Présidence de Bill Clinton

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Ceci est une version archivée de cette page, en date du 26 octobre 2019 à 01:36 et modifiée en dernier par Kozam (discuter | contributions). Elle peut contenir des erreurs, des inexactitudes ou des contenus vandalisés non présents dans la version actuelle.
Présidence de Bill Clinton

42e président des États-Unis

Description de cette image, également commentée ci-après
Le président Bill Clinton en 1994.
Type
Type Président des États-Unis
Résidence officielle Maison-Blanche, Washington
Élection
Système électoral Grands-électeurs
Mode de scrutin Suffrage universel indirect
Élection 1992
1996
Début du mandat
Fin du mandat
Durée 8 ans
Présidence
Nom Bill Clinton
Date de naissance (77 ans)
Appartenance politique Parti démocrate
Divers
Site web whitehouse.gov
Voir aussi Politique aux États-Unis

La présidence de Bill Clinton débuta le 20 janvier 1993, date de l'investiture de Bill Clinton en tant que 42e président des États-Unis, et prit fin le 20 janvier 2001. Membre du Parti démocrate, Clinton entra en fonction après avoir remporté l'élection présidentielle de 1992 face au président sortant George H. W. Bush et au milliardaire Ross Perot. Quatre ans plus tard, Clinton défit à nouveau Perot et le candidat républicain Bob Dole ce qui lui permit d'être élu pour un second mandat. Dans le cadre de ces élections, Clinton s'était présenté comme un Nouveau démocrate et le positionnement centriste, ou « troisième voie », qu'il adopta se ressentit dans les décisions politiques de son administration. Il fut le premier président élu après la fin de la Guerre froide et le premier baby boomer à accéder à la présidence. Il fut également le premier président démocrate à effectuer deux mandats complets depuis Franklin D. Roosevelt. À la suite de l'élection présidentielle de 2000, le républicain George W. Bush lui succéda à la Maison-Blanche.

Sous la présidence de Clinton, les États-Unis connurent une période de forte prospérité économique. Dans les premiers mois de son mandat, Clinton signa l’Omnibus Budget Reconciliation Act of 1993 qui entraîna une hausse des impôts et fut à l'origine des excédents budgétaires ultérieurs. Il obtint également la ratification de l'Accord de libre-échange nord-américain, un pacte commercial négocié par le président Bush entre les États-Unis, le Mexique et le Canada. Sur le front législatif, le plan d'assurance santé universelle, qui constituait sa réforme la plus ambitieuse, échoua cependant à obtenir l'approbation du Congrès, le président n'ayant pas réussi à mobiliser un soutien parlementaire suffisant à la loi. En conséquence, le Parti démocrate fut sévèrement sanctionné dans les urnes lors des élections de mi-mandat et les républicains prirent le contrôle des deux chambres du Congrès pour la première fois depuis les années 1950. La « révolution républicaine » de 1994 permit aux républicains du Congrès, sous l'impulsion du président de la Chambre des représentants Newt Gingrich, de proposer des mesures conservatrices. Si Clinton fit usage à plusieurs reprises de son droit de veto, il dut également ratifier certaines de ces lois comme le Personal Responsibility and Work Opportunity Act. Les désaccords avec les républicains du Congrès conduisirent par deux fois à l'arrêt des activités gouvernementales dans le pays entre 1995 et 1996. Dans le domaine de la politique étrangère, le premier mandat de Clinton vit des interventions américaines en Somalie, en Haïti et dans les Balkans.

Son second mandat fut marqué par les premiers excédents budgétaires fédéraux depuis les années 1960, mais cet événement fut en partie éclipsé en 1998 par la mise en accusation du président à la suite d'un scandale sexuel impliquant Clinton et une jeune stagiaire de la Maison-Blanche, Monica Lewinsky. Bien que la Chambre des représentants eût voté en faveur de la destitution, Clinton fut acquitté par le Sénat. En 1997, il signa la loi qui donnait naissance au State Children's Health Insurance Program, un programme d'assurance-maladie qui concernait des millions d'enfants américains. En 1999 enfin, il ratifia la loi Gramm-Leach-Bliley qui fusionnait les activités des banques de dépôts avec celles des banques d'investissement. Sur la scène internationale, le président Clinton ordonna une intense campagne de bombardement dans les Balkans qui déboucha sur la création d'un protectorat sous mandat des Nations unies au Kosovo. Clinton contribua grandement à étendre l'influence de l'OTAN dans les anciens pays du bloc de l'Est tout en continuant à entretenir de bonnes relations avec le président russe Boris Eltsine. Il renforça dans le même temps les partenariats économiques avec certains pays comme la Chine.

Bill Clinton termina son deuxième mandat avec une cote de popularité élevée, bien que son successeur désigné, le vice-président Al Gore, fut défait par Bush à l'élection présidentielle de 2000. Depuis la fin de sa présidence, les historiens et les politologues considèrent généralement Clinton comme un président « moyen » voire « supérieur à la moyenne ».

Élection présidentielle de 1992

La popularité du président George H. W. Bush à la suite des succès enregistrés lors de la guerre du Golfe convainquit un certain nombre de leaders démocrates de ne pas se présenter à l'élection présidentielle de 1992. Des figures du parti comme Mario Cuomo ou Dick Gephardt étant hors course, les primaires démocrates mirent en concurrence des candidats relativement inconnus. Parmi eux figuraient l'ancien sénateur Paul Tsongas du Massachusetts, l'ancien gouverneur de la Californie Jerry Brown et le gouverneur de l'Arkansas Bill Clinton, en fonction depuis 1983. Clinton émergea rapidement comme le favori dans la course à l'investiture démocrate dès les premières primaires du mois de février 1992. Membre fondateur du Democratic Leadership Council, considéré comme centriste, Clinton parvint à surmonter l'opposition de démocrates plus libéraux comme Brown et décrocha la nomination du parti en avril 1992[1].

Clinton battit le président George H. W. Bush à l'élection présidentielle de 1992.

De son côté, Bush triompha de la candidature conservatrice de Pat Buchanan à la convention républicaine et put de fait concourir à sa réélection. En plus de Bush et de Clinton, la campagne présidentielle fut marquée par la présence d'un troisième homme, Ross Perot, un milliardaire du Texas qui mena une campagne résolument populiste visant à attirer les électeurs désabusés par la politique des deux principaux partis. Perot manifesta également son opposition à l'accord de libre-échange nord-américain et se montra favorable à un équilibre du budget fédéral. Les sondages effectués au début du mois de juin 1992 placèrent Bush en tête, suivi de Perot puis de Clinton. Toutefois, Perot se retira temporairement de la course de juillet à septembre, ce qui endommagea sérieusement sa candidature. À la convention nationale démocrate de 1992, Clinton désigna comme colistier le sénateur Al Gore du Tennessee. Ce choix, entre autres motifs, permit d'unifier le parti derrière la candidature de Clinton. Alors qu'à la même époque la convention républicaine mettait l'accent sur les questions sociales, Clinton focalisa son discours de campagne sur les difficultés économiques engendrées par la récession du début des années 1990[2].

