Utilisateur:Pline/Estonie

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L'histoire de l'Estonie débute à la fin de la dernière ère glaciaire vers 8 500 avant JC lorsque les premières populations nomades pénètrent sur le territoire qu'occupe aujourd'hui l'Estonie qui vient d'être libéré par les glaces de la dernière glaciation. Selon une théorie répandue, le peuple finno-ougrien, qui constitue aujourd'hui la principale population du pays, arrive dans la région vers le 4ème millénaire avant JC marqué par l'introduction de la céramiques à peigne.

Au début du XIIIème siècle la région est une des dernières enclaves païennes en Europe. Les croisades baltes (1200-1227), menées par les chevaliers allemands de l'ordre de Livonie, réalisent la conquête de pays dont les habitants sont convertis au catholicisme. La société se structure en deux classes bien distinctes : d'une part une petite minorité germanophone qui constitue l'élite politique, intellectuelle et qui monopolise le commerce et la propriété foncière, d'autre part les paysans finno-ougrien dont la situation aura tendance à se dégrader au fil des siècles. Cette division va perdurer jusqu'en 1917 même lorsque la région aura perdu son indépendance.

Entre 1418 et 1562 le territoire qui recouvre l'Estonie et la Lettonie actuelle forme la Confédération Livonienne. A l'issue d'une période de conflits dans lesquels interviennent la Russie, la Lituanie et la Suède, cette dernière annexe la Livonie. En 1710, la Russie, en pleine expansion, conquiert à son tour la région à l'issue d'une longue période de conflits couronnée par la Grande Guerre du Nord. Comme dans le reste de l'Europe, le XIXème siècle est marqué par le réveil du sentiment national au sein de la majorité finno-ougriènne.

En 1920, alors que l'empire russe se décompose, l'Estonie acquiert son indépendanceà l'issue d'une courte guerre contre l'Armée rouge. Une démocratie parlementaire s'installe et les terres agricoles sont redistribuées aux paysans. Les clauses secrètes du Pacte germano-soviétique signés en 1939 par l'Allemagne nazie et l'Union soviétique permettent à cette dernière d'occuper l'Estonie. Le pays est ravagé par son occupant puis occupé par l'Allemagne avant d'être repris par l'Union Soviétique à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Une partie de la population quitte définitivement le pays qui est annexé à l'URSS. La société estonienne et son économie sont profondément transformés par l'envahisseur jusqu'à l'éclatement de l'Union Soviétique en 1991 qui permet au pays de retrouver son indépendance.

Des origines au XIIIe siècle[modifier | modifier le code]

La période mésolithique[modifier | modifier le code]

Outils de la culture de Kounda (musée d'histoire de l'Estonie)

Vers 9500 av. J.-C. la fin de la dernière glaciation qui affecte le continent européen permet les premières incursions humaines sur le territoire de l'Estonie libéré des glaces qui est désormais couvert par une toundra. Les premières traces d'établissements humains ont été découvertes sur le cours inférieur du fleuve Pärnu (culture dite « de Kunda » car le premier site se trouve près de cette ville) et remontent au 9ème siècle avant JC. Les premiers occupants, venus du sud, sont des semi-nomades qui vivent au bord des lacs, des rivières puis par la suite de la mer, en pratiquant la cueillette, la chasse et la pêche au harpon, à l'hameçon et au filet[1].

La période néolithique[modifier | modifier le code]

Le début du néolithique, période caractérisée par l'invention de la poterie, la domestication des animaux et les débuts de l'agriculture, est marqué sur les territoires de l'Estonie par l'apparition des céramiques dite de Narva (du nom de la ville près de laquelle les premières trouvailles ont été effectuées) dont les plus anciennes remontent à 4900 avant JC. Le climat est à l'époque devenu plus clément et la toundra est remplacée par des forêts de de feuillus. Les premières poteries sont réalisées en argile épais mélangé avec des galets, des coquillage et des plantes. Les céramiques de cette culture ont été trouvées tout le long des cotes et dans les iles. L'outillage en pierre et en os est proche de ce qui est produit par la culture de Kunda[2].

Céramique à peigne (musée d'histoire de l'Estonie)

Vers 4000 avant JC apparaissent les céramiques à peigne (l'ornementation composée de stries comme faites avec un peigne) qui semble une spécificité des peuples de langue Finno-ougrien car on la trouve également en Finlande et dans l'Oural où vivent des peuples parlant une langue apparentée. Il est possible que le peuple dont descendent les estoniens soit arrivé à cette époque. Selon une autre théorie les ancêtres des estoniens modernes seraient les premiers occupants de la région apparus donc à la fin de la glaciation. Les céramiques à peigne coexistent pendant plusieurs siècles avec les céramiques de Narva. On considère généralement que le berceau des finno-ougriens se trouve entre le coude de la Volga et le massif de l'Oural car des langues de cette famille y sont encore parlées[3].

Poterie et haches de la culture de la céramique cordée

Vers 3200 avant JC une nouvelles population sans doute d'origine indo-européenne, donc utilisant une langue rattachée à un rameau complètement différent du finno-ougrien, arrivent dans la région : leur apparition se traduit par l'introduction de la céramique cordée , de haches en pierre particulièrement bien finies (haches naviformes) et l'amorce d'une activité agricole et de d'élevage. Les premières fermes sont construites à l'époque. Il semble qu'après une période de coexistence qui va jusqu'en 2000 avant JC, la langue finno-ougrienne s'impose sur le territoire de l'Estonie, au nord et sur la côte de la Lettonie tandis que le parler des derniers arrivants s'impose dans le reste de la Lettonie et plus au sud. Toutefois chaque langue emprunte sans doute à cette époque une fraction minoritaire de son vocabulaire à l'autre. Par la suite aucune autre mouvement de population massif ne semble avoir affecter le territoire de l'Estonie. La population estonienne et sa langue semblent donc descendre directement des habitants de cette époque[4].

L'age du bronze[modifier | modifier le code]

cimetière de l'age de bronze

L'age du bronze commence dans la région vers 1800 av JC. Des objets en bronze sont d'abord durant les premiers siècles importés de la Scandinavie avec lesquels des échanges ont lieu grâce aux progrès de la navigation. L'influence culturelle des peuples du nord de la Baltique ou peut-être un début de colonisation peut être détecté par les sépultures de type scandinaves retrouvées sur le sol estonien : celles-ci sont constitués de sarcophages en pierre de forme circulaire ou ovale. La crémation des morts apparait mais coexiste avec l'inhumation. La langue semble avoir emprunté à cette époque certain termes scandinaves. A partir de 1 000 av JC l'orge commence à être cultivé dans la région occupée aujourd'hui par Tallin dans des champs délimités par des murs de pierre et l'utilisation de la charrue semble se répandre. La culture du lin pour le tissage apparait sans doute au même moment. La population, jusque là concentrée le long des rivières et des lacs se répand dans l'intérieur du pays. Les premiers oppida apparaissent traduisant une insécurité croissante liée à un début d'accumulation de richesse[5].

L'age du fer[modifier | modifier le code]

Vers 500 avant JC les premiers objets en fer, essentiellement des armes et des bijoux, importés du sud, apparaissent sur le territoire de l'Estonie. Un artisanat local se met en place vers 200 avant JC. L'empire romain malgré son éloignement fait sentir son influence entre 50 et 450 après JC ; les échanges sont sans doute favorisés par par la route de l'ambre qui permet de ramener cette résine fossile très prisée à Rome et qui abonde sur sur la côte de la mer Baltique. On a découvert sur le territoire estonien de nombreux objets d'origine romaine : bijoux, lampes à huile, monnaie. Les fibules des costumes traditionnels estoniens ont sans doute une origine romaine. Le nombre d'oppida augmente dans le nord et le nord ouest de l'Estonie actuelle ainsi que les caches d'armes et de bijoux ce qui reflète une instabilité croissante. Les sépultures conservent leur style scandinave mais croissent en taille et en richesse, sont ceintes d'enclos et les bijoux remplacent les armes dans les offrandes. Le pays est défriché, l'agriculture et l'élevage se généralisent et des villages de forme circulaire (dans l'ouest) ou linéaires ailleurs se créent sur tout le territoire. La population, croissante, atteint peut être 20 000 à 30 000 habitants sur le territoire de l'Estonie actuelle au tournant du millénaire[6].

Comme dans le reste de l'Europe les grandes invasions s'accompagnent d'un déclin économique. Cette période, dite de l'age du fer moyen (450-800 ap JC), est marquée par la généralisation des oppida et des sépultures d'un style moins élaboré simple tas de pierre ou tumulus de terre dans lesquels on trouve à nouveau des armes. Les slaves qui progressent pacifiquement depuis leur région d'origine prennent sans doute à cette époque contact avec les habitants occupant le territoire de l'Estonie et s'installent dans les régions voisines qui deviendront plus tard les principautés russes de Pskov et Novgorod. La frontière linguistique entre les deux populations se fixe pratiquement à cette époque[7].

En 800 av JC et pour plus de deux siècles, les scandinaves, les vikings (varègues sur le territoire russe), qui avaient subi une éclipse, sont de retour sur la rive sud est de la Baltique : ces marchands guerriers mettent en place une nouvelle route commerciale entre la Scandinavie d'une part et Byzance et le monde arabe d'autre part qui passe par la rivière Daugava en territoire letton. La cité état de Novgorod et la Rus de Kiev, embryon de la future Russie, dont ils sont les fondateurs, servent de relais et contribuent à nourrir le trafic. Les échanges portent notamment sur le sel, les objets en métal, les étoffes, les esclaves, les fourrures et le miel. Bien que n'étant pas situé sur la route principale qui passe plus au sud, les habitants de l'Estonien profitent de ce courant commercial comme en témoignent de nombreuses pièces arabes retrouvées [8].

A l'aube de l'histoire[modifier | modifier le code]

A compter de 1050, les marchands allemands commencent à concurrencer les scandinaves. Les événements durant cette période ont pu être reconstitués grâce aux premières sources écrites fiables portant sur la région qui apparaissent à cette époque. L'est du territoire tombe dans la sphère d'influence des principautés russes : selon les chroniques russes de l'époque, celles-ci montent régulièrement des expéditions pour extorquer des tributs aux tchoudes : ce terme regroupe lettons, estoniens, lives, ingriens et votes. Au cours d'une de ces expéditions Iaroslav le Sage, prince de Kiev, fonde en 1030 la ville de Iourev ; celle ci disparaitra une trentaine d'années plus tard mais sur son emplacement sera élevée par la suite Tartu qui deviendra la deuxième ville d'Estonie. Les sagas norvégiennes de l'époque indiquent que certaines régions de l'ouest de la région versent un tribut de manière épisodique aux scandinaves ou sont l'objet de raids armés. Mais les indigènes ne sont pas sans défense et les écrits de l'époque témoignent des attaques régulières des indigènes contre Pskov, la plus proche des villes russes ou des raids sanglants contre l'île danoise d'Öland en 1170 ou Siguna qui est à l'époque la capitale de la Suède[9].

