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« Hindouisme » : différence entre les versions

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=== L'hindouisme et la minorité hindoue aprés la partition indienne ===
=== L'hindouisme et la minorité hindoue aprés la partition indienne ===
Le départ des colonialistes [[royaume-Uni|britanniques]] en [[1947]] a laissé l’Inde divisée en deux territoires. Un à majorité [[islam|musulmane]], le [[Pakistan]] (constitué de deux régions : le Pakistan oriental et occidental) et l’autre à majorité hindoue, l’[[Inde]]. Alors que l’[[Inde|Union indienne]] adoptait la laïcité, le Pakistan, lui, se proclamait [[Pakistan|République islamique du Pakistan]], adoptant une Constitution basée sur une jurisprudence islamique, qui réduisait considérablement les droits politiques de ses minorités religieuses dont la plus importante était la communauté hindoue. De fait, jusqu’à aujourd’hui, et contrairement à l'Inde qui reste le troisième pays musulman au monde, pratiquement aucun hindou n’a pu accéder à une position significative dans la société (gouvernement, armée...).
Le départ des colonialistes [[royaume-Uni|britanniques]] en [[1947]] a laissé l’Inde divisée en deux territoires. Un à majorité [[islam|musulmane]], le [[Pakistan]] (constitué de deux régions : le Pakistan oriental et occidental) et l’autre à majorité hindoue, l’[[Inde]]. Alors que l’[[Inde|Union indienne]] adoptait la laïcité, le Pakistan, lui, se proclamait [[Pakistan|République islamique du Pakistan]], adoptant une Constitution basée sur une jurisprudence islamique, qui réduisait considérablement les droits politiques de ses minorités religieuses dont la plus importante était la communauté hindoue. De fait, jusqu’à aujourd’hui, et contrairement à l'Inde qui reste le troisième pays musulman au monde, pratiquement aucun hindou n’a pu accéder à une position significative dans la société (gouvernement, armée...).
[[Image:Taslima Nasrin 1.jpg|right|thumb|350px|[[Taslima Nasreen]], menacée par des [[fondamentaliste]]s [[islam]]iques à la suite de la publication de son premier roman ''Lajja'' (La honte), qui dénonçait l'oppression courante sur la communauté hindoue au [[Bangladesh]], fut obligée de quitter son [[pays]] natal, le [[Bangladesh]], menacée d'une ''[[fatwa]]'' qui la condamne à mort. Habitant désormais [[Calcutta]], en mars 2007, sa tête à été mise à prix par un groupe islamiste indien<ref name="khaleejtimes">([http://www.khaleejtimes.com/DisplayArticleNew.asp?xfile=data/subcontinent/2007/March/subcontinent_March677.xml&section=subcontinent&col= Indian Muslim group calls for beheading of writer], [[Khaleej Times]] Online / [[Agence France-Presse|AFP]], [[17 March]] 2007</ref>. La prime pour sa [[décapitation]] est de 500 000 [[roupie]]s (8 842,62€). Une pétition à été mise en place pour faire pression sur le gouvernement indien pour qu'il fasse retirer cette prime<ref>voir le [http://www.petitiononline.com/taslima/petition.html texte de la pétition "In Defence of Taslima Nasreen"]</ref>.