Le jour du scrutin, Clinton obtint 43 % du vote populaire et une large majorité au collège électoral. Derrière lui, Bush récolta 37,4 % des voix et Perot 18,9 %, ce qui constituait le score le plus élevé réalisé par un candidat tiers ou indépendant à une élection présidentielle depuis 1912. Clinton remporta la plupart des États du nord-est des États-Unis ainsi que plusieurs États du Midwest, de l'Ouest et du Sud[3].

Composition du gouvernement

Le vice-président Al Gore et la première dame Hillary Clinton apparurent très vite comme les deux personnalités les plus influentes de l'administration Clinton, le président sollicitant leur avis sur de nombreux sujets[4]. Mack McLarty, un ami de longue date de Clinton qui avait fait carrière dans les affaires et avait été président du comité démocrate de l'Arkansas, devint le premier chef de cabinet de Clinton[5]. Ce dernier convainquit le sénateur Lloyd Bentsen du Texas, qui s'était présenté comme candidat à la vice-présidence sur le ticket démocrate en 1988, d'occuper le poste de secrétaire du Trésor[6]. Au début du premier mandat de Clinton, Bentsen, le directeur du Bureau de la gestion et du budget Leon Panetta, le secrétaire au Travail Robert Reich et le coordinateur politique Robert Rubin furent les principaux conseillers économiques du président[7].

Les premières semaines à la Maison-Blanche furent difficiles pour l'administration[8], en particulier la difficulté pour Bill Clinton de trouver quelqu'un pour le poste d'Attorney General. En effet, il avait promis de nommer un gouvernement qui « ressemblerait à l'Amérique », et des rumeurs avaient supposé que ce poste irait à une femme[9]. Clinton jeta son dévolu sur Zoë Baird, une avocate peu connue, mais le scandale connu sous le nom de Nannygate révéla, en janvier 1993, qu'elle embauchait une immigrante illégale péruvienne en couple, pour travailler dans sa maison. Baird retira sa nomination et Clinton désigna Kimba Wood qui dut rapidement décliner elle aussi en raison de problèmes similaires. À la suite de cet événement, plus d'un millier de postes à pourvoir à la présidence furent soumis à un examen plus minutieux des pratiques d'embauche à l'aide ménagère, ce qui eut pour conséquence de ralentir fortement les nominations à de nouveaux postes administratifs[10]. Janet Reno, une magistrate de l'État de Floride, fut finalement désignée au poste de procureur général quelques semaines plus tard et confirmée en mars 1993[11]

Lors de ce premier mandat, l'équipe de conseillers à la politique étrangère du président fut dirigée par le conseiller à la sécurité nationale Anthony Lake et par le secrétaire d'État Warren Christopher, qui avaient tous les deux servis dans la précédente administration Carter[12]. Le secrétaire à la Défense, Les Aspin, démissionna peu après la bataille de Mogadiscio et fut remplacé par William Perry[13]. Bentsen et McLarty démissionnèrent à leur tour en 1994 et furent remplacés respectivement par Rubin et Panetta[14]. Clinton ayant été réélu pour un second mandat, Panetta quitta ses fonctions et fut remplacé par l'ex-chef d'état-major adjoint Erskine Bowles[15]. Madeleine Albright devint la première femme secrétaire d'État et Sandy Berger succéda à Lake comme conseiller à la sécurité nationale tandis que l'ancien sénateur républicain William Cohen fut nommé secrétaire à la Défense[16]. Selon le journaliste John Harris, la proximité de Berger avec le président fit de lui le principal responsable de la politique étrangère du second mandat de Clinton, ainsi que le conseiller à la sécurité nationale le plus influent depuis Henry Kissinger[17]. John Podesta servit en tant que chef de cabinet à partir de 1998 alors que Lawrence Summers remplaça Rubin au secrétariat du Trésor en 1999[18].

Le cabinet sous la présidence Clinton en 1993, réuni dans la Cabinet Room à la Maison-Blanche.
Cabinet Clinton
Fonction Nom Dates
Président Bill Clinton 1993-2001
Vice-président Al Gore 1993-2001
Secrétaire d'État Warren Christopher 1993-1997
Madeleine Albright 1997-2001
Secrétaire du Trésor Lloyd Bentsen 1993-1994
Robert Rubin 1995-1999
Lawrence Summers 1999-2001
Secrétaire à la Défense Les Aspin 1993-1994
William Perry 1994-1997
William Cohen 1997-2001
Procureur général Janet Reno 1993-2001
Secrétaire à l'Intérieur Bruce Babbitt 1993-2001
Secrétaire à l'Agriculture Mike Espy 1993-1994
Dan Glickman 1995-2001
Secrétaire du Commerce Ronald Brown 1993-1996
Mickey Kantor 1996-1997
William Daley 1997-2000
Norman Mineta 2000-2001
Secrétaire au Travail Robert Reich 1993-1997
Alexis Herman 1997-2001
Secrétaire à la Santé et aux services sociaux Donna Shalala 1993-2001
Secrétaire à l'Éducation Richard Riley 1993-2001
Secrétaire au Logement
et au Développement urbain
Henry Cisneros 1993-1997
Andrew Cuomo 1997-2001
Secrétaire aux Transports Federico Peña 1993-1997
Rodney Slater 1997-2001
Secrétaire à l'Énergie Hazel R. O'Leary 1993-1997
Federico Peña 1997-1998
Bill Richardson 1998-2001
Secrétaire aux Anciens combattants Jesse Brown 1993-1997
Togo West 1998-2000
Hershel Gober 2000-2001
Chef de cabinet Mack McLarty 1993-1994
Leon Panetta 1994-1997
Erskine Bowles 1997-1998
John Podesta 1998-2001
Administrateur de l'Agence de protection
de l'environnement
Carol Browner 1993-2001
Ambassadeur aux Nations unies Madeleine Albright 1993-1997
Bill Richardson 1997-1998
Richard Holbrooke 1999-2001
Directeur du Bureau de la gestion et du budget Leon Panetta 1993-1994
Alice Rivlin 1994-1996
Franklin Raines 1996-1998
Jacob Lew 1998-2001
Directeur du bureau national chargé
de la politique de contrôle des drogues
Lee P. Brown 1993-1995
Barry McCaffrey 1996-2001
Représentant américain au commerce Mickey Kantor 1993-1996
Charlene Barshefsky 1996-2001
Directeur de la Central Intelligence Agency James Woolsey 1993-1995
John Deutch 1995-1996
George Tenet 1996-2001
Administrateur de la Small Business
Administration
Erskine Bowles 1993-1994
Philip Lader 1994-1997
Aida Álvarez 1997-2001

