Groupe Wagner

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Groupe Wagner
Image illustrative de l’article Groupe Wagner

Idéologie Nationalisme russe
Néo-nazisme[1]
Objectifs Défense paramilitaire des intérêts extérieurs de la Russie
Statut Actif
Site web wagnercentr.ruVoir et modifier les données sur Wikidata
Fondation
Date de formation 2014
Pays d'origine Russie
Fondé par Evgueni Prigojine et Dmitri Outkine
Actions
Mode opératoire Mercenariat
Opérations clandestines
Zone d'opération Ukraine, Syrie, Soudan, Libye, Centrafrique, Venezuela, Mali, Madagascar, Mozambique
Période d'activité Depuis 2014
Organisation
Chefs principaux Evgueni Prigojine
Dimitri Outkine
Sergueï Kim
Membres 2 500 à 5 000 au total en 2021[2]
1 000 à 4 000 en Syrie en 2018[3],[4]
Soutenu par Ministère de la Défense russe (du moins en partie)
Forces armées russes ?
GRU ?
FSB ?
Crise de Crimée
Guerre du Donbass
Guerre civile syrienne
Conflit au Kordofan du Sud
Deuxième guerre civile libyenne
Deuxième guerre civile centrafricaine
Insurrection djihadiste au Mozambique
Crise présidentielle de 2019 au Venezuela
Guerre du Mali
Invasion de l'Ukraine par la Russie en 2022

Le Groupe Wagner (russe : Группа Вагнера), également connu comme PMC Wagner, ChVK Wagner, ou CHVK Vagner, est une société militaire privée russe ayant recours au mercenariat, active notamment lors de la guerre du Donbass et la guerre civile syrienne mais aussi dans d'autres zones de conflits à travers le monde. Cette organisation paramilitaire n'est pas liée officiellement au gouvernement russe mais proche du Kremlin[5],[6]. Le groupe œuvre dans le but d'assurer la défense des intérêts extérieurs de la Russie. Le groupe est sanctionné par l'Union européenne en 2021.

Direction

Le Groupe Wagner est fondé en 2014[7]. Il est financé par (ou est la propriété de) l'oligarque russe Evgueni Prigojine, proche du pouvoir russe et à la tête de l'Internet Research Agency (IRA), une usine à propagande et à désinformation sur internet[3],[8]. Le Groupe Wagner et l'IRA sont deux organisations sœurs qui sont synchronisées l'une à l'autre. Le Groupe Wagner met en œuvre des opérations militaires, tandis que l'IRA mène une guerre informationnelle sur internet et planifie des opérations psychologiques[9],[10],[11].

Le siège social officiel du Groupe Wagner est en Argentine[12]. Le fondateur et commandant militaire du groupe est Dimitri Outkine, lieutenant-colonel au sein des Spetsnaz jusqu'en 2013 et ancien membre du Corps slave[13].

Outkine est un néonazi admirateur du Troisième Reich[13],[14]. Il aurait adopté le surnom de Wagner en hommage au compositeur allemand Richard Wagner et aurait baptisé son entreprise de mercenariat du même nom[13],[14],[15],[16]. Le Groupe Wagner pourrait également se référer à Robert Wagner qui dirigea le SAIMR pendant la Guerre froide[17].

En , Outkine devient le directeur général de l'entreprise Concord Management and Consulting, qui appartient à l'homme d'affaires Evgueni Prigojine[4].

Les sociétés militaires privées sont officiellement interdites en Russie[3]. Mais selon The Daily Beast et le département d'État des États-Unis et d'autres[5], le groupe Wagner est sous le contrôle du ministère russe de la Défense[13],[18]. Cependant, le gouvernement russe nie officiellement tout lien avec cette société[13]. Pour Isabelle Mandraud, journaliste pour Le Monde : « les mercenaires russes n’ont pas d’existence légale en Russie. Leurs liens avec le pouvoir sont pourtant évidents. Leur chef s’était ainsi pris en photo au côté du président Vladimir Poutine lors d'une réception au Kremlin en décembre 2016 »[19]. Pour le New-York Times : « ses relations avec le Kremlin sont obscures et non confirmées, mais ses dirigeants auraient été décorés au Kremlin et ses mercenaires sont formés dans les installations du ministère russe de la Défense »[15]. Le financement du Groupe Wagner est lié, au moins en partie, au ministère de la Défense russe. Le ministère signe des contrats avec des entreprises proches de Prigojine et une partie de l'argent de ces contrats est effectivement dirigé vers le financement du Groupe. Le budget annuel du Groupe Wagner est estimé à 30 millions de dollars américains[20].