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En 1947, la communauté hindoue du [[Pakistan]] représentait '''23 %''' de la population au Pakistan occidental et '''29 %''' au Pakistan oriental. En [[1998]], elle représentait seulement '''1,60 %''' de la population totale du Pakistan – réduit à sa partie occidentale depuis 1971 avec la sécession de sa partie orientale devenue le Bangladesh. Cet effondrement démographique est la preuve éclatante des [[discrimination]]s dont les citoyens pakistanais de confession hindoue ont souffert, et des violations des droits de l’homme dont ils font l’objet. Au Pakistan oriental, aujourd’hui le [[Bangladesh]], deux millions de personnes ont été massacrées lors de la répression menée par la junte militaire d’Islamabad au cours de la guerre d’indépendance de [[1971]]. Ce nettoyage ethnique et l’exode vers l’Inde de la communauté hindoue, portent à 10 millions le nombre de Bangladeshis disparus. Selon Saleem Samad, journaliste militant pour le respect des droits de l'homme, la population hindoue au Bangladesh en 1991 aurait dû, avec un taux normal de croissance, atteindre 32,5 millions. Elle n’était que de 12,5 millions. Cette « tragédie silencieuse », pour reprendre les termes de Afsan Chowdhury, [[journaliste]] bengali militant pour les droits de l’homme, est en grande partie ignorée par les [[média]]s régionaux et, par conséquent, par les médias internationaux, et ces violations des droits de l’homme figurent rarement dans les rapports annuels des organisations concernées. Aujourd’hui, le destin de la minorité hindoue dans ces trois régions (en comptant le [[Jammu-et-Cachemire|Kashmir]]) est celui d’une population discriminée et opprimée dont la situation est globalement ignorée par les organisations internationales de défense des [[Droits de l'homme|Droits de l’Homme]].
En 1947, la communauté hindoue du [[Pakistan]] représentait '''23 %''' de la population au Pakistan occidental et '''29 %''' au Pakistan oriental. En [[1998]], elle représentait seulement '''1,60 %''' de la population totale du Pakistan – réduit à sa partie occidentale depuis 1971 avec la sécession de sa partie orientale devenue le Bangladesh. Cet effondrement démographique est la preuve éclatante des [[discrimination]]s dont les citoyens pakistanais de confession hindoue ont souffert, et des violations des droits de l’homme dont ils font l’objet. Au Pakistan oriental, aujourd’hui le [[Bangladesh]], deux millions de personnes ont été massacrées lors de la répression menée par la junte militaire d’Islamabad au cours de la guerre d’indépendance de [[1971]]. Ce nettoyage ethnique et l’exode vers l’Inde de la communauté hindoue, portent à 10 millions le nombre de Bangladeshis disparus. Selon Saleem Samad, journaliste militant pour le respect des droits de l'homme, la population hindoue au Bangladesh en 1991 aurait dû, avec un taux normal de croissance, atteindre 32,5 millions. Elle n’était que de 12,5 millions. Cette « tragédie silencieuse », pour reprendre les termes de Afsan Chowdhury, [[journaliste]] bengali militant pour les droits de l’homme, est en grande partie ignorée par les [[média]]s régionaux et, par conséquent, par les médias internationaux, et ces violations des droits de l’homme figurent rarement dans les rapports annuels des organisations concernées. Aujourd’hui, le destin de la minorité hindoue dans ces trois régions (en comptant le [[Jammu-et-Cachemire|Kashmir]]) est celui d’une population discriminée et opprimée dont la situation est globalement ignorée par les organisations internationales de défense des [[Droits de l'homme|Droits de l’Homme]].



Version du 10 octobre 2007 à 13:16

Modèle:Spiritinde L'hindouisme est la doyenne des principales religions du monde, son origine remonte à la plus ancienne religion connue qui est celle de la civilisation de l'Indus (Shindu)[1], première manifestation de la culture indienne et qui remonte au moins au IIIè millénaire av. J.-C (précédant donc la migration des peuples indo-européens)[1]. Avec plus de 905 millions de fidèles, l'hindouisme, appelé aussi Sanâtana Dharm (सनातन धर्म, « religion éternelle », ou plutôt « ordre socio-cosmique éternel », en sanscrit), est actuellement la troisième religion la plus répandue, après le christianisme comptant environ 2,2 milliards de fidèles, et l’islam avec 1,35 milliard[2]. À l'inverse des autres religions principales, l'hindouisme n'a pas été fondé par un prophète et ne dépend pas d'un dogme central, sa pratique étant issue d'une tradition très ancienne. L'hérésie n'existe donc pas. C'est une religion dynamique, un ensemble de concepts philosophiques issus d'une tradition remontant à la protohistoire indienne, dotée d'une capacité à assimiler les croyances, et les philosophies, sans les opposer[3]. Les nombreuses conquêtes et invasions qui se sont déroulées sur le sous-continent indien ont favorisé le mélange des idées et des connaissances. L'hindouisme a beaucoup évolué au cours du temps passant du védisme aryen polythéiste, au brahmanisme triadique. L'hindouisme ancien dépassait le simple cadre religieux, au-delà du syncrétisme théologique, l'hindouisme était un vecteur pour toutes les sciences ; le droit,la politique, l'architecture, l'astrologie, la philosophie, la médecine, etc., comme tant d'autres savoirs qui avaient en commun le substrat religieux.

Première approche

L'hindouisme, ou plus exactement le Sanâtana Dharma, est davantage une façon de vivre et de penser qu’une religion organisée. Ce qu'on appelle « hindouisme » date de ces temps encore mal connus où l'ancien panthéon védique se voit éclipsé par la popularité énorme d'un Shiva, d'un Vishnou ou d'un Krishna[4]. Historiquement, « hindou » ne fait pas référence à un système de croyances religieuses ; le terme, d’origine persane se rapporte aux personnes qui vivent de l’autre côté. Après la colonisation britannique, le terme a été employé pour indiquer un ensemble flou de faits religieux. N'oublions pas que lorsqu'on aborde une spirualité exotique, on comprend surtout ce qu'on est prédestiné à comprendre par sa propre vocation, par sa propre orientation culturelle et celle du moment historique auquel on appartient[5].