Nominations judiciaires

Le président Clinton nomma deux juges à la Cour suprême. La première vacance se produisit en mars 1993 lorsque le juge assesseur Byron White informa Clinton qu'il allait bientôt prendre sa retraite. Clinton songea initialement à le remplacer par Mario Cuomo ou par le secrétaire à l'Intérieur Bruce Babbitt, qu'il jugeait capables d'exercer un rôle influent au sein de la Cour suprême[19]. Après quelques semaines de réflexion, le président estima qu'il serait plus judicieux de nommer un juriste expérimenté et il s'entretint avec Stephen Breyer et Ruth Bader Ginsburg, qui exerçaient tous les deux la fonction de juge d'appel fédéral. Cette dernière fut choisie et Clinton annonça sa nomination en juin 1993. Le Sénat confirma cette décision deux mois plus tard, faisant de Ginsburg la deuxième femme à siéger à la Cour suprême après Sandra Day O'Connor[20]. En 1994, ce fut au tour d'Harry Blackmun de partir à la retraite et Clinton proposa avec succès le nom de Breyer pour lui succéder. Toutefois, ces nominations n'eurent pas d'influence majeure sur le positionnement idéologique de la Cour suprême, les conservateurs continuant d'y détenir une faible majorité[21].

Politique intérieure

Politique budgétaire

Plan de réduction du déficit de 1993

Graphique en cascade montrant les causes du passage d'une situation de déficit en 1994 à une situation d'excédent budgétaire en 2001, mesurées en pourcentage du PIB. Les recettes liées à l'impôt sur le revenu ont vu leur part dans le PIB augmenter en raison de la hausse des impôts sur les contribuables les plus aisés, tandis que le rapport des dépenses et des intérêts relatifs au secteur de la défense ont diminué.

Clinton hérita des administrations Reagan et Bush un important déficit budgétaire qui se montait à 290 milliards de dollars pour l'année fiscale 1992. Afin de réduire le déficit, Bentsen, Panetta et Rubin conseillèrent à Clinton de continuer à augmenter les impôts et de limiter les dépenses pour encourager le président de la Réserve fédérale, Alan Greenspan, à baisser les taux d'intérêt et ainsi ramener le pays à la prospérité grâce à la confiance accrue des investisseurs[22]. Malgré le secrétaire au Travail Robert Reich qui estimait que la stagnation des revenus constituait un enjeu économique bien plus important que la question des déficits, Clinton fit de la remise à niveau du budget la priorité économique majeure de sa première année au pouvoir[23]. Ce faisant, il dut abandonner à contrecœur un projet de réduction d'impôts de la classe moyenne qu'il avait défendu pendant sa campagne[24].

Clinton soumit sa réforme budgétaire à l'approbation du Congrès en février 1993, proposant à la fois une hausse des impôts et une réduction des dépenses qui devaient combler le déficit de moitié d'ici à 1997[25]. Les dirigeants républicains étaient cependant hostiles à une augmentation des impôts et ils pressèrent les membres de leur parti à faire bloc contre le budget de Clinton[26]. Lors du vote, le projet de loi ne récolta pas une seule voix chez les républicains[23]. Les démocrates du Sénat bloquèrent la mise en œuvre d'une nouvelle taxe énergétique en faveur d'une augmentation de la taxe sur l'essence, mais Clinton résista aux pressions qui s'exerçaient contre lui pour le retrait d'un projet d'extension du crédit d'impôt sur les revenus du travail. En définitive, le Sénat et la Chambre des représentants adoptèrent chacun, à de courtes majorités, une version du projet de loi sur le budget et un comité de conférence régla les différences entre les deux versions[27]. La Chambre des représentants adopta la version finale de la loi par 218 voix contre 216. Après avoir longuement démarché auprès de Bob Kerrey et des autres sénateurs démocrates, Clinton obtint également le passage de la loi au Sénat par 50 voix contre 50, le vice-président Gore venant apporter la 51e voix décisive comme prévu en cas d'égalité. L’Omnibus Budget Reconciliation Act of 1993 fut officiellement ratifié par Clinton le 10 août 1993[28].

Arrêt des activités gouvernementales

Les républicains ayant pris le contrôle des deux chambres du Congrès lors des élections de 1994, le nouveau président de la Chambre des représentants, Newt Gingrich, promit une « révolution » conservatrice qui comprenait notamment des réductions d'impôts, des réformes sociales et une importante baisse des dépenses intérieures[29]. Le conservatisme avait désormais le vent en poupe au détriment de la politique libérale inspirée du New Deal et Clinton espérait forger un nouveau consensus qui ne rejetterait pas totalement l'interventionnisme du gouvernement. En réaction à la défaite électorale de son parti, il embaucha le consultant Dick Morris, qui conseilla à Clinton d'appliquer une stratégie de triangulation entre les républicains conservateurs et les démocrates libéraux. En cooptant certaines des idées républicaines, Morris soutenait que le président pourrait gagner en popularité tout en empêchant la mise en œuvre de réformes drastiques prônées par certains conservateurs[30].

Le Congrès républicain présenta à Clinton un plan budgétaire qui réduisait les dépenses du programme Medicare et accordait des baisses d'impôts importantes pour les plus riches, lui donnant jusqu'au 14 novembre 1995 pour ratifier le projet de loi. Une fois cette date dépassée, le gouvernement serait contraint d'arrêter temporairement ses activités en raison d'un manque de financement. En réponse, Clinton proposa un autre plan qui n'incluait pas les coupes prévues dans l'assurance-maladie mais qui se donnait pour objectif d'équilibrer le budget d'ici à 2005. Le président refusa de donner son accord au projet de loi républicain et une grande partie des services gouvernementaux durent en conséquence suspendre leurs opérations[31]. Les activités gouvernementales s'interrompirent à nouveau le 16 décembre après que Clinton eût opposé son veto à un plan budgétaire républicain qui prévoyait une nouvelle diminution des impôts en faveur des catégories les plus aisées, une réduction des dépenses sur les programmes sociaux et le transfert de la responsabilité du programme Medicaid aux États. Après 21 jours d'interruption des services gouvernementaux, les républicains, craignant de passer pour des extrémistes aux yeux de la population, validèrent le budget proposé par Clinton[32].