Le groupe Wagner pourrait avoir intégré une autre société, Evro Polis, dirigée par Evgueni Prigojine, sous contrat avec le régime de Bachar el-Assad[4],[3],[19],[13]. Selon Isabelle Mandraud : « Créée en 2016 dans la banlieue de Moscou selon le site d’informations Fontanka, cette entreprise aurait plutôt ressemblé à une coquille vide à ses débuts avant de voir son capital brutalement augmenter l’année suivante »[19]. Pour The Daily Beast, Evro Polis serait devenu le front commercial du groupe Wagner[13]. Selon les journalistes de Libération Luc Mathieu et Veronika Dorman : « Prigojine, que la presse russe désigne aussi comme le patron des usines à troll russes, s’est diversifié dans le militaro-industriel. Son entreprise de restauration, Evro Polis, basée à Moscou, s’est recyclée en 2016 dans l’exploitation minière et la production de gaz et de pétrole avant d’ouvrir en 2017 une représentation à Damas. En 2016, Evgeny Prigojine a signé un contrat avec les autorités syriennes, lui assurant 25 % des revenus des champs de gaz et de pétrole repris par ses soins, c’est-à-dire par les hommes de Wagner, au groupe jihadiste État islamique »[4].

Idéologie

Néonazi et admirateur du Troisième Reich, Dimitri Outkine, ancien parachutiste des forces spéciales russes et ancien lieutenant-colonel du renseignement militaire, se donne comme nom de guerre « Wagner », en hommage à Richard Wagner, le compositeur préféré d'Adolf Hitler[2],[13],[14],[21]. Une photo diffusée en 2020, montre notamment Outkine arborant des tatouages nazis[1],[21].

En 2020, une tablette abandonnée par un combattant russe à Ain Zara, pendant la bataille de Tripoli, en Libye, est découverte et analysée par des journalistes de la BBC et de Newlines[1],[21]. L'Orient-Le Jour indique que « C'est surtout la composante idéologique qui pourrait durablement modifier l’image de ces combattants de l'ombre. Depuis plusieurs années, les rumeurs circulent quant aux penchants idéologiques du groupe. [...] Les nouvelles informations permettent de confirmer et d’élargir ces données. Outre les ouvrages de littérature militaire, le manifeste d’Adolf Hitler, Mein Kampf a été retrouvé dans la bibliothèque électronique de la tablette oubliée à Ain Zara. L'identification du profil en ligne de quelques soldats confirme ce faisceau d’indices préexistants : références à la Seconde Guerre mondiale, tatouages et slogans nazis, symboles issus du néopaganisme associés à l'extrême droite en Russie, identification à la culture viking et pureté de la « race » slave »[1]. Des graffitis racistes et islamophobes accompagnés de croix gammées sont également laissés à Ain Zara, par des combattants russes ayant pris part à la bataille de Tripoli[1],[22].

Sanctions

Les activités du groupe Wagner sont critiquées et plusieurs États ont pris des sanctions à son égard.

En 2020, Evgueni Prigojine est soumis à des sanctions de la part de l'Union européenne[23].

En , l'Union européenne accuse le groupe d'« alimenter la violence, de piller les ressources naturelles et d'intimider les civils en violation du droit international » dans différents pays : Libye, Syrie, Ukraine et République centrafricaine. Les sanctions touchent Wagner, trois sociétés liées à Wagner (Evro Polis, Mercury et Velada) et 8 personnes dont Dmitri Outkine, Valery Zakharov, un conseiller du président centrafricain Faustin-Archange Touadéra, Denis Kharitonov, un militaire séparatiste dans le Donbass et Andreï Trochev, un militaire en opération en Syrie[23]. L'UE dénonce des « actes de torture et des exécutions et meurtres extrajudiciaires ». Ces sanctions sont critiquées par le ministère des Affaires étrangères russe[24].

