Luxembourgeois

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Luxembourgeois
Lëtzebuergesch (Westmoselfränkisch)
Pays Drapeau du Luxembourg Luxembourg
Drapeau de la Belgique Belgique (Pays d'Arlon, Pays de Saint-Vith)
Drapeau de la France France (Pays des Trois Frontières)
Drapeau de l'Allemagne Allemagne (Pays de Bitburg, Pays de Saarburg, Pays de Prüm)
Nombre de locuteurs près de 400 000 (2010)
Nom des locuteurs luxembourgophones
Classification par famille
Statut officiel
Langue officielle Drapeau du Luxembourg Luxembourg
Étendue Langue individuelle
Type Langue vivante
Échantillon
Article premier de la Déclaration universelle des droits de l'homme (voir le texte en français) :

Artikel 1

All Mënsch kënnt fräi a mat deer selwechter Dignitéit an deene selwechte Rechter op d'Welt. Jiddereen huet säi Verstand a säi Gewësse krut a soll an engem Geescht vu Bridderlechkeet deenen anere géintiwwer handelen.
Carte
Image illustrative de l’article Luxembourgeois
Aire géographique du luxembourgeois.

Le luxembourgeois (Lëtzebuergesch en luxembourgeois) est une langue germanique parlée essentiellement au grand-duché de Luxembourg, ainsi que dans quelques communes limitrophes en Belgique[1], en France[2] et en Allemagne. Le luxembourgeois est la langue nationale des Luxembourgeois et considéré comme langue officielle du pays, au même niveau que le français et l'allemand[3].

Primitivement, l'appellatif « Luxembourgeois » ne concerne que les variétés du moyen-allemand occidental qui sont parlées au Luxembourg, l'orthographe du luxembourgeois est officiellement standardisée en 1976 et, en 1984, ce dialecte obtient le statut de langue nationale du Luxembourg. Depuis la seconde moitié du XXe siècle, le terme « Luxembourgeois » désigne par extension une zone linguistique[n 1] qui est délimitée par le francique ripuaire (isoglosse dorp/dorf), le francique mosellan (isoglosse op/of) et deux dialectes d'oïl (le wallon et le lorrain).

Classification et extension

Il faut d'abord faire la distinction entre luxembourgeois « standard » ou « normé » et luxembourgeois « local » ou « régional ». Le luxembourgeois standard, également appelé koinè pour ce qui est des aspects phoniques, existe officiellement au Luxembourg depuis 1976, à la suite d'un arrêté ministériel du portant réforme du système officiel d'orthographe luxembourgeoise[n 2].

Depuis la seconde moitié du XXe siècle, le terme « luxembourgeois » est ambigu, car les limites de sa zone linguistique varient selon les interprétations, il y a néanmoins trois interprétations principales :

  • Au sens premier, le luxembourgeois ne concerne que le Luxembourg, étant donc délimité par les frontières du pays
  • Au sens un peu plus large, il concerne également le nord-ouest de la Moselle en France, les pays d'Arlon et de Saint-Vith en Belgique, ainsi qu'une zone limitrophe en Allemagne dont les limites nord et est sont floues
  • Au sens le plus large, il correspond au territoire appelé nördliches Moselfränkisch d'après le Rheinischer Fächer de Georg Wenker publié en 1877. Ce territoire est délimité par l'isoglosse dorp/dorf à l'ouest et par l'isoglosse op/of à l'est.

Le francique luxembourgeois[4],[5] ou luxembourgeois (Lëtzebuergesch en luxembourgeois, Luxemburgisch en allemand) est une langue du groupe germanique occidental au même titre que l'allemand et le néerlandais. C'est une des nombreuses variantes régionales ou locales du moyen-francique. Certaines classifications le rattachent au francique mosellan (Moselfränkisch en allemand). Avec le francique ripuaire et le francique rhénan, le francique mosellan constitue l'aile occidentale du groupe des dialectes moyen-allemands. Bien que très similaire, cette langue n'est pas considérée par certains scientifiques comme de l'allemand standard, et a ses particularités propres, tant au niveau du vocabulaire que de la syntaxe. De plus, elle a largement subi l'effet d'un superstrat roman : environ 5 000 mots d'origine française ont été intégrés au luxembourgeois.

La limite orientale du domaine dialectal luxembourgeois est l'isoglosse op/of (mutation consonantique en finale qui sépare le francique luxembourgeois du francique mosellan), autrement appelée Bad Hönninger Linie ou encore Vinxtbach-Linie[6]. Au sud et à l'ouest, le luxembourgeois est voisin de parlers romans (lorrain et wallon).

En 2010, on estime que près de 400 000 personnes dans le monde parlent cette langue[7]. Son aire de pratique s'étend, outre sur l'ensemble du Grand-Duché de Luxembourg, sur les communes belges limitrophes depuis Tintange jusqu'à Athus (formant le Pays d'Arlon), avec la ville largement francisée d'Arlon (où la variante locale est appelée arlonais ou areler), ainsi que sur le territoire de Beho.
Le luxembourgeois est aussi parlé en France, dans l'arrondissement de Thionville et en Allemagne, dans les arrondissements de Bitburg et de Daun, ainsi que dans une partie de la vallée de la Moselle.

Le luxembourgeois, au sens large du terme, a ci-dessus le no 4.

À la suite d'une forte émigration au XIXe siècle et au début du XXe siècle[8], « eis Sprooch », « notre langue », est également parlée en Amérique du Nord, notamment au nord des États-Unis[8] (Wisconsin, Illinois...) et dans quelques endroits du Canada.

Dans les zones françaises limitrophes du Grand-Duché, il a été affaibli par opposition au pangermanisme qui a eu pour conséquence les deux annexions de l'Alsace-Lorraine et les deux guerres mondiales. Il a été en revanche utilisé au Reichstag avec le sarrois et l'alsacien lors de la première annexion par les députés protestataires pour exprimer leur opposition à l'annexion et leur attachement au souvenir français. Les autres députés de l'Empire ne pouvaient alors pas les comprendre. De même il a été au Luxembourg un ciment national, un moyen d'identification et de résistance (ainsi, la population a refusé de considérer l'allemand comme sa langue, malgré la pression nazie, lors d'un recensement de l'Occupant en 1941). Il suffit de penser à la devise nationale, gravée p. ex. au fronton de l'Hôtel de Ville d'Esch-sur-Alzette (Esch-Uelzecht en luxembourgeois) : Mir welle bleiwen wat mer sinn (= « Nous voulons rester ce que nous sommes » ; notons qu'en luxembourgeois codifié depuis, on écrirait Mir wëlle bleiwe wat mir sinn). Cette même phrase se retrouve notamment sur une façade du centre historique de Luxembourg-Ville, rue de la Loge, mais avec une graphie légèrement différente : « Mir wölle bleiwe wat mir sin » (en fait, le ö n'existe pas en luxembourgeois, sauf exception rarissime ; on utilise le ë).

Il fut un temps où les Luxembourgeois appelaient cette langue « notre allemand » (onst Däitsch), « l'allemand luxembourgeois » ou « l'allemand du Luxembourg »[9], ainsi que « dialecte allemand luxembourgeois » au XIXe siècle[10].

Langue nationale du Grand-Duché

Façade du Monkey's Bar, 4, rue de la Loge, Luxembourg : Mir wölle bleiwe wat mir sinn (« Nous voulons rester ce que nous sommes »).

En , par décret, le luxembourgeois est devenu, avec le français et l'allemand, la troisième langue administrative du Grand-Duché. Le , a été promulguée (en français) la loi suivante :

  1. La langue nationale des Luxembourgeois est le luxembourgeois.
  2. Les textes légaux sont rédigés en français.
  3. Les langues administratives sont, au choix, le luxembourgeois, l'allemand ou le français.
  4. Dans l'administration, il doit être, dans la mesure du possible, répondu par le fonctionnaire au demandeur dans la langue que ce dernier a utilisée : français, allemand ou luxembourgeois.

Le luxembourgeois est de ce fait une langue nationale et reconnue, quoiqu'on puisse discuter le fait que la loi parle de "langue" (ce sont les linguistes qui déterminent si l'on est en présence d'une langue, d'un dialecte ou d'un patois). Cela dit, les Luxembourgeois entre eux ne parlent que le luxembourgeois, et cela à tous les niveaux et dans toutes les situations, ce qui revient pour eux à parler ce qui est, de fait, "leur langue". Des efforts sont par ailleurs faits, partout dans le pays, pour la codifier et l'unifier davantage. La presse nationale, par exemple les quotidiens Luxemburger Wort, Tageblatt, Lëtzebuerger Journal, sont rédigés majoritairement en allemand et partiellement en français, sans que l'article soit traduit dans l'autre langue. On y trouve aussi quelques lignes rédigées en luxembourgeois : le courrier des lecteurs, les annonces personnelles ayant trait à la vie privée (nécrologies, faire-parts divers…). Pour les romanophones (non autochtones), il existe aussi des quotidiens et hebdomadaires monolingues en français (Le Quotidien, L'essentiel, Le Jeudi).

Au sein de la Communauté française de Belgique, le luxembourgeois bénéficie du décret sur la protection des langues régionales endogènes.

Cela dit, le luxembourgeois n'est pas une langue officielle de l'Union européenne. Les Luxembourgeois ayant trois langues en usage, dont le français pour tout ce qui relève de la législation.

Entre 2000 et 2002, le linguiste luxembourgeois Jérôme Lulling a développé une banque de données de 125 000 formes de mots luxembourgeois pour le premier correcteur orthographique informatique appliqué à la langue luxembourgeoise (projet C.ORT.IN.A)[11]. Le développement d'un tel instrument a constitué une étape importante dans l'informatisation de la langue luxembourgeoise qui dispose également d'une version luxembourgeoise de Wikipedia (lb.wikipedia).

Le luxembourgeois en France

Panneau d'entrée bilingue de Roussy-le-Bourg (Moselle, France).

En France, une partie de l'aire linguistique du luxembourgeois représente l'ancienne prévôté luxembourgeoise de Thionville. Celle-ci est cédée au royaume de France en 1659 dans le cadre du traité des Pyrénées qui fait suite à la prise de Thionville par le duc d'Enghien et ses troupes en 1643.

En Lorraine, le « lëtzebuerger platt » (platt luxembourgeois) était langue vernaculaire dans le nord-est de l'arrondissement de Briey[n 3] : Soit en 1790, dans une partie du district de Longwy[12] et dans les années 1860, à partir de Mont-Saint-Martin[13] jusqu'à Villerupt. Certains lieux-dits de ce territoire, ont plus ou moins conservé une dénomination germanique[n 4].

Cette langue était également vernaculaire dans le nord-ouest de l'actuel département de la Moselle (57) autour de Thionville (Diddenuewen en luxembourgeois), Cattenom (Kettenuewen) et Sierck-les-Bains (Siirk). Cette particularité valut à ses habitants d'être annexés à l'Empire allemand de à en même temps que le reste de la Moselle et les deux départements alsaciens du Haut-Rhin et du Bas-Rhin.

Vers 1828, M. Teissier remarquait déjà que l'idiome parlé dans les villages environnant Thionville était, selon lui, inintelligible avec la « langue de Wieland et de Goethe »[14], soit l'allemand standard. Quelques décennies plus tard, M. Bouteiller fit une remarque similaire concernant ce « patois allemand » usité dans l'arrondissement de Thionville, en particulier à propos de celui parlé dans les cantons limitrophes du Grand-Duché, en expliquant que ces différences caractéristiques se rapportent à une langue particulière, à cause de mots qui ne se trouvent pas dans l'allemand et de la prononciation de quelques voyelles et de quelques consonnes[13].

D'après un recensement de 1962, les cantons de Cattenom et de Sierck avaient chacun entre 60 et 80 % de locuteurs du francique[15]. En 1975, Thionville comptait entre 2 500 et 6 500 locuteurs de la langue[16]. En 1990, le Bureau européen pour les langues moins répandues estime que la France devait compter 40 000 luxembourgeophones.

Les personnalités représentatives de cette zone linguistique en France, depuis les années 1970, ont été notamment Daniel Laumesfeld (musicien, écrivain), Jo Nousse (musicien, poète, enseignant) et Albert Piernet (ancien enseignant), ce dernier étant le fondateur de l'association francique Hemechtsland a Sprooch en 1975[17] (une des premières en France), qui publiait une revue sous le même nom[18]. En 1979, Jean-Marie Becker fonda une association concurrente dénommée Wei laang nach ? (Jusqu’à quand ?)[17].

Situation géographique

Située au nord-ouest du département de la Moselle, l'aire linguistique du luxembourgeois est délimitée à l'est par l'isoglosse op/of. Cette isoglosse, qui sépare le francique luxembourgeois du francique mosellan, est située à l'est des localités suivantes : Hestroff, Edling, Hobling, Chémery-les-Deux, Neudorff, Bibiche, Rodlach, Waldweistroff, Flastroff, Zeurange, Bourg-Esch, Cottendorff et Otzwiller[19]. Elle est également située à l'ouest des lieux suivants : Bockange, Piblange, Anzeling, Freistroff, Beckerholz, Colmen et Schwerdorff[19]. Concernant le village de Schwerdorff, qui est du côté du francique mosellan, il est quasiment enclavé : puisque Flastroff et Zeurange à l'ouest, Cottendorff au nord et Otzwiller à l'est sont du côté du luxembourgeois, tout du moins par rapport à l'isoglosse op/of.

L'aire linguistique luxembourgeoise est également délimitée à l'ouest et au sud par le lorrain roman (quasiment éteint au début du XXIe siècle). En 1500, la frontière linguistique qui sépare le luxembourgeois du lorrain roman est située à l'ouest de : Godbrange, Hussigny, Tiercelet, Bréhain-la-Ville, Crusnes, Aumetz, Boulange, Fontoy, Lommerange, Fameck, Vitry-sur-Orne, Amnéville, Hagondange et Talange[19]. Ainsi qu'au sud de : Talange, Bousse, Montrequienne, Hessange et Saint-Hubert[19]. Plusieurs éléments ont contribué à son recul, notamment la guerre de Trente Ans, suivie d'un repeuplement par des colons étrangers à la région ; ainsi que les épidémies de choléra du XIXe siècle entre Metz et Thionville[20]. La politique linguistique française après 1944, notamment dans l'enseignement, a également contribué au recul du « platt luxembourgeois » dans tout le territoire où il est traditionnellement parlé.

En 1983, l'aire linguistique du luxembourgeois s'étend encore jusqu'aux localités suivantes : Rédange, Russange, Volmerange-les-Mines, Nondkeil, Rochonvillers, Angevillers, Beuvange-sous-Saint-Michel, Volkrange, Veymerange, Saint-Pierre, Beauregard, Daspich, Ébange, Illange, Bertrange, Imeldange, Reinange, Schell, Vinsberg, Metzeresche, Hombourg, Ébersviller et Hestroff[19].

Spécificités

Le luxembourgeois traditionnel de Lorraine est différent du « luxembourgeois standard »[n 5], celui-ci peut même varier d'un village à un autre, notamment pour le vocabulaire. Par exemple à Russange, commune frontalière avec le Luxembourg, les habitants nés avant 1900 disaient Huaamer au lieu de Hummer (marteau), Nuaam au lieu de Numm (nom), ou encore Mättigogo au lieu de Schleek (escargot)[21],[22]. Même chose pour les verbes : par exemple à Metzervisse, on dit heren au lieu de héieren (entendre), woossen au lieu de wuessen (croître), ou encore dau bascht au lieu de du bass (tu es)[23]. Enfin, il existe aussi des variantes dans la phonétique : à Volkrange, Metzange et Beuvange, les [a] brefs sont fréquemment prononcés [å], soit presque comme un [o] ; dans le pays de Thionville, ce cas phonétique n'existe que dans ces trois localités[24].

Pour certains mots, selon les zones, [o] devient [ue] et inversement[25]. À titre comparatif, le dialecte de Rodemack se compose de dix diphtongues alors que celui de Yutz n'en a que deux[26].

Entre Manom et Cattenom, les mots finissant par -er se prononcent [ɛʁ] (comme le français « aire ») au lieu de [ɐ]. Soit par exemple, « frère » s'écrit Bruddär au lieu de Brudder[27].

Dans huit villages situés entre l'ouest et le sud de Thionville[n 6], à l'exception de quelques mots brefs, les [n] situés en fin de mots disparaissent, cela quelle que soit leur position dans la phrase. Et concernant l'article défini den, il se réduit à de sauf si le nom suivant commence par une voyelle[24]. Cette dernière spécificité est notamment une règle de la langue Luxembourgeoise au Grand-Duché, si la lettre du mot suivant est soit a, d, e, h, i, n, o, t, u, ou encore z. Exemple : den Harespel qui veut dire en Français "la guêpe".

Quelques comparaisons de vocabulaire
français dialecte
de Guentrange[28]
dialecte
de Haute-Yutz[29]
dialecte
d'Inglange[30]
dialecte
de Rodemack[26]
fourmi omess ooblens omensel seejomes
fraise eerpel eerbet beer knëppelbir
marché maart for[n 7] maart moaart
papillon pipoul päipampel paipolter päipolfer
poing fouscht fauscht fauscht fëuscht

Enseignement

Au début des années 2010, le luxembourgeois est réintroduit sous sa forme standard dans l'arrondissement de Briey via la voie scolaire, dans quelques écoles[31].

Concernant le département mosellan, une enquête diligentée en 1995 par l'Inspection académique de la Moselle révéla que 424 familles (représentant 491 élèves) de la commune de Sierck et ses environs demandaient l'enseignement du francique luxembourgeois pour leurs enfants. Une autre enquête de 2004, faite par la même inspection académique et concentrée sur quelques communes choisies, a recueilli les demandes de 60 % des parents d'élèves en faveur de l'enseignement de cette langue. Un dispositif minimal d'une heure et demie par semaine d'enseignement du luxembourgeois (langue et culture régionales) a été mis en place dans quelques communes seulement, là où les demandes étaient les plus fortes[32].

À partir de la rentrée 1996-97, l'enseignement de la langue fut effectif à Rustroff, Berg-sur-Moselle, Ritzing, Launstroff, puis au collège de Sierck. En , devant le refus de l’Inspection académique de répondre aux demandes parentales, la commune de Roussy-le-Village mit en place des cours de luxembourgeois. Pour l'année scolaire 2005-2006, l’enseignement du luxembourgeois fut dispensé dans 11 écoles des communes de : Montenach, Manderen, Kirsch-lès-Sierck, Rustroff, Merschweiller, Ritzing, Launstroff, Gavisse, Kœnigsmacker et Sierck[33]. Enfin, pour l'année scolaire 2013-2014, il fut également enseigné à Rettel, Basse-Rentgen et Thionville.

Le luxembourgeois en Belgique

Plaque bilingue français / luxembourgeois à Martelange (Belgique).

Le Grand-Duché du Luxembourg prend son indépendance en 1839. La Belgique conserve néanmoins la partie romane ainsi que, pour des raisons stratégiques, le pays d'Arlon dont la langue véhiculaire est le luxembourgeois.

En 1976, sous l’impulsion de l'instituteur Gaston Mathey, est fondée l’ALAS : « Arelerland a Sprooch »[34], ayant pour but la promotion de la langue et de la culture luxembourgeoise du pays d'Arlon.

Le Luxembourgeois standardisé fait progressivement son retour dans l'enseignement et les formations grâce au développement économique du Grand-Duché et l'importance grandissante de cette langue dans le monde du travail[35].

Langues exclusivement connues :

Construction du luxembourgeois

Même si chaque région du pays possède son dialecte, de même que le sud de la Belgique qui possède une forme locale du luxembourgeois (Pays d'Arlon), il est possible de donner un aperçu des caractéristiques standard de la langue.

Historique

Le plus ancien des textes rédigés en luxembourgeois étant connu à ce jour (1999), est celui de Yolanda von Vianden (XIIIe siècle)[36].

Antoine Meyer (1801-1857), originaire de Luxembourg-ville, a tenté de donner une grammaire et une orthographe au luxembourgeois[37]. Son ouvrage de 1829 intitulé E' Schrek ob de lezeburger Parnassus (Un pas sur le Parnasse luxembourgeois), inclut des remarques sur la grammaire et les méthodes qu'il a suivies dans la fixation de l'orthographe[38].

Par la suite, M. Gloden fit paraitre en 1845 dans l'ouvrage de Meyer intitulé Luxemburgische Gedichte und Fabeln, une introduction grammaticale et l'explication des mots plus ou moins propres au dialecte[39].

L'orthographe de cette langue, qui fut longtemps flottante, a été fixée officiellement en 1976[40]. Celle-ci fut à nouveau remaniée via le Règlement grand-ducal du .

Construction des mots

La construction des mots est basée le plus souvent sur une modification systématique des tonalités dans ceux-ci par rapport aux langues française et allemande. Ceci est dû à l'accent du pays. Par exemple, le suffixe -heit (die Schönheit, la beauté) de l'allemand est automatiquement remplacé par -heet (d'Schéinheet) en luxembourgeois. Il en est exactement de même avec certaines terminaisons françaises comme -ion (Direction), qui devient -ioun (Directioun).

Articles et genres

En règle générale, le genre est défini par le mot allemand, mais des écarts de langage, ou l'influence du français, peuvent le faire varier. Exemples de divergences: l'all. die Brille (les lunettes) devient en lux. de Brëll (donc, fém.→ masc.); idem pour die Ecke (le coin) qui devient den Eck (fém. → masc.). Le mot all. das Bier (la bière), qui est neutre, devient masculin en lux. : de Béier.

Les articles luxembourgeois sont analogues aux allemands der, die, das, ein, eine, etc.

Masculin Féminin Neutre
Défini de(n) d' d'
Indéfini e(n) eng e(n)

Au masculin, l'article défini masculin den et l'article indéfini (masculin et neutre) en perdent leur -n final si le mot qui suit commence par une consonne différente de h, n, d, t et z. Si le mot commence soit par une voyelle, soit par une de ces cinq consonnes, le -n est conservé. Il en est de même avec les formes verbales.

Exemples : den Alphabet (l'alphabet), en Elefant (un éléphant), den Hammel (le mouton), en Duerf (un village) / e Lamm (un agneau), de Bierg (la montagne), e Paërd (un cheval)…

Verbes

Verbes réguliers

Les formes verbales luxembourgeoises sont similaires aux formes allemandes, du fait que les verbes se ressemblent. Les terminaisons sont aussi héritées de l'allemand, quoique légèrement modifiées.

personne terminaison
ech (je) verbe infinitif
du (tu) -s
hien, si, hatt (il, elle, +neutre) -t
mir (nous) verbe infinitif
dir (vous) -t
si (ils, elles) verbe infinitif

Deux verbes luxembourgeois conjugués :

wunnen (habiter) drénken (boire)
ech wunnen drénken
du wunns drénks
hien, si, hatt wunnt drénkt
mir wunnen drénken
dir wunnt drénkt
si wunnen drénken

Verbes irréguliers

sinn (être) hunn (avoir)
ech sinn hunn
du bass hues
hien, si, hatt ass huet
mir sinn hunn
dir sidd hutt
si sinn hunn

Comme pour les articles, si le mot suivant le verbe commence par une consonne différente de h, n, d, z, ou t, le n final disparaît.

Exemples

Français Allemand Néerlandais Luxembourgeois Prononciation standard
la terre die Erde de aarde d'Äerd ɛət
le ciel der Himmel de hemel den Himmel ˈhɪməl
l'eau das Wasser het water d'Waasser ˈvaːsɐ
le feu das Feuer het vuur d'Feier ˈfaiɐ
l'homme der Mann de man de Mann mɑn
la femme die Frau de vrouw d'Fra fʁaː
manger essen eten iessen ˈiəsən
boire trinken drinken drénken ˈdʁeŋkən
grand groß groot grouss gʁəus
petit klein klein kleng klɛŋ
la nuit die Nacht de nacht d'Nuecht nuəɕt
le jour der Tag de dag den Dag daːx
  • Moien - Bonjour
  • Äddi - Au revoir
  • Wann ech gelift - s'il te/vous plaît
  • Merci - Merci
  • Lëtzebuerg - Luxembourg
  • lëtzebuergesch - luxembourgeois
  • Trottoiren - trottoirs

Notes et références

Notes

  1. Cette zone linguistique, dont les limites varient selon divers points de vue, correspond grosso modo à celle qui est appelée en allemand nördliches Moselfränkisch d'après le Rheinischer Fächer de Georg Wenker publié en 1877.
  2. L'arrêté ministériel du 10 octobre 1975 est abrogé par le règlement grand-ducal du 30 juillet 1999, qui porte également réforme du système officiel d'orthographe luxembourgeoise.
  3. D'après Hans Witte (de), au XVIe siècle, l'« allemand » était courant dans la partie septentrionale de la région de Longwy.
  4. Notamment à Villerupt, Thil, Tiercelet et Crusnes.
  5. Il était surnommé « la koinè des banquiers » par D. Laumesfeld, écrivain dialectophone du pays thionvillois (cf. Glottopol, no 4, juillet 2004).
  6. Soit : Volkrange, Metzange, Beuvange-sous-Saint-Michel, Veymerange, Elange, Florange, Ebange et Guentrange.
  7. Ce mot est une variante de fouer (foire).

Références

  1. « La langue luxembourgeoise en Belgique », sur luxembourg.public.lu,
  2. « La langue luxembourgeoise en France », sur luxembourg.public.lu,
  3. Luxemburger Lexikon - Das Großherzogtum von A-Z
  4. Ernest Berthet, Langue dominante, langues dominées, Edilig, 1982, p. 84
  5. Henri Giordan et Gilles Verbunt, Par les langues de France, Centre Georges Pompidou, 1984
  6. (de) Józef Grabarek, Zur Geschichte der deutschen Sprache im 20. Jahrhundert, Peter Lang (ISBN 9783653030594), p. 13
  7. « 390 000 personnes parlent le luxembourgeois », sur lessentiel.lu,
  8. a et b « La langue luxembourgeoise aux Etats-Unis », sur luxembourg.public.lu,
  9. Rosemarie Kieffer, Littératures luxembourgeoises ?, 1990.
  10. Théodore de la Fontaine, « Essai étymologique sur les noms de lieux du Luxembourg germanique : troisième division, Luxembourg français », Publications de la Société pour la recherche et la conservation des monuments historiques dans le Grand-Duché de Luxembourg, Luxembourg, V. Buck, vol. XVIII,‎
  11. (fr) « Projet Cortina »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?)
  12. Jean-Louis Masson - Histoire administrative de la Lorraine, des provinces aux départements et à la région, page 185.
  13. a et b Ernest de Bouteiller, Dictionnaire topographique de l'ancien département de la Moselle, rédigé en 1868, § 12 : Ethnographie et linguistique.
  14. Guillaume Ferdinand Teissier, Histoire de Thionville, Metz, 1828.
  15. S. Legrand - d'après les chiffres de l'INSEE.
  16. Daniel Laumesfeld, La Lorraine francique : culture mosaïque et dissidence linguistique.
  17. a et b Auburtin Éric, Langues régionales et relations transfrontalières dans l'espace Saar-Lor-Lux, Hérodote, (lire en ligne), p. 102-122
  18. Revue qui paraissait sous l' (ISSN 0762-7440).
  19. a b c d et e Marcel Konne et Albert-Louis Piernet, « Dierfer vun äiser Hemecht », Hemechtsland a Sprooch, no 1,‎ (ISSN 0762-7440)
  20. P. Brasme, La population de la Moselle au XIXe siècle.
  21. Albert-Louis Piernet (dir.), Hemechtsland a Sprooch : Réisséng, H.A.S. (no 8), (ISSN 0762-7440)
  22. « Mättigogo », in Luxemburger Wörterbuch, P. Linden (lire en ligne)
  23. Albert-Louis Piernet (dir.), Hemechtsland a Sprooch : Metzerwis, H.A.S. (n°16), 1987
  24. a et b Albert-Louis Piernet (dir.), Hemechtsland a Sprooch : Woolkrénge a Metzénge, H.A.S. (no 12), (ISSN 0762-7440)
  25. mairie-manom.fr
  26. a et b Albert-Louis Piernet (dir.), Hemechtsland a Sprooch, no 15, 1987 (ISSN 0762-7440)
  27. Albert-Louis Piernet (dir.), Hemechtsland a Sprooch, n°1 et n°3, 1983
  28. Albert-Louis Piernet (dir.), Hemechtsland a Sprooch, no 6, 1984
  29. Albert-Louis Piernet (dir.), Hemechtsland a Sprooch, no 13, 1986
  30. Albert-Louis Piernet (dir.), Hemechtsland a Sprooch, no 10, 1985
  31. « Apprendre le luxembourgeois ce n’est pas du luxe », Le Républicain lorrain.
  32. Intervention du SNUIPP Moselle, Paris, novembre 2012.
  33. [PDF]D'lëtzebuergesch sprooch endléch an der schoul ! / Le francique luxembourgeois enfin à l'école !
  34. GLOTTOPOL, Revue de sociolinguistique en ligne, n°4, juillet 2004
  35. Philippe Descamps et Xavier Monthéard, « Comment s’invente une langue : Le laboratoire luxembourgeois », Le Monde diplomatique,‎ (lire en ligne)
  36. (de)Andrea Rapp, Yolanda von Vianden: Der älteste luxemburgische Text, 1999
  37. Philippe Vandermaelen, Dictionnaire géographique du Luxembourg, 1838.
  38. Dictionnaire des hommes de lettres, des savans et des artistes de la Belgique ; présentant l'énumération de leurs principaux ouvrages, Bruxelles, 1837
  39. Félix Thyes, Essai sur la poésie luxembourgeoise, 1854 (lire en ligne).
  40. Malcolm Offord, A reader in French sociolinguistics, 1996.

Annexes

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Bibliographie

  • Le Parler luxembourgeois en Lorraine, extraits de textes publiés dans la revue Passerelles, 1995 (lire en ligne)
  • Francis André-Cartigny, Petite Grammaire Luxembourgeoise, 1996 (lire en ligne)
  • Luxemburgischer Sprachatlas, 1963 (lire en ligne

Dictionnaires

  • J. F. Gangler, Lexicon der Luxemburger Umgangssprache mit hochdeutscher und französischer Uebersetzung und Erklärung, V. Hoffmann, (lire en ligne)
  • Wörterbuch der luxemburgischen Mundart, M. Huss, (lire en ligne)
  • Luxemburger Wörterbuch, 1950-1977 (lire en ligne)
  • Jérôme Lulling et François Schanen, Luxdico : Dictionnaire bilingue, lëtzebuergesch-franséisch, français-luxembourgeois, Schortgen (lire en ligne)

Articles connexes

Liens externes