Miniature datant des années 1710 représentant une des divinités hindoues et avatar de Vishnou les plus populaires : Krishna (gopala: le « vacher »), ici accompagnée de ses amantes, les gopi (« bergères »), dont sa préférée se nomme Radha.

En 1966, la Cour suprême de l'Inde a défini le cadre de la foi hindoue comme suit :

  1. l’acceptation respectueuse des Védas comme la plus Haute Autorité sur les sujets religieux et philosophiques et l’acceptation respectueuse des Veda par les penseurs et philosophes hindous comme base unique de la philosophie hindoue,
  2. l’esprit de tolérance et de bonne volonté pour comprendre et apprécier le point de vue de l’adversaire, basé sur la révélation que la vérité comporte plusieurs apparences,
  3. l’acceptation par chacun des six systèmes de philosophie hindoue d’un rythme du monde qui connaît des périodes de création, d’entretien et de destruction, périodes, ou Youga, qui se succèdent sans fin,
  4. l’acceptation par tous les systèmes de la philosophie hindoue de la croyance dans la renaissance et la pré-existence des êtres,
  5. l’identification du fait que les moyens ou les manières d’accéder au salut sont multiples,
  6. la réalisation de la vérité que, aussi grand que puisse être le nombre des divinités à adorer, on peut cependant être hindou et ne pas croire qu’il faille adorer des idoles,
  7. à la différence d’autres religions, ou croyances, la religion hindoue n’est pas liée à un ensemble défini de concepts philosophiques.
Ganesh, dieu « qui enlève les obstacles », dieu de la sagesse ; Ganesh est un dieu des plus vénérés dans l'hindouisme (dessin à l'encre du XIXe siècle)

Selon un autre point de vue, un hindou est celui qui croit à la philosophie exposée dans les Veda (ou savoir). Les Védas sont les écritures religieuses les plus anciennes du monde. Leur enseignement de base est que la vraie nature de l’homme est divine. Dieu, ou le Brahman (« Absolu »), existe en chaque être vivant en tant qu'atman. La religion est donc une recherche de la connaissance de soi, une recherche du divin présent en chaque individu. Les Védas déclarent que personne n’a besoin « d’être sauvé », car personne n’est jamais perdu. Dans le pire des cas, on vit dans l’ignorance de sa vraie nature divine.

Le Védanta (« fin, ou aboutissement des Védas », branche philosophique de l'hindouisme qui se fonde sur les écrits védiques) reconnaît qu’il y a beaucoup d’approches différentes de Dieu, et toutes sont valides. N’importe quel genre de pratique spirituelle mène au même état de réalisation de soi. Ainsi, le Védanta enseigne le respect de toutes les croyances et se distingue de la plupart des autres religions majeures par son fort encouragement à la tolérance envers ces différents systèmes de croyance.

L'hindouisme est aussi appelé religion aryenne (Arya Dharma), ce qui signifie religion noble. On trouve aussi le terme de Vaidika Dharma (la religion védique).

La tradition hindouiste : point de départ

Vishnou (Dieu protecteur/préservateur selon la Trimourtî) endormi sur Naga (le serpent de l'énergie cosmique), devient ainsi créateur du Dieu de la Création : Brahmâ, assis sur un lotus qui vient du nombril de Narayan (nom de Vishnou dans cette situation), à la manière d'un cordon ombilical, symbolisant bien l'interdépendance entre les deux Dieux ; la présence de la Déesse manifeste la symbiose relationnelle entre l'immanence et la transcendance du Divin. (Miniature des années 1780/1790)

Il semble finalement assez hasardeux de véritablement définir le concept « hindouisme » tant il est complexe et multiforme. Il est donc préférable de cerner l'hindouisme par ses idées et ses pratiques. L'hindouisme existe aujourd’hui sur deux plans différents — le premier basé purement sur la foi et le second basé sur la philosophie. Souvent, les deux plans s’entrecroisent.

On peut décomposer la tradition hindouiste en quatre concepts fondamentaux et solidaires: ce sont le karma, la mâyâ, le nirvâna et le yoga[4]. Cette lecture permet d'écrire une histoire cohérente de l'hindouisme en partant de n'importe lequel de ces concepts fondamentaux : nécessairement, on sera amené à parler des trois autres. En terme de philosophie occidentale, on dira que, depuis l'époque postvédique, l'Inde a cherché surtout à comprendre[4] :

  1. la loi de la causalité universelle, qui solidarise l'homme avec le Cosmos et le condamne à transmigrer indéfiniment: c'est la loi du karma ;
  2. le processus mystérieux qui engendre et soutient le Cosmos, et, ce faisant, rend possible l'« éternel retour » des existences : c'est la mâyâ, l'illusion cosmique, supportée (pire encore : valorisée) par l'homme aussi longtemps qu'il est aveuglé par la « nescience » (avidya), la confusion liée à l'attachement et au désir ;
  3. la réalité absolue « située » au-delà de l'illusion tissée par le karma ; l'Être pur, l'Absolu, de quelque nom qu'on le désigne : le Soi (âtman), Brahman, l'inconditionné, le transcendant, l'immortel, l'indestructible, le Nirvâna, etc.;
  4. enfin, les moyens favorisant la révélation de l'Être, les techniques adéquates pour réaliser la délivrance (moksha, mukti) : cette somme des moyens s'appelle à proprement parler yoga.