Excédents budgétaires

Conjugué à une économie forte, le plan de réduction du déficit de 1993 entraîna chaque année une baisse des déficits budgétaires, et en 1998, le gouvernement fédéral connut le premier excédent budgétaire depuis les années 1960. Reflétant l'importance de l'événement, le New York Times décrivit la fin des déficits comme « l'équivalent fiscal de la chute du mur de Berlin ». La bonne santé du budget fédéral avait déjà permis en 1997 à Clinton de s'entendre avec les républicains du Congrès pour n'apporter que des changements relativement mineurs dans le budget[33]. Alors que les excédents budgétaires incitaient les chefs de file du Parti républicain à réclamer une baisse massive des impôts, Clinton ne consentit à aucune modification importante du budget fédéral dans les trois dernières années de son mandat[34]. Les républicains bloquèrent en retour certaines de ses réformes comme l'augmentation du salaire minimum à l'échelle fédérale ou un programme législatif visant à délivrer des médicaments sous ordonnance aux personnes âgées[35].

Politique économique

Finances fédérales et PIB sous la présidence de Clinton[note 1]
Année Revenu Dépenses Surplus/
Déficit
PIB Dette en %
du PIB[note 2]
1993 1154,3 1409,4 -255,1 6794,9 47,8
1994 1258,6 1461,8 -203,2 7197,8 47,4
1995 1351,8 1515,7 -164,0 7583,4 47,5
1996 1453,1 1560,5 -107,4 7978,3 46,8
1997 1579,2 1601,1 -21,9 8483,2 44,5
1998 1 721,7 1 652,5 69,3 8 954,8 41,6
1999 1 827,5 1 701,8 125,6 9 510,5 38,2
2000 2 025,2 1 789,0 236,2 10 148,2 33,6
2001 1 991.1 1 862,8 128,2 10 564,6 31,4
Sources [36] [37] [38]
Déficit budgétaire du gouvernement fédéral américain de 1971 à 2001 (en milliards de dollars).

Clinton présida à une « économie de Boucles d'or », caractérisée par une faible inflation et un taux de chômage réduit. Dans les années 1990, le Dow Jones Industrial Average quadrupla et la part des familles possédant des investissements en actions passa de 32 % en 1989 à 51 % en 2001. L'inégalité de revenus augmenta également, les ménages les plus aisés représentant une plus grande part du revenu total[39]. Toutefois, le revenu médian des ménages, ajusté à 2 000 dollars près afin de tenir compte de l'inflation, passa de 38 262 dollars en 1995 à 42 151 dollars en 2000. À cette date, le taux de chômage n'était plus que de 4 % et le taux de pauvreté de 11,3 %[40].

David Greenberg, professeur d'histoire et de sociologie des médias à l'université Rutgers, écrit :

« À la fin de la présidence Clinton, les chiffres étaient uniformément impressionnants. Outre les excédents records et les taux de pauvreté records, l'économie pouvait afficher la plus longue expansion économique de l'histoire ; le taux de chômage le plus bas depuis le début des années 1970 ; et enfin les taux de pauvreté les plus faibles pour les mères célibataires, les Afro-Américains et les personnes âgées[41]. »

Clinton plaida en faveur d'un plan de relance économique de 30 milliards de dollars au cours de sa première année de mandat, mais ce projet fut défait par les républicains au Sénat et il fut incapable d'obtenir le passage d'une proposition similaire pour le restant de sa présidence. Clinton entra en fonction à une époque où le monétarisme avait, dans l'esprit de la plupart des hommes politiques à Washington, supplanté le keynésianisme comme théorie dominante de la croissance économique. Les monétaristes estimaient que les politiques fiscales menées par Clinton n'allaient avoir que relativement peu d'impact sur l'économie et soutenaient que l'acteur essentiel en la matière était le Conseil des gouverneurs de la Réserve fédérale des États-Unis, un groupe de fonctionnaires qui définissait la politique monétaire. Alan Greenspan fut le président de la Réserve fédérale pendant toute la durée de la présidence de Clinton et s'affirma comme un personnage particulièrement important lorsque l'économie s'améliora entre le milieu et la fin des années 1990[42]. Même si Greenspan fut largement crédité pour son rôle dans la bonne santé de l'économie, les Américains furent globalement satisfaits de la gestion de l'administration Clinton et le contexte économique favorable aida le président à maintenir sa popularité malgré les controverses qui entouraient sa vie personnelle[43].

Déréglementation

Le mandat de Clinton fut aussi marqué par une période de déréglementation dans les secteurs des télécommunications et de la finance. En 1999, Clinton promulgua la loi Gramm-Leach-Bliley (GLBA) : cette dernière abrogeait une disposition de la loi Glass-Steagall de 1933 qui exigeait que les banques se définissent elles-mêmes en tant que banques de dépôt, c'est-à-dire soumises à un contrôle du gouvernement fédéral et à des protections comme les fonds de garantie des dépôts et de résolution, ou en tant que banques d'investissement, qui faisaient l'objet d'une réglementation moins stricte mais qui ne bénéficiaient pas de protections fédérales. L'industrie financière et ses alliés tentaient de faire abroger cette clause de la loi depuis les années 1980, et ils en obtinrent finalement la suppression grâce à la coopération du secrétaire du Trésor Rubin et celle d'autres membres de l'administration Clinton qui estimaient que l'industrie financière américaine avait besoin d'une réglementation plus souple pour rester compétitive. L'un des principaux objectifs des défenseurs de la GLBA étaient de permettre aux banques de participer à la titrisation des hypothèques, un processus par lequel les hypothèques étaient converties en obligations et vendues à des investisseurs individuels[44]. Avec la mise en place des services de banques universelles, la loi Gramm-Leach-Bliley rompit la séparation traditionnelle entre banque de dépôt et banque d'investissement, en opposition avec les leçons tirées du krach de 1929, et fut plus tard accusée d'avoir considérablement accentuée les effets de la crise financière mondiale débutant en 2007[45].

Peu avant de quitter ses fonctions, Clinton ratifia le Commodity Futures Modernization Act of 2000, ou « loi sur la modernisation des marchés de matières premières », qui déréglementa le commerce des produits dérivés financiers. Cette loi comprenait notamment la « faille d'Enron » qui déboucha sur un assouplissement de la réglementation du commerce de l'énergie en faveur de certaines entreprises comme Enron[46]. Clinton signa enfin en 1996 une loi sur les télécommunications qui représentait la première législation majeure dans ce domaine depuis la précédente loi sur les communications de 1934[47]. En abolissant la réglementation sur la propriété croisée, le texte souhaitait favoriser la libre concurrence entre les différents fournisseurs et opérateurs de téléphonie, d'Internet et de la télévision[48].

