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Responsabilité sociétale des entreprises

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La responsabilité sociétale des entreprises (RSE, en anglais corporate social responsibility, CSR) désigne la prise en compte par les entreprises, sur base volontaire, et parfois juridique[1], des enjeux environnementaux, sociaux, économiques et éthiques dans leurs activités. Les activités des entreprises sont ici entendues au sens large : activités économiques, interactions internes (salariés, dirigeants, actionnaires) et externes (fournisseurs, clients, autres)[2].

L'enjeu de la RSE résulte au départ de demandes de la société civile (associations religieuses, écologiques, humanitaires ou de solidarité) d'une meilleure prise en compte des impacts environnementaux et sociaux des activités des entreprises, qui est née, notamment, des problèmes d'environnement planétaire rencontrés depuis les années 1970. La RSE trouve aussi une inspiration dans la philosophie « agir local, penser global » (René Dubos). Il s'agit alors d'intégrer le contexte mondial et local dans la réflexion stratégique.

La RSE est donc souvent comprise comme la mise en œuvre dans l'entreprise des concepts de développement durable, qui intègrent les trois piliers environnementaux, sociaux, et économiques. Elle a été à l'ordre du jour du sommet de la Terre de Johannesburg en 2002, auquel ont participé de grandes entreprises, en particulier françaises, des secteurs de l'environnement et de l'énergie.

La RSE tend aussi à redéfinir les responsabilités, c'est-à-dire les devoirs des entreprises vis-à-vis de ses parties prenantes : au-delà des controverses sur cette notion de « partie prenante », l'enjeu, très présent dans la norme ISO 26000, est notamment d'organiser les devoirs de l'entreprise vis-à-vis de personnes ou groupes qui ne peuvent pas faire valoir de contrats (salarial, commercial…) ni de réglementation pour faire valoir leur demande auprès d'une entreprise.

Histoire

Le concept de RSE apparaît à partir des années 1960 dans la littérature consacrée aux entreprises (Social Responsibilities of the Businessman de H. Bowen en 1953, et The Responsible Corporation par G. Goyder en 1961)[3]. Il a depuis fait l'objet d'une élaboration théorique chez plusieurs chercheurs anglophones et francophones (voir, notamment les travaux de l'École de Montréal et ceux qui se réfèrent à la Théorie de la régulation[4]).

Définition théorique et pratique de la RSE

La RSE se définit d'abord par rapport à la notion de responsabilité. Elle consiste donc à la fois en un « devoir de rendre compte de ses actes » (enjeu du reporting, des audits, etc.) et « d'en assumer les conséquences » (enjeu des actions en réparation et en prévention). Cette définition n'est cependant opératoire qu'après avoir précisé : 1) par rapport à quels acteurs sociaux ce devoir existe et 2) quelle est la nature des actes et des conséquences que l'entreprise doit assumer. D'où l'importance accordée par la norme ISO26000 (inspirant les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance) à la place des parties prenantes dans la gouvernance de l'entreprise, au « dialogue » avec les parties prenantes avec lesquelles se construit, de façon coopérative ou conflictuelle selon le cas, ce devoir de RSE pour chaque entreprise. De ce fait, le caractère « volontaire » revendiqué pour les démarches RSE (voir par exemple les positions de la Commission européenne) ne se comprend que par opposition à des exigences réglementaires : en pratique, c'est aussi souvent sous la contrainte économique (de ses clients ou de ses donneurs d'ordres, par exemple) qu'une entreprise investit pour améliorer sa RSE.

Une conception dominante en France définit le contenu de la RSE en rapport avec la notion de développement durable, déclinée au niveau des entreprises, comme le confirme une recommandation du Ministère français de l'écologie et du développement durable[5]. Le lien entre cet objectif macrosocial et la satisfaction des parties prenantes de l'entreprise est toutefois assez complexe, d'autant que le développement durable ne dépend pas exclusivement des entreprises mais de l'ensemble des agents économiques.

La Commission européenne propose les critères suivants :[réf. souhaitée]

  1. La RSE couvre les matières sociales et environnementales.
  2. La RSE n'est pas et ne devrait pas être séparée de la stratégie et des opérations commerciales : puisqu'il s'agit d'intégrer les préoccupations sociales et environnementales dans ces stratégies et opérations.
  3. La RSE est un concept volontaire.
  4. Un aspect important de la RSE est la manière dont les entreprises interagissent avec leurs parties prenantes internes et externes (employés, clients, voisins, ONG, autorités publiques, etc.).

La responsabilité sociétale des entreprises ne devrait pas être confondue avec le mécénat. En effet, alors que le mécénat est mené de manière séparée de l'activité quotidienne de l'entreprise, la RSE devrait s'appliquer d'abord au cœur de métier de l'entreprise, dans les domaines où elle est reconnue comme efficace[6], même si les directions d'entreprise incluent souvent aussi leurs actions « pour la communauté ».

En pratique, la mise en œuvre d'une RSE consiste à produire un progrès continu dans les domaines du social, de l'environnemental et de l'économique. Elle couvre, par exemple, la qualité globale des filières d'approvisionnement, de la sous-traitance, le bien-être des salariés, leur santé, l'empreinte écologique de l'entreprise, etc. Cette mise en œuvre demande donc, outre une bonne perception de l'environnement de l'entreprise, des compétences en conduite du changement pour intégrer l'intérêt des parties prenantes, une connaissance fine des enjeux planétaires et de leurs déclinaisons politiques et réglementaires, et enfin, une connaissance des solutions techniques et managériales qui contribuent à l'amélioration des processus sanitaires, environnementaux et sociaux dans les organisations.

La RSE et le développement durable font l’objet de multiples controverses. Pour ses détracteurs, ces notions cachent une forme sophistiquée de manipulation. Ainsi, les démarches de RSE n'incluent pas le domaine du civisme fiscal, alors que de très nombreuses multinationales passeraient sous silence leurs pratiques d'optimisation fiscale, voire de fraudes, pour échapper à l'impôt[7]. Pour leurs promoteurs, c'est au contraire la preuve de la capacité des dirigeants d'entreprise à assumer, sans réglementation supplémentaire, des défis sociétaux. Les controverses sur la définition de la RSE et le contrôle de la réalité des pratiques participent donc d'une redéfinition de la conception actionnariale de l'entreprise, au niveau national et multinational (voir la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale sur le devoir de vigilance des sociétés-mères à l'égard de leurs filiales), et plus largement d'une reconstruction du contrat social[8].

Enjeux, gouvernance, typologie des critères

Gouvernance

La RSE se traduit ou devrait se traduire de différentes manières :

L'approche RSE peut permettre de mettre en œuvre, entre autres, de nouvelles régulations et une meilleure gouvernance d'entreprise, que l'entreprise soit grande, moyenne ou petite, dans les pays développés, comme dans les pays en développement. Son avantage résiderait en l'instauration d'une meilleure « contextualisation » des activités économiques des entreprises, une meilleure structuration des relations avec les parties prenantes, et théoriquement une meilleure gouvernance d'entreprise. Chaque entreprise adapte cette démarche à son rythme et selon sa culture[13].

La RSE et les organismes internationaux

Ce concept se développe dans le monde industrialisé à l'initiative d'organisations intergouvernementales ou régionales, à l'échelle mondiale ou régionale. Il se traduit par différents niveaux d'obligations qui prennent la forme de recommandations, de normes volontaires voire se trouvent imposées à divers degrés dans certaines législations nationales.

Parmi ces organismes inter-gouvernementaux :

Au sommet de la Terre de Johannesbourg en 2002, les thèmes de RSE ont été mis sur le devant de la scène par la participation d'entreprises, (notamment françaises du secteur des services environnementaux et de l'énergie) au côté des représentants officiels.

  • La Banque mondiale ou BM : la BM a également publié des recommandations, et a créé un cours pour sensibiliser les entreprises en vue de leur permettre de mettre en œuvre le concept de RSE. Ce cours a déjà été donné à 12 000 personnes[Quand ?] partout dans le monde[réf. nécessaire].
  • L'OCDE : Les principes directeurs, précurseurs car rédigés en 1976, révisés en 2000 sont des simples recommandations, des lignes directrices que les gouvernements adressent aux entreprises multinationales. Ils n'ont pas de pouvoir contraignant.
  • L'Union européenne : la Commission européenne défend une politique volontariste dans le domaine de la RSE ou CSR (Corporate Social Responsibility) via sa Direction générale entreprise[14] depuis son premier livre vert en 2001, suivi d'une communication en 2002 renouvelée en 2006. L'approche interactive entre toutes les parties prenantes est promue avec la mise en place d'un forum dédié entre 2002 et 2004 puis d'une "alliance"[15]. Les PME sont désormais également impliquées et deviennent des acteurs à part entière, compte tenu de leur omniprésence dans le tissu économique européen des 25 États membres. Un programme spécifique[16] leur est consacré.