Mais cette façon de concevoir l'hindouisme à des limites puisqu'elle fragmente de fait l'hindouisme qui est par nature un ensemble de croyances complexes et richement imbriquées.

On comprend dès lors comment se pose, pour l'hindouisme, le problème fondamental de toute philosophie : la recherche de la vérité. Pour l'Inde, la vérité n'est pas précieuse en elle-même ; elle devient précieuse grâce à sa fonction sotériologique, parce que la connaissance de la vérité aide l'homme à se délivrer. Ce n'est donc pas la possession de la vérité qui est le but suprême du sage hindou : c'est la délivrance ou Moksa. La conquête de cette liberté absolue, de la parfaite spontanéité, constitue le but de toutes les philosophies et de toutes les techniques mystiques indiennes[4].

«La qualification d'être humain signifie aspirer à la réalisation de Dieu.
La vocation de l'Homme est de trouver Dieu.[6] »

Écoles et courants

Une charmante miniature réalisée vers 1800, représentant Shiva et sa famille : Shiva l'ascète tient élégamment la main de son épouse, la Déesse Parvati, qui tient dans ses bras leur premier fils Karttikeya (qui a six têtes), avec, au dernier plan, Ganesh, sur le buffle Nandi (véhicule de son père, Shiva), accompagné du rat (véhicule de Ganesh), du tigre (véhicule de sa mère : Shakti/Parvati/Durga), et du paon (véhicule de son frère Karttikéya). Au premier plan, on remarquera Hanuman qui tient les bagages sur sa tête.

L'hindouisme est dépourvu d'autorité reconnue ; on ne peut donc dater avec précision le moment de sa naissance. Nous savons cependant que des élaborations philosophiques s'amorcent dès la première moitié du Ier millénaire av. J.-C. Le système religieux et culturel qu'on appelle hindouisme s'est développé dans le sous-continent indien et n'est sorti que rarement de ses frontières[1].

Les six grands systèmes philosophico-théologiques

L'hindouisme a développé des astika antiques, ou écoles orthodoxes (car acceptant l’autorité des Vedas) de philosophie, ou shadarshana. Ces systèmes, ou « visions » (darshana), de l'hindouisme classique sont au nombre de six ; chacun d'entre eux est le fruit d'une longue élaboration dont témoigne une vaste littérature[1]:

  1. Sâmkhya, l'un des plus anciens est le système de pensée fondé sur un dualisme entre l'esprit (Purusha) et la nature (Prakrit), qui fut à l'origine détaché des spéculations théologiques ; contrairement au Yoga, qui est théiste, ce système peut être considéré comme athée.
  2. Purva-Mimamsa (également appelé la Mîmâmsâ), système tourné autour de l'éclaircissement du Veda.
  3. Uttara Mimamsa — appelé plus communément l' Advaita Vedânta —, système centré sur la métaphysique et la nature mystique des Upanishads.
  4. Yoga, un système basé sur une pratique personnelle (posturale, respiratoire et méditative) pour atteindre la libération, la délivrance (मोक्ष, mokṣa).
  5. Vaisheshika, le système qui a proposé la théorie atomique pour la première fois,
  6. Nyâya, le système de la logique de l'Inde, et dernier des courants philosophiques hindous.

Les nâstika ou écoles non-orthodoxes — qui ne sont pas discutées dans cet article — sont le jaïnisme, le bouddhisme et le chârvâka, l'athéisme ancien classique de l’Inde qui réfute l’existence de l’âme ou âtman.