Mesures sociales

En 1996, Bill Clinton réduit fortement le principal dispositif d'aide sociale des États-Unis, Aid to families with dependant children, le nombre de bénéficiaires de l'allocation passant de 14 millions à 4[49].

Mesures sociétales

Il nomme quatre ministres Afro-Américains dans son cabinet présidentiel[50].

Dans ces premières mesures, figure aussi la loi « Don't Ask, don't tell ». Pendant sa campagne électorale, Clinton avait promis aux personnes homosexuelles de pouvoir servir dans les forces armées[réf. nécessaire]. Ce projet de loi, qui sera vivement critiqué par les deux grands partis américains, réunira de longs débats avant d'être approuvé par le Congrès des États-Unis qui est l’institution ayant le pouvoir de réguler les forces armées. Pour mettre d'accord les deux partis, la loi préconisait que l'armée ne demande plus les préférences sexuelles de ces militaires tandis que les homosexuels voulant intégrer cette dernière ne devait pas le revendiquer (« Ne demandez pas, n'en parlez pas »). Cette loi sera finalement abrogée en 2010 sous la présidence de Barack Obama. Malgré son apparence discriminante, elle a aidé les personnes LGBT à intégrer l'armée[50].

Ensuite, il signera une loi accordant des congés pour cause de grossesse ou pour raison médicale avant de devoir gérer le premier attentat contre le World Trade Center.

Politique étrangère

Commerce

Fichiers audio
Remarques sur la ratification de l'ALENA (8 décembre 1993)
noicon
Remarques du président Bill Clinton sur la ratification de l'Accord de libre-échange nord-américain, le 8 décembre 1993.
Remarques sur la ratification de l'ALENA (8 décembre 1993)
noicon
Version audio uniquement
Des difficultés à utiliser ces médias ?
Des difficultés à utiliser ces médias ?
Des difficultés à utiliser ces médias ?

Clinton débuta sa présidence moins de deux ans après la chute de l'Union soviétique qui avait mis fin à la guerre froide. Avec le dénouement de ce conflit géopolitique de longue date, la question du commerce prit une place de plus en plus importante sur la scène internationale, à une période où les pays cherchaient à abaisser les droits de douane et à négocier de nouveaux accords commerciaux. Clinton pensait que la mondialisation favoriserait la prospérité économique et la diffusion de la démocratie à travers le monde et il ratifia plusieurs accords commerciaux majeurs[51]. Le président Bush avait signé avant lui l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) avec le Canada et le Mexique dans la dernière année de son mandat, mais le traité n'avait pas encore été ratifié lorsque Clinton entra en fonction. L'opposition à l'ALENA avait dépassé le cadre des partis et des alliés syndicalistes comme le représentant démocrate Dick Gephardt ou des isolationnistes conservateurs comme Pat Buchanan s'opposèrent à la ratification[52]. Le sort de l'ALENA étant toujours en suspens à la Chambre des représentants, le vice-président Al Gore décida de rencontrer Ross Perot lors d'un débat télévisé sur CNN. La solide performance de Gore dans ce débat, ainsi que la campagne de lobbying efficace menée par l'administration Clinton, contribuèrent à la ratification définitive de l'ALENA en novembre 1993[53].

Au total, Clinton négocia environ 300 accords commerciaux avec d'autres pays sous sa présidence[54]. En accordant à la Chine le statut temporaire de nation la plus favorisée en 1993, son administration diminua fortement les droits de douane sur les importations chinoises. Clinton conditionnait initialement l'extension de ce statut à la mise en oeuvre de réformes dans le domaine des droits de l'homme en Chine, mais il décida finalement d'étendre le statut malgré le manque de réformes[55]. En 2000, Clinton signa un projet de loi normalisant les relations commerciales avec la Chine de façon permanente ; en conséquence, les importations américaines de produits chinois augmentèrent massivement dans les années suivantes[56]. Le dernier secrétaire du Trésor de Clinton, Lawrence Summers, fit valoir que les initiatives de Clinton sur le plan commercial étaient techniquement « la plus grande réduction d'impôts dans l'histoire du monde » dans la mesure où elles avaient réduit les prix des biens de consommation en abaissant les droits de douane[57]. Les prises de position de Clinton en faveur des accords commerciaux déclenchèrent de vives réactions parmi ceux qui avaient critiqué les divers aspects de la mondialisation ainsi que les suppressions d'emplois dans l'industrie manufacturière nationale après la ratification de l'ALENA. Une réunion de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) à Seattle en 1999 fut éclipsée par des manifestations de grande ampleur qui donnèrent lieu à des scènes de violence[55].

Interventions militaires

Des soldats américains à Kismaayo en 1993, pendant la guerre civile somalienne.

Les troubles en Somalie dégénérèrent en une guerre civile à grande échelle en 1991 et le président Bush envoya 25 000 soldats américains dans le pays dans le cadre d'une mission de maintien de la paix par l'ONU. À la fin de l'année 1993, la Somalie était toujours en proie à la guerre civile et 4 000 militaires américains étaient encore présents sur le territoire. Au mois d'octobre, les forces spéciales américaines déclenchèrent un raid sur Mogadiscio afin de capturer le chef de guerre Mohamed Farrah Aidid, qui avait mené des attaques contre les forces de l'ONU. L'opération se solda par un échec, coûtant la vie à dix-huit soldats américains[58]. L'incident était embarrassant pour l'administration Clinton, de nombreux Américains s'interrogeant sur la présence de leurs forces armées en Somalie. Après la ratification d'un accord de paix par les dirigeants somaliens en 1994, Clinton retira toutes les forces américaines du pays[59].

L'épisode somalien exacerba les discussions internes autour du rôle à jouer par la puissance militaire américaine dans la période de l'après-guerre froide. Les partisans de la non-intervention remportèrent une victoire lorsque l'administration Clinton imposa de nouvelles conditions au déploiement des troupes américaines, en particulier dans le cadre des missions de maintien de la paix de l'ONU[60]. En avril 1994, les Hutus du Rwanda perpétrèrent un génocide contre la minorité des Tutsis, tuant 800 000 personnes en trois mois. L'ONU dépêcha sur place un petit contingent pour assurer la protection des populations mais les États-Unis, qui n'avaient aucun intérêt stratégique ou économique dans la région, restèrent en retrait[61]. Clinton affirma plus tard que la non-intervention au Rwanda avait été la pire erreur de son administration[62].