La société estonienne se structure[modifier | modifier le code]

Découpage du territoire estonien vers 1200

Malgré ce climat de violence, la population augmente fortement et atteint 150 000 habitants vers 1200 ap JC. La surpopulation est particulièrement forte à Saaremaa ce qui explique peut-être la réputation de nid de pirates de l'île. Un nouveau type de charrue est adopté qui se conservera jusqu'au 19ème siècle. La culture de l'orge prend de l'importance et l'élevage se substitue définitivement à la chasse en tant que source de protéines. L'habitat groupé est constitué de chaumières, d'une seule pièce pour les plus pauvres, dépourvues de fenêtres, pour conserver la chaleur, avec un seuil rehaussé, une petite entrée non chauffée et un foyer couvert ancêtre du poêle four. L'époque voit apparaitre des forteresses de mieux en mieux fortifiées abritant parfois de manière permanente la population locale, signe de temps troublés. Des petites villes commencent à apparaitre : la plus grande Varbola compte à l'époque peut être 900 habitants[10].

Cette période de l'histoire a été fortement idéalisée au 19ème siècle par les nationalistes estoniens car elle précède l'invasion allemande qui va complètement transformer la région. Pourtant tout laisse à pense qu'une société inégalitaire se met en place dont on trouve des traces à travers la richesse de certaines sépultures et habitations. Les membres d'une élite politico-militaire désignés sous le terme d'Anciens, de Seigneurs ou de Puissants (dans la littérature contemporaine les vanemad c'est à dire anciens), se recrutent sans doute parmi les principaux propriétaires fonciers et utilisent le clientélisme pour assoir son pouvoir. Celui-ci s'étend notamment à la justice, la collecte des impôts, les corvées et le service militaires. Les esclaves sont nombreux et sont en partie des autochtones. Il n'y pas, semble t'il, d'entité politique à l'échelle de l'Estonie mais des structures en place à l'échelle locale aux contours mouvants et instables. Sur le territoire de l'Estonie on en trouve deux niveaux de regroupement : le kihelkonnad comporte quelques milliers d'habitants et, sur une partie de la région, le maakoonad englobe 3 à 7 kihelkonnad. Vers 1200 il y a envion 45 kihelkonnad et 7 maakoonad. Le plus vaste des maakoonnad est l'Ugandi qui se trouve au sud-est, à cheval sur le territoire occupé par les populations de langue indo-européenne. Au sud-ouest le Sakala est centré sur le lieu occupé aujourd'hui par la ville de Viljandi. Le maakond de Râvala s'étend dans la région de Tallinn (le nom allemand de la ville, Reval, en dérive). Au nord-est on trouve le Virumaa qui a donné le nom finnois de l'Estonie (Viro) et sur la côte ouest le Läänemaa. Au sud du Rävala et du Virumaa se trouvent le Harjumaa et le Järvamaa. Enfin l'île de Saaremaa forme également un maakond. Le centre-est et la région située au nord de Tartu ne comportent pas, semble t'il, de maakond. Nous savons par l'étude des langues et des restes archéologiques qu'à cette époque les parlers et les coutumes se différencient. Durant le conflit qui va suivre au début du 13ème siècle, les maakoonad ne constitueront jamais un front uni face à l'envahisseur [11].

Sur le plan religieux, malgré l'absence de sources fiables, on peut déduire des indices disponibles que les indigènes adoraient des dieux représentant les forces de la nature et leur sacrifiaient des animaux et des humains, qu'ils honoraient les morts et pratiquaient la divination. Ils édifiaient des sanctuaires avec des images des divinités et vénéraient des bosquets sacrés. Toutes ces pratiques sont très proches de celles de la Scandinavie avant sa christianisation[12].

La christianisation des pays baltes[modifier | modifier le code]

Le contexte des croisades[modifier | modifier le code]

Les tribus baltes vers 1200

Le XIIe siècle est en Europe la période des croisades : il s'agit de répandre la foi chrétienne parmi les peuples païens si besoin à la force des armes. Coincée entre la Scandinavie catholique et la Russie orthodoxe les régions bordant la côte sud de la mer Baltique, de la Prusse à l'Estonie, constituent à l'époque les dernières contrées païennes sur le continent européen. Des missions de conversion étaient parties de Scandinavie au XIème et XIIème siècles vers ces contrées mais sans rencontrer de succès. A la même époque un mouvement de migration parti de l'Allemagne moyenne qui évacue ainsi un trop plein démographique va peupler les côtes de la Baltique jusque là occupées de manière clairsemée par les Wendes, une peuplade slave. Plusieurs villes sont fondées sur la côte dont Lübeck en 1143. Quelques années plus tard, en 1161, est fondée la Hanse, un réseau d'entraide entre marchands allemands qui vise à protéger le commerce en mer du Nord et en mer Baltique. C'est alors que les intérêts de plusieurs communautés vont converger pour déclencher un mouvement qui aboutira à la colonisation germanique des pays baltes : le mouvement migratoire allemand se heurte bientôt aux peuplades païennes qui vivent plus à l'est en Lituanie ; les marchands de la Hanse souhaitent sécuriser la rive sud est de la Baltique occupées par les populations païennes dont comportement instable est peu propice au commerce; les chevaliers du Saint-Empire romain germanique à la recherche d'une terre de croisade car ils jouent un rôle marginal en Terre Sainte, vont jeter leur dévolu sur ce dernier territoire païen.

La conquête des territoires baltes[modifier | modifier le code]

En 1186 un religieux allemand du nom de Meinhard de Holstein, s'installe à Uxhüll, en Livonie et fonde un évêché sur le territoire des Lives, un peuple païen qui occupe alors la Lettonie actuelle. Son entreprise de conversion après un succès initial se heurte bientôt à des résistances. Son successeur, qui a reçu une bulle de croisade du pape Célestin III, est tué peu après son arrivée dans la région en 1198. Le pape Innocent III relance la croisade et consacre un nouvel évêque à qui des moyens importants sont donnés. En 1200 ces croisés, dirigé par le nouveau prince-évêque de Riga, Albert de Buxhövden, fondent la ville de Rīga, aujourd'hui capitale de la Lettonie, à l'embouchure de la rivière Daugava. Riga va devenir à la fois un centre religieux et un important relais pour les marchands allemands sur la route commerciale qui relie les ports hanséatiques au territoire russe. En 1202 est fondé dans cette ville un ordre de moines soldats, les chevaliers porte-glaives (Fratres militiae Christi), auxquels le pape accorde le statut des templiers, pour seconder les efforts d'évangélisation.

En 1208 les croisés, qui ont pris le dessus en Lettonie, s'attaquent aux territoires voisins correspondant à l'Estonie actuelle. L'histoire de la conquête de ces territoires nous est connue grâce à une chronique tenue par un prêtre de l'ordre des porte-glaives, Henri le Letton, qui a participé activement à la croisade. Les chevaliers s'attaquent d'abord à l'Ugandi au sud-est de l'Estonie, dont les habitants harcèlent les convois commerciaux qui circulent vers les villes russes de Novgorod et Pskov. Ces principautés russes s'inquiètent à leur tour de l'avancée des croisés allemands et elles vont tenter par la suite de contrer la croisade soit en s'alliant avec les indigènes soit en menant leur propre entreprise de conquête.

Otepää tombe à l'automne mais les croisés aidés par des forces auxiliaires lives et latagaliens sont défaits à l'été 1210 par un malev (une force indigène) sur la rivère Ûmera. Les forces en présence sont de faible importance puisque les chevaliers porte-glaive allemands ne sont que 20. En mars 1211 les croisés avancent de nouveau et obtiennent la reddition de Viljandi. Une épidémie qui ravage la région arrête temporairement les combats. Ceux-ci reprennent en 1215 dans un contexte confus où les indigènes tour à tour se rallient ou prennent les armes contre les croisés avec l'appui des russes : l'Ugandi et le Sakala sont conquis. Le vanem (chef) de Sakala, Lembitu, futur animateur de la résistance, est fait prisonnier puis rallié. Les indigènes finissent par s'organiser en un front uni qui parvient à rassembler une force estimée à 20 000 hommes par Henri le Letton (chiffre sans doute exagéré) qui met le siège à Otepää et obtient sa reddition. Lembitu, qui a rompu ses liens avec les croisés, prend la tête de la résistance. Le 21 septembre 1217 6 000 indigènes sont défaits par les 3 000 hommes rassemblés par les croisés au cours de la Bataille de la saint Matthieu près de la ville de Lehola. Lembitu est tué. Les régions de l'Estonie Centrale sont désormais aux mains des croisés.

Mais le territoire n'est pas complètement pacifié et un raid parti de Lituanie le dévaste en partie. Le prince-évêque décide de faire appel au roi du Danemark Valdemar II pour prendre en tenaille la résistance. Celui-ci effectue un débarquement en 1219 sur la côte nord de l'Estonie avec une force importante et édifie une forteresse à l'emplacement de la future capitale de l'Estonie, Tallin[N 1]. Les danois, qui se heurtent rapidement aux forces indigènes qu'ils ont tenté de rallier, parviennent à contrôler la côte sud du golfe de Finlande (c'est à dire la côte nord de l'Estonie actuelle). .... Les habitants de l'île de Saaremaa continuent de résister de 1222 à 1227 : cette année là une expédition dirigée par les croisés franchit la mer gelée et obtient la reddition de la dernière forteresse indigène à Valjala. Plusieurs soulèvements auront encore lieu notamment à Saarema qui reprend son indépendance entre 1236 et 1241, en 1255 et 1261 mais la domination des croisés n'est désormais plus réellement remise en question.

La Livonie[modifier | modifier le code]

Durant les 3 siècles qui vont suivre (jusqu'en 1558), les territoires conquis correspondant à la Lettonie et à l'Estonie constituent un état, la Livonie, où le pouvoir est éparpillé entre les princes-évêques et les chevaliers porte-glaives et leurs descendants. Les chevaliers porte-glaives continuent de poursuivre leur croisade contre les lituaniens païens mais également contre les russes orthodoxes donc schismatiques. Mais avec des moyens limités ils ont le dessous face à ces états qui gagnent progressivement en puissance durant cette période.

