moins que l’année grégorienne (selon que celle-ci est bissextile ou non, et que l’année musulmane est abondante ou commune), le nouvel an musulman survient chaque année civile en avance de ce même nombre de jours par rapport à l’année solaire, et chaque date du calendrier musulman (dont notamment les fêtes religieuses et le jeûne du mois de ramadan) « transite » donc progressivement par toutes les saisons.

Croissant de lune à Manama, Bahrain, marquant le début du mois de ramadan.

L’astronome et le calendrier

Le mois lunaire débute au moment de la « conjonction » mensuelle, quand la Lune se trouve située sur une ligne droite entre la Terre et le Soleil. Le mois est défini comme la durée moyenne séparant deux nouvelles lunes (29,53 jours environ). La lunaison varie au sein d'une plage dont les limites sont de 29,27 jours au solstice d'été et de 29,84 jours au solstice d'hiver, donnant, pour l’année de 12 mois, une durée moyenne de 354,37 jours. L’astronome babylonien Kidinnu (IVe siècle av. J.-C.), très connu pour ses travaux astronomiques, a calculé la durée du mois synodique comme étant égale à 29 j 12 h 44 min 3,3 s, alors que la valeur admise aujourd’hui est de 29 j 12 h 44 min 2,8 s, soit environ une demi-seconde d’écart.

Les astronomes ont posé, depuis des millénaires, le principe que les mois de 30 jours et de 29 jours se succèdent en alternance, permettant de faire correspondre la durée de révolution synodique de la Lune sur deux mois consécutifs à un nombre de jours entiers (59). En fin de cycle, il restait ainsi un écart mensuel de 44 min environ, qui se cumulait pour atteindre 24 h (soit l’équivalent d’un jour) tous les 2,73 ans. Pour solder cet écart, il suffisait d’ajouter un jour au dernier mois de l’année, tous les trois ans environ, de la même manière qu’on ajoute un jour tous les quatre ans au calendrier grégorien. Les années dites « abondantes » du calendrier islamique, d’une durée de 355 jours chacune, sont au nombre de 11 dans un cycle de 30 ans (années nos 2, 5, 7, 10, 13, 16, 18, 21, 24, 26 et 29), alors que les années dites « communes », d’une durée de 354 jours, sont au nombre de 19.

Notes et références

Notes

  1. Cette approche était " acceptée […] jusqu’à une date récente de façon unanime, bien qu’il soit avéré désormais que ces thèses étaient infondées." : Robin, Topoi.
  2. Voir : Robin (Christian Julien), « Die Kalender der Araber vor dem Islam », dans Nora Schmidt, Nora Katharina Schmid & Angelika Neuwirth (édd.), Denkraum Spätantike. Reflexionen von Antiken im Umfeld des Koran, Wiesbaden(Harrassowitz), 2016, p. 299-386
  3. Le mot yawm apparait ainsi environ 460fois dans le Coran : Fr. Déroche, Dictionnaire du Coran.
  4. « L’Immunité ou le Repentir », IX, 36.