En 1991, une junte militaire en Haïti avait évincé le président Jean-Bertrand Aristide, élu démocratiquement[63]. Clinton était favorable à ce qu'Aristide retourne au pouvoir, en partie pour endiguer le flux d'Haïtiens qui fuyaient vers les États-Unis, mais beaucoup d'Américains étaient opposés à une intervention militaire dans un État qui ne constituait pas une menace pour leur pays[64]. Malgré l'opposition du Congrès et de l'opinion publique, Clinton annonça en septembre 1994 que les États-Unis renverseraient la junte si elle ne se retirait pas volontairement du pouvoir[65]. Dans le même temps, il envoya sur les lieux une délégation de paix composée de Colin Powell, de l'ancien président Jimmy Carter et du sénateur Sam Nunn pour convaincre le gouvernement militaire de se retirer. Alors que les soldats américains se préparaient à lancer une expédition sur Haïti, la junte accepta finalement de rétablir Aristide dans ses fonctions[66].

Balkans

Carte de la Yougoslavie pendant la guerre.

Alors que la guerre froide touchait à sa fin, Slobodan Milošević devint en 1989 le nouveau dirigeant de la République socialiste de Serbie. Sa politique nationaliste lui aliéna les dirigeants des autres pays constitutifs de la Yougoslavie, un État multi-ethnique créé en 1918 à la fin de la Première Guerre mondiale. La Slovénie, la Croatie et la République de Macédoine proclamèrent leur indépendance en 1991, mais l'armée serbe s'opposa brutalement à la sécession de la Croatie, marquant le début des guerres yougoslaves. En 1992, la Bosnie-Herzégovine quitta à son tour la fédération yougoslave. Tout comme en Croatie, une importante minorité de Serbes opposés à la sécession vivait en Bosnie-Herzégovine et une guerre éclata entre les partisans de l'indépendance et ceux qui y étaient opposés[67]. Les opérations de nettoyage ethnique menées par les Serbes de Bosnie furent condamnées par l'ensemble de la communauté internationale. La question de savoir s'il fallait intervenir ou non dans les Balkans se posait de manière particulièrement brûlante au moment où Clinton entra en fonction. Des activistes comme Elie Wiesel firent pression sur Clinton pour l'inciter à agir contre les nettoyages ethniques, et le président lui-même souhaitait faire quelque chose pour mettre fin aux violences[68]. Le général Colin Powell, chef d'état-major des armées, déconseilla néanmoins à Clinton d'intervenir militairement car il estimait que les États-Unis n'avaient pas suffisamment d'intérêts stratégiques clairs dans cette région[69].

En mai 1994, les forces serbes envahirent des zones de sécurités établies par la Force de protection des Nations unies. Clinton autorisa alors des frappes aériennes contre les positions serbes[70]. Cela ne fut pas suffisant pour arrêter l'avance de l'armée serbe, et en juillet 1995 près de 8 000 Bosniaques furent assassinés lors du massacre de Srebrenica. Clinton et son conseiller à la sécurité nationale, Anthony Lake, proposèrent une solution pour mettre fin au génocide en Bosnie qui prévoyait notamment une offensive aérienne massive de l'OTAN contre les Serbes bosniens. Les dirigeants européens donnèrent leur accord et l'OTAN déclencha l'opération Deliberate Force. En réaction aux bombardements et à la progression des troupes bosniaques, Milošević accepta d'entamer des pourparlers de paix[71]. Ces discussions débouchèrent sur la signature des accords de Dayton qui mirent fin à la guerre de Bosnie-Herzégovine et divisèrent cette dernière en deux régions autonomes[72].

En 1998, une nouvelle guerre éclata entre la Serbie et le Kosovo, une province serbe autonome qui souhaitait accéder à l'indépendance. Des groupes d'Albanais partisans de la sécession constituèrent l'Armée de libération du Kosovo et menèrent des attaques contre les forces serbes. Ces dernières réprimèrent le mouvement et procédèrent à un nettoyage ethnique à l'encontre de la population albanaise. Les dirigeants de l'OTAN ne souhaitaient pas s'impliquer dans ce conflit et la Russie annonça qu'elle mettrait son veto à toute résolution des Nations unies autorisant une intervention militaire, mais la plupart des conseillers de Clinton étaient favorables à une nouvelle intervention dans les Balkans[73]. Afin d'obliger Milošević à se mettre à la table des négociations, Clinton ordonna une campagne de bombardement contre l'armée serbe en mars 1999. Milošević refusa néanmoins de capituler et l'OTAN intensifia les bombardements ; Belgrade, la capitale serbe, fut complètement dévastée. De plus en plus contesté en interne, Milošević accepta finalement de retirer ses troupes et autorisa le déploiement d'une force de maintien de la paix dirigée par l'OTAN au Kosovo. Le statut de cette région fit l'objet de vifs débats dans les années suivantes ; quant à Milošević, il fut renversé en octobre 2000[74].

Renforcement de l'OTAN

Bill Clinton avec le président russe Boris Eltsine en novembre 1999.

L'une des priorités de Clinton fut d'étendre l'influence de l'OTAN dans les pays de l'ancien bloc de l'Est en Europe, car il pensait que cela contribuerait à la stabilité de la région. Un certain nombre de dirigeants russes se sentirent menacés par l'extension de cette alliance militaire qui avait été créé pour permettre aux Américains de s'opposer à l'Union soviétique. La décision de Clinton d'élargir l'OTAN fut aussi critiquée aux États-Unis par des responsables qui ne souhaitaient pas se mettre la Russie à dos. Dès le début de son mandat, Clinton noua des relations amicales avec le président russe Boris Eltsine et celui-ci promit d'aider à faire respecter les accords de Dayton en Bosnie-Herzégovine. En 1997, Clinton persuada non sans mal son homologue russe de ne pas s'opposer à l'élargissement de l'OTAN, permettant ainsi à la Hongrie, la Pologne et la République tchèque d'y adhérer[75]. Eltsine insista en retour pour que les États-Unis s'engagent à ne pas élargir l'OTAN aux pays baltes, mais Clinton n'était pas disposé à lier ses successeurs à une telle promesse. Il s'opposa également aux Français qui voulaient que la Roumanie et la Slovénie rejoignent l'OTAN car il craignait qu'une expansion trop rapide vers l'Europe de l'Est n'affaiblisse l'organisation[76]. Dans la vague des problèmes engendrés par la chute de l'URSS, Clinton essaya d'aider Eltsine à éviter une dépression économique et à réformer l'économie russe. Par la suite, il soutint discrètement Eltsine lorsque celui-ci fut réélu en 1996 et fit tout son possible pour empêcher la résurgence du communisme en Russie, tout en favorisant l'entrée de cette dernière au G8[77],[78].