La société de la Livonie médiévale[modifier | modifier le code]

A l'issue de la conquête, la société de la Livonie se structure en deux classes de population bien distinctes ; cette caractéristique, relativement commune en Europe au Moyen-Age, va par contre perdurer jusqu'au 19ème siècle. La minorité germanophone (Deutschen c'est à dire les allemands) est concentrée dans les villes et forme l'élite politique, militaire, commerciale et religieuse. Les « indigènes » (Undeutschen c'est à dire les non allemands) forment la paysannerie et les classes sociales inférieures des villes. Un courant d'émigration constant venu d'Allemagne vient grossir les effectifs de commerçants et d'artisans installés dans les cités, mais la campagne, aux terres trop pauvres, est laissée aux indigènes qui préserveront ainsi leur langue et leur culture. Estimée à environ 150 000 avant le début de la croisade, la population des territoires correspondant à l'Estonie tombe à 100 000 à l'issue de la conquête. Elle remontera à 200 000 vers 12000 et à plus de 250 000 au milieu du 14ème siècle[13].

Tallin a conservé ses remparts du 13ème siècle

Les villes, qui sont fortifiées, sont souvent fondées sur d'anciens oppidums indigènes. Ce sont initialement les lieux où se concentrent les pouvoirs politique et religieux mais très vite l'artisanat et le commerce s'y développent : Tallin à partir de 1285, Tartu, Viljandi et la seconde Pärnu au 13ème siècle, adhèrent l'association des villes commerçantes de la Hanse. Ces villes sont essentiellement des relais sur les routes commercialent qui relient d'une part la Russie exportatrice notamment de fourrures, cire et miel et importatrice de sel, vin, articles de luxe et pièces de laine et d'autre part la Scandinavie et l'Europe occidentale. Le marché local exporte du seigle. Les commerçants s'organisent en guildes peu ouvertes aux indigènes. Les villes restent de taille modeste : au 15ème siècle Tallin, la plus grande cité de la région, compte moins de 8 000 habitants, Tartu moins de 6 000 et Narva 700[14].

Le clergé catholique, initialement originaire des pays scandinaves, est recruté à partir du 14ème siècle en Allemagne et vient grossir la classe dominante germanophone. Trois évêchés dont le pouvoir temporel s'exerce sur de larges portions du territoire et 97 paroisses existent au début du 16ème siècle. Les ordres religieux (cisterciens, dominicains, augustinien) se taillent de vases domaines au 13ème siècle [15].

La condition de la paysannerie va progressivement se dégrader durant les 3 siècles qui vont suivre. Certes les modes de culture progressent avec l'assolement triennal mais l'outillage agricole reste inchangé. Le nombre et le pouvoir des grands propriétaires terriens (les mõisnik), d'origine majoritairement étrangère, augmente progressivement dans les campagnes : ils accaparent les terres tout en multipliant les servitudes féodales. Les commerçants des villes maintiennent un monopole sur le commerce qui prive de sources de revenus la paysannerie des côtes et des îles. L'esclavage disparait progressivement mais globalement le statut du paysan se dégrade. A l'origine la classe paysanne se répartit en petits vassaux (maavabad), sans doute descendants des anciens chefs locaux, exemptés de taxes féodales, les laboureurs qui forment le corps de la classe paysanne. Au 15ème siècle apparaissent les üsksjalad, propriétaires de lopins de petite taille. Enfin on trouve des paysans sans terre et les journaliers. La condition des paysans a été fixé, au moment de la conquête, par des accords qui préservent certains des droits des indigènes notamment leur présence dans les instances judiciaires. Ces accords sont plus favorables dans l'ile de Saaremaa, prompte à la révolte, que dans les premiers territoires conquis au sud de l'Estonie actuelle. Mais progressivement les corvées et surtout la dime due au pouvoir ecclésiastique vont s'alourdir jusqu'à provoquer la révolte paysanne de 1343-1345. La défaite de celle-ci est suivie de la poursuite de la dégradation du statut des paysans qui va conduire à l'apparition du servage à la fin du 16ème siècle. Pour échapper à une condition de plus en plus misérable, certains paysans quittent la terre et s'installent dans les villes ou fuient vers les pays voisins[16].

Un état féodal[modifier | modifier le code]

La Livonie au 15ème siècle

Les chevaliers porte-glaives avaient peu après la fondation de l'ordre pris une grande autonomie vis à vis de l'autorité papale. En 1525, profitant de difficultés dans lequel se débat le royaume du Danemark, ils envahissent les possessions danoises du nord de la Livonie ; combattent les forces placées sous l'autorité du moine Baudoin d'Alne envoyé par le pape et chargé de mettre de l'ordre dans ce conflit entre chrétiens. En 1236 les chevaliers porte-glaives, affaiblis par la défaite subie contre les lituaniens à Saule, acceptent un compromis : le traité de Stensby entérine un découpage du territoire entre les chevaliers, qui en ont la majeure partie, les princes-évêques et le Danemark. Les porte-glaives, dont les effectifs sont tombés très bas ont été absorbés par l'ordre des chevaliers teutoniques qui remplissent une mission analogue en Prusse orientale en combattant les prusses païens et les lituaniens. Les chevaliers porte-glaives conservent néanmoins leur autonomie et prennent le nom d'ordre de Livonie. Ils sont placés sous les ordres d'un grand maitre qui réside à Riga puis à Cesis sur le territoire de la Lettonie moderne[17].

  • 1236 : Défaite des Porte-Glaive face aux Lituaniens à Saule (Šiauliai). L'année suivante, l'ordre est placé sous l'autorité de l'ordre des chevaliers teutoniques, apparus en Palestine en 1190, actifs en Prusse-Orientale depuis 1230. La branche baltique de l'ordre est connue également sous le nom d'ordre de Livonie.
  • 1238 : Au traité de Stensby, les conquérants se répartissent les territoires. Le nord de l'Estonie est attribué aux Danois, le sud à l'État teutonique, à l'exception des territoires ecclésiastiques.
  • 1242 : Défaite des chevaliers sur le lac Peipsi (Peipous), face à Alexandre Nevski, prince de Novgorod (« bataille sur la glace »). Cette bataille fixe pour des siècles la frontière entre catholicisme et orthodoxie, régions d'influence allemande et russe.
  • 1248 : Éric IV du Danemark accorde la charte de Lübeck à la ville de Reval (Tallinn).
La confédération de Livonie en 1260.
  • 1285 : Tallinn devient membre de la Hanse.
  • 1343-1345 : Révolte dite « de la Saint-Georges » : soulèvement des indigènes des possessions danoises.
  • 1346 : Le roi Valdemar IV de Danemark vend ses possessions estoniennes à l'Ordre de Livonie.
  • 1421 : Pour mettre fin aux conflits incessants entre les chevaliers et les évêques, première réunion d'une diète de Livonie, composée de quatre curies (évêques, Ordre, vassaux, villes). Elle ne parviendra jamais à mettre fin à l'anarchie, aggravée par les incursions russes : la Livonie ne sera jamais un véritable État.
  • XVe – XVIIe siècle : Essor progressif du servage ; en 1495, pour la première fois, un paysan est vendu avec sa terre.
  • 1494 : Moscou ferme le comptoir de la Hanse à Novgorod : début du déclin de la Hanse, développement d'un commerce direct avec la Russie.
  • 1507 : Interdiction faite aux paysans de porter des armes.
  • 1523 : Arrivée de la Réforme en Estonie.
  • 1524-1525 : Destruction de tous les monastères de Tallinn et de Tartu, à l'exception d'un seul qui continue à vivoter jusqu'au début du XVIIe siècle.
  • 1525 : Premier livre avec texte en estonien (textes religieux luthériens) imprimé à Lübeck. Le grand-maître de l'Ordre proclame la liberté de conscience dans les villes de Livonie.
  • 1535 : Premier livre en estonien conservé (partiellement), le catéchisme luthérien de Wanradt et Koell, imprimé à Wittenberg.
  • 1554 : La diète étend la liberté de conscience à toute la Livonie.

Les guerres de Livonie (1558-1710)[modifier | modifier le code]

Durant cette période qui va de 1558 à 1770 les conflits, qui aboutissent à l'éclatement de la Livonie, occupent 70 années pour 82 années de paix et ravagent la région. Les élites locales perdent leur pouvoir politique au profit des grands états voisins qui montent en puissance. Ces bouleversements se superposent avec des changements importants au sein de la société : l'implantation du protestantisme, les premiers écrits en estonien et la fondation de la première université[18].

Le démantèlement de la Livonie (1558-1561)[modifier | modifier le code]

En 1539 la Livonie expulse les marchands russes de ses villes. Les guildes cherchent ainsi à lutter contre le déclin de leur activité en instituant un monopole sur les routes commerciales qui passent par la région et mettent en communication la Russie, complètement enclavée, à l'Europe occidentale. Mais en 1547 Ivan IV le Terrible monte sur le trône à Moscou avec la volonté de renforcer le pouvoir de la Russie et d'étendre son territoire. Sa victoire sur les tribus mongoles qui avaient longtemps tenues le pays sous leur joug est complète avec la prise de Kazan en 1552 et d'Astrakhan en 1556 et permet à l'armée russe en 1558 de prendre l'offensive dans le nord et d'envahir la Livonie sous prétexte de dettes impayées ; Narva puis Tartu sont conquises. L'armée livonienne attaque alors Pskov ce qui permet d'obtenir une trêve. Les combats reprennent en 1560 : l'ordre livonien, dirigé par son grand maitre Gotthard Kettler, subit une défaite décisive à Hârgmäe près de Viljandi. En septembre de la même année une révolte paysanne, la première depuis celle de la Saint-Georges, se produit dans le Hrjumaa et le Läänema mais est réprimée au cours de l'hiver. Kettler demande l'aide de la Pologne-Lituanie dirigée alors par Sigismond II Auguste pour combattre l'envahisseur russe tandis que la bourgeoisie d'Estlande se tourne vers le roi de Suède Eric XIV de Suède . Celui-ci débarque en revendiquant les anciennes possessions danoises sur le continent et chasse les polono-lituaniens de Toompea. En novembre 1561 le traité de Vilnius entérine la partition de la Livonie : l'évêché de Saare-Lääne revient au royaume du Danemark, la région de Tallinn devient suédoise, tandis que le sud de la Livonie est rattaché à la Pologne-Lituanie. Cette dernière crée deux duchés sur ce nouveau territoire : la Livlande est à cheval sur la frontière sud de l'Estonie moderne et a pour chef-lieu Riga ; la Courlande correspond au sud de la Lettonie actuelle. Le maitre de l'ordre de Livonie, qui est dissous, prend la tête du duché de Courlande. Les russes conservent provisoirement Tartu et Viljandi[19].

La montée en puissance de la Suède (1563-1661)[modifier | modifier le code]

Les combats reprennent peu après (1563) entre d'une part la Suède et d'autre part le Danemark allié à la Pologne-Lituanie. La paix de Stettin en 1570 permet à la Suède de récupérer l'évêché de Saare-Lääne. Jusqu'en 1917 le territoire ainsi agrandi détenu par la Suède portera le nom de Estland. Les combats reprennent la même année entre la Suède et la Russie. Les russes parviennent à plusieurs reprises à envahir le territoire occupé par les suédois mais échouent devant la ville Tallin malgré deux sièges en 1570-1571 et 1577. La Pologne-Lituanie, gouvernée à partir de 1576 par Stefan Bathory, s'attaque aux armées russes tandis que le général Pontus de La Gardie, mercenaire au service de la Suède, parvient à chasser définitivement les russes. Par la paix de Iam Zapolsk (1982) Ivan le Terrible reconnait la défaite de ses troupes et les droits de la Pologne-Lituanie sur la Livonie. La guerre reprend entre russes et suédois en 1590. La Russie, qui est en proie au chaos depuis la mort d'Ivan le Terrible, doit reconnaitre par le traité de Täyssinä (1595) les droits de la Suède sur l'Estlande. Cet accord sera confirmé par le traité de Stolbova signé en 1617 par le nouveau souverain russe Michel Romanov. La Suède et la Pologne-Lituanie après une trêve qui dure jusqu'à 1600 reprennent les armes. La noblesse germanophone de la Livlande, qui a été en partie dépouillée de ses biens par le nouvel occupant, prend le parti de la Suède. Après des combats indécis entrecoupés d'armistices les armées suédoises prennent le dessus. Selon le traité d'Altmark (1929) signé entre les deux belligérants, pratiquement toute la Livlande passe sous le contrôle de la Suède. La Courlande reste polono-lituanienne. En 1643 un nouveau conflit permet à la Suède victorieuse de récupérer l'île de Saarema par le traité de Brömsebro (1645). La première guerre du Nord éclate entre la Suède, la Pologne-Lituanie et la Suède en 1656 et se déroule en grande partie sur le territoire de l'actuelle Estonie. La Suède, qui l'emporte, se voit confirmer par des traités signés en 1660 (traité de paix d'Oliwara avec la Pologne Lituanie) et 1661 (traité de paix de Kärde avec la Russie) son hégémonie sur les territoires qu'elle détient sur la rive sud de la Baltique y compris l'Ingrie et l'emplacement de la future capitale russe Saint-Pétersbourg[20].

L'ère suédoise[modifier | modifier le code]

Sous la domination suédoise

Les divisions administratives[modifier | modifier le code]

Le territoire de l'Estonie est désormais pratiquement entièrement contrôlé par le royaume scandinave et pour la première fois placé sous le contrôle d'un seul pouvoir. La région est découpée en trois entités administratives aux statuts très différents : au nord le duché d'Estlande a pour capitale Tallin et comprend 4 maakonnad : le Harjumaa, le Järvamaa, le Läänemaa et le Virumaa. Narva est détaché de cet ensemble et devient la capitale de l'Ingrie. La province de Livlande au sud a pour capitale Tartu puis Riga et comprend 4 districts dont deux Tartu et Pärnu rassemblant les locuteurs estoniens (désignés par le terme d'Esthen), les deux districts du sud qui rassemblent les locuteurs lettons se situant sur ce qui constitue aujourd'hui le territoire de la Lettonie. Enfin l'île de Saaremaa constitue une troisième entité tantôt gouvernorat tantôt possession personnelle du roi de Suède[21].

Croissance démographique et courants d'immigration[modifier | modifier le code]

La population, victime de ces conflits quasi permanents aini que de la famine et des épidémies qui les accompagnent, compte de nouveau moins de 150 000 habitants vers 1640. La reprise démographique est rapide et vers 1690 on dénombre entre 350 000 et 400 000 habitants sur le territoire de l'Estonie soit 10% de la population du royaume de Suède. Cet accroissement de la population est en partie lié à l'arrivée d'immigrants qui viennent repeupler les territoires vidés par les différents conflits et répondent ainsi parfois à l'appel des autorités : ils viennent de Finlande, Russie, Courlande et Lituanie. En général les nouveaux venus finissent par se fondre dans la paysannerie estonienne. Toutefois une communauté de russes vieux-croyants, pourchassés dans leur pays, vient coloniser les rives du lac Peipous et conservera jusqu'à aujourd'hui sa langue et sa culture. Des commerçants et artisans russes s'installent dans les villes. La croissance démographique est interrompue par le petit age glaciaire qui débute à cette époque et provoque une dégradation climatique catastrophique en 1695-1697 : des pluies diluviennes et un froid persistant entrainent une famine accompagnée d'épidémies de typhus et de dysenterie qui fait périr 20% de la population[22].

Le nouveau pouvoir des barons baltes[modifier | modifier le code]

Le pouvoir de la classe dominante germanophone descendante de l'ordre de Livonie sort fortement renforcée de cette série de conflits. Ceux qu'on appelle désormais les barons baltes (en allemand ils se désignent par le terme de Balten « baltes » ou Deutschbalten « baltes allemands » ou Balstischer Adel « noblesse balte » pour se distinguer des roturiers), reçoivent la récompense de leur soutien à la Suède avec des variantes selon les régions administratives : très favorable en Estlande qui s'est rallié très tôt à la couronne suédoise, un peu moins à Saarema ou les terres confisquées sont en partie conservées par la couronne suédoise et en Livlande intégrée plus tardivement. Dans ces trois régions les barons baltes bénéficient d'un statut juridique privilégié (Ritterschaft chevalerie) ; les affaires courantes sont désormais gérées par des conseillers territoriaux (Landräte) choisis parmi les barons baltes. Les représentants forment une diète régionale qui se réunit tous les 3 ans à Tallin pour l'Estlande et Riga pour la Livlande. Les pouvoirs du gouverneur suédois sont essentiellement fiscaux et militaires. Les lois suédoises n'ont pas court. Les institutions mises en place, qui donnent les pleins pouvoirs aux barons baltes, se maintiendront jusqu'en 1917[23].

Dégradation de la condition des paysans et stagnation des villes[modifier | modifier le code]

Malgré l'absence d'évolution des pratiques agricoles, les provinces baltes contribuent à approvisionner Stockholm ce qui leur vaut le surnom de « grenier de la Suède ». Le nombre des mõisad, ces grands propriétaires terriens généralement germanophones, atteint le millier sur le territoire de l'Estonie et grâce aux pouvoirs accrus accordés à la noblesse balte, s'approprie de nouvelles terres agricoles en expulsant ou asservissant les paysans jusque là propriétaires. La concentration des terres entraine la disparation de villages et aboutit à un habitat rural dispersé. Le satut de la majorité des paysans est modifié par des règlements édictés en 1645 en Estlande et en 1671 et 1688 en Livlande : le paysan est désormais un serf attaché à la terre de manière héréditaire qui peut être vendu avec la propriété agricole ; les chatiments corporels se généralisent. La justice seigneuriale s'impose face à une administration suédoise embryonnaire. La fiscalité s'accroit : 50 à 80% des revenus des paysans reviennent à la noblesse locale et à la couronne. Malgré cette dégradation de la condition paysanne, les révoltes sont de faible ampleur. Le pouvoir suédois va toutefois intervenir à compter des années 1670 pour freiner et inverser cette évolution du statut du paysan[24].

Les villes de l'Estonie ont du mal à se remettre des conflits dont elles ont souvent été victimes car le territoire estonien est désormais à l'écart des principaux courants commerciaux. La population urbaine ne regroupe que 6% de la population totale en 1700. La plus grande ville est Tallin qui avec 11 000 habitants est la troisième cité du royaume suédois après Stockholm et Riga mais la plus dynamique est Narva qui devient le principal centre commercial du golfe de Finlande. Les premières manufactures industrielles s'installent à Narva et Tallinn[25].

Alphabétisation des campagnes et influence culturelle allemande[modifier | modifier le code]

Les églises continuent de jouer un rôle majeur dans l'évolution culturelle. Le pouvoir suédois s'intéresse de près à la promotion du protestantisme dans cette région à la limite des terres catholiques (Lituanie) et orthodoxes (Russie). Les deux évêchés (Tallin et Riga) qui subsistent sur le territoire après une réorganisation des nouveaux dirigeants, reçoivent durant cette période des titulaires suédois à deux exceptions près. La Pologne-Lituanie avait tenté, lorsqu'elle détenait la Livlande (1561-1629), de ramener au catholicisme la population convertie à l'église Réformée. Dans ce contexte les jésuites, acteurs principaux de la contre-Réforme, avaient fondé en 1583 à Tartu une école de traducteurs et un établissement d'enseignement secondaire puis en 1595 un collège d'enseignement supérieur chargé de former les prêtres et les cadres administratifs. Après la prise de la ville par les suédois en 1625, les jésuites sont expulsés et l'école est mise au service du clergé luthérien. Le souverain suédois Gustave II Adolphe élève en 1632 le collège de Tartu au rang d'université. Il s'agit à l'époque de la deuxième université de Suède après lUppsala. Jusqu'à sa dissolution par la Russie en 1710, elle fonctionnera de manière discontinue du fait des conflits et des problèmes financiers et formera en tout 1706 étudiants futurs pasteurs et juristes surtout suédois et germanophones.

La langue estonienne se métisse d'allemand. La structure de la phrase se calque sur celle de l'allemand. Les verbes à particule séparable apparaissent à l'image des langues germaniques. Environ 15 à 20% du vocabulaire est issu de l'allemand[26].