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  31. Allal el Fassi, « Aljawab assahih… », op. cit., pp. 26-28.
  32. Allal el Fassi, « Aljawab assahih… », op. cit., p. 22.
  33. Moonsighting.com : premier chawal 1429 eid al fitr dans les pays musulmans.
  34. C'est la thèse soutenue dès 1965 par Allal el Fassi, un 'alem de l'université Qarawiyine de Fès et ministre marocain des Affaires islamiques, dans un rapport sur « le début des mois lunaires » préparé à la demande du roi Hassan II. D'après lui, si un consensus islamique pouvait être réalisé autour d'un tel « retour aux sources », cela pourrait constituer une « voie de progrès » considérable, dans le but d'unifier les dates des célébrations à caractère religieux à travers le monde musulman, en exploitant les possibilités offertes par les technologies modernes de communication. voir Allal el Fassi, « Aljawab assahih… », op. cit., p. 25.
  35. Moonsighting.com : « The Astronomical New Moon is on Monday, September 29, 2008 at 8 h 12 GMT, 4 h 12 EDT, 1 h 12 PDT). It will not be visible on September 29 except small possibility in Polynesian Islands. On Tuesday, September 30, it will be visible in New Zealand Australia, Indonesia, South Asia, Africa and Americas. In North America on September 30, it can be seen in Southern belt states. So, Eidul-Fitr is expected on Wednesday, October 1, most of the world, Insha-Allah. Also, according to the criteria adopted by Fiqh Council of North America, and European Council for Fatwa and Research, the first day of Shawwal is on Wednesday, October 1, 2008, which would be after completing 30 days of Ramadan.
  36. Le calendrier saoudien d'Umm al Qura, préparé sur une base annuelle, donc longtemps à l'avance, avait annoncé le 1er chawal pour le 1er octobre (en application de ses paramètres). Mais, les autorités saoudiennes l'« ajustèrent » à la dernière minute pour ramener le 1er chawal au 30 septembre 2008, pour des raisons inexpliquées. Le détail de ces « ajustements » est présenté par l'astronome Robert Harry van Gent dans son article : The Umm-al-Qura calendar of Saudi Arabia dans la section « Advancement and postponement of the Umm al Qura calendar ». À noter que quatorze États musulmans ont suivi l'Arabie saoudite dans cet « ajustement ».
  37. Nidhal Guessoum, Mohamed el Atabi et Karim Meziane, Ithbat acchouhour alhilaliya wa mouchkilate attawqiti alislami, 152 p., Dar attali'a, Beyrouth, 2e éd., 1997.
  38. Moonsighting.com : procédure d’observation de la nouvelle lune par pays.
  39. Robert Harry van Gent, The Umm-al-Qura calendar of Saudi Arabia.
  40. Moonsighting.com 1426rmd : au Nigeria, les autorités annoncèrent que la nouvelle lune avait été aperçue le 2 octobre au soir, et le premier jour de jeûne fut fixé au 3 octobre, alors que la conjonction n'eut lieu que le 3 octobre, dans la matinée. Le Haut Conseil judiciaire d'Arabie saoudite (HCJAS) annonça, pour sa part, que la nouvelle lune avait été aperçue le 3 octobre au soir, alors qu'elle avait moins de 5 h d'âge. Or, d'après les astronomes, il était impossible d'observer une lune aussi jeune (l'âge habituel requis étant d'au moins 18 h). De plus, les autres paramètres astronomiques n'étaient pas favorables à une telle observation. Le début du ramadan fut décrété pour le 4 octobre, date qui concordait avec celle établie de longue date par le calendrier d'Umm al Qura. Huit États du Moyen-Orient annoncèrent le début du ramadan pour le 4 octobre, en se basant sur l'annonce saoudienne. L'Algérie, la Mauritanie et l'Égypte annoncèrent également que la nouvelle lune avait été aperçue sur leur territoire le soir du 3 octobre, alors qu'elle était âgée de moins de 9 h dans toute cette zone, à la fois bien trop jeune pour être visible, et associée à des paramètres d'observation défavorables. Pour eux aussi, le ramadan débuta le 4 octobre. La Libye, quant à elle, débuta le jeûne du ramadan le 4 octobre, du fait que la conjonction s'était produite le 3 octobre dans la matinée, donc avant le « fajr » (aube) du 4 octobre.
  41. La multiplicité des rapports erronés relatifs à l'observation de la nouvelle lune, parfois avant même la conjonction, s'explique du fait que les personnes cherchant à apercevoir la nouvelle lune dans le ciel, à son premier coucher, la confondent souvent, de bonne foi, avec d'autres phénomènes naturels. En effet, comme il a déjà été indiqué, la nouvelle lune ne devient généralement visible que quelque 18 h après la conjonction, et sujet à l’existence de conditions favorables résultant de facteurs tels que le nombre d’heures écoulées depuis la conjonction ; les positions relatives du soleil, du croissant lunaire et de l’observateur ; l’altitude de la lune au coucher du soleil ; le lieu où l’on procède à l’observation ; l’angle formé avec le soleil au moment du coucher ; les conditions d’observation (pollution, humidité, température de l’air, altitude) ; la limite de détection de l'œil humain ; etc. Dans beaucoup de cas, le jeu de tous ces facteurs la rend très difficile (sinon impossible) à distinguer dans le ciel, à l'œil nu, à son premier coucher après la conjonction.
  42. Moonsighting.com 1426rmd : le site spécialisé « Moonsighting.com » explique que la conjonction s'est produite le 3 octobre à 10 h 28 GMT mais que la nouvelle lune ne pouvait être observée nulle part dans le monde le 3 octobre 2005. Elle pouvait être vue le 4 octobre dans la majeure partie du monde, à l'exception de la plus grande partie de l'Asie et de Europe, où elle ne pourra être vue que le 5 octobre au soir. Par conséquent, le 1er ramadan sera le 5 octobre en Amérique du Nord et dans la plus grande partie du monde, sauf en Europe et dans la plus grande partie de l'Asie.
  43. Un auteur de référence en matière de science du hadith.
  44. Ahmad Shakir, « Le début des mois arabes… est-il licite de le déterminer par le calcul astronomique ? (1939) » reproduit par le quotidien saoudien al-Madina du 13 octobre 2006 (no 15878).
  45. a et b Abi alfayd Ahmad al-Ghomari, op. cit.
  46. Yusuf al-Qaradawi, « Calcul astronomique et détermination du début des mois » (en arabe).
  47. Décision du Conseil du Fiqh d’Amérique du Nord.
  48. Van Gent, « The Umm-al-Qura calendar of Saudi Arabia ».
  49. Ahmad Shakir : op. cit.
  50. Yusuf al-Qaradawi, op. cit.
  51. Zulfikar Ali Shah, « The astronomical calculations: a fiqhi discussion ».
  52. Islamic Center of Boston, Wayland: Moonsighting Decision documents.
  53. Khalid Chraibi, « La réforme du calendrier musulman 3/3 ».
  54. Fiqh Council of North America - Announcements - Ramadan & Eid Mubarak 1433 (2012).
  55. European Council for Fatwa and Research (ECFR) announcement.
  56. Saudi announcement 1 Ramadan 1433.
  57. Conseil français du culte musulman (CFCM) : Ramadan Moubarak !
  58. Nidhal Guessoum, « Quel sera le premier jour du mois de Ramadan 2012 ? »
  59. Gouvernement de Turquie.
  60. Robert Harry van Gent, « The Islamic calendar of Turkey ».
  61. Une partie importante de cet article est basée sur sept articles de Khalid Chraibi intitulés « 1er muharram : calendrier lunaire ou islamique ? », « La problématique du calendrier islamique », « Le calendrier musulman en 10 questions », « La charia et le calendrier », « La réforme du calendrier musulman - les termes du débat », « Le calendrier musulman pris en étau entre l'astronomie, la théologie, les traditions et la politique » et « Calendrier lunaire: le guide du musulman perplexe » publiés par « www.oumma.com ». L’auteur en a autorisé la reproduction libre, dans leur intégralité ou en partie, dans toute utilisation non-commerciale, à la seule condition que l'auteur et la source en soient clairement identifiés.
  62. Convertisseur bi-directionnel d'une date du calendrier julien-grégorien en date du calendrier hégire arabe (calendrier lunaire).

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