Terrorisme

La question du terrorisme devint l'un des principaux enjeux de sécurité nationale sous la présidence de Clinton[79]. Pendant la guerre d'Afghanistan, Oussama ben Laden avait fondé Al-Qaïda, une organisation militante sunnite. Ben Laden et les autres dirigeants d'Al-Qaïda méprisaient les valeurs occidentales et étaient particulièrement scandalisés par la présence de militaires américains en Arabie Saoudite. L'organisation prit de l'importance dans les années 1990 et commença à mener des actions terroristes au Moyen-Orient et ailleurs[80]. Le groupe revendiqua l'attentat du World Trade Center de 1993, les attentats contre les ambassades américaines en Afrique et l'attentat contre l'USS Cole au large du Yémen. En guise de représailles, Clinton ordonna à l'aviation américaine de bombarder les bases d'Al-Qaïda en Afghanistan et au Soudan[81]. Traqué par l'armée américaine et par la CIA, ben Laden parvint à se réfugier dans les montagnes afghanes[82].

Autres événements

Poignée de main entre le Premier ministre israélien Yitzhak Rabin et le président de l'Autorité palestinienne Yasser Arafat sous le regard de Bill Clinton lors de la signature des accords d'Oslo, le 13 septembre 1993.

Clinton chercha à se poser en médiateur dans le conflit israélo-arabe et il encouragea les dirigeants d'Israël et de l'Organisation de libération de la Palestine à ratifier les accords d'Oslo en septembre 1993[83]. Par la suite, un nouvel accord donna naissance à l'Autorité nationale palestinienne qui se vit attribuer l'administration de la bande de Gaza, territoire dont Israël s'était emparé pendant la guerre des Six-Jours en 1967. Lors de son second mandat, Clinton s'efforça de relancer les négociations de paix, parvenant notamment à convaincre le gouvernement israélien de céder la Cisjordanie, également conquise par Tsahal durant la guerre des Six-Jours. En 2000, Bill Clinton organisa le sommet de Camp David II entre le dirigeant palestinien Yasser Arafat et le Premier ministre israélien Ehud Barak, mais les discussions entre les deux parties échouèrent à déboucher sur un compromis. En septembre de la même année, la population palestinienne se souleva contre les autorités israéliennes : ce fut le début de la seconde intifada, qui se poursuivit plusieurs années après la fin de la présidence de Clinton[84].

Clinton maintint les sanctions économiques et les zones d'exclusion aérienne imposées à l'Irak au lendemain de la guerre du Golfe. En réponse à la tentative d'assassinat fomentée par les autorités irakiennes contre l'ancien président George H. W. Bush, Clinton ordonna une frappe de missiles contre le siège des services de renseignement irakiens en 1993[83]. De plus, la commission mandatée par les Nations unies pour surveiller l'état du programme de développement d'armes de destruction massive irakien vit son travail perturbé par Saddam Hussein. Les États-Unis et le Royaume-Uni ripostèrent en bombardant les entrepôts d'armes irakiens pendant l'année 1998[85]. Ces raids se poursuivirent de façon sporadique jusqu'à l'invasion de l'Irak en 2003[86].

En janvier 1995, Bill Clinton fut informé par ses conseillers que le gouvernement mexicain était dans l'incapacité de rembourser ses dettes et qu'un prêt de 25 milliards de dollars de la part des États-Unis était nécessaire pour redresser la situation. Clinton et le président de la Chambre des représentants Newt Gingrich pensaient qu'il était important pour les intérêts américains de renflouer l'économie mexicaine, mais le Congrès s'opposa à toute forme d'aide[87]. L'administration Clinton contribua également à limiter les effets de la crise économique asiatique de 1997 en maintenant ouverts les marchés américains[88].

Surmontant l'opposition des conservateurs et des vétérans de la guerre du Viêt Nam, Clinton normalisa les relations diplomatiques avec le Viêt Nam en 1995 et y effectua une visite officielle la même année, une première pour un président américain. Il fut également le premier président à visiter le Botswana, la Slovénie et l'Afrique du Sud[89].

En 1997, le travailliste Tony Blair devint Premier ministre du Royaume-Uni. Clinton et Blair étaient des centristes sur le plan politique et ils promurent ensemble leur concept de « troisième voie » à l'échelle internationale[90].

Mesures prises sous la présidence

Principales lois signées

  • 1993
    • 5 février : loi sur les congés familiaux et médicaux ;
    • 10 août : loi sur la réduction de la dette publique ;
    • 16 novembre : loi de protection de la liberté religieuse ;
    • 30 novembre : loi de prévention contre la violence des armes à feux.
  • 1994
    • 13 septembre : loi sur le contrôle des crimes violents ;
    • 25 octobre : loi sur l'assistance de communication pour l'application des lois.
  • 1995
  • 1996
    • 8 février : loi sur les télécommunications ;
    • 24 avril : loi sur la peine de mort pour dissuader le terrorisme ;
    • 20 août : loi de protection des emplois pour les PME ;
    • 21 août : réforme de l'assurance-maladie ;
    • 26 août : loi sur les responsabilités individuelles face aux opportunités de travail ;
    • 21 septembre : loi de protection des institutions du mariage ;
    • 26 septembre : loi sur la parité dans le domaine de la santé mentale.
  • 1997
    • 5 août :
      • loi pour l'équilibre budgétaire ;
      • loi sur les taxes et impôts.
  • 1998
    • 7 août : loi d'investissement sur les effectifs ;
    • 31 octobre : loi pour un changement de régime irakien ;
    • 3 novembre : loi sur les recours collectifs privés pour fraudes.
  • 1999
    • 12 novembre : loi sur la modernisation des services financiers.
  • 2000
    • 21 décembre : loi sur la modernisation de la réglementation des produits financiers.

Notes et références

Notes

  1. Toutes les données, à l'exception du pourcentage de la dette, sont exprimées en milliards de dollars. Le PIB est calculé selon l'année civile. Le montant des revenus, des dépenses, du déficit et de la dette est calculé selon l'année fiscale, qui se termine le 30 septembre. Par exemple, l'année fiscale 2017 aux États-Unis s'est achevée le 30 septembre 2017.
  2. Représente la dette nationale détenue par le public en pourcentage du PIB.

Références

  1. Wilentz 2008, p. 317 à 319.
  2. Wilentz 2008, p. 315 à 321.
  3. Wilentz 2008, p. 321 et 322.
  4. Harris 2005, p. 24 et 25.
  5. Harris 2005, p. 27 et 28.
  6. Harris 2005, p. 21 et 22.
  7. Harris 2005, p. 4, 5 et 21.
  8. Harris 2005, p. 14.
  9. (en) George Stephanopoulos, All Too Human: A Political Education, Boston, Little, Brown and Company, (ISBN 0-316-92919-0), p. 118 et 122.
  10. (en) Michael Kelly, « Washington Memo; Household Hiring Is Trickier With New Broom in Capital », sur nytimes.com, The New York Times, (consulté le ).
  11. Harris 2005, p. 16.
  12. Herring 2008, p. 925 et 926.
  13. Harris 2005, p. 124 et 125.
  14. Harris 2005, p. 148, 149 et 158.
  15. Harris 2005, p. 254 et 255.
  16. Herring 2008, p. 932.
  17. Harris 2005, p. 370 et 371.
  18. Harris 2005, p. 395 et 396.
  19. Harris 2005, p. 58 à 60.
  20. Harris 2005, p. 60 à 62.
  21. Patterson 2005, p. 330 et 366.
  22. Harris 2005, p. 5.
  23. a et b Wilentz 2008, p. 327 et 328.
  24. Harris 2005, p. 5 et 6.
  25. Harris 2005, p. 23, 29 et 30.
  26. Harris 2005, p. 85 et 86.
  27. Harris 2005, p. 87 à 89.
  28. Harris 2005, p. 92 et 93.
  29. Harris 2005, p. 157 et 158.
  30. Wilentz 2008, p. 350 et 351.
  31. Wilentz 2008, p. 357 à 364.
  32. Patterson 2005, p. 371 et 372.
  33. Wilentz 2008, p. 371 et 372.
  34. Wilentz 2008, p. 407.
  35. Patterson 2005, p. 402.
  36. « Historical Tables », sur Obama White House, Table 1.1, Bureau de la gestion et du budget (consulté le ).
  37. « Historical Tables », sur Obama White House, Table 1.2, Bureau de la gestion et du budget (consulté le ).
  38. « Historical Tables », sur Obama White House, Table 7.1, Bureau de la gestion et du budget (consulté le ).
  39. Patterson 2005, p. 350 à 352.
  40. Patterson 2005, p. 357 et 358.
  41. (en) David Greenberg, « Memo to Obama Fans: Clinton's presidency was not a failure », sur Slate, (consulté le ).
  42. Harris 2005, p. 84 et 85.
  43. Harris 2005, p. 328 et 329.
  44. Yeaman 2010, p. 689 à 692.
  45. Serge Halimi, « Le gouvernement des banques », Le Monde diplomatique,‎ (lire en ligne).
  46. (en) Eric Lipton, « Gramm and the 'Enron Loophole' », sur nytimes.com, The New York Times, (consulté le ).
  47. (en) David McCabe, « Bill Clinton's telecom law: Twenty years later », sur thehill.com, The Hill, (consulté le ).
  48. Conley 2012, p. 171.
  49. Anne Chemin, « La pauvreté made in America », Le Monde Idées, cahier du Monde no 22641, 28 octobre 2017, p. 3.
  50. a et b Clément Boutin, « Pourquoi Bill Clinton reste-t-il aussi populaire ? », lesinrocks.com, 12 juillet 2016.
  51. Herring 2008, p. 926.
  52. Wilentz 2008, p. 335.
  53. Harris 2005, p. 101.
  54. (en) Bill Clinton, « Remarks at the University of Nebraska at Kearney, Nebraska: December 8, 2000 », sur presidency.ucsb.edu, The American Presidency Project (consulté le ).
  55. a et b Herring 2008, p. 926 et 927.
  56. (en) Jim Tankersley, « What Republicans did 15 years ago to help create Donald Trump today », sur washingtonpost.com, The Washington Post, (consulté le ).
  57. (en) Lawrence Summers, « "The Benefits of Electricity Restructuring for Consumers, Industry and the Environment" (12/8/1997) », sur treasury.gov, Département du Trésor des États-Unis (consulté le ).
  58. Wilentz 2008, p. 336 et 337.
  59. Patterson 2005, p. 338.
  60. Herring 2008, p. 927 et 928.
  61. Wilentz 2008, p. 338.
  62. Herring 2008, p. 928 et 929.
  63. Wilentz 2008, p. 337 et 338.
  64. Harris 2005, p. 133 à 136.
  65. Harris 2005, p. 138 et 139.
  66. Herring 2008, p. 929.
  67. Wilentz 2008, p. 339 et 340.
  68. Harris 2005, p. 42 à 44.
  69. Harris 2005, p. 48 à 50.
  70. Wilentz 2008, p. 355 et 356.
  71. Wilentz 2008, p. 360 et 361.
  72. Herring 2008, p. 930.
  73. Wilentz 2008, p. 403 à 405.
  74. Herring 2008, p. 933 et 934.
  75. Wilentz 2008, p. 373 et 374.
  76. Harris 2005, p. 282 à 288.
  77. (en) Svetlana Savranskaya, « Yeltsin and Clinton », Diplomatic History, vol. 42, no 4,‎ , p. 564 à 567 (DOI 10.1093/dh/dhy052).
  78. (en) Strobe Talbott, « Clinton and Yeltsin », Diplomatic History, vol. 42, no 4,‎ , p. 568 à 571 (DOI 10.1093/dh/dhy052).
  79. Herring 2008, p. 936 et 937.
  80. Wilentz 2008, p. 375 et 376.
  81. Wilentz 2008, p. 406.
  82. Harris 2005, p. 403 à 440.
  83. a et b Wilentz 2008, p. 340.
  84. Herring 2008, p. 935 et 936.
  85. Wilentz 2008, p. 405 et 406.
  86. Patterson 2005, p. 381.
  87. Wilentz 2008, p. 356 et 357.
  88. Herring 2008, p. 765 et 766.
  89. Herring 2008, p. 935.
  90. Troy 2015, p. 201 et 202.

Bibliographie

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • (en) Richard S. Conley, Historical Dictionary of the Clinton Era, The Scarecrow Press, Inc., (ISBN 978-0-8108-5972-2). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • (en) John F. Harris, The Survivor: Bill Clinton in the White House, New York, Random House, (ISBN 0-375-50847-3). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • (en) George C. Herring, From Colony to Superpower: U.S. Foreign Relations Since 1776, Oxford University Press, (ISBN 978-0-19-507822-0). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • (en) James Patterson, Restless Giant: The United States from Watergate to Bush v. Gore, Oxford University Press, (ISBN 978-0195122169). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • (en) Gil Troy, The Age of Clinton: America in the 1990s, Thomas Dunne Books, (ISBN 978-1-250063724). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • (en) Sean Wilentz, The Age of Reagan, HarperCollins, (ISBN 978-0-06-074480-9). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • (en) Helena Yeaman, « The Bipartisan Roots of the Financial Services Crisis », Political Science Quarterly, vol. 124, no 4,‎ . Document utilisé pour la rédaction de l’article