Les réformes de Charles XI[modifier | modifier le code]

Le roi Charles XI de Suède, parvenu au pouvoir en 1660, veut établir un état fort sur le modèle de l'état français. Dans ses possessions baltes cette nouvelle politique se traduit par le renforcement du pouvoir royal au détriment des élites germanophones et par un allégement de la condition des paysans afin d'éviter les révoltes. A partir de 1680 le pouvoir suédois s'approprie tous les domaines dont les maîtres allemands n'ont pas de titre de propriété en bonne et due forme (Güterreduktion), comme cela a été fait en Suède auparavant. Les confiscations sont plus importantes en Livlande ; sur l'ensemble du territoire 54% des biens des mõisad sont rattachés à la couronne suédoise mais contrairement à la Suède on laisse aux anciens propriétaires l'usage de leurs terres. Sur les terres confisquées, les pasteurs autrefois nommés par la noblesse sont désormais désignés par les représentants du souverain suédois. Le servage y est aboli par des décrets passés en 1681 et 1687. Les paysans désormais prennent part aux conseils provinciaux et peuvent demander justice devant des tribunaux royaux. Face à toutes ces mesures les élites germanophones, qui sentent leur pouvoir menacé pour la première fois dans leur histoire, protestent vigoureusement jusqu'à déclencher la dissolution de la diète de la Livonie par le pouvoir royal en 1694. Charles XII de Suède, qui monte sur le trône en 1697 alors qu'il n'est encore qu'un adolescent, tente en vain d'apaiser la noblesse en revenant sur certaines des mesures prises par son père[27].

La grande guerre du Nord[modifier | modifier le code]

En hachuré les possessions suédoises cédées à la Russie dans le cadre du traité de Nystad qui conclue la Grande guerre du Nord

Pierre Ier de Russie, tsar depuis 1682, a de grandes ambitions pour son pays qu'il veut moderniser en l'ouvrant vers l'Europe occidental. Il va profiter de la position affaiblie de la Suède dans les pays baltes. Une alliance est conclue entre la Pologne-Lituanie, le Danemark, la Saxe et la Russie contre la Suède en 1699. Ce pacte est en grande partie le résultat des intrigues du maréchal de camp balte Johann Reinhold von Paktul ; cet ancien porte-parole de la diète de Livlande a tenté de s'opposer aux réformes en 1692 avant de passer dans le camp de la Pologne-Lituanie. La Grande guerre du Nord éclate en février 1700. Les troupes saxonnes et polono-lituaniennes pénètrent sur le territoire des pays baltes par le sud mais échouent devant Riga tandis que le roi de Suède repousse une attaque russe contre Narva. Le corps d'armée principal suédois dirigé par Charles XII s'enfonce en Pologne ce qui permet aux troupes russes de pénétrer en Ingrie et dans les pays baltes mal défendus. L'armée russe ravage les campagnes et s'empare de Tartu et de Narva. Le souverain suédois, après avoir pris le dessus sur ses ennemis à l'ouest et leur avoir imposé des traités de paix, se retourne en 1706 contre les russes avec qui un armistice avait été signé entre temps. Mais il est complètement défait à la bataille de Poltava en Ukraine en 1709 ce qui permet aux troupes russes de parachever la conquête des territoires baltes en 1710. Le conflit se poursuit notamment en Finlande. Il s'achève en 1721 avec le Traité de Nystad qui confirme l'annexion de l'ancienne Livonie par la Russie[28].

L'Estonie dans l'empire russe[modifier | modifier le code]

Le statut quo[modifier | modifier le code]

Les nouveaux dirigeants russes n'introduisent aucun bouleversement dans la région. La noblesse germanophone, qui a accueilli favorablement le changement de suzerain, retrouve la position qu'elle détenait avant les interventions des deux derniers souverains suédois : dès 1710 les privilèges des diètes de Livlande et d'Estlande sont ainsi restaurés et les biens confisqués par la couronne suédoise sont restitués. Par la suite, tous les tsars jusqu'à Alexandre II de Russie confirmeront leurs droits et la gestion des provinces sera entièrement confiée aux barons baltes qui en échange feront preuve d'un loyalisme sans faille envers le pouvoir russe. La noblesse lettone fournira par la suite de nombreux serviteurs de rang élevé aux souverains russes qui, depuis Pierre le Grand, s'appuient sur une élite intellectuelle et militaire souvent d'origine germanique. Sur le plan religieux et linguistique, les autorités russes n'interfèrent pas avec les pratiques locales contrairement à ce qui se passe dans le reste de l'Empire. Le cadre administratif est légèrement modifié : la province de Livlande et d'Estlande sont chacune divisée en 4 districts. Saaremaa est désormais un des districts de Livlande. Le pouvoir russe désigne les deux gouverneurs des régions, généralement des russes, qui traitent essentiellement des affaires militaires ainsi que les responsables des douanes et les percepteurs d'impôt. Le reste de l'administration est entre les mains des barons baltes. La langue de l'administration et de la justice tandis que celle de l'armée et des douanes est le russe. Les pays baltes sont protégés par une barrière douanière du reste de l'Empire et dispose de sa propre monnaie, le Thaler[29].

  • 1710-1712 : Une forte peste ravage le pays.
  • 1711 : Fermeture de l'université de Tartu.
  • 1715 : Publication du Nouveau Testament en estonien du sud.
  • 1729 : Début de la prédication des frères moraves, mouvement piétiste fondé en Bohême par le comte Nikolaus Ludwig von Zinzendorf.
  • 1739 : Publication de la Bible entière en estonien du nord : cette langue prend peu à peu le dessus sur l'estonien du sud, elle est à la base de la langue écrite moderne.
  • 1743 : Interdiction de la prédication des frères moraves.
  • 1764 : Voyage de Catherine II en Livonie. L'année suivante elle fait des propositions d'amélioration du sort des serfs, mais la diète s'y oppose.
  • 1779 : Publication du recueil de chants populaires de J. G. Herder, Stimmen der Völker in Liedern. Il inclut huit chants estoniens.
  • 1797 : Des Estoniens commencent à être recrutés pour l'armée russe.
  • 1802 : Réouverture de l'université de Tartu ; les cours sont toujours en allemand, mais une chaire d'estonien apparaît en 1803.
  • 1806 : Publication du premier journal en langue estonienne, l'hebdomadaire Tarto maa rahwa Näddali-Leht.
  • 1816 : Abolition du servage dans la province d'Estlande (nord de l'Estonie actuelle).
  • 1819 : Abolition du servage à Saaremaa et en Livonie. La terre n'est pas redistribuée, la corvée est maintenue.
  • 1821 : Premier périodique de diffusion notable en estonien, le Marahwa Näddala-Leht d'Otto Wilhelm Masing.
  • 1822 : Décès à vingt et un ans de Kristian Jaak Peterson, premier grand poète estonien, ignoré de son vivant.
  • 1838 : Fondation à Tartu de la Esthnische Gelehrte Gesellschaft (« Société savante estonienne ») par des Allemands « estophiles ».
  • 1841 : « Guerre de Pühajärv » : émeutes à la suite de rumeurs de distributions de terres en Russie.
  • Années 1840 : Conversions à l'orthodoxie et début d'émigration en direction de la Russie méridionale.
Premier numro du quotidien Perno Postimees (1857)
  • 1857 : Débuts d'une presse régulière : Johann Voldemar Jannsen fonde le Perno Postimees (devenu Eesti Postimees en 1864, puis Postimees en 1891).
  • 1857-1861 : Friedrich Reinhold Kreutzwald publie le Kalevipoeg, épopée nationale estonienne.
  • 1858 : « Guerre de Mahtra » : soulèvement paysan à la suite de l'annonce du report à dix ans de l'application d'une loi sur l'accès des paysans à la propriété de la terre.
  • 1866 : Abolition des châtiments corporels et des corvées.
  • 1869 : Premier festival général du chant choral (à Tartu), organisé par Jannsen.
  • 1878 : Débuts du journal Sakala, publié à Viljandi par Carl Robert Jakobson.
  • 1884 : Bénédiction, à l'église d'Otepää, du drapeau bleu-noir-blanc de l'Association des étudiants estoniens, qui deviendra le drapeau national.
  • 1885 : Début de la russification de l'administration.
  • 1887 : Le russe devient la langue d'enseignement dans les écoles.
  • 1889 : Début de la russification de l'université de Tartu. La ville est rebaptisée Iouriev.
  • 1904 : Aux élections municipales, victoire à Tallinn d'un parti « estonien » (en coalition avec un parti « russe »). Konstantin Päts devient vice-bourgmestre.
  • 1905
    • Publication du premier album du groupe littéraire Noor-Eesti (« Jeune-Estonie »).
    • (29 octobre) : La répression d'une manifestation fait quatre-vingt-dix morts à Tallinn.
    • (10 décembre) : Réunion d'un congrès panestonien à Tartu. Les congressistes, divisés, demandent tous l'autonomie.
    • (26 décembre) : Déclenchement de troubles à la campagne (pillage et incendie des manoirs), sévèrement réprimés par l'armée.

De la Première Guerre mondiale à l'indépendance (1914-1920) =[modifier | modifier le code]

La première guerre mondiale[modifier | modifier le code]

L'entrée en guerre de l'Empire russe contre l'Empire allemand en aout 1917 reçoit un accueil plutôt favorable dans les milieux nationalistes estoniens qui y voient le moyen de prendre une revanche sur les oppresseurs germaniques. Pour la minorité germano-balte c'est au contraire une catastrophe : les entreprises à capitaux allemands sont nationalisées, les établissements scolaires, les périodiques et les associations germano-baltes sont fermés. Durant les trois ans que dure le conflit, l'Estonie, comme tous les autres pays belligérants, est saignée à blanc : 100000 estoniens sont mobilisés soit 20% de la population mâle dontplus de 10000 sont tués et environ 20000 blessés. L'économie, privée de bras, est désorganisée et l'inflation fait rage. Le commerce sur la Baltique est interrompu par le blocus de la marine allemande. En 1916 la tension monte dans la société : les villes, encombrées de réfugiés et de déserteurs, connaissent des problèmes d'approvisionnement, tandis que les grèves, qui se multiplient, atteignent le même niveau qu'en 1906.

La révolution russe[modifier | modifier le code]

L'effondrement du régime tsariste en quelques jours, en février 1917, surprend tous les acteurs. La révolution qui s'en suit est au début, en Estonie comme dans le reste de l'Empire Russe, peu violente car les forces de l'ordre refusent de défendre le régime. En Estonie, deux soviets, composés essentiellement de militants socialistes recrutés parmi les ouvriers et les soldats, sont créés à Tallin et Narva. Les russophones y sont majoritaires. Le pouvoir officiel coexiste avec ces deux instances sans coordination. Les nationalistes estoniens mobilisent l'opinion régionale et, à l'issue d'une manifestation qui rassemble 45 000 personnes devant le palais du gouvernement russe à Saint-Petersbourg, obtiennent du gouvernement provisoire du prince Lvov un nouveau découpage des frontières des pays baltes. Une entité administrative baptisée Estonie est créée ; ses frontières coïncident avec celles de l'Estonie moderne (à l'exception de Narva). L'estonien devient la langue d'enseignement dans les établissements scolaires, les diètes sont abolies. Les fonctionnaires russophones sont renvoyés et le gouvernement russe autorise la formation d'un régiment estonien de 8000 hommes en espérant que les soldats auront ainsi plus à cœur de défendre leur territoire contre les allemands. Le maire de Tallin, un estonien Janna Poska, devient commissaire du gouvernement de l'Estonie à titre provisoire en attendant l'élection d'une assemblée provinciale. Les élections ont lieu en mai dans les campagnes et en aout et septembre dans les villes. La Diète qui est élue comprend 62 membres dont cinq bolchéviques, neuf menchéviques, huit S.R., sept représentants du Parti Démocrate Estonien, un représentant de la minorité germanophone, un autre de la minorité suédophone. Deux nouveaux partis apparaissent à l'occasion de cette élection : le parti agrarien auquel adhère Päts qui n'a pu fonder son propre parti comme il le souhaitait et le parti travailliste estonien. Dans les villes, à Tallin et encore plus à Narva les partis bolchéviques et S.R. étaient majoritaires car ils peuvent s'appuyer sur une forte minorité russophone et les soldats sensibles à la propagande bolchévique. Le parti bolchévique qui comptait 200 militants en mars en avait 20 000 en octobre. Les allemands repassent à l'offensive fin septembre en occupant l'île de Saaremaa alors qu'en Estonie l'anarchie s'installe[30].

Le 27 octobre, soit 2 jours après la révolution d'Octobre au cours de laquelle les bolchéviques s'emparent du pouvoir à Saint-Pétersbourg, un comité militaire révolutionnaire d'Estonie, dirigé par le russe Ivan Rabrchinski et l'estonien Victor Kingissepp, chasse le commissaire du gouvernement estonien Poska et prend le pouvoir au nom du nouveau régime. Mais les représentants politiques estoniens résistent : la Diète refuse la dissolution et se proclame l'organe officiel du pouvoir en Estonie au cours de la seule session qu'elle tiendra, les fonctionnaires se mettent en grève, le conseil municipal de la capitale ne se résigne à être dissous qu'en janvier. Les élections constituantes qui devaient avoir lieu sur l'ensemble du territoire de l'ex Empire russe sont maintenues par les bolchéviques. En Estonie, ceux ci ont su séduire la population grace aux promesses de paix, d'autodétermination des peuples et de réforme agraire. Ils obtiennet 40% des voix contre 24% sur l'ensemble du territoire russe. Le Bloc Démocratique de Tönisson obtient 23% des voix et le Parti Travailliste 22%. Fort de ce succès local, les bolchéviques décident de lancer un deuxième scrutin pour élire une constituante estonnienne. Mais le vote, qui débute les 21 et 22 janvier, s'annonce beaucoup moins favorable pour les bolchéviques et ceux-ci décident de l'interrompre sous prétexte d'un complot des germano-baltes et des nationalistes et ils proclames l'état de guerre. Début janvier l'assemble constituante panrusse, où les bolchéviques sont minoritaires avait été dissolue par ces derniers. Le comité des Anciens, émanation de la Diète, décide début décembre de mobiliser un embryon d'armée nationale. L'idée de l'indépendance commence à prendre corps sein des dirigeants politiques estoniens, qui hormis les bolchéviques, n'attendent rien de positif de l'évolution en cours en Russie. Des représentants de la Diète proposent une association sous forme de fédération aux pays scandinaves qui repoussent cette idée. Des contacts sont pris avec les puissances occidentales pour sonder les opinions[31].

Les menaces se précisent au sein de l'Estonie où les bolchéviques commettent des actes de violence contre les prêtres, pratiquent des nationalisations et des confiscations arbitraires et déportent 550 germano-baltes coupables, selon eux, de trahison. Les négociations entre le gouvernement russe et l'Allemagne pour la signature du traité de Brest-Litovsk piétinent : l'armée allemande repasse à l'attaque le 18 février 1918 depuis ses bases en Lettonie. Durant la brève vacance du pouvoir qui sépare le départ des bolchéviques et l'arrivée des allemands, le Comité de salut public qui a été désigné le 19 février par le Comité des Anciens pour diriger le pays et qui est composé de 3 membres dont Päts et Vilms, proclame symboliquement l'indépendance de l'Estonie dans ses frontières historiques et ethnographiques. L'armée allemande achève d'occuper l'ensemble de l'Estonie le 3 mars. Le même jour, le gouvernement russe accepte les conditions du traité de paix. En aout de la même année il accepte dans le cadre d'une clause additionnelle de renoncer à sa souveraineté sur les provinces baltes [32].

La guerre d'indépendance (1918-1920)[modifier | modifier le code]

Guerre d'indépendance estonienne

Informations générales
Date Novembre 1918février 1920
Lieu Estonie
Issue Indépendance de l'Estonie
Belligérants
Estonie
Royaume-Uni
Modèle:Country data Russian SFSR et la Commune des travailleurs d'Estonie Duché balte uni
Russes blancs volontaires

L'occupation allemande de l'Estonie va durer 9 mois jusqu'à la défaite de l'Empire allemand en novembre 1918. Les germano-baltes reprennent les commandes de la région sous la tutelle des autorités militaires et annulent toutes les mesures prises en faveur des estoniens depuis le début de la révolution. Environ 2 000 bolchéviques et nationalistes estoniens sont exécutés, dont sans doute Vilms. Le pays est pillé par le nouvel occupant qui manque de tout. Le système éducatif est germanisé et l'enseignement dans l'université de Tartu, qui a été réouverte, se fait désormais en allemand. Les nouveaux dirigeants germanophones mettent sur pied en avril un Conseil National (Landesrat) représentant les trois provinces baltes qui est notamment composé de 35 représentants des germano-baltes (pour les 3 régions) et de 13 représentants estoniens. Le Conseil propose à l'empereur Guillaume II d'Allemagne de créer un grand-duché balte (Baltikum). Le pouvoir allemand qui a pris d'autres engagements dans le cadre du traité de paix et qui a une confiance relative dans les dirigeants locaux ne donne son accord qu'en septembre : la création du Baltikum est proclamée en novembre alors que l'Empire allemand s'effondre. Durant cette période les dirigeants estoniens, qui sont passés dans la clandestinité, ont pris contact avec l'Italie, la France et le Royaume-Uni qui acceptent de reconnaitre le principe d'une indépendance de l'Estonie. Le 11 novembre, le jour de l'armistice, le gouvernement provoire estonien sort de la clandestinité et Päts qui a été libéré en prend la tête. Le 21 novembre les occupants allemands lui remettent officiellement le pouvoir alors que le régime allemand s'effondre[33].

Les dirigeants de l'Union Soviétique tentent de profiter de la nouvelle situation et dénoncent le traité de Brest-Litovsk le 13 novembre. Mi-novembre un Comité Révolutionnaire provisoire d'Estonie se proclame seul pouvoir légal en Estonie et demande à l'Armée Rouge de libérer le pays. Les soldats russes passent à l'attaque le 22 novembre dans la région de Narva mais sont repoussés par les armées allemandes qui n'ont pas encore quitté la région. Une nouvelle attaque le 28 novembre permet la prise de Narva et début janvier l'Armée Rouge occupe tout l'est de l'Estonie. Le gouvernement provisoire tente de mobiliser sans grand succès les estoniens et de faire appel à l'aide de la Finlande et de la Grande-Bretagne. Kignissep tente d'organiser un soulèvement pro bolchévique à Tallinn contre le gouvernement mais celui-ci. Une armée estonienne est finalement mise sur pied avec, à sa tête, le lieutenant-colonel Johan Laidoner un ancien officier de l'armée russe. Celui-ci reprend l'offensive à la tête d'une division estonienne assistée de volontaires plus ou moins organisés. Une escadre britannique fait escale à Tallinn en décembre 1918 pour repousser toute tentative d'attaque soviétique par la mer et apporter de munitions et des armes tandis que la Finlande envoie du matériel et consent un prêt. Des volontaires lettons et scandinaves viennent prêter main-forte à l'armée estonienne. Le 1er février, cette coalition est parvenue à repousser l'Armée Rouge en dehors du territoire estonien[34].

En février l'Armée rouge reprend l'offensive dans le sud est. En mai les estoniens parviennent à repousser celle-ci en territoire russe où ils reçoivent le soutien de l'armée des russes blancs de Nikolaï Ioudénitch. Mais l'entente n'est pas parfaite car Ioudénitch, qui lutte pour rétablir l'Empire russe, est hostile à l'indépendance de l'Estonie. Au sud l'armée estonienne doit se battre contre les corps-francs allemands et les germano-baltes qui ont pris le pouvoir en Lettonie et luttent à la fois contre l'Armée Rouge et les nationalistes baltes. Les estoniens défont ceux-ci le 23 juin 1919 lors de la bataille de Cesis. La victoire contre l'ennemi séculaire sera par la suite célébrée comme une fête nationale. En septembre 1919 l'Estonie engage des pourparlers de paix avec la Russie au dépit des puissances occidentales et de leurs alliés baltes et scandinaves qui espèrent renverser le régime bolchévique. Après avoir soutenu mollement une dernière offensive de l'armée des russes blancs de Ioudénévitch contre Saint-Pétersbourg (rebaptisée Petrograd) qui échoue, ils reprennent les négociations en décembre 1919 et après d'âpres négociations signent avec les soviétiques le traité de Tartu le 2 février 1920. Dans celui-ci la Russie soviétique reconnait l'indépendance de l'Estonie. La nouvelle frontière ajout au territoire estonien une bande de territoire située en territoire russe sur la rive droite du fleuve Narva ainsi que l'ensemble du pays sétou au sud-est qui représentent 5% de la superficie totale de l'Estonie. Les russes d'origine estonienne, dont le nombre est estimé à 20000, est autorisé à rentrer au pays : seuls la moitié d'entre eux présenteront des demandes et 37500 seront autorisés à revenir[35].

La première période d'indépendance[modifier | modifier le code]

Déclaration d'indépendance à Pärnu
Déclaration d'indépendance de l'Estonie du 21 février 1918
Constantin Päts

Les institutions de l'Estonie[modifier | modifier le code]

Les premières élections de l'Estonie indépendante ont lieu en avril 1919 dès que l'Armée rouge a été repoussé en dehors du territoire. L'assemblée constituante élue comprend une majorité d'élus socialistes réformistes (71 sièges sur 120) qui ont capitalisé sur un programme de réforme agraire et promis des emplois aux anciens combattants. Le parti du premier ministre par intérim Päts n'obtient que 8 élus. L'assemblée met un an à définir le régime politique du nouveau pays. Elle opte pour un régime parlementaire le plus proche des principes démocratiques, qui se révèlera en pratique mal adaptée aux temps de crise qui suivront et à l'immaturité politique de ce pays neuf. Le pouvoir législatif est représenté par une chambre unique de 100 représentants élue pour 3 ans au scrutin proportionnel. Le chef du gouvernement fait également office de chef d'état ; il peut être révoqué à tout moment par les députés et n'a pas de droit de veto sur les décisions législatives. Les citoyens disposent de droits étendus dont ceux de pouvoir initier des référendums populaires à condition de recueillir suffisamment de signatures. Une loi votée dès octobre 1919 confisque les terres de pratiquement tous les mõisads terriens qui subsistaient à l'époque ainsi que les domaines de la couronne et des églises, soit en tout 55% des terres arables de l'Estonie. Celles-ci sont par la suite redistribués ou vendus aux paysans estoniens qui se transformèrent du jour au lendemain en autant petits propriétaires. En 1925 un statut légal très ouvert est accordé pour les minorités qui à l'époque ne constituaient pas encore un problème par leur poids démographique[36].

Les débuts de l'Estonie[modifier | modifier le code]

Meeting du mouvement de la Ligue des vétérans de la guerre d'Indépendance : l'orateur est Artur Sirk

L'ère soviétique[modifier | modifier le code]

Plan du blocus et de l'invasion de l'Estonie par l'URSS (1940)

La première occupation soviétique[modifier | modifier le code]

Le 23 août 1939 l'Allemagne signe avec l'Union soviétique le Pacte germano-soviétique (dit « Pacte Molotov-Ribbentrop ») : ce pacte de non-agression permet au dirigeant nazi Adolf Hitler de ne pas avoir à lutter sur deux fronts si la guerre éclate. Une clause secrète définit le partage des zones d'influence dans les régions situées entre les deux puissances (Pays baltes, Pologne, Finlande). L'Estonie fait partie de la "sphère d'intérêt" soviétique. Le 1er septembre l'Armée allemande ouvre les hostilités en pénétrant sur le territoire de la Pologne ; l'entrée en guerre de la France et du Royaume-Uni, alliés de la Pologne, déclenche la Seconde Guerre mondiale. Staline, constatant que le conflit tourne à l'avantage de l'Allemagne, déclare à son tour la guerre à la Pologne le 17 septembre. Immédiatement l'Estonie se déclare neutre, mais les dirigeants soviétiques, utilisant un prétexte (un sous-marin polonais présent dans le port de Tallin n'aurait pas été désarmé), exigent des négociations en exerçant un blocus maritime et terrestre du pays pour appuyer leur demande. Le président Konstantin Päts, qui sait que son pays est isolé, accepte de signer le 28 un traité d'assistance mutuelle qui permet aux soviétiques d'installer des bases navales sur le territoire estonien. L'Armée soviétique installe peu après des troupes terrestres en violation de ces accords. Adolf Hitler a négocié dans le cadre du pacte le rapatriement des germanophones sur le territoire allemand : ceux-ci doivent devenir les nouveaux colons de l'Allemagne agrandie. La quasi totalité des germano-baltes estoniens, soit 20 000 personnes, acceptent de répondre à l'appel du gouvernement nazi et quittent l'Estonie entre octobre 1939 et 1941 mettant fin à une présence qui avait marqué le pays depuis le 13ème siècle[37].

En juin 1940, le gouvernement soviétique, qui est mis en échec par l'armée finlandaise, décide de transformer sa présence en Estonie en occupation : 90000 hommes et 600 tanks pénètrent sur le territoire estonien sans rencontrer de résistance. Le gouvernement Uulots, sous la pression de pseudo manifestants, laisse la place à une nouvelle équipe composée en partie d'intellectuels non communistes dirigée par le médecin et poète Johannes Vares. Des élections largement truquées sont organisées à la mi-juillet : presque tous les candidats d'opposition ont été récusés; les candidats présentés par les communistes remportent 93% des votes avec une participation de 84%. Le président Päts est démis de ses fonctions par l'assemblée et les élus proclament l'Estonie République socialiste soviétique et demandent son incorporation à l'URSS. Le 6 aout 1940 l'Union Soviétique annexe l'Estonie. Le NKVD soviétique mène une campagne de purge. Les principaux cadres de l'Armée et dirigeants politiques sont arrêtés et remplacés par des communistes dont de nombreux Estoniens ayant résidé en URSS. Les cadres estoniens arrêtés sont déportés en Russie ou parfois fusillés sur place. Le chef de l'armée estonienne Johann Laidoner mourra dans un camp soviétique à Vladimir en 1953 et le président Päts à Tver en 1956. L'Estonie est dotée d'institutions soviétiques. L'assemblée prend l'appellation de soviet suprême et l'exécutif est confié au Conseil des commissaires du peuple dirigé par Johanes Lauristin. Le parti communiste, qui compte environ 4000 membres, est institué parti unique[38].

L'économie est entièrement nationalisée hormis le commerce de détail. En principe les propriétés agricoles ne sont pas concernées mais environ un quart des terres sont confisquées sous des prétextes divers. Le marché du travail est désormais géré par le Gosplan qui réaffecte les ouvriers estoniens au gré de la demande. Près de 2 000 ouvriers estoniens sont ainsi déportés à l'extérieur de l'Estonie. Le niveau de vie s'effondre. L'enseignement de l'histoire est entièrement revu. Les cours de marxisme-léninisme et de russe sont mis en avant tandis que les cours de religion et de langues anciennes disparaissent. La presse est placée sous le contrôle de l'état. Au printemps 1941 la tension croissante entre l'URSS et l'Allemagne entraine un accroissement de la répression dans toutes les régions annexées récemment. Environ 6 000 personnes sont arrêtés entre janvier et juillet 1941 puis plus de 9000 personnes (soit 1% de la population estonnienne) sont arrêtées le 14 juin au terme d'une opération soigneusement préparée. Une grande partie des hommes arrêtés sont exécutés sur place ou en Union Soviétique et la plupart des femmes et des enfants ne survivront pas à l'épreuve des camps. Une semaine plus tard, le 22 juin, l'Allemagne déclenche l'opération Barbarossa contre l'Union Soviétique. Dès l'annonce de la guerre, les atrocités se multiplient sur le territoire estonien tandis 33 000 estoniens sont incorporés de force dans l'Armée Rouge dont moins de la moitié reviendra vivant du conflit. Les armées allemandes qui ont rapidement enfoncé le front soviétique sont accueillies en libérateur par les estoniens qui voient la fin de leur cauchemar. Une guérilla de plus de 10 000 hommes contribue à la libération du territoire de l'occupation soviétique. Les combats sur le territoire estonien débute le 7 juillet se s'achève par sa libération le 21 octobre. Les soviétiques avaient évacué environ 25 000 personnes proches collaborateurs[39].

L'occupation allemande (1941-1944)[modifier | modifier le code]

Il n'est pas question pour l'Allemagne nazie de rendre son indépendance, même de manière symbolique, à l'Estonie. L'occupant ménage toutefois les finno-ougriens qui, dans sa vision raciste du monde, fait partie des peuples nordiques, donc supérieurs aux slaves et a fortiori aux juifs et à qui, de plus, une élite germanophone a montré l'exemple durant plusieurs siècles. Les exactions durant l'occupation allemande sont essentiellement limitées aux minorités que le régime nazi pourchasse : les juifs qui n'ont pas fui, soit un quart de cette minorité qui comptait plus de 4 500 personnes avant guerre, sont éliminés impitoyablement entre aout et décembre 1941, ainsi qu'un nombre de tsiganes peut-être équivalent et 4 000 à 6 000 communistes, résistants et membres de bataillons de destruction. Par ailleurs une dizaine de milliers de juifs en provenance des pays voisins périssent dans des camps de concentration installés sur le territoire estonien ainsi qu'environ 15 000 prisonniers de guerre russes. Le 19 septembre 1944, à la veille du retour de l'Armée Rouge, l'occupant perpétue le plus grand massacre qu'ai connu l'Estonie à Klooga en éliminant sauvagement environ 1 800 personnes, essentiellement des juifs. Une petite minorité collabore avec les allemands mais est essentiellement motivée par l'anti-communisme. Néanmoins les forces de sécurité estoniennes jouent un rôle actif dans les arrestations et les autochtones fournissent l'essentiel de l'encadrement des camps de prisonnier et des camps de concentration[40]..

L'occupant accepte, à la demande des estoniens, la constitution d'une milice chargée de poursuivre les communistes et de maintenir l'ordre, mais ce corps populaire au début de l'occupation perd rapidement tout attrait. En aout 1942, les dirigeants nazis décident de constituer un corps de la Waffen SS estonien qui ne réussit à recruter que 500 volontaires. A partir de février 1943, les classes 37 à 42 sont mobilisées par les allemands sans grand succès : si plus du tiers des appelés sont malgré tout incorporés ou envoyés en Allemagne dans les industries de guerre, près de 6 000 jeunes gens rejoignent l'armée finlandaise qui combat l'Armée Rouge tandis que le reste prend le maquis. A l'approche de l'Armée Rouge qui avance inexorablement, un appel lancé par Uulots, le chef de gouvernement d'avant guerre, parvient toutefois à mobiliser de 38 000 à 43 000 hommes pour repousser un envahisseur particulièrement redouté. Grâce à cette mobilisation, l'Armée Rouge est bloquée durant 6 mois devant Narva. Durant cette phase du conflit les bombardements aériens détruisent le centre de Narva et de Tallinn. Finalement Tallinn tombe le 22 septembre 1944 et la conquête de l'Estonie s'achève en novembre 1944. L'invasion de l'Armée Rouge provoque un exode massif de la population qui craint des représailles comme celles qu'on subi certains peuples caucasiens de l'URSS dans des circonstances similaires. Durant l'été 1944 près de 80 000 personnes soit 9% de la population prend la mer et tente de s'échapper. Entre 4 000 et 7 000 d'entre eux périssent en chemin victimes des chasseurs bombardiers soviétiques qui attaquent les bateaux chargés de civils. Les survivants débarquent pour un tiers en Suède, le reste en Allemagne d'où la plupart gagneront par la suite l'Amérique du Nord. Cet exode est une catastrophe pour l'Estonie qui perd une grande partie de ses élites intellectuelles, du corps enseignant et des cadres religieux déjà décimés par les massacres qui ont précédé. A l'issue de ces événements il ne reste plus que 25% du corps professoral en Estonie ; le pays a perdu par ailleurs 20% de sa population d'avant-guerre[41].

La deuxième occupation soviétique (1944-1991)[modifier | modifier le code]

Alors que les combats en Estonie ne sont pas achevés, les dirigeant soviétiques décident d'amputer le pays de plusieurs territoires représentant 5% de sa superficie (notamment les terrains se situant sur la rive droite de la Narva). Il s'agit de lieux susceptibles de jouer un rôle stratégique et que l'URSS souhaite conserver dans l'éventualité de traités de paix qui l'obligerait à restituer son indépendance à l'Estonie. Des campagnes d'arrestation reprennent et touchent environ 75 000 personnes entre 1944 et 1949, dont un tiers est fusillé ou meurt dans des camps, le restant étant déporté. Les Estoniens qui ont lutté contre l'Armée Rouge et n'ont pu fuir le pays ainsi qu'une partie de ceux qui ont refusé de se laisser enroler par les soviétiques prennent le maquis. Les frêres de la forêt sont dans les années 1945-1947 30 000 soit 4% de la population présente. Ils luttent avec l'espoir que les forces alliées viendront délivrer le pays de l'occupation soviétique[42].

  • 1944 : Reconquête de l'Estonie par l'Armée rouge. Plus de soixante-dix mille personnes s'enfuient en Suède.
  • 1945 : Début d'une immigration massive de russophones.
  • 1949 (25 mars) : Vingt mille personnes sont déportées en Sibérie.
  • 1949-1952 : Collectivisation des campagnes.
  • 1954 : Constitution d'un gouvernement estonien en exil.
  • 1956-1960 : Retour des déportés.
  • 1960 Assemblée Consultative du Conseil de l'Europe Résolution passe la “Résolution 189 (1960) relative à la situation dans les Etats baltes, à l'occasion du vingtième anniversaire de leur incorporation forcée dans l'Union Soviétique.” [1]
  • 1965 : Ouverture d'une ligne régulière de ferry entre Tallinn et Helsinki.
  • 1972 : À Toronto, des émigrés estoniens organisent les premières Journées estoniennes mondiales (ESTO).
  • 23 août 1979 : Appel baltique : à l'occasion du 40e anniversaire du pacte Molotov-Ribbentrop quarante-cinq dissidents des pays baltiques diffusent une lettre ouverte réclamant la publication du protocole secret de ce pacte et la « liquidation de ses conséquences ».
  • 1980 : Vague de russification, notamment dans l'enseignement. Manifestations de jeunes à Tallinn et dans d'autres villes. « Lettre des Quarante » (première grande protestation d'intellectuels contre la russification).
  • 1985 : Début de la perestroïka en URSS.
  • 1986-1987 : Campagne écologique contre l'ouverture d'une mine de phosphorite. Pour la première fois, la pression populaire force le pouvoir à reculer.
  • 1987
    • (26 septembre) : Présentation du projet d'autonomie économique de l'Estonie (IME).
    • (12 décembre) : Fondation de la Société estonienne pour la protection du patrimoine, première organisation de masse de la société civile, qui œuvre pour la réhabilitation et la conservation de la mémoire historique.
  • 1988
    • (avril) : Première réapparition massive des couleurs nationales (bleu-noir-blanc), interdites durant toute la période soviétique. Début de la formation du Front populaire d'Estonie, qui luttera pour le rétablissement de la souveraineté nationale.
    • (août) : Fondation du premier parti indépendant, le Parti pour l'indépendance nationale de l'Estonie (ERSP).
    • (16 novembre) : Le Soviet suprême subordonne l'application des lois fédérales sur le territoire estonien à son approbation et proclame la « souveraineté » de l'Estonie.
  • 1989
    • (24 février) : Le drapeau bleu-noir-blanc, redevenu officiel, est hissé au sommet de la tour du Grand Hermann à Tallinn.
    • (23 août) : Grande chaîne humaine, la Voie balte, à travers les trois pays baltes, pour le cinquantième anniversaire du pacte germano-soviétique.
  • 1990
    • (24 février) : Élection du Congrès estonien, incarnant la continuité juridique de la République d'Estonie d'avant-guerre.
    • (mars) : Élections au Soviet suprême, remportées par le Front populaire.
    • (30 mars) : Le Soviet suprême proclame « l'ouverture d'une période de transition vers l'indépendance » et déclare, que le régime soviétique est illégal dès son établissement en 1940.
    • (8 mai) : Disparition des adjectifs « socialiste » et « soviétique » dans le nom officiel de la république.

La nouvelle indépendance[modifier | modifier le code]

  • 1991
    • (3 mars): 77% des électeurs se prononcent par référendum pour l'indépendance
    • (20 août) : Rétablissement de l'indépendance.
    • (6 septembre) : L'URSS reconnaît l'indépendance de l'Estonie.
    • (17 septembre) : Admission de l'Estonie à l'ONU
  • 1992
    • (20 juin) : Adoption d'une monnaie nationale, la couronne estonienne.
    • (28 juin) : Adoption par référendum d'une nouvelle constitution.
    • (5 octobre) : Lennart Meri est élu président de la République.
  • 1993 (14 mai) : L'Estonie entre au Conseil de l'Europe.
  • 1994 (31 août) : Départ des dernières troupes russes.
  • 1995 : L'Estonie dépose sa demande d'adhésion à l'Union européenne.
  • 1998 : Entrée en vigueur de l'accord d'association entre l'Estonie et l'Union européenne.
  • 2003 (14 septembre) : La population estonienne se prononce par référendum (66,9%) en faveur de l'adhésion à l'Union européenne.
  • 2004
  • 2007 : Tensions avec la minorité russophone et crise diplomatique avec la Russie, suite à la décision de déplacer du centre de Tallinn à la périphérie la statue du soldat de bronze commémorant la "libération" de l'Estonie par l'Armée rouge. L'Estonie est alors victime d'une cyber-attaque massive et puissante.
  • 2008-2009 : L'Estonie subit la crise économique.

Galerie[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Tallin pourrait avoir pour origine l'expression Taani lidna c'està dire le chateau des Danois.

Références[modifier | modifier le code]

  1. Tarmo Kulmar (trad. JP Minaudier), « Les habitants de l'Estonie préhistorique », dans A.Bertricau (Dir.), L'Estonie : identité et indépendance, Paris, L'Harmattan, (ISBN 2-7475-1036-0), p. 37-50
  2. J.P. Minaudier, op. cit., p.33
  3. J.P. Minaudier, op. cit., p.33-34
  4. J.P. Minaudier, op. cit., p.35-36
  5. J.P. Minaudier, op. cit., p.36-37
  6. J.P. Minaudier, op. cit., p.37-38
  7. J.P. Minaudier, op. cit., p.39
  8. J.P. Minaudier, op. cit., p.40-41
  9. J.P. Minaudier, op. cit., p.41-43
  10. J.P. Minaudier, op. cit., p.43-44
  11. J.P. Minaudier, op. cit., p.43-52
  12. J.P. Minaudier, op. cit., p.48-49
  13. J.P. Minaudier, op. cit., p.77-78
  14. J.P. Minaudier, op. cit., p.79-80
  15. J.P. Minaudier, op. cit., p.80-81
  16. J.P. Minaudier, op. cit., p.81-83
  17. J.P. Minaudier, op. cit., p.70
  18. J.P. Minaudier, op. cit., p.91
  19. J.P. Minaudier, op. cit., p.93-95
  20. J.P. Minaudier, op. cit., p.95-97
  21. J.P. Minaudier, op. cit., p.97-98
  22. J.P. Minaudier, op. cit., p.98-99
  23. J.P. Minaudier, op. cit., p.99-101
  24. J.P. Minaudier, op. cit., p.101-102
  25. J.P. Minaudier, op. cit., p.102-103
  26. J.P. Minaudier, op. cit., p.103-112
  27. J.P. Minaudier, op. cit., p.112-114
  28. J.P. Minaudier, op. cit., p.114-116
  29. J.P. Minaudier, op. cit., p.117-119
  30. J.P. Minaudier, op. cit., p.234-240
  31. J.P. Minaudier, op. cit., p.234-240
  32. J.P. Minaudier, op. cit., p.240-242
  33. J.P. Minaudier, op. cit., p.247-248
  34. J.P. Minaudier, op. cit., p.248-250
  35. J.P. Minaudier, op. cit., p.250-254
  36. J.P. Minaudier, op. cit., p.254-257
  37. J.P. Minaudier, op. cit., p.290-291
  38. J.P. Minaudier, op. cit., p.292-294
  39. J.P. Minaudier, op. cit., p.294-297
  40. J.P. Minaudier, op. cit., p.294-301
  41. J.P. Minaudier, op. cit., p.301-304
  42. J.P. Minaudier, op. cit., p.307-304

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Principales sources utilisées
  • Jean-Pierre Minaudier, Histoire de l'Estonie et de la nation estonienne, L'Harmattan, (ISBN 978-2-296-04673-3)
  • A.Bertricau, L'Estonie : identité et indépendance, L'Harmattan, (ISBN 2-7475-1036-0)
  • Autres ouvrages
  • Suzanne Champonnois et François de Labriolle, L'Estonie : des Estes aux Estoniens. Éditions Karthala, collection « Méridiens », Paris, 1997. 285 p. + 8 p. d'illustrations. (ISBN 2-86537-724-5).
  • Suzanne Champonnois et François de Labriolle, Estoniens, Lettons, Lituaniens. Histoire et destins. Éditions Armeline, Crozon, 2004. 330 p. + XII p. d'illustrations. (ISBN 2-910878-26-0).
  • Suzanne Champonnois et François de Labriolle, Dictionnaire historique de l'Estonie. Éditions Armeline, Brest, 2005. 313 p. (ISBN 2-910878-38-4).
  • Jean Meuvret, Histoire des pays baltiques, Paris, Armand Colin, 1934.
  • Yves Plasseraud, Les États baltiques : des sociétés gigognes. La dialectique majorités-minorités, 2e éd., Brest, Éditions Armeline, 2006. (ISBN 2-910878-23-6)