À la lecture de la dernière communication de la Commission européenne de 2006, le Parlement européen a confirmé dans des débats qui se sont tenus le 12/03/2007 qu’il est en attente d'un nouveau partenariat[17].

Outils, normes et notations en faveur de la RSE

Depuis les années 1980, sous l'impulsion notamment des ONG, les concepts de finance éthique, commerce équitable, développement durable étaient entrés dans le débat des instances politiques. Celles-ci ont fait appel aux universités et centres de recherches afin de faire des études pour développer des outils pour identifier le niveau de responsabilité des entreprises[18].

Des recherches se sont concrétisées pour la RSE par la mise au point de référentiels internationaux (GRI), des codes de conduite des entreprises (Global compact) ou des certifications, normes ou labels (SA8000…) jusqu'aux audits sociaux ou environnementaux. Par ailleurs, différents outils pratiques existent pour faciliter l’intégration de ces normes à différents échelons dans les entreprises. Lors des procédures d’appels d’offres par exemple, certaines entreprises utilisent aujourd’hui une encyclopédie exhaustive des clauses d’achats durables[19].

Depuis 2000, l'Europe œuvre pour développer des outils pour fixer des normes concernant la RSE[20].

Grands référentiels

Pacte mondial

Le Pacte mondial (Global Compact) est lancé en janvier 2000 lors du Forum économique mondial par Kofi Annan. Le pacte mondial[21] est un code de conduite qui comprend 10 principes que les entreprises doivent s'engager à respecter. Sans les énumérer, deux de ces principes concernent les droits de l'homme, quatre les normes de travail, trois l'environnement et le dernier la lutte contre la corruption.

ISO 26 000

Cette norme, publiée le [22] précise l'intégration des normes de responsabilité sociétale, de gouvernance et d'éthique d'une manière plus élargie. Il ne s'agit pas d'une norme certifiable[23], mais d'un guide de lignes directrices proposé aux entreprises et organisations. Le terme de Responsabilité Sociale des Entreprises est ainsi élargi dans cette norme à celui de Responsabilité Sociale (ou sociétale) des Organisations (RSO).

Global Reporting Initiative

Le Global Reporting Initiative (GRI) a été initiée en 1997 par le Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) et de la Coalition for Environmentally Responsible Economies (CERES)[24]: l'objectif est d'élaborer des lignes directrices et une standardisation de normes pour la rédaction de rapports environnementaux et sociaux.

Autres outils

  • Système de management environnemental et d'audit (EMAS) de l’Union européenne[25] : Le règlement détaillant les procédures pour la participation volontaire des entreprises à ce système d'audit sur leur management environnemental et la mise à disposition du public des résultats. Les états membres font la promotion d'EMAS à leur niveau. Il existe un logo EMAS.
  • Le standard SA 8000 (en anglais Social Accountability Standard 8000) : ce standard a été initié par le Council on Economic Priorities. Il est géré par SAI : il concerne les conditions de travail, l'interdiction du travail des enfants, du travail forcé... Il existe deux types d'engagement pour les entreprises : le certificat en cas de respect des normes pour la production, le statut membre si les critères sont respectés également pour les filières de fournisseurs et pour toutes les unités de production.
  • La norme ISO 14001 : cette norme vise à mesurer l'impact de l'activité d'une entreprise sur l'environnement. Initiée en 1996, révisée en 2015. Elle prend en compte des aspects environnementaux significatifs : les émissions dans l'air, les rejets dans l'eau, la contamination des sols, la gestion des déchets, l'utilisation des matières premières et des ressources naturelles. (voir aussi la série des normes ISO 14000)[26]
  • La norme Synergy Codethic 26000 : publiée en septembre 2011 par SYNERGY Global Standarization Service, elle est conçue comme une norme ISO avec un système de management - et donc, certifiable - pour la prise en compte de la performance en management des enjeux du développement durable dans la stratégie des organisations. Elle est applicable à tout type d'organisation, de secteur et d'industrie.[pertinence contestée]
  • Le référentiel RSE 26001 : référentiel de système de management de la RSE certifiable publié en 2013 qui se base sur la norme ISO 14001 étendue à la RSE, en incluant les mécanismes de l'ISO 26000[27].
  • La SD 21000 Française : publiée en mai 2003 par l'AFNOR (Christian Brodhag, président de la commission), elle est conçue comme un guide - et donc, non certifiable - pour la prise en compte des enjeux du développement durable dans la stratégie et le management de l'entreprise. Surtout utilisée dans le cadre des Petites et moyennes entreprises, elle pourrait inspirer la future ISO 26000… Deux documents sont disponibles : X30 021 le texte général et X30 023 la méthode de hiérarchisation des enjeux.
  • SPI-Finance : adaptation du GRI au secteur de la finance.
  • La Chambre de commerce internationale (CCI)[28] a publié une Charte des entreprises.
  • La Confédération générale des entreprises du Maroc a mis en place le Label CGEM pour la Responsabilité Sociale de l’Entreprise.

Label responsabilité sociale des centres de relations clients (France)

Créé le sous l’égide du Ministère du travail, de l’emploi et de la cohésion sociale, de l’AFRC (Association française de la relation client) et du SP2C (Syndicat des professionnels des centres de contacts), le « Label responsabilité sociale » se positionne comme le garant éthique des bonnes pratiques sociales des acteurs de la chaîne de la relation clients.

En 2007, la légitimité du « Label responsabilité sociale » fut renforcée par la création d’une association destinée à la promotion et au développement de la responsabilité sociale des entreprises dans le secteur de la relation clients : l'ALRS, Association pour la promotion et le développement du Label responsabilité sociale.

En 2009, les critères d'évaluation (mesurés par 2 cabinets d'audits indépendants) portaient sur :

  • Le recrutement
  • L'accueil et l'intégration des salariés
  • Le suivi de carrière
  • L'intégration des travailleurs handicapés
  • La reconversion et la fidélisation des salariés
  • Le baromètre social de l'entreprise
  • Le dialogue social
  • L'analyse détaillée du processus de formation
  • La surveillance et l'observation électronique et vie privée - CNIL
  • Les conditions de travail
  • La responsabilité sociale de l'entreprise

Depuis les années 2010, ce label a gagné en notoriété parmi les centres de relations clients internalisés (Insourcers), externalisés (Outsourcers) mais aussi parmi leurs donneurs d'ordre, qui représentent les 3 acteurs habilités à solliciter ce Label, accessible aux petits Outsourcers de 40 salariés (SCOP A Cappella à Amiens) comme aux multinationales (EDF, Orange, etc.), ces derniers pouvant être certifiés sous les 3 statuts.

Ce Label s'inscrit dans la lignée des labels et certifications de la responsabilité sociale, qui ont inspiré la Norme ISO 26000.

Mesure, tableaux de bord

Les entreprises, dans le cadre de leurs programmes de développement durable, mettent en place des tableaux de bord, contenant selon les quatre types déjà mentionnés : environnementaux, sociaux, économiques et de gouvernance, jusqu'à une centaine d'indicateurs de gestion.

Pour la conception des tableaux de bord, voir :

En France, lorsque l'activité de l'entreprise est stratégique du point de vue du développement durable (secteur des services environnementaux ou de l'énergie), elle fait certifier ses comptes par des Commissaires aux comptes.

Agences de notation

Créées à la fin des années 1990, des agences de notation sociale et environnementale[29] évaluent et notent les entreprises, selon leur propre méthodologie. Une agence de notation se base sur les documents publics, des questionnaires et des résultats d'entrevue avec les responsables d'entreprise. Elle doit aussi disposer d'une méthodologie, objet d'un travail de recherche en amont, sur la cohérence entre les questions posées et les objectifs recherchés au regard du développement durable (notamment au regard de l'agenda 21, mais plus généralement, en fonction des critères que souhaite favoriser l'investisseur. Des travaux de fond ont été entrepris en France dans les années 2001 à 2003 sur ce point[30].

Aspects médiatiques de la RSE

Partenariat ONG - secteur des entreprises et pouvoirs publics

  • Les valeurs ajoutées d'un partenariat avec une ONG

Dans leur partenariat avec des entreprises qui souhaitent mettre en place des actions de RSE, les ONG peuvent jouer des rôles :

  • d'expert technique,
  • d'intermédiaire social,
  • et parfois de caution auprès du grand public.

Quelques actions, campagnes concrètes :

  • Consumer Charter for Global Business élaborée par Consumers International, ONG regroupant 200 associations de consommateurs.
  • Clean Clothes Campaign, campagne vêtements propres, une initiative européenne lancée en 1998 concernant l’industrie textile, dotée d'un code de conduite.
  • Ethical Trading Initiative, au Royaume-Uni promue par un partenariat entre ONG, syndicat et secteur privé.
  • Solidaritest a été élaboré en Belgique par un consortium d'ONG et d'entreprises. C'est un concours qui évalue et récompense les pratiques de RSE des entreprises établies sur le territoire belge.