Les écoles et courants théistes

Le dieu védique Agni, dieu du Feu et Feu lui-même (miniature du XVIIIe siècle). L'importance de ce dieu apparaît clairement si l'on pense que 8 des 10 livres du Rig-Veda commencent par des hymnes adressés à lui. Selon Aurobindo, il est la Volonté divine ou Puissance consciente qui est Maître de l'Univers. Pour l'hindou, rien ne se fait dont la Volonté divine (qui est Agni) ne soit à la fois l'inspiration, le moteur, l'acteur, l'instrument et le but[7]. Son éclat et sa force touchent lles trois mondes : feu du soleil, il naît tous les matins dans le ciel ; feu des nuées, il est la foudre qui brûle l'air pendant l'orage ; enfin, il « naît » tous les jours sur la terre quand les hommes allument le feu. Agni joue le rôle intermédiaire entre les hommes et les dieux : d'un côté, la fumée du feu sacrificiel fait monter au ciel les offrandes ; de l'autre, la foudre révèle aux habitants de la terre la présence des dieux. Renaissant à chaque fois de la friction de deux morceaux de bois, il est éternellement jeune, donc porteur de vie et de progéniture. C'est lui-même qui dépose la semence dans la femme[1].

Contrairement à la croyance populaire, l’hindouisme « vrai » n’est ni strictement polythéiste, ni strictement monothéiste. Certains considèrent l’hindouisme comme une religion hénothéiste ou même panenthéiste. Les diverses divinités et avatars adorés par les hindous sont considérés comme différentes formes de l’Un, le dieu suprême, ou Brahman, formes adoptées qui seules sont accessibles à l’homme (on prendra garde à ne pas confondre Brahman, l’être suprême et la source ultime de toute énergie divine, et Brahma, le créateur de tous les êtres vivants).

Ce difficile chemin vers la connaissance suprême orthodoxe (inanamarga), prôné par les six écoles hindouistes, reste le privilège d'une élite intellectuelle restreinte, le croyant populaire mélangeant souvent tout ces courants de pensée ensemble. Toutefois, trois grands courants théistes de l'hindouisme se démarquent de façon relativement importante dans toutes les couches de la population: le vishnouisme, le shivaïsme et le shaktisme. À l'intérieur de ces courants, de nombreuses écoles se sont développées, qui se différencient surtout par leur interprétation des rapports existant entre Être suprême, conscience individuelle et monde, ainsi que des conceptions ésotériques qui en dérivent. Les textes védiques (Vedas, Upanishads, etc.) constituent une référence pour les trois courants, même si chacun d'entre eux les complète par les écrits (Puranas, Gitas, etc.) qui lui sont propres. Ces écrits ne s'excluent pas, car l'hindouisme admet la coexistence de voies différentes vers le salut. Le choix d'un courant n'implique donc pas le rejet des autres[1].Le brahmanisme, qui est la nouvelle forme de la religion védique (voir védisme), se divise en branches, elles-mêmes subdivisées en sectes :

  1. Le vishnouisme ou vaishnava qui se rapporte au culte de Dieu en tant que Vishnu ou l'un de ses avatars. Les Livres sacrés sont le Bhâgavata Purâna - souvent appelé Shrîmad-bhâgavatam - et la Bhagavad-Gîtâ.
  2. Le shivaïsme ou shaivisme qui se rapporte au culte de Shiva dont la Légende nous est rapportée dans le Shiva Purâna. La divinité Rudra des Vedas s'identifie avec Shiva.
  3. Le Shaktisme, se subdivise en deux ou trois branches selon les classifications et se rapporte à la réalisation de shakti, l'aspect « acte de prise de conscience » souvent associé à une forme de Devî, la déesse mère (comme Kâlî, Durga, etc. - le Shaktisme est lié au Tantrisme : l'un et l'autre constituent, d'une certaine manière, le développement extrême de l'hindouisme[1]).

Chacun de ces cultes se pratique avec les mêmes moyens philosophiques ou de yoga, ce sont leurs méthodes qui diffèrent. Ces dénominations ne devraient pas être considérées comme des « Églises », parce qu'il n'y a aucun dogme central dans l'Hindouisme, et les croyances individuelles sont toujours respectées. D'ailleurs, une importante majorité des hindous modernes peut ne pas se considérer comme appartenant à une dénomination précise.

Selon une estimation générale, les Vaishnavas constituent approximativement une majorité d' hindous à ce jour, adorant, entre autres, l’un des trois plus récents avatars — ou incarnations terrestres — de Vishnu comme déité principale. Les hindous non-vishnouite sont le plus souvent des Shivaïtes, qui adorent Shiva ; le reste se consacre à Shakti, Īshvarī ou la déesse Kâlî. Mais bien souvent, le croyant hindou possède chez lui les représentations de plusieurs de ces formes de Dieu (Īshvara).

Cosmogonie hindouiste

Croyances et pratiques communes à l'Hindouisme

Bien que l'hindouisme soit la rencontre d'un ensemble de cultes, chaque hindou partage un tronçon de valeurs communes. La somme de ces valeurs identifie le croyant hindou.

Croyance de base

Preuve de la capacité d'assimilation de l'hindouisme : Jésus est souvent considéré comme un des avatârs de Vishnou, c’est à dire la Fonction Divine de maintenance et de protection de l’Univers manifesté, et du Dharma (Ordre socio-cosmique). En tout état de cause, la plupart des hindous considère Jésus comme un saint homme, prêchant le sacrifice de soi et la non-violence[8].
« Vous n'aimez pas souffrir vous-même. Comment pouvez-vous donc infliger des souffrances à autrui ? Contentez-vous de chasser les moustiques puisque leurs piqûres vous font mal. » (R. Maharshi (1875-1950). [9]
Temple hindou en Indonésie, à Bali

On peut dire que ce qui est commun à tous les Hindous est la croyance au Dharma (Ordre socio-cosmique), réincarnation (renaissance), Karman ( « actions  » Le modèle {{Guillemets}} ne doit pas être utilisé dans l'espace encyclopédique, signifiant une cause et son effet), et à un Moksha (libération) de chaque âme par une variété de chemins, tels que Bhakti (dévotion), Karma (action), Jñâna (la connaissance) ; et naturellement, Ishvara (le Seigneur).

La réincarnation ou la transmigration de l'âme pendant un cycle de naissance et de mort, jusqu'à ce qu'elle atteigne Moksha, est régi par le karman. La philosophie du karman concerne les résultats des actions libre-voulues, qui laissent leur impression sur l'âme ou le soi, appelés comme âtman.

L'idée selon laquelle on peut devenir Hindou est contestable. En effet, l'Hindouisme reconnaît tous les chemins, qu'ils soient philosophiques, religieux, etc., par conséquent le mode de vie hindou n'est pas obligatoire pour les autres peuples du monde, et l'hindouisme n'a jamais manifesté aucun prosélytisme à l'égard des « non-hindous ».

Les hindous qui ont été convertis par le passé à une autre religion peuvent évidemment se reconvertir à l'hindouisme.

On remarquera que l'hindouisme favorise le syncrétisme avec les autres cultures. Pour un « non-hindou » qui souhaite devenir hindou, tout dépend de la sincérité de ses efforts personnels.

Quoi qu'il en soit, le débat sur la possibilité ou non de se convertir à l'hindouisme est un « non-sujet », étant donné que l'activité religieuse est dans l'hindouisme liée à l'individu ou à la famille.[1]

N'oublions pas que l'hindouisme a connu une phase d'expension en Asie du sud-est, et cela jusqu'à l'Indonésie actuelle, donnant lieu à un syncrétisme avec les cultures locales animistes.

Une autre conviction intéressante est que, bien que la mythologie hindoue mentionne une classe d'êtres diaboliques (les démons, appelés Asuras ou Rakshasas), opposés aux esprits célestes (appelés Devas), la philosophie hindoue ne croit pas au concept central d'un Diable. L'existence de Satan (le diable, transcription d'un mot grec signifiant « calomniateur »), l'adversaire du Dieu, diffame sa perfection et son omnipotence.

Cela ne signifie pas que tout le mal dans le monde est attribué à Dieu, mais qu'il est attribué à l'ignorance humaine et donc au libre arbitre de l'erreur.

En effet, la démarcation dans l'hindouisme entre dieux (les dévas) et démons (les açouras) n'est pas nette ; loin de s'exclure mutuellement, ils se complètent. La tâche essentielle des dieux est de lutter éternellement contre les démons et continuellement triompher d'eux, mais non de les anéantir ou de les éliminer. Si les démons disparaissent, les dieux n'ont plus de raison d'être et disparaissent également, et c'est la fin des mondes, cyclique[7].

OM

Ôm en langue tamoule : sa forme fait penser à la trompe et aux défenses de Ganesh, identifié ainsi à l'Âme cosmique.
Ôm (ou Aum) est un des plus importants symboles religieux de l'hindouisme, il signifie l'Âme Cosmique

Om (ou Aum, ॐ) est un des symboles le plus sacré de l'hindouisme : il est utilisé comme préfixe et parfois suffixe aux mantras et à toute prière hindoue. Il est empli d'un message symbolique profond : il est considéré comme la vibration primitive divine de l'Univers qui représente toute existence, entourant toute nature dans Une Vérité Ultime.

Ainsi, le son, produit d'une façon prolongée, résultat de la combinaison de trois sons A-U-M (de la triade à l'unité), signifie « ce qui a été, est et sera », et possède, pour ceux qui se voue à la méditation, une force à la fois magique et religieuse. Un Upanishad affirme : « Comme s'agglomèrent toutes les feuilles enfilées sur une tige qui les traverse, de même toute parole se fond dans le son OM. Le son OM est tout cet univers. » [10].

La nature de Dieu

Fichier:410px-Kaligoddess.jpg
Kâlî (« la noire ») dansant sur son époux inanimé Shiva : Elle maîtrise le temps, dévore tout ce qui est vivant, et semant la mort, prélude à la délivrance. Elle est représentée noire et entièrement nue, ses nombreux bras brandissant des armes, mais deux de ses mains font souvent un geste apaisant[1].

Les Vedas dépeignent le Brahman (prononcé comme /brəh mən/) comme la Réalité Ultime, l'Âme Absolue ou Universelle (Paramatman).

Le Brahman est l'indescriptible, inépuisable, incorporel, omniscient, omniprésent, l'original, la première existence infinie, absolu, transcendant et immanent et l'éternel, l'Être et le principe ultime qui est sans un commencement, sans une fin, qui est caché dans tout et qui est la cause, la source, le matériel et l'effet de toute création connue, inconnue et pourtant arrivée — dans l'univers entier. Le Brahman (qui ne doit pas être confondu avec la divinité Brahmâ) est vu comme l'Âme Cosmique.

La personnalité derrière le Brahman est connue comme Parabrahman (Le Brahman supérieur). Le Brahman peut être regardé sans les attributs personnels, sans forme (Nirguna Brahman), d'une façon totalement abstraite, ou avec les attributs, avec forme, de part toutes les divinités hindoues (Saguna Brahman).

En corrélation avec la Nature et l'Âme, il faut un troisième élément : le Dieu personnel, susceptible d'avoir avec des rapports, ce que ne peut l'Absolu[7].

A ce Dieu personnel, l'Inde donne le nom général d' Ishvara (litt., « le Seigneur Suprême »), terme surtout philosophique, car, dans la pratique du culte et de la vie quotidienne, on ne s'adresse guère qu'à l'un des aspects à la fois (Shiva et Vishnou ; Brahmâ n'est pas honoré, puisqu'il engendre le samsara (le cycle des réincarnations))[7].

C'est pourquoi l'art comme les Ecritures le représentent surtout en Trimourtî. Ce sont donc Brahmâ, Vishnou et Shiva, qui respondent respectivement à l'action créatrice, conservatrice et destructrice de l'Absolu transcendant.[7]

Ces trois aspects sont aussi inséparables que les éléments de notre propre activité, car, dans le cadre de cet univers, on ne peut avoir l'un sans les autres. La germination crée l'arbre, détruit la semence et conserve l'espèce ; le menuisier crée la table, détruit l'arbre et conserve le bois[7].

Dans la philosophie de l' Advaita Vedanta, Ishvara est simplement la forme manifestée du Brahman sur l'esprit humain. Lorsque Ishvara est plein de qualités favorables innombrables (Saguna Brahman), il est omniscient, tout-puissant, perfectionné, juste, clément, glorieux, mystérieux, et pourtant plein d'amour. Il est le Créateur, le Dirigeant et le Destructeur de cet univers. Quelques-uns croient qu'il est infini et incorporel. Pour les hindous liés au Vaishnavisme ou au Shaivisme, Saguna Brahman est incarnané de la plus exacte des manières en Vishnou, ou en Shiva, — leurs partisans peuvent attribuer une forme anthropomorphique à Ishvara. Ishvara est aussi appelé Bhagavan en hindi moderne. Le pouvoir divin (ou l'énergie) de Dieu est incarné en une divinité féminine, Shakti.

L'épouse, Dévî (Shakti) de Shiva, est la seule déesse de l'hindouisme à jouer un rôle autonome par rapport à son époux, la seule qui soit souvent élevée au rang de divinité principale, même par rapport à la divinité masculine qui se trouve à ses côtés. Ses très nombreuses épithètes correspondent à des aspects qui peuvent être réunis en cinq grands groupes. Le premier groupe souligne ses aspect paisibles et relatifs à la fertilité ; dans ce cas l'épouse prend les noms de Mahâdevî « la grande déesse », ou de Pârvatî, « la montagnarde », Satî « vertueuse », ou Gauri « jaune », « resplendissante », etc. ; dans un second groupe, Devî, en qualité d'ascète, devient tour à tour Yogesvari, « grande Yogini » et Vajrayogini, cette dernière toujours représentée dans des positions du yoga, placée au-dessus des couples de divinités Kâma, « amour », et Rati, « passion » ; dans un troisième groupe, la Shakti sous son aspect guerrier, se manifeste sous la forme de Durgâ, « l'inaccessible », la tueuse de démons ; dans un quatrième groupe, c'est la forme destructrice et terrifiante, comme Kâlî ; enfin le cinquième groupe, Devî est le squelette qui sème la mort, la déesse Camunda qui tue les démons Canda et Munda, et Sitala, la déesse de la Variole[1]

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La multitude des divinités

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Forme féminine de la Trimoûrti : Lakshmi au centre, Shakti/Durga à gauche et Sarasvati à droite.
Gautama Bouddha est, dans l'hindouisme, un des grands avatârs (« incarnation », « descente ») de Vishnou, qui s'incarne ainsi en moine pacifiste, prêchant pour l'arrêt des sacrifices d'animaux, par la pureté de son message sur la compassion pour tous les êtres vivants (selon la Gita Govinda), ou enseignant aux Asura la doctrine monachiale, ces derniers étant vaincus, à cause de cela, par les Dévas (selon le Skanda Purana).

La religion hindoue croit aussi en l'existence de plusieurs sortes de divinités, comme les yaksha et les animaux divinisés (zoolâtrie) (d'origine pré-aryenne), ou comme les Asura et les entités célestes qui sont appelées Devas (d'origine aryenne). Ces Devas signifient en sanscrit, « dieu » ou « être lumineux », et dans le védisme sont en partie des divinités de la nature (on se souviendra que le panthéon védique veut représenter la totalité des phénomènes naturels, comprendre l'essence des forces surnaturelles ainsi que leurs intéractions)[11]. Le féminin de deva est devî (ou dévî). La question de la nature de ces devas peut être analysée selon ces trois points :

  1. Selon la philosophie de l’Advaita Vedânta, et certains passages de la Bhagavad-Gîtâ, des Upanishads et des Vedas ; tous les devas sont les manifestations sous une forme mondaine du Seigneur suprême (Îshvara) perçues par l'esprit humain. Donc, ils sont les manifestations multiples de l'Un Brahman dans la sphère de conception de l'esprit humain. Pour adorer Îshvara, le passionné conçoit une forme anthropomorphique de Dieu dans son esprit pour l'adorer avec amour et dévouement. Le Rig-Veda dit : ekam sat vipra bahudha vadanti — « Le Vrai Dieu est l'Un, bien que les sages s'adressent à lui par des noms multiples ». Ce point de vue est celui que considère strictement la secte de Smarta.
  2. Selon les philosophies du Nyâya, du Vaishéshika, du yoga, de certains vers de la Shruti et de certaines pensées Shaivites et Vaishnavites; les devas sont ces êtres célestes immortels qui sont subordonnés au Seigneur suprême (Îshvara), mais sont au-dessus des humains. Ils ont été créés par Dieu, dont dérivent leurs pouvoirs, et c'est sous son contrôle qu'ils œuvrent.
  3. Selon la philosophie de la Mimâmsâ, tous les devas et devîs sont les souverains des forces de la nature et Dieu Îshvara n'existe pas. Pour faire en sorte qu'une action désirée soit réalisée, les humains doivent plaire à un ou plusieurs de ces devas et doivent les adorer avec des rites rigoureusement codifiés. Ce genre de point de vue, proche de l'animisme (l'animisme indien existe toujours et reste une branche de l'hindouisme), pourrait être considéré comme purement polythéiste.

On ne doit pas confondre les termes Îshvara et devas. Au-dessous du divin unique que représente Brahmâ, Vishnou et Shiva et la Déesse, (ou Mère), (qui est leur émanation directe, bien que différenciée), nous trouvons toutes les manifestations, individualisées et particularisées, de Dieu dans le monde[7].

Ce sont « les dieux » de l'Inde, au nombre de 330 millions, et dont les aventures, les démêlés, tant qu'entre eux qu'avec les sages, les héros et les démons, forment la partie la plus massive et la plus difficile à interpréter de la mythologie hindoue[7].

Loin de pouvoir entrer dans une classification simpliste telle que le bien et le mal, dieu et diable, le dieu « hindou » repésente une conjonction (on pourrait dire une clef de voûte) de forces et de lois, dont le jeu (comme celui des forces de la Nature) est tantôt favorable et tantôt contraire à la réalisation de ce que nous croyons être juste, et peut être un facteur soit de progrès, soit de freinage, soit même de régression, selon les groupements auxquels elle s'oppose dans tel ou tel épisode de la vie[12].

Plus précisément, les écritures hindoues et la plupart des pensées Shaivites et Vaishnavites considèrent le devas comme une combinaison de deux premiers points de vue ; par exemple, Krishna est considéré comme Îshvara et tous les autres dieux lui sont subordonnés, et simultanément, tous les dieux sont vus comme les manifestations mondaines de Krishna. Mais la troisième conception n'est pas mentionnée dans les écritures.

Quelle que soit la nature des devas (aussi appelé dévatâs), ils sont une partie intégrale de la culture hindoue plurielle. Les 33 devas védiques incluent Indra, Agni, Soma, Varuna, Mitra, Savitr, Rudra, Prajâpati, Vishