Jeanne II de Bourgogne

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Jeanne II de Bourgogne
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Jeanne de Bourgogne, à droite, recevant de Thomas le Myésier (agenouillé, au centre) son œuvre, un abrégé de la pensée de son maître Raymond Lulle (debout derrière le Myésier).

Titres

Reine de France et de Navarre


(5 ans, 1 mois et 15 jours)

Comtesse palatine de Bourgogne


(14 ans, 4 mois et 17 jours)

Comtesse d'Artois


(1 mois et 25 jours)

Comtesse de Poitiers


(4 ans et 11 mois)

Biographie
Dynastie Maison d'Ivrée
Naissance vers 1291
Décès
Roye (France)
Sépulture Couvent des Cordeliers de Paris
Père Othon IV de Bourgogne
Mère Mahaut d'Artois
Conjoint Philippe V le Long
Enfants Jeanne de France
Marguerite de France
Isabelle de France
Blanche de France
Philippe de France

Jeanne II de Bourgogne[1] (vers 1291 - à Roye), comtesse de Bourgogne et d'Artois, devient reine de France de 1316 à 1322 en tant qu'épouse du roi Philippe V dit « le Long ».

Biographie[modifier | modifier le code]

Jeunesse[modifier | modifier le code]

Jeanne est la fille aînée d'Othon IV de Bourgogne (av. 1248-1303), comte de Bourgogne, et de Mahaut d'Artois (v. 1268-1329) comtesse d'Artois[2].

Son prénom, Jeanne, féminisation de Jean, lui aurait été attribué, selon Jean-Luc Chassel, en mémoire de Jean Ier de Chalon, grand-père du comte Othon[3].

Jeanne de Bourgogne est, de son propre chef, comtesse de Bourgogne (1303-1330), fief d'Empire dans lequel elle succède à son frère Robert de Bourgogne (1303-1315), ainsi que comtesse d'Artois (1329-1330), fief qu'elle hérite de sa mère Mahaut d'Artois.

Comtesse de Poitiers[modifier | modifier le code]

Le [2], à Corbeil, elle épouse le futur Philippe V (v. 1293-1322), dit Philippe le Long, fils de Philippe IV le Bel et de la reine Jeanne Ire de Navarre[4].

À la Pentecôte de 1313, à l’occasion des fêtes de l’adoubement des fils du roi, elle prend la croix en même temps que ses belles-sœurs Marguerite de Bourgogne, reine de Navarre, et Isabelle de France, reine d’Angleterre[5]. Il semble cependant qu’elle ait été contrainte à ce vœu par son époux, Philippe de Poitiers[6].

En 1314, lors du procès dit de la tour de Nesle, où sa sœur Blanche de Bourgogne et sa belle-sœur Marguerite de Bourgogne, sont reconnues coupables d'adultère, elle n'est accusée que de connivence[2]. Elle est enfermée dans la forteresse de Dourdan[2]. Ne cessant de crier son innocence, elle échappe à l'accusation d'adultère, mais elle est toutefois poursuivie pour ne pas avoir dénoncé la conduite de ses belles-sœurs. Acquittée par arrêt du Parlement, elle est libérée entre le 24 et le et retrouve sa place auprès de son époux à la cour de France[7].

L'influence de sa mère fut certainement pour beaucoup dans son retour en faveur, Mahaut d'Artois ne souhaitant pas perdre le rôle que pouvait lui procurer l'avènement de son gendre, Philippe le Long.

Reine de France[modifier | modifier le code]

En novembre 1316, à la mort de son neveu, l'héritier du trône de France, Jean le Posthume, son époux étant proclamé roi de France, elle devient reine de France. Elle est couronnée à la cathédrale Notre-Dame de Reims lors du sacre de son mari, le 6 (fête de l'Épiphanie) ou le dimanche [8]. Elle a comme chancelier Pierre Bertrand, qui sera son exécuteur testamentaire[9].

Comtesse de Bourgogne[modifier | modifier le code]

Jeanne garde une attention constante pour son comté de Bourgogne dont elle est issue ; l'épouse du roi de France Philippe V le Long, fait venir de Paris dès 1318 des tisserands et des drapiers pour y faire prospérer une nouvelle bourgeoisie à Marnay[10] et à Gray[11]. Au décès du roi, elle revient en comté de Bourgogne.

Culture et mécénat[modifier | modifier le code]

Jeanne de Bourgogne, à droite, recevant de Thomas le Myésier (agenouillé, au centre) son œuvre, un abrégé de la pensée de son maître Raymond Lulle (debout derrière le Myésier).

Selon Pierre Bersuire, c'est à la demande de Jeanne de Bourgogne qu'est composé L'Ovide moralisé, une adaptation en français des célèbres Métamorphoses d'Ovide[12].

Thomas Le Myésier (ca), chanoine d'Arras et disciple de Raymond Lulle, lui dédie son Breviculum seu electorium parvum, version abrégée de sa monumentale compilation des œuvres de Lulle, Electorium magnum[13].

En 1317, elle fait copier et enluminer un livre d'heures par un moine de Saint-Denis du nom de Gilles Mauléon[14],[15].

Ses dispositions testamentaires ordonnent la fondation du collège de Bourgogne à Paris.

Mort, sépulture et succession[modifier | modifier le code]

Jeanne de Bourgogne meurt à 39 ans, à Roye le [2]. Tandis que son corps est inhumé à Paris dans l'église du couvent des Cordeliers, son cœur est déposé à Saint-Denis près de son époux.

Descendance[modifier | modifier le code]

De son union avec Philippe V le Long sont issus cinq enfants :

Dans la fiction[modifier | modifier le code]

Jeanne de Bourgogne est un personnage secondaire apparaissant à de nombreuses reprises dans les premiers tomes de la célèbre suite romanesque historique Les Rois maudits de Maurice Druon, publiée de 1955 à 1977.

Dans le premier tome, Le Roi de fer (1955), dont l'action se déroule de mars à , Jeanne, alors comtesse de Poitiers et mariée au second fils du roi, apparaît sous la plume de Druon comme une jeune femme de 21 ans, « grande, élancée, avec des cheveux blond cendré, un maintien un peu composé, et un œil oblique de lévrier », se vêtant « avec une simplicité qui était presque une recherche »[17]. Alors que sa cousine Marguerite de Bourgogne et sa sœur Blanche, respectivement mariées au fils aîné et au troisième fils du roi, entretiennent une liaison extraconjugale avec les frères Philippe et Gauthier d'Aunay, Jeanne, bien que fidèle à son mari, « épouse constante mais entremetteuse bénévole, qui prenait un trouble plaisir à vivre les amours d'autrui », favorise l'adultère de ses deux belles-sœurs en combinant les rendez-vous et en facilitant les rencontres, « moitié par faiblesse, moitié par amusement »[18]. Lorsque l'intrigue est révélée, les trois brus royales, tondues et vêtues de bure, sont traduites publiquement en justice : Marguerite et Blanche, reconnues coupables d'adultère, sont condamnées à l'emprisonnement à vie dans la forteresse de Château-Gaillard, alors que Jeanne, considérée comme complice, est enfermée au château de Dourdan[19].

Dans le troisième tome, Les Poisons de la Couronne (1956), qui se déroule en 1315-1316 sous le règne de Louis X le Hutin, Mahaut d'Artois parvient à obtenir le retour en grâce de Jeanne et à la réconcilier avec son époux Philippe au château d'Hesdin[20].

Le quatrième tome, La Loi des mâles (1957), qui se déroule en 1316-1317 autour des intrigues pour la succession de Louis X, se conclut par la victoire de son frère Philippe, l'époux de Jeanne, reconnu roi de France.

L'œuvre de Druon a été portée à l'écran à deux reprises. Dans l'adaptation télévisée de Marcel Jullian réalisée par Claude Barma et diffusée en 1972-1973, le rôle de Jeanne de Bourgogne est tenu par Catherine Rich, alors que dans celle de 2005 réalisée par Josée Dayan, elle est incarnée par Julie Depardieu.

Jeanne de Bourgogne est également l'un des personnages du film muet Buridan, le héros de la tour de Nesle (1923), de Pierre Marodon.

Ascendance[modifier | modifier le code]

Références et notes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Œuvres de fiction

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Jeanne de Bourgogne sur le site Foundation for Medieval Genealogy.
  2. a b c d et e Christian Bouyer, Dictionnaire des Reines de France, Librairie Académique Perrin, 1992 (ISBN 2-262-00789-6) p. 196.
  3. Jean-Luc Chassel, « Le nom et les armes : la matrilinéarité dans la parenté aristocratique du second Moyen Âge », Droit et cultures [En ligne], vol. 64, no 2, 2012, [lire en ligne] (page consultée le 2 août 2016).
  4. Jiri Louda et Michael MacLagan, Les Dynasties d’Europe, Bordas, 1995 (ISBN 2-04-027115-5), tableau 65.
  5. Gaëlle Audéon, Philippe le Bel et l’Affaire des brus, 1314, L’Harmattan, (ISBN 978-2-34320371-3), p. 110-114.
  6. (en) Elizabeth A. R. Brown, Nancy Freeman Regalado, City and Spectacle in Medieval Europe, University of Minnesota Press, , 352 p. (ISBN 978-0-8166-2360-0), « La grans feste, Philip the Fair’s Celebration of the Knighting of His Sons in Paris at Pentecost of 1313 », p. 80.
  7. Christelle Balouzat-Loubet, Mahaut d'Artois, une femme de pouvoir, Paris, Perrin, , 222 p. (ISBN 978-2-262-03678-2), p. 113 et 202-203, note 28. : « Les dernières lettres envoyées par Mahaut [d'Artois] à Dourdan datent du 24 décembre 1314 [...]. Libérée dans les jours qui suivent, Jeanne séjourne à l'hôtel d'Artois avec sa mère entre le 31 décembre 1314 et le 2 janvier 1315 [...]. Elle dîne à Conflans le 1er février 1315. ».
  8. Christian Bouyer, op.cit., p. 197.
  9. GUYOT (Joseph-Nicolas). Répertoire universel et raisonné de jurisprudence civile, criminelle. (1777), (a): p. 19; (b): p. 20.
  10. Monographie du bourg de Marnay - Léon Paget, Le Livre d'histoire - p.80.
  11. Histoire de la ville de Gray - Éditeur, Breitenstein-Hamey, 1851 - p.36.
  12. Marc-René Jung, « L'Ovide moralisé : de l'expérience de mes lectures à quelques propositions actuelles », dans Laurence Harf-Lancner, Laurence Mathey-Maille et Michelle Szkilnik, éd. Ovide métamorphosé: les lecteurs médiévaux d'Ovide, Paris, Presses Sorbonne Nouvelle, 2009, p. 115.
  13. Alison Stone, « Le débat dans la miniature: le cas du Breviculum de Thomas le Myésier », dans Christian Heck, éd., Qu’est-ce que nommer ? L’image légendée entre monde monastique et pensée scolastique, Turnhout, Brepols, 2010, 189-199.DOI 10.1484/M.ETRILMA-EB.3.3354.
  14. Christopher de Hamel (trad. de l'anglais), Une histoire des manuscrits enluminés [« A history of illuminated manuscripts »], Londres, Phaidon, (1re éd. 1994), 272 p. (ISBN 0-7148-9037-5 et 9780714892832, présentation en ligne), p. 186.
  15. Un livre d'heures enluminé conservé à la Bibliothèque impériale de Saint-Pétersbourg au début du XXe siècle et provenant de la collection de Piotr Doubrovski portait le colophon suivant : « Ces heures furent escriptes et d'images aournées pour trés grant et trés douce dame Madame Jehanne comtesse de Bourgoigne fame du Roi Philippe nostre Sire par frère Gilles Mauleon moyne de St Denys l'an nre Seigneur Ihus Crist MCCCXVII ». Selon Fernand de Mély qui a pu examiner des photographies du manuscrit, celui-ci ne serait pas, d'après le style et l'écriture, l'original du début du XIVe siècle, mais une copie du XVe siècle : Fernand de Mély, « Signatures de primitifs miniaturistes », Extrait des Mémoires de la Société nationale des Antiquaires de France, t. LXVII, Paris, 1908, p. 6-8, avec reproduction d'une enluminure et du colophon aux planches I et II [télécharger en pdf].
  16. (en) Elizabeth A. R. Brown, « The King's Conundrum : Endowing Queens and Loyal Servants, Ensuring Salvation, and Protecting the Patrimony in Fourteenth-Century France », dans John Anthony Burrow et Ian P. Wei, Medieval Futures : Attitudes to the Future in the Middle Ages (recueil d'articles), Woodbridge, The Boydell Press, (ISBN 9780851157795), p. 130 et note 30.
  17. Druon 1999, Le Roi de fer, partie 1 : « La Malédiction », chapitre III « Les brus du roi », p. 42.
  18. Druon 1999, Le Roi de fer, partie 1 : « La Malédiction », chapitre III « Les brus du roi », p. 45.
  19. Druon 1999, Le Roi de fer, partie 2 : « Les Princesses adultères ».
  20. Druon 1999, Les Poisons de la Couronne, partie 2 : « Après la Flandre, l'Artois... ».

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Articles connexes[modifier | modifier le code]