Dans le domaine du commerce équitable, citons aussi par exemple le Fairtrade Labelling Organizations.

Communication à la société civile

Les sociétés les plus incitées à communiquer sur ce sujet sont celles qui y sont obligées comme les sociétés cotées du CAC 40 en France dont les actions RSE sont suivies de près. Comme tout processus de communication, la communication dite sociétale (ou éco-communication[31]) est un processus très complexe, qui peut induire certains risques. Mais les PME voire les TPE s'emparent quelquefois d'une communication RSE, de surcroit lorsque leurs produits et services sont marketés verts et/ou engagés socialement et que leur exemple est institutionnalisé comme une illustration de bonnes pratiques[32].

Communication externe sur la RSE

Les études sectorielles sur la communication RSE sont en cours en particulier dans le cadre du programme RARE où les premières études concernant les secteurs bancaire, pétrochimique et de la pêche démontrent une profusion d'outils pour une efficacité qui reste à démontrer même si « l'attention rhétorique croissante à la RSE et le poids correspondant donné aux instruments RSE ont contribué à certains de ces changements en pratique »[33][réf. incomplète].

Une communication mensongère vis-à-vis des allégations RSE, donc de ces impacts les plus significatifs, est couramment qualifiée de « Greenwashing », en français écoblanchiment. C'est le cas si le message qu'elle émet est considéré comme trompeur au regard des articles L.121-1 à L.121-7 du code de la consommation[34]. En France, l'ARPP (Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité) est l'association compétente pour viser le message d'un annonceur en amont ou aval de sa diffusion. Indépendante des pouvoirs publics, elle dispose de différentes instances consultatives concernant la déontologie des messages publicitaires émis par les entreprises.

Les destinataires potentiels des rapports de développement durable étant nombreux, leurs intérêts très diversifiés, il existe un risque sur le patrimoine informationnel de l'entreprise, ainsi que sur une éventuelle mauvaise interprétation, volontaire ou non (voir biais cognitif) des informations diffusées. Rien n'empêche au demeurant ces destinataires de recouper l'information lors de son appropriation et d'interroger directement les entreprises sur certains points obscurs ou insuffisamment renseignés. Le récepteur passe alors en mode émetteur dans l'interactivité des parties prenantes qui est revendiquée par ailleurs dans la gouvernance de la RSE.

L'élément RSE représente 9 % de l'information publiée par les sociétés cotées indique l'Autorité des Marchés Financiers fin 2013. L'autorité financière estime toutefois que les sociétés doivent adopter une démarche plus pragmatique dans leur manière de communiquer sur la RSE (hiérarchie des informations)[35].

Aspects juridiques de la RSE

À l'échelle internationale

La RSE demeure avant tout un concept de soft law qui ne peut a priori engager directement la responsabilité juridique de l'entreprise, personne morale puisqu'elle repose sur une approche volontaire[36]. La doctrine observe cependant que la force contraignante de la RSE en tant que concept parapluie peut apparaître en termes de hard law, dès lors que la RSE fait référence à une obligation résultant du droit des traités, de la loi voire se voit confirmée par le juge comme une obligation unilatérale qui lie son auteur, l'entreprise en l'occurrence[37].

En Europe, le Danemark est le premier pays à avoir imposé un reporting environnemental à ses grandes entreprises comme une obligation légale incontournable, l'intégrant ainsi dans le droit positif. La France a fait de même (voir infra). Le Royaume-Uni et la Belgique pourraient modifier également leur droit des sociétés en introduisant une exigence identique de RSE dans la documentation de leurs actionnaires.

Le Parlement européen dans son dernier débat de sur la RSE à la suite de la communication 2006 de la Commission sur le sujet a souhaité une modification de la directive droit des sociétés dans ce sens. Comme le rappelle le point 27 de sa résolution :

« [le Parlement] rappelle à la Commission que le Parlement l'a invitée à présenter une proposition de modification de la quatrième directive 78/660/CEE du Conseil du 25 juillet 1978 fondée sur l'article 54 paragraphe 3 sous g) du traité concernant les comptes annuels de certaines formes de sociétés (18) (quatrième directive sur le droit des sociétés) visant à inclure les informations sociales et environnementales à côté des informations financières. »

Assistera-t-on à une généralisation de l'obligation pour les sociétés cotées dans les 27 États membres de l'Union européenne ?

En France, obligation d'information pour les sociétés cotées, et bientôt pour des sociétés non cotées

Obligation légale

En France, la loi Grenelle I et surtout la loi Grenelle II (respectivement adoptée en 2009 et 2010, et issues du processus du Grenelle de l'environnement de 2007) renforcent fortement les devoirs des entreprises et les exigences de publication en matière de RSE et de responsabilité environnementale ou sociétale, en l'étendant aux sociétés non cotées, et avec une volonté de transparence, vérifiabilité, certification par un « tiers indépendant ». La loi vise aussi une comparabilité des rapports par des méthodes communes de calcul et d'évaluation. Des sanctions sont prévues pour les entreprises ne répondant pas aux exigences de la loi. Un décret doit préciser le contenu et les modalités du reporting et des contrôles et sanctions éventuelles.

Antérieurement, les exigences de RSE ne s'étaient traduites que par un article de loi concernant les entreprises cotées, les autres ne répondant qu'à des logiques de volontariat ou à de simples recommandations.

Ainsi, l'article 116[38] de la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE) votée en 2001 demande que les entreprises cotées en bourse indiquent dans leur rapport annuel une série d'informations relatives aux conséquences sociales et environnementales de leurs activités[39].

Le rapport exigé du législateur « indique l'importance de la sous-traitance, et la manière dont la société promeut auprès de ses sous-traitants et s'assure du respect par ses filiales des dispositions des conventions de l'Organisation Internationale du Travail. Il indique en outre la manière dont les filiales étrangères de l'entreprise prennent en compte l'impact de leurs activités sur le développement régional et les populations locales. »

Certaines entreprises soumises à ces obligations les ignorent ou les appliquent partiellement. Ainsi, une enquête[40] faite en 2008 par TNS Sofres auprès de 430 dirigeants de multinationales françaises sur leurs actions en matière de Responsabilité Sociale de l'Entreprise (RSE) et la protection de la santé des collaborateurs à l’international a montré que les fonctions de direction générale et les fonctions RSE, pour la plupart, ne faisaient pas le lien entre les deux problématiques.

Mise en œuvre de cette obligation

Méthodes et limites de l'obligation

Chaque société cotée dispose d'une entière liberté méthodologique pour remplir son obligation. Cette liberté tient à la spécificité de chaque entreprise dans la description de ses activités et ses impacts en termes qualitatifs qui déterminent la grille quantitative.

L'entreprise doit ainsi fournir des informations concrètes et si possible quantifiées sur :

  • le pilier environnemental (compatibilité environnementale, réalisation d'objectifs quantitatifs, etc.)
  • le pilier social (accidents, lutte contre les discriminations par exemple, engagements en matière de formation, etc.)

Pour renforcer l'objectivité des rapports, des sociétés d'audit et de notation sociale se sont créées pour vérifier la véracité de ces données et des méthodes pour les établir. Les commissaires aux comptes sont également signataires de rapport d'examen sur les indicateurs sociaux et environnementaux outre les indicateurs comptables et financiers permettant d'apprécier la qualité de l'information rapportée.

La loi ne précise pas les conditions de responsabilité juridique des dirigeants en cas de manquement à cette obligation de communication, compte tenu de la difficulté qu'aurait un juge à apprécier le caractère exhaustif d'une telle information ; on compte sur les exigences des actionnaires et d'une manière plus générale des marchés financiers via l'approche de l'ISR, l'information financière se tournant de plus en plus sur des éléments qualitatifs.

Dans l'absolu, il est permis de douter de l'efficacité pratique d'une sanction d'une telle obligation légale, dans la mesure où le capital immatériel des entreprises n'a pas fait l'objet d'une structuration préalable identique. La loi demande de communiquer des informations à caractère qualitatif et extrêmement hétérogènes dans leur définition au-delà des frontières nationales. Les nouvelles normes comptables IAS/IFRS peuvent également produire des effets de distorsion dans l'appréhension de cette information. Cependant, l'information produite par ces rapports ont la vertu par l'effet de transparence et d'antériorité créés d'une plus grande information des parties prenantes et en premier lieu des actionnaires pour qui l'investissement socialement responsable est un critère clef.

La limite principale consiste dans le fait que l'auditeur est payé par son client, l'audité, par conséquent, il n'a pas intérêt à le perdre en lui attribuant une note basse ou en lui refusant la certification. Il s'agit donc d'une privatisation de la régulation.