Effectifs

Selon une enquête de RBK publiée le , environ 1 600 hommes ont servi sous les ordres de Wagner depuis le début de l'année 2016[25]. En 2018, RBK estime que le nombre des combattants du groupe Wagner a varié en Syrie, allant d'un millier d'hommes en moyenne à 2 500 au plus fort des combats[3]. Selon le journal russe Kommersant, 600 Russes sont présents en Syrie au sein du groupe Wagner début 2018 [8]. À la même période, l'agence Bloomberg News estime leurs forces à 2 000 hommes [26]. Libération évoque pour sa part entre 2 000 et 4 000 hommes[4].

En 2021, la BBC estime que 10 000 hommes ont combattu dans les rangs du Groupe Wagner lors des sept années précédentes[21].

En Russie, ces forces sont basées jusqu'à l'été 2016 dans l'enceinte de la 10e brigade spéciale de renseignement, à Molkino, près de Krasnodar[3],[27],[28],[16],[25].

Les premiers mercenaires du groupe Wagner sont des vétérans d'Afghanistan et de Tchétchénie, mais par la suite le groupe engage des nouvelles recrues sans grande expérience militaire[29]. Un certain nombre des combattants du groupe sont également des militants du Parti national-bolchévique[30]. En général, les combattants sont envoyés en zone de guerre après une formation militaire de seulement un mois[29].

Selon le témoignage à la BBC d'un ancien mercenaire, de nombreux agents de Wagner ont un casier judiciaire, ce qui rend difficile pour eux de rejoindre l'armée régulière[21].

Théâtres d'opérations

Les mercenaires du groupe Wagner ont été engagés en Ukraine dans la crise de Crimée, la guerre du Donbass, en Syrie durant la guerre civile syrienne[3],[19],[8],[28], et aussi au Venezuela[31]. Ils ont aussi été déployés en Afrique, notamment au Soudan[7], en Centrafrique[32] et en Libye[33]. Des consultants du Groupe Wagner sont vus au Mali vers fin 2019[34], et dans le courant de l'année 2021[35]. Le groupe aurait également une présence au Mozambique et à Madagascar[36],[37].

Syrie

Le groupe Wagner intervient dans la guerre civile syrienne à partir de fin 2015[3]. Chargés initialement d'épauler lors des combats une armée syrienne affaiblie, ses combattants se voient ensuite assigner pour mission la garde des installations pétrolières dans l'est de la Syrie[3],[8],[38]. Ils encadrent aussi les ISIS Hunters[39]. Selon l'écrivain Zakhar Prilepine, également chef d'un bataillon pro-russe dans le Donbass, plusieurs combattants ont choisi de quitter l'Ukraine pour la Syrie car le salaire y est plus élevé[8].

En 2016 et 2017, le groupe Wagner combat l'État islamique à Palmyre[26],[14],[25]. Fin , deux combattants russes du groupe Wagner sont faits prisonniers par l'État islamique près de Deir ez-Zor[40],[41],[8]. Leur mort est annoncée fin octobre[8].

En , le groupe Wagner est la cible de bombardements américains et subit des pertes importantes — plusieurs dizaines ou plusieurs centaines de tués ou de blessés — lors de la bataille de Khoucham[19].

Selon la journaliste de Libération Hala Kodmani : « Les principales zones où sont intervenus les mercenaires russes en Syrie ces dernières années correspondent à l’est du pays où se trouvent des champs de pétrole et de gaz. C’est aussi la région qui était contrôlée depuis 2014 par l’État islamique, qui en a été délogé par les offensives antiterroristes de l’année dernière. Même si les ressources et réserves d’hydrocarbures syriennes sont loin d’être aussi importantes que celles de ses voisins, comme l’Irak, et que la production a été pratiquement réduite à néant par la guerre, le secteur reste un enjeu stratégique, en particulier pour la Russie »[42].