Retour d'expérience depuis 2005

Les premiers retours d'expérience de 2005 indiquent que malgré des formats différents et des hésitations sur le contenu informationnel des rapports environnementaux et sociaux, les sociétés françaises du CAC 40 (grandes entreprises) ont dans 90 % des cas appliqué la loi. Pour s'assurer de la fiabilité de ces rapports, plus de 53 % d'entre elles les font vérifier par un cabinet d'audit[41]. Au-delà de la contrainte légale, l'affichage d'objectifs stratégiquement validés peut être une source de productivité économique, d'efficacité sociale et d'éco-compatibilité environnementale.

En 2006, selon Jean-Denis Errard, directeur de projet de Capitalcom, une régression semble se dessiner pour cette cible qui ne constitue qu'une part des sociétés cotées sur le respect effectif de cette obligation. « […] Il s'agit là d'une obligation légale inscrite dans le code de commerce (article L. 225-102-1). Force est de dire que cette obligation est encore loin d'être respectée. […] Alors que les groupes du CAC 40 sont ordinairement à la pointe de la qualité de l'information financière, onze d'entre eux ne satisfont pas aux obligations légales du code de commerce »[42]. Ainsi, seulement 83 % des sociétés cotées auraient en 2006 appliqué la loi.

Un dernier bilan sectoriel dans le secteur des médias français de confirme les réticences de certaines sociétés cotées (CAC 40 mais surtout SBF 120) à prendre en compte sérieusement cette obligation légale par une information étayée.

2009 est peut-être une année de basculement pour le CAC 40. Pour Caroline de La Marnierre, présidente de Capitalcom avec une nouvelle étude parue en décembre :

« La forte montée en puissance de la prise en considération des enjeux extra-financiers aux plus hauts niveaux hiérarchiques des entreprises, depuis 2 ans, démontre que l’on s’achemine à grands pas vers la convergence des stratégies financières et extra-financières. Le reporting ne se restreint donc plus aux seuls résultats financiers, car de plus en plus d’entreprises communiquent sur des objectifs sociaux et environnementaux chiffrés. 5 groupes se révèlent même exemplaires et précurseurs, notamment en indexant une part de la rémunération des managers sur des critères extra-financiers et en instaurant au sein du Conseil d'administration un comité chargé de la stratégie de développement durable : GDF SUEZ, Danone, Total, Lafarge et Suez Environnement. »

Le délégué interministériel au développement durable, les ministres chargés de l’environnement, du travail et des finances ont demandé à l’IGE, à l’IGAS et au CGM de faire un point sur la mise en œuvre de cette obligation, et sur l’intérêt d’en élargir le champ.

Le rapport (IGE/06/050) du [43], constatait :

  1. […] une évolution favorable, quoique lente, de la situation, la moitié environ de ces entreprises remplissant aujourd’hui peu ou prou leurs obligations. Cette lenteur tient moins à la difficulté et au coût de l’exercice qu’à la faible pression de la société civile.
  2. Le cadre réglementaire n’est plus remis en cause aujourd’hui et le rapport ne critique pas ses souplesses. Il n’est donc pas proposé de le remettre en cause, mais d’en diffuser un mode d’emploi détaillé et de faire éventuellement appel aux commissaires aux comptes.
  3. Les rapporteurs ne jugent pas non plus opportun d’en étendre le champ d’application tant que l’intégralité des assujettis ne le respecteront pas. Ils suggèrent par contre de demander à l'État et à ses établissements publics de montrer l’exemple en publiant des informations sociales et environnementales et d’inviter les collectivités locales à faire de même. Ils suggèrent aussi de renforcer la présence française dans les démarches européennes et internationales en la matière.

Début 2011, Lors de l’audition de Nathalie Kosciusko-Morizet par l’Assemblée, le député UMP Bertrand Pancher a dénoncé les « pressions » exercées par les lobbies des entreprises pour faire rehausser de 500 à 5000 salariés le seuil à partir duquel elles devront inclure un volet développement durable à leur rapport annuel[44]. Un collectif de quinze organisations (écologistes, syndicales et caritatives) a demandé au Premier ministre de promulguer la loi en l’état[44].

De son côté FNE dénonce aussi le fait que « La loi sur la régulation bancaire et financière adoptée au Sénat récemment supprime la possibilité créée par la loi Grenelle II pour les syndicats et les associations de donner les avis sur le rapport RSE des entreprises »[45].

En 2014, dans le cadre d'une transposition de la directive européenne sur le reporting extra-financier en préparation, et après un an de réflexion conduite par la Plateforme RSE, plateforme nationale d'actions globales pour la responsabilité sociétale des entreprises[46], une réunion plénière () a rendu de premières conclusions en 46 pistes de recommandations[47],[48].

Développement d'événements autour de la RSE

La RSE n'est plus un sujet oublié ; Aujourd'hui, les médias, les dirigeants, les salariés, et l'ensemble des parties prenantes s'intéressent aux enjeux du développement durable et à l'impact de leur entreprises. Salons, conférences, campagnes de sensibilisation ou encore articles de presse se développent dans le monde, à l'image du salon PRODURABLE organisé au Palais des Congrès au mois d'avril dernier pour sa 12e édition. Réunissant les professionnels du développement durable et de la RSE et accueillant plus de 8000 visiteurs avec près de 130 conférences, il fut tourné en 2019 autour du bien être au travail, de la numérisation et des consommations responsables[49].

Aspects opérationnels de la RSE : questions de fond

La mise en œuvre opérationnelle de la responsabilité sociétale dans les entreprises est redoutablement complexe. Elle pose plusieurs questions de fond, dont voici les grandes lignes.

Aspects communication

Les entreprises peuvent être tentées d'adopter une stratégie de communication superficielle, et ne pas traiter les risques en profondeur. Cette attitude peut être dangereuse en cas de menaces avérées. La bonne attitude consiste à faire une veille sur les informations environnementales, à les traiter dans un processus d’intelligence économique et de gestion des connaissances, puis à communiquer[50].

Pour d'autres[51], la RSE est une nouvelle forme de communication manipulatrice et cynique à bon compte des entreprises : la seule raison pour laquelle les entreprises mettraient en place des projets de RSE serait une raison utilitaire, avec un bénéfice commercial dans l'amélioration de leur réputation auprès du public et des gouvernements.

Si la communication est faite sans structuration préalable des informations, cela peut discréditer l'entreprise.

Des territoires mettent également ce concept de responsabilité environnementale, économique et sociétale au coeur de leur stratégie de communication: L'exemple du Conseil Départemental des Vosges avec Evodia[52].

Aspects culturels

La mise en œuvre de la RSE demande de changer certains référents sur l'attitude par rapport aux risques, notamment écologiques et industriels. Certaines mentalités peuvent avoir tendance à biaiser ce type d'approche : on va alors constater des comportements de type sophisme, biais cognitif, ou biais culturel. En psychologie sociale, les résistances rencontrées correspondent à des mèmes. Les aspects culturels sont d'autant importants que la RSE s'applique à une échelle transnationale.

Aspects éthiques et juridiques

La complexité du droit est une difficulté. Les questions qui se posent sont :

Aspects macroéconomiques et financiers

La mise en œuvre de programmes transversaux dans l'ensemble des entreprises nécessite d'appliquer des normes, qui touchent à la structure du droit, à l'économétrie (comptabilité nationale), à la finance de marché, notamment. Cette mise en œuvre peut s'avérer complexe, et ne pas dépendre exclusivement de l'entreprise. Les aspects institutionnels sont très importants.

La RSE peut aussi être liée au concept d’investissement socialement responsable (ISR)[53],[54]. L'ISR est l'application des principes du développement durable aux placements financiers. En 2013, l'Association Française de la Gestion financière (AFG), qui réunit les acteurs du métier de la gestion, et le Forum pour l'investissement responsable (FIR) qui réunit les acteurs de l'ISR, ont donné une définition précise de l'ISR qui est la suivante :

« L'ISR (Investissement Socialement Responsable) est un placement qui vise à concilier performance économique et impact social et environnemental en finançant les entreprises et les entités publiques qui contribuent au développement durable quel que soit leur secteur d'activité. En influençant la gouvernance et le comportement des acteurs, l'ISR favorise une économie responsable[55]. »

Pour certains, l'ISR est même « la déclinaison financière et spéculative du développement durable »[56].

Les investisseurs qui proclament cette démarche — banques, établissements financiers et autres fonds financiers (retraite, épargne salariale, etc.) — définissent généralement leurs propres engagements en matière de RSE avec une communication RSE spéciale[57].

L'interaction entre les concepts de RSE et de l'ISR, tant du côté de l'entreprise qui fait appel à l'épargne que du côté de celui qui apporte cette épargne publique réside essentiellement dans leur convergence conceptuelle qui reste à démontrer au cas par cas.

Aspects management

La mise en œuvre de la RSE nécessite une approche transversale et horizontale, donc une certaine culture stratégique au sein des entreprises. Les directions fonctionnelles de marketing, de ressources humaines, de comptabilité, financière mais aussi stratégique sont amenées à faire une lecture du développement durable et dérouler un plan qui favorise la RSE à travers leur spécialité[58]. On constate néanmoins en pratique une fragmentation des visions, responsabilités et actions entre les qualiticiens (normes), les responsables de la veille ou de l'intelligence économique, les risk managers, les responsables des programmes de gestion des connaissances, les organisations de maîtrise d'ouvrage des systèmes d'information, les juristes, les responsables de la communication, etc. Organiser ce type de programme est très complexe et suppose une coordination hors pair du responsable RSE ou développement durable de l'entreprise qui s'engage par des actions concrètes et vérifiables.

La dimension ressources humaines de la RSE nécessite, pour certains auteurs, une révolution culturelle qui passe par une prise en compte de la vulnérabilité des salariés. Il s'agit non seulement d'en prendre la mesure mais aussi de valoriser le parcours de ces personnes[59].

Pour les directions achat des entreprises ou des établissements publics, la RSE pose également des difficultés culturelles et temporelles. Il faut passer d'une logique d'appels d'offres réguliers (Avec changement de fournisseur) à une logique de relation de collaboration à long terme. La plate forme PEAK a lancé un programme de recherche pluri annuel pour développer des outils qui aideront les acheteurs à s'engager dans une démarche RSE.

Aspects souveraineté

Dans les secteurs de l'énergie et de l'environnement, ou dans d'autres secteurs de souveraineté, qui sont les principaux concernés, la mise en œuvre de la RSE est délicate du point de vue des enjeux de communication.

La norme ISO 26000 pourra potentiellement constituer une grille de références à l'analyse de l'action opérationnelle de l'entreprise comme de toute autre organisation au-delà de l'analyse des performances économiques, sociales et environnementales suivies dans le cadre des indicateurs du rapport développement durable lorsque celui-ci existe.

Aspects formations

La formation à la RSE est par essence transverse à l'ensemble des fonctions de l'entreprise. Depuis quelques années, les universités et les grandes écoles françaises proposent des formations généralistes comme spécialisées. Celles-ci sont notamment axées sur les aspects Reporting du développement durable (rapports d'activité extra-financiers avec indicateurs de suivi et de résultat), Ressources humaines (gestion de la diversité, lutte contre les discriminations, climat de travail), et Éthique (déontologie des affaires, chartes éthiques). De par l'éventail et la transversalité des sujets abordés, les programmes se situent de façon générale au niveau Master(bac +4/bac +5).

RSE à double face

La RSE est à découvrir au sein de chaque entreprise. Comme un Janus à double face, la RSE est paradoxale: certains acteurs ont tendance à créer un double langage entre discours et réalité alors que pour d'autres, elle constitue un engagement réel parce que volontairement soumis à des formes d'audits externes ainsi qu'au débat avec les parties prenantes. Cette seconde attitude serait pour certains auteurs une condition de survie pour les entreprises dans un environnement global et compétitif[60].

Paradoxe créé par le double langage de certaines entreprises

Certains exemples de paradoxes sont rapportés par les médias. Un « paradoxe » survient quand d'un côté, une société s'engage dans une action de RSE, prend par exemple des engagements concernant le développement durable tandis que de l'autre côté, des révélations accusatrices et circonstanciées au sujet de ses pratiques émergent au grand jour.

Certaines ONG comme Christian Aid ont clairement dénoncé des abus de la part de certaines grandes multinationales dans certaines parties du monde.

Par exemple aux États-Unis, McDonald's illustre ce comportement paradoxal. Société emblématique qui a toujours souhaité affirmer ses engagements économiques, sociaux voire environnementaux, cette société a été critiquée pour des pratiques d'affaires non éthiques. Lors du traitement de l'affaire McLibel par la justice britannique, celle-ci a confirmé certaines plaintes pour mauvais traitement des travailleurs, publicité abusive et traitement cruel des animaux. Le , la Cour européenne des droits de l'homme a tranché en faveur de Helen Steel et Dave Morris, (deux militants écologistes) dans leur bras de fer avec McDonald's dans l'affaire du McLibel. L’avocat du duo a déclaré :

« La Cour européenne des droits de l'homme a considéré que des violations des droits de l’homme avaient été commises à leur encontre – qu’il y avait eu une inéquité procédurale dans l’affaire et que les procédures adoptées n’étaient pas équitables. »

Wal-Mart est également un exemple saisissant de double langage en matière de RSE avec de lourds contentieux dans le domaine social.

De même, une société européenne comme Shell a largement participé en tant que pionnier « porte-drapeau » de la RSE mais en manquant pourtant en 2004 de rapporter à ses actionnaires une évaluation fiable de ses stocks pétroliers qui fondait sa valeur comptable.

Autre illustration, la manière dont on demande un reporting international sur l'ancrage territorial, avec des groupes de travail composés en vaste majorité d'entreprises et d'ONG, sans aucune participation d'élus régionaux, pose la question de la légitimité de l'information telle qu'elle est maniée par l'entreprise à des fins de communication.

Trahison de ses engagements RSE et risque de réputation (risque systémique potentiel)

L'engagement de l'entreprise en matière de RSE l'oblige à être plus transparente dans le contrat social qu'elle avec les autres acteurs. Elle crée sa propre épée de Damoclès, d'autres auteurs ont évoqué un « risque mortel »[61] par la médiatisation de ses actions.

À défaut d'honorer cet engagement, elle prend un risque médiatique de réputation voire de confiance par un effet de « boomerang ». Ce risque viendra en cas d'abus manifeste tôt ou tard se rappeler avec force au bon souvenir de tous ceux qui souhaiteraient à mauvais escient manipuler les autres parties prenantes et les actionnaires en premier lieu. La sanction juridique peut se doubler d'une sanction boursière plus rapide et redoutable et saper in fine la réputation chèrement et patiemment acquise (sanction médiatique).

Une RSE « paradoxale » se paiera « cash ». Enron et Parmalat sont deux contre-exemples emblématiques qui démontrent dans le seul compartiment de la RSE relatif à la gouvernance d'entreprise (ou gouvernement d'entreprise) des deux côtés de l'Atlantique, l'issue fatale de tentatives de manipulations qu'il s'agisse d'un capitalisme libéral ou familial, américain ou européen.

RSE et salariés

Béthoux, Didry et Mias (2007) mettent en évidence une autre dimension de la responsabilité sociale des entreprises, celle des salariés. À partir de l’analyse de « codes de conduite », ils soulignent en effet que les salariés sont au cœur de ces codes, soit comme destinataires, dans le cas de la référence aux droits fondamentaux de l’OIT (1998), soit comme acteurs de leur mise en œuvre, soit comme menace à l’égard des actifs de l’entreprise considérés comme propriétés des actionnaires (shareholders).

Comme destinataires, les salariés visés sont principalement les salariés des entreprises sous-traitantes en contrat avec de grands groupes multinationaux.

Comme acteurs de la responsabilité sociale, les salariés visés sont les salariés de ces grandes firmes multinationales chargés de rapporter les abus pouvant engager la responsabilité de l’entreprise, à travers par exemple la création de lignes téléphoniques anonymes. Comme menaces pour l’intégrité de l’entreprise, les salariés peuvent émettre des revendications sur la propriété des découvertes auxquelles ils ont participé ou encore être à l’origine de conflits d’intérêts (népotisme, corruption).

Ce regard sur les codes de conduite recensés par l’OIT fait donc apparaître la responsabilité sociale de l’entreprise sous un jour différent, en dégageant l’intérêt des actionnaires (shareholders) à se conformer à des principes moraux, mais aussi en faisant apparaître l’ensemble des salariés concernés par ces engagements de l’entreprise. Ainsi, ces codes de conduite comme manifestation de la responsabilité sociale de l’entreprise contribuent à définir le champ d’action de l’entreprise à l’échelle mondiale, c’est-à-dire la firme multinationale elle-même comme collectif de salariés (intégrant la sous-traitance) contribuant la réalisation de ses produits.

Défis clefs

Parmi les défis clefs que doit affronter la RSE :

  • La règle implicite des affaires qui veut que les cadres dirigeants s'empêchent de s'impliquer dans une activité qui pourrait réduire les profits.
  • Pour certains, telle ou telle des parties prenantes peut se trouver en position dominante et privilégier ses objectifs propres.
  • Les mécanismes habituels sont prévus pour gérer le problème essentiel des agents économiques, telle la vision comptable, les stocks options, l'évaluation des performances, l'attribution de compensations liées ainsi que tous les autres mécanismes qui visent à accroître leur suivi aux actionnaires.

Pour cela, il devient évident que la démarche de RSE peut seulement se réaliser en règle générale dans ses volets à caractère social et environnemental, sous réserve que cette démarche n'empêche les profits ; d'où le slogan RSE, doing well by doing good (réussir en faisant le bien). Cela suppose que les ressources dispensées en matière de RSE doivent avoir un retour sur investissement plus élevé que d'autres ressources qui pourraient produire un tel rendement par d'autres manières et qui sont d'autant de stratégies fréquemment suivies (par exemple, investissement en capital, productif, lobbying en matière fiscale, sous-traitance, externalisation off-shore, lutte contre les mouvements syndicaux, risques réglementaire ou de marché").

Les dernières études sur l'attendu des dirigeants montrent la nécessité de bien valoriser la démarche en démontrant le retour sur investissement (ROI).

Application opérationnelle dans les entreprises

La mise en œuvre d'une démarche de développement durable dans une entreprise est un processus complexe, qui engage toutes les fonctions de l'entreprise. Il s'agit de mettre en place une véritable gestion de programme transverse, avec des correspondants dans les principales entités de l'organisation, en impliquant les parties prenantes dans un modèle économique durable[62]. Nous donnons ci-dessous quelques exemples de domaines d'application particulièrement concernés par la mise en œuvre d'une démarche de développement durable ou de responsabilité sociétale.

Ventes et logistique

Les ventes et la logistique sont particulièrement impactées par les questions de développement durable. La fonction administration des ventes des entreprises est en effet responsable de la livraison au client final, qui fait appel le plus souvent au transport routier, fortement consommateur de produits pétroliers.

Marketing

Il s'agit d'identifier les opportunités et les menaces dans le contexte d'une sensibilité accrue des consommateurs et du marché aux enjeux du développement durable, en accord avec les parties prenantes[63]. Le marketing doit aussi véhiculer vers les autres domaines de l'entreprise les valeurs demandées par le marché. Certaines sociétés se contentent parfois d'opérations de communication plutôt que de vraiment changer le fonctionnement de l'entreprise ; on parle alors d'écoblanchiment (en anglais : greenwashing)[64].

Élizabeth Reiss montre que les entreprises ont intérêt à créer des produits et des services responsables, parce que les clients le demandent, et parce ce que c'est rentable. Elle donne des pistes pour revoir les modes de production et de communication. L'entreprise peut dans certains cas y gagner en productivité et fidéliser ses équipes de salariés et ses clients[65].

Christophe Sempels et Marc Vandercammen analysent le comportement du consommateur responsable, et soulignent le rôle du marketing dans la mise en œuvre d'innovations durables et dans leur acceptation par les marchés. Ils cherchent à créer le lien entre une demande et une offre plus responsables, en passant d'une logique « produit » à une logique « service »[66].

Plusieurs programmes de fidélisation ayant pour but la modification des comportements de consommations au travers d'outils marketing ont vu le jour ces dernières années. C'est par exemple le cas de RecycleBank (en) aux États-Unis ou encore du programme Green Points en France. Ces types de programme utilisent le principe de prime pour motiver le consommateur à changer ses habitudes de consommation.

Recherche et développement

Les caractéristiques du développement durable que sont les échelles temporelles et spatiales multiples, et l'interconnexion des problèmes, conduisent à des problématiques nouvelles de recherche et développement, à la recomposition de certains champs de recherche, et à l'apparition de nouvelles disciplines. La réponse aux demandes du développement durable passe par un accroissement des travaux de nature interdisciplinaire, entre sciences de la nature et sciences humaines et sociales. Il est nécessaire de structurer la recherche scientifique de manière plus fédérative, en organisant des institutions transversales et internationales. La demande d'expertise nécessite souvent la coopération de disciplines différentes. La recherche pour le développement durable nécessite de meilleures données, plus abondantes, et des outils plus performants dans le domaine de la modélisation et de la prospective. La recherche doit imaginer de nouvelles formes de coopération avec les autres acteurs, responsables politiques, entreprises, associations, syndicats, et autres composantes de la société civile[67].

Le marketing doit répondre à la question de savoir s'il faut investir dans le recyclage ou investir dans de nouveaux produits propres, ce qui impose des choix dans la recherche et développement[68]. La recherche peut se faire dans des laboratoire de recherche internes aux entreprises, ou en partenariat avec des laboratoires publics, par exemple dans le cadre de pôles de compétitivité[N 1].

La recherche et développement peut avoir besoin d'outils de gestion des connaissances pour améliorer l'efficacité de ses recherches[69]. Elle doit procéder à une veille technologique orientée vers des objectifs de développement durable[70].

Aspects juridiques

Sur le plan règlementaire, le développement durable se traduit par un ensemble de textes juridiques, qui peuvent être établis soit au niveau européen (directives européennes), soit au niveau des États. Quelques exemples de règlements européens sont le règlement REACH sur les substances chimiques, ou la directive sur les déchets d'équipements électriques et électroniques (DEEE), pour ce qui concerne le pilier environnemental.

Au niveau des États, le droit environnemental et le droit social s'appliquent sur chacun de ces piliers environnemental et social (en France le code de l'environnement et le code du travail).

En France :

  • La charte de l'environnement, de valeur constitutionnelle, stipule à l'article 6 que « les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. À cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l'environnement, le développement économique et le progrès social ».
  • Les marchés publics, soumis à une réglementation stricte, peuvent intégrer des clauses environnementales et sociales, en vertu des articles L.2111-1 et L.2112-2 du code de la commande publique[71]. Le code de la commande publique concerne les entreprises en tant que fournisseurs des organismes publics.
  • La loi sur les nouvelles régulations économiques, dans son article 116, impose aux entreprises cotées en bourse de produire des rapports d'activité qui rendent compte des conséquences environnementales et sociales de leur activité[72].

Les services juridiques des entreprises doivent procéder à une veille juridique, éventuellement pour les petites et moyennes entreprises (PME) avec l'aide des chambres de commerce et d'industrie.

Outre cette veille, les services juridiques sont amenés à vérifier la conformité des actions de développement durable de l'organisation dans ses déclinaisons économiques, sociales et environnementales par rapport aux normes applicables et la communication extra-financière qui l'accompagne.

Achats

Le respect de critères environnementaux, sociaux, et économiques dans l'élaboration des produits d'une entreprise dépend non seulement de ses processus internes, mais aussi de la qualité des produits achetés auprès des fournisseurs de l'entreprise, des services inhérents à ces achats, en particulier le transport, ainsi qu'en amont de ceux-ci. La performance en matière de développement durable dépend donc de l'intégration progressive de la chaîne d'approvisionnement dans le référentiel de responsabilité sociétale des entreprises concernées. Il est nécessaire de revoir la stratégie achats (réduction des coûts, élimination des déchets, augmentation de l'efficacité énergétique, conservation des ressources), en faisant participer les partenaires fournisseurs de l'entreprise[73].

Gérer le développement durable dans les achats des entreprises, des organismes publics ou encore des collectivités locales peut se faire en tenant compte du coût global d'acquisition qui, outre le prix d'achat, intègre le transport des produits achetés, le dédouanement, les garanties, les coûts de stockage, l'obsolescence, les déchets générés lors de la production et en fin de vie[74].

L'engagement d'un plan d'action développement durable aux achats répond généralement à des arguments de quatre natures différentes[75] :

  • un argument citoyen, comme moyen d'action en vue de permettre aux générations du présent de répondre à leurs besoins sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs ;
  • un argument économique, relatif aux économies d'achat qui proviennent d'une meilleure conception produit ;
  • un argument communication, relatif aux risques sur l'image (réputation) ;
  • un argument légal, consistant en la réponse aux obligations règlementaires (code de la commande publique dans le secteur public en France).

Finance

La mise en œuvre d'une politique de développement durable dans les entreprises dépend largement de l'utilisation des ressources de l'entreprise. Ces ressources peuvent être des actifs physiques (immobilisations au sens classique du terme), mais aussi des actifs immatériels (immobilisations incorporelles) ou tout simplement des ressources humaines, c'est-à-dire des salariés et des partenaires de l'entreprise.

L'atteinte des objectifs de développement durable dépend en grande partie de la façon dont les entreprises vont orienter l'action de l'ensemble de ces ressources (employés, parties prenantes, organisation…). Des réflexions apparaissent sur de nouvelles méthodes d'estimation de la valeur financière des entreprises à travers la notion de capital immatériel.

Les actifs financiers que sont les investissements socialement responsables (ISR) permettent d'orienter les portefeuilles de valeurs financières vers des actifs qui respectent des critères à la fois environnementaux, sociaux et économiques. L’ISR a une vision à long terme de nature à donner des résultats meilleurs que ceux des sociétés qui agissent dans la perspective d'objectifs financiers à court terme. Selon une définition officielle donnée en par le Forum pour l'investissement responsable (FIR), association réunissant les acteurs de l'ISR en France, et l'Association française de la gestion financière (AFG), association des acteurs du métier de la gestion, « L'ISR est un placement qui vise à concilier performance économique et impact social et environnemental en finançant les entreprises et les entités publiques qui contribuent au développement durable quel que soit leur secteur d'activité. En influençant la gouvernant et le comportement des acteurs, l'ISR favorise une économie responsable »[76].

L’ISR est encore trop récent et le recul insuffisant pour le vérifier de façon tangible et assez large, mais l’observation des fonds ISR les plus anciens laisse penser que leur rentabilité est comparable, voire parfois meilleure que celle des autres fonds[77].

Il faut également signaler le développement de toute une branche de la finance, la finance du carbone, liée aux enjeux des gaz à effet de serre. Le projet Bluenext s'inscrit dans ce type d'activités.

Durant le mois de , seize très grandes entreprises européennes (ENEL, EDF, ENGIE, EDP, Ferrovie dello Stato Italiane, Iberdrola, Icade, Ørsted, RATP, SNCF Réseau, Société du Grand Paris, SSE, Tennet, Terna, Tideway, Vasakronan) lancent le Corporate Forum on Sustainable Finance, un réseau tourné vers le développement d'outils du financement vert[78].

Systèmes d'information, numérique

Centre de stockage des données.

Il existe une croyance selon laquelle l'informatique serait « virtuelle » ou « immatérielle ». La « dématérialisation », qui consiste à faire passer les flux d'information d'un support papier à un support électronique, est trompeuse, puisque la matière n'a fait que changer de forme. Elle est pourtant souvent présentée, y compris par les spécialistes du développement durable[79], comme un avantage du point de vue environnemental, car elle supprimerait la consommation de papier. Dans les faits, le « zéro papier » est « un mythe »[80]. Une analyse qualitative des avantages et des inconvénients de la dématérialisation du point de vue du développement durable montre en effet que les choses ne sont pas si simples. En particulier, ce processus n'améliore pas la qualité environnementale des produits.

L'informatisation massive de l'économie depuis une cinquantaine d'années, que l'on appelle aujourd'hui en France transformation numérique, nous a fait passer dans une économie de l'« immatériel », dans laquelle l'augmentation des flux de gestion pilotés par l'informatique s'est accompagnée d'une augmentation parallèle des flux de biens marchands, donc des quantités de ressources naturelles consommées, comme le montre Jean-Marc Jancovici[81].

La transformation numérique concerne de plus en plus des usages de particuliers. Elle s'accompagne d'un impact environnemental important correspondant, selon un rapport de l'association française The Shift Project publié en , à 3,7 % des émissions de gaz à effet de serre mondiales[82], soit plus que le trafic aérien. Selon un rapport de de la même association, la vidéo en ligne, ou streaming vidéo, représente à elle seule 1 % des émissions de gaz de effet de serre mondiales[83]. Selon Frédéric Bordage (GreenIT), la multiplication exponentielle des objets connectés (internet des objets) est la principale responsable de l'impact environnemental du numérique au tournant des années 2020[84].

Concilier développement durable et systèmes d'information n'est pas aisé, car les systèmes d'information ne sont généralement pas pensés pour le long terme. Tant les matériels que les logiciels sont généralement conçus pour une durée d'utilisation de quelques années. D'autre part, les systèmes d'information d'entreprise ont été conçus selon une logique essentiellement comptable et financière. Ils se sont structurés autour de la comptabilité générale, avec des progiciels de gestion intégrés, et ils ont longtemps ignoré les critères extra-financiers du développement durable. Les éditeurs de progiciels de gestion intégrés proposent des offres de mise en conformité réglementaire[N 2].

Les initiatives actuelles sur l'application des principes de développement durable en informatique concernent le plus souvent le matériel informatique proprement dit (recyclage[85] et consommation électrique). Il existe une certification internationale pour les équipements, la certification TCO, ainsi qu'une directive européenne sur les substances dangereuses, la directive RoHS. L'informatique durable (green IT en anglais) se concentre essentiellement sur les bonnes pratiques portant sur le matériel informatique.

Plus fondamentalement, le développement durable pose de nouveaux défis : faire face à l'augmentation des connaissances, gérer une nouvelle relation avec les clients, respecter des réglementations de plus en plus complexes[86]. Pour cela, il est nécessaire de restructurer les systèmes d'information selon une nouvelle architecture : celle du système d'information durable, combinant gestion des données de référence (MDM), système de gestion de règles métier (BRMS) et gestion des processus métiers (BPM)[87].

L'application aux processus d'affaires vertueuse sur le plan du développement durable pose le problème du partage de l'information environnementale et sociale entre les entreprises et les administrations publiques, ainsi qu'avec leurs parties prenantes. Concernant l'application au volet environnemental proprement dit, on parle d'éco-informatique (les Américains emploient l'expression Green IT 2.0).

Les systèmes d'information actuels sont très hétérogènes et n'ont le plus souvent pas été conçus pour gérer une information à caractère sociétal. Ainsi, les exigences de développement durable nécessitent-ils de structurer les informations utiles pour la gestion des programmes concernés, et plus particulièrement pour la gestion des données et la structuration de réseaux de compétence. Le Royaume-Uni a mis en place une régulation publique de l'information environnementale. La France mise sur l'effet de la loi relative aux nouvelles régulations économiques pour réguler l'économie. D'une façon générale, le développement durable pose le défi de gérer une grande quantité d'informations non structurées ; pour cela, plusieurs méthodes sont apparues : les techniques du web sémantique s'appuyant sur des ontologies et des métadonnées ; les projets d'ingénierie des connaissances ; les systèmes wiki comme l'encyclopédie Ékopédia, ou Wikia Green[88].

Un autre problème crucial qui se pose est de savoir quels sont les impacts de la course à la puissance informatique en matière environnementale, et si la fameuse loi de Moore est véritablement pertinente à long terme[89]. On constate que les ordinateurs et les logiciels sont généralement surdimensionnés par rapport aux besoins et que l'arrivée incessante de nouvelles versions de matériels et de logiciels a pour effet de diminuer la durée d'amortissement des équipements, donc de générer des déchets.

La convergence entre l'internet et le développement durable fait l'objet des réflexions du forum TIC21[90]. L'Association pour le développement des outils multimédias appliqués à l'environnement (ADOME)[91] a développé un moteur de recherche du développement durable, Ecobase 21, composé de 70 000 liens.

Communication

Avec la mise en place de programmes de développement durable dans les entreprises et d’agendas 21 dans les collectivités territoriales, s’est posée, à partir de 2002, la question de la « communication sur le développement durable ». Autrement dit, comment sensibiliser l’opinion au développement durable, impliquer les professionnels, et parfois convaincre les décideurs ?

Cette question a en partie trouvé sa réponse dans la création d'une direction du développement durable, qui est désormais perçue comme un poste stratégique dans l'entreprise. Une association loi de 1901, le Collège des Directeurs du développement durable (C3D), participe à faire évoluer la fonction du directeur de développement durable[92].

Plusieurs autres pistes et éléments de réponse sont donnés par des professionnels[93] :

  • « Il n’y a pas de communication miracle, mais un travail sur la durée ». En outre, il est souhaitable : « d’impliquer les associations, d'impliquer physiquement les citoyens (événements festifs, comités citoyens, témoignages, etc.), et d’agir plus sur l’émotionnel, car on convainc souvent mieux avec des événements festifs que des arguments scientifiques ». Concernant éco-produits et éco-services, la communication doit mettre « simultanément en avant l’aspect environnement/social et les égo-promesses (être en meilleure santé, avoir une plus jolie peau, , etc.) »[94][source insuffisante], sous peine de ne pas convaincre et de ne pas vendre.
  • « On passe d'une logique de conformité à une logique d'innovation », explique Michel Rios[95].

Service après-vente

La mise en œuvre d'une démarche de développement durable dans le domaine du service après-vente se traduit le plus souvent par une politique de réparabilité des produits, qui peut permettre à l'entreprise de fidéliser ses clients et éviter l'obsolescence programmée, source de coûts économiques et environnementaux élevés[96].

Avantages de la démarche

Selon le rapport Consortium Report du Performance Group publié en 1999, les démarches de responsabilité sociétale se traduisent par des avantages permettant de créer de la valeur pour les actionnaires. Ces avantages peuvent se décliner suivant six effets vertueux :

  • l'anticipation des contraintes et la prévention des risques (sociaux, écologiques, juridiques, d'image) ;
  • la réduction des coûts liés à la consommation de ressources ou à la production de déchets ;
  • l'innovation par l'augmentation de la qualité, du service et de la valeur ajoutée ;
  • la différenciation sur le marché et l'augmentation de la valeur de la marque ;
  • l'amélioration de la réputation et la fidélisation des publics ;
  • la performance économique et financière[97].

Notes et références

Notes

  1. De nombreux pôles traitent de la problématique du développement durable : Industries et agroressources, Génie civil écoconstruction, Advancity ex ville et mobilité durables, etc.
  2. C'est le cas de SAP avec l'offre Governance, risk, and compliance.

Références

  1. En France, la loi relative aux nouvelles régulations économiques (article 116) demande aux entreprises de rendre compte des conséquences sociales et environnementales de leurs activités
  2. Voir sur strategie.gouv.fr.
  3. Connaissez-vous les origines de la RSE ?, RSE-pro, 1 décembre 2010.
  4. Voir notamment le dossier "RSE, régulation et diversité du capitalisme", Revue de la régulation, vol.9, 2011, regulation.revues.org/9085 en ligne.
  5. Responsabilité sociétale des entreprises en France, ministère de l'écologie
  6. Élisabeth Laville, L'Entreprise verte, Village Mondial, p. 34-38
  7. Michel Capron et Françoise Quairel-Lanoizelée, L'entreprise dans la société : une question politique, Paris, La Découverte, , 240 p. (ISBN 978-2-7071-7596-0), page 84
  8. Rosé J.-J., ed., 2006, Responsabilité sociale de l’entreprise. Pour un nouveau contrat social, coll. « Méthodes et Recherches », Bruxelles: De Boeck.
  9. note sur l'actualité des fonds éthiques MinEFI 2001
  10. Élisabeth Laville, L'entreprise verte, Village mondial, pages 24 et 25 notamment
  11. Élisabeth Laville, L'entreprise verte, Village mondial, page 114
  12. Jean-François Chantaraud, Gouvernance, Lien social, Performance : une vision du monde, Documentation française
  13. [PDF] Guide MEDEF 2006 du Développement Durable.
  14. ec.europa.eu
  15. http://ec.europa.eu/enterprise/csr/alliance.htm
  16. http://ec.europa.eu/enterprise/csr/sme_fr.htm
  17. [1]
  18. université de Liège Belgique ; Analyse des enjeux, outils, normes
  19. Source : Manuel des achats durables de Factea Durable - https://www.youtube.com/watch?v=PwTGxIMQkm4
  20. Voir sur actares.ch.
  21. voir (en) en:UN Global Compact site officiel/
  22. Lancement le 1er novembre de la norme ISO 26000 sur les lignes directrices relatives à la responsabilité sociétale - 2010-10-27.
  23. C'est clair et net : pas de certification ISO 26000 pour la responsabilité sociétale - 2010-11-30.
  24. site officiel de "Coalition for Environmentally Responsible Economies" (CERES)
  25. EMAS
  26. les normes ISO 14000 concernent le système de management environnemental (SME)
  27. « Qui sommes-nous ? », sur rse26001.fr (consulté le )
  28. CCI sise à Paris, comprend la Fédération des chambres mondiales (FCM), ne pas confondre avec la Chambre de commerce et d'industrie française
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Voir aussi

Articles connexes

Aspects gouvernance

Aspects éthiques

Aspects juridiques

Aspects normalisation

Concepts et déclarations

Liens externes

Bibliographie

Ouvrages
  • Chanteau Jean-Pierre, Martin-Chenut Kathia & Capron Michel (dir), Entreprise et responsabilité sociale en question. Savoirs et controverses, Paris: Editions Classiques Garnier, 2017 (ISBN 978-2-406-06933-1).
  • Capron Michel, Quairel-Lanoizelée, L'Entreprise dans la société, Paris: éd. La Découverte, 2015
  • Comtesse Xavier, Responsabilité sociétale, Genève, Fondation pour Genève, 2009, 119 p., www.fondationpourgeneve.ch.
  • Blog de veille RSE
  • Dictionnaire critique de la RSE, 2014, sous la direction de Nicolas Postel et Richard Sobel éd. du Septentrion
  • Freeman, Edward ; Moutchnik, Alexander (2013): Stakeholder management and CSR: questions and answers. In: UmweltWirtschaftsForum, Springer Verlag, Bd. 21, Nr. 1
  • La gestion des droits de l'homme. Déconstruction des politiques de responsabilité sociale des entreprises, Ph. Robert-Demontrond (ed.), Éditions Apogée, 2006 (ISBN 2843982065 et 978-2843982064)
  • La Responsabilité sociale des entreprises (corporate social responsibility) : concept, pratiques et droit, Emmanuel de Cannart d'Hamale, Eva De Walsche, Nicolas Hachez et Pol Cools, préface de Céline Louche, Éditions Vanden Broele, 2006, 334 p. (ISBN 97890 8584 329 0)
  • Responsabilité sociale de l'entreprise. Pierre Batellier, Emmanuel Raufflet, Presses internationales Polytechnique, 2008 (ISBN 978-2-553-01425-3)
  • Le développement durable au cœur de l'entreprise, Emmanuelle Reynaud, 2011, Dunod, Paris, 2e éd., 256 p. (ISBN 978-2-10-056293-0)
  • L'Entreprise responsable. Alain Chauveau, Jean-Jacques Rosé, éd. des Organisations, 2003
  • L'Entreprise responsable. Sociale, éthique, « verte »… et bénéficiaire ?, de Cécile Jolly, préface de Corinne Lepage, Ed. du Félin, 2006 (ISBN 2-86645-617-3)
  • La Responsabilité sociale de l'entreprise: comprendre, rédiger le rapport annuel, J. Igalens, M. Joras, Paris, Éditions Eyrolles, 2002
  • Entreprises et ONG face au développement durable : l'innovation par la coopération, Farid Baddache, Éditions L'Harmattan, 2004 (ISBN 2-7475-7547-0)
  • L'Entreprise verte : le développement durable change l'entreprise pour changer le monde, Élisabeth Laville, Village Mondial,
  • La Responsabilité sociale de l'entreprise : Nouvelle régulation du capitalisme ?, Nicolas Postel, Didier Cazal, Frédéric Chavy, Richard Sobel (eds), Villeneuve d'Ascq, Presses universitaires du Septentrion, coll. « Capitalismes, Éthique, Institutions », 2011, 416 p. (ISBN 2-7574-0212-9 et 978-2-7574-0212-2)
  • Responsabilités des entreprises et corégulation, de Thomas Berns, Pierre-François Docquir, Benoit Frydman, Ludovic Hennebel et Gregory Lewkowicz, Ed. Bruylant, 2007, 230 p. (ISBN 978-2-8027-2292-2)
  • Économie plurielle, responsabilité sociétale et développement durable, Dossier de la revue Développement durable et territoires
  • La responsabilité sociale d'entreprise, Michel Capron, Françoise Quairel-Lanoizelée, La Découverte / Repères, 2007
  • Responsabilité sociale de l’entreprise. Pour un nouveau contrat social., coll. « Méthodes et Recherches », dirigé par Rosé J.-J., Bruxelles, De Boeck, 2006
  • Quand l'entreprise s'affiche "responsable.- G. Saint-Lambert, Éducation permanente - no 167? 2006/2
  • « La santé à l'International et la responsabilité sociale sont liées », article tiré du site d'information Globalix
  • What Codes of Conduct Tell Us : corporate social responsability and the nature of the multinational corporation, de Élodie Béthoux, Claude Didry et Arnaud Mias, Corporate Governance, Volume 15, no 1, January 2007, p. 77-90
  • MiroirSocial : Responsabilité sociale des entreprises : il reste une ombre au tableau.
  • « Réguler les entreprises transnationales, 46 propositions » - Yann Queinnec, William Bourdon, Association Sherpa, 2010
  • « RSE, régulation et diversité du capitalisme », Thomas Lamarche (dir.) / Revue de la régulation. Capitalisme, Institutions, Pouvoirs 2011.
  • Emmanuelle Mazuyer (dir.), Regards croisés sur le phénomène de la responsabilité sociale de l'entreprise, La documentation française, CERIC, Paris, 2010
  • RSE et développement durable en PME - Comprendre pour agir, dirigé par Jean-Marie COURRENT, Bruxelles, De Boeck, 2012
  • La Responsabilité sociale des entreprises : défis, risques et nouvelles pratiques, Jacques Igalens, Paris, Editions Eyrolles, 2012
  • Responsabilité sociétale des entreprises, Carnet de route de la RSE, Sophie de Menthon, Paris, Groupe imprimerie nationale, 32 p.
Articles
  • Bazin Damien, (2009), « What Exactly is Corporate Responsibility towards Nature?: Ecological Responsibility or Management of Nature? A Pluri-Disciplinary Standpoint », Ecological Economics, 68(3): 634–642.
  • Didier Pautard, « Les avantages d'une approche marketing consciente des principes de responsabilité sociétale », Revue française du marketing - - N° 200 consacré au développement durable, pages 67 à 81 lire en ligne
  • Julien Bokilo Lossayi, « Firmes TIC et responsabilité sociétale des entreprises en Afrique, cas du Congo », Revue Africaine et Malgache de recherche scientifique de sciences juridiques et politiques, n°2, juillet 2019, p. 59-74.