La participation des mercenaires russes au conflit syrien se fait de manière très discrète : leurs décès ne sont pas signalés et ils ne font pas l'objet de funérailles d'État[13],[14]. Des témoignages de mercenaires russes font état de très lourdes pertes en Syrie : au moins plusieurs centaines de morts[14],[25],[4].

Les lourdes pertes, l'obligation de devoir rester dans l'ombre, la vétusté de plus en plus grande des armes et du matériels provoquent des tensions avec l'armée russe à partir de 2017[4].

Venezuela

En , au moment de la crise présidentielle, des agents de sécurité du Groupe Wagner arrivent au Venezuela pour renforcer la sécurité du président Nicolás Maduro[31].

Libye

En 2019, selon le site russe Meduza, 300 hommes du Groupe Wagner prennent part à la bataille de Tripoli aux côtés des forces de l'Armée nationale libyenne du maréchal Haftar et au moins 35 d'entre-eux auraient été tués en septembre[43].

Entre et , selon un rapport de l'ONU, la Russie a accru son soutien logistique au groupe Wagner en Libye : quelque 338 avions cargo militaires partent de Syrie pour la Libye afin d'aider les combattants du groupe[44].

Selon un rapport du Département de la Défense des États-Unis publié en , les Émirats arabes unis, allié militaire proche des États-Unis au Moyen-Orient, financeraient les activités du groupe Wagner en Libye. Cette révélation survient alors que les démocrates au Congrès ont monté une campagne pour s'opposer à la vente proposée par l'administration Trump d'avions de chasse F-35 aux Émirats arabes unis pour 23 milliards de dollars[18].

En août 2021, BBC News prend possession d'une tablette numérique abandonnée sur un champ de bataille en Libye. Selon le journaliste chargé d'analyser ses contenus, la tablette aurait été utilisée par un combattant du groupe. Plusieurs lieux de combats sont identifiés sur des cartes, ainsi que des lieux minés. Selon des informateurs anonymes du journaliste, jusqu'à 1 000 combattants du groupe auraient participé à des combats en Libye[45].

Centrafrique

À partir de 2018, des mercenaires du Groupe Wagner sont présents en Centrafrique, où ils participent à la formation de militaires de l'armée centrafricaine[46]. Wagner ouvre des bases arrières dans le pays, notamment dans des zones diamantifères comme Bria.

Le , 175 instructeurs russes de la société privée Sewa Security Services (SSS) arrivent en Centrafrique. En , le palais de Berengo (Bobangui) et ses 40 hectares de terrain sont transformés en camp militaire pour les contractuels russes appartenant à Sewa Security Services (fondée en ) et Lobaye Invest Ltd (société minière fondée en )[47]. Ces deux sociétés sont, selon le Trésor américain, reliées au fondateur du groupe Wagner. Les instructeurs russes y forment les Forces Armées Centrafricaines (FACA)[48]. Une cérémonie pour la fin de la formation d’un premier contingent de 200 hommes s’est tenue le en présence du président de la République Faustin-Archange Touadéra. Les mercenaires russes de SSS assurent également, depuis 2018, la garde rapprochée du président centrafricain.

En , les mercenaires de Wagner, appuyés par deux hélicoptères Mi-8 de l'armée russe, s'engagent aux côtés de l'armée centrafricaine, des forces de la MINUSCA et des forces rwandaises contre les rebelles de la Coalition des patriotes pour le changement qui veulent prendre Bangui et empêcher la tenue des élections présidentielle et législatives[49]. Le , le Groupe de travail des Nations unies sur les mercenaires a dit sa préoccupations sur des violations répétées des droits de l'Homme par les mercenaires du groupe Wagner. Une enquête de RFI a collecté de nombreux indices, dont des documents confidentiels et des témoignages allant en ce sens[50]. Le gouvernement centrafricain a réagi en mettant en place une commission d'enquête. La Russie a dénoncé « de fausses nouvelles » qui « servent les intérêts des malfaiteurs qui complotent pour renverser le gouvernement »[51]. En , la commission d'enquête du gouvernement centrafricain sur les exactions en RCA confirme la responsabilité de membres du Groupe Wagner dans certaines des exactions commises pendant la guerre[52].

Le Service européen pour l'action extérieure affirme, dans un rapport paru en , qu'une large part de l'armée centrafricaine serait « sous le commandement direct ou la supervision des mercenaires de Wagner Group », y compris les troupes formées par l'Union européenne[53]. En conséquence, l'Union européenne suspend temporairement sa mission de formation des Forces armées centrafricaines et fixe trois conditions à la reprise de la mission. Le gouvernement centrafricain nie que les mercenaires de Wagner soient présents en RCA[54],[55].

Arrestations en Biélorussie

En , 33 hommes dont certains affiliés au Groupe Wagner sont arrêtés en Biélorussie. Ils sont accusés par les autorités biélorusses d'avoir voulu perpétrer des actions terroristes. Plusieurs analystes doutent que des mercenaires du Groupe Wagner interviennent en Biélorussie. Ces arrestations peuvent aussi être une manœuvre du président biélorusse Alexandre Loukachenko, peu avant l'élection présidentielle d'août, de se dire victime d'un complot[56],[57]. Les hommes sont accusés par les autorités biélorusses d'avoir potentiellement des liens avec Sergueï Tikhanovski, le mari de Svetlana Tikhanovskaïa, la principale candidate opposée à Loukachenko lors de l'élection présidentielle[58].

L'extradition de 28 de ces 33 hommes est demandée par le bureau du procureur d'Ukraine en août car ils sont accusés de faire partie d'« organisations terroristes » et d'avoir participé à des combats entre l'armée ukrainienne et les séparatistes de l'est de l'Ukraine (oblasts de Louhansk et Donetsk)[59].

32 hommes sont renvoyés vers la Russie le [60].

Mali

L'opération militaire française Barkhane est menée depuis 2014 dans le Sahara et au Sahel, et en particulier au Mali, pour lutter contre divers groupes armés islamistes. L'évaluation de l'appréciation et des résultats de l'opération Barkhane est controversée. En , le président français Emmanuel Macron annonce la fin de l'opération Barkhane et la réduction des troupes françaises au Mali[61].

Le gouvernement de transition malien, issu d'un coup d'État, est accusé par la France et ses alliés de se rapprocher de la Russie et du groupe Wagner pour continuer la lutte contre les groupes armés islamistes. Une crise diplomatique éclate entre la France, qui refuse l'arrivée de la Russie dans son ancienne colonie, et le Mali. Le département d'État des États-Unis avertit à deux reprises le Mali des risques financier et politique que pose le groupe Wagner[62].

Le , la France et ses alliés au sein de la Task Force Takuba considèrent que le Groupe Wagner s'est effectivement déployé au Mali et condamnent ce déploiement[63]. Le lendemain, le gouvernement malien nie que des mercenaires de Wagner soient déployés mais reconnait l'existence d'un « partenariat d'État à État » avec la Russie, « son partenaire historique », et la présence de formateurs de l'armée russe au Mali, « au même titre que la mission européenne de formation »[64],[65].

Début janvier 2022, RFI indique que 300 à 350 éléments du Groupe Wagner auraient été déployés au Mali selon une source[66]. Un premier accrochage entre des djihadistes et des mercenaires du Groupe Wagner aurait eu lieu à Mandoli, près de Bandiagara, le 3 janvier[66]. Selon Le Monde, un mercenaire russe est tué et deux autres sont blessés dans ce premier accrochage[67].

Le commandement des opérations militaires américaines en Afrique (Africom) confirme par la suite que « plusieurs centaines » de membres du groupe Wagner sont présents au Mali et que ceux-ci bénéficient du soutien logistique de l'armée russe[68].

Officiellement la junte malienne nie la présence du Groupe Wagner au Mali et affirme que les combattants russes déployés sont des militaires de l'armée régulière[69]. Cependant, le , le président russe Vladimir Poutine contredit les déclarations de la junte en reconnaissant la présence de mercenaires russes au Mali, et en affirmant que « le gouvernement russe, l'État russe n'a rien à voir avec ces entreprises qui opèrent au Mali »[69].

Ukraine

The Times affirme que lors de l'agression de la Russie contre l'Ukraine, qui a commencé le , le groupe Wagner a fait venir par avion plus de 400 mercenaires russes d'Afrique de la mi-janvier à la fin janvier dans le cadre d'une mission visant, avec l'ordre du Kremlin et de Poutine, à assassiner le président ukrainien Volodymyr Zelenskyy et son gouvernement, et ainsi préparer le terrain pour que la Russie prenne le contrôle et installe un gouvernement fantoche. Le gouvernement ukrainien ayant reçu des informations à cet égard le 26 février, il a déclaré un couvre-feu dur de 36 heures pour nettoyer la capitale des saboteurs russes[70]. La veille, le gouvernement a affirmé que ses forces avaient tué 60 saboteurs à Kiev qui se faisaient passer pour une unité de défense territoriale[71].

Exactions et crimes de guerre

Selon le témoignage à la BBC d'un ancien mercenaire, des prisonniers sont fréquemment exécutés par des combattants de Wagner, car « personne ne veut d’une bouche supplémentaire à nourrir »[21],[1].

Décapitation d'un soldat syrien

Dans plusieurs vidéos diffusées en 2019 et tournées en 2017, quatre hommes du Groupe Wagner apparaissent en torturant puis en décapitant un déserteur de l'armée syrienne à al-Chaer, près de Palmyre. Le cadavre, privé de ses bras, est ensuite pendu par les jambes et brûlé, avec, sur son torse, l'inscription « Pour les VDV ! ». Le journal russe Novaïa Gazeta identifie l'un des bourreaux grâce à l'une de ces vidéos[72],[73] mais a du mal à faire saisir de l'affaire le Comité d'enquête russe[74].

Le , le Centre syrien pour les médias et la liberté d'expression, la Fédération internationale pour les droits humains et l'association russe Memorial déposent plainte, en Russie, contre le groupe Wagner pour le meurtre de ce déserteur syrien. Les trois ONG ont la certitude que les mercenaires de Wagner agissent « sous le contrôle effectif de la Russie » et sont impliqués « dans de graves violations des droits humains contre des civils », en Syrie et ailleurs[75].

Crimes de guerre lors de la bataille de Tripoli

Le Groupe Wagner est notamment suspecté de l'exécution sommaire de trois civils le 23 septembre 2019, dans le village d'Espiaa, à 45 kilomètres au sud de Tripoli[21]. Selon la BBC, une douzaine de civils auraient été tués par les hommes de Wagner lors de la bataille de Tripoli[21].

Massacre en Centrafrique

Le groupe Wagner est soupçonné d'avoir tué plus de trente civils près de Bria à Aïgbado les 16 et 17 janvier 2022. La Minusca a entrepris d'évaluer les faits[76].

Morts de journalistes enquêtant sur le groupe

Chute du balcon de Maxime Borodine

En , le journaliste d'investigation russe Maxime Borodine meurt à la suite d'une chute de balcon inexpliquée alors qu'il enquêtait sur les activités du groupe Wagner dans le Donbass et en Syrie. La justice russe décide de ne pas ouvrir d'enquête criminelle en évoquant un suicide, mais selon ses proches, Maxime Borodine se disait suivi depuis la veille par des hommes en tenue camouflage et par un homme masqué probablement armé. Il n'a pas non plus laissé de lettre expliquant un éventuel suicide. Sa mort a été qualifiée de très préoccupante par l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe[77],[78].

Centrafrique

En , trois journalistes russes - Orhan Djemal, Alexandre Rasstorgouïev, Kirill Radtchenko - sont assassinés dans le nord du pays dans des circonstances non éclaircies, alors qu'ils enquêtaient sur les activités du Groupe Wagner[79],[80].

Notes et références

Documentaires

  • Wagner, les hommes de l'ombre de Poutine, Le monde en face 2022, par Alexandra Jousset et Ksenia Bolchakova, 80 min[81]

Références

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Annexes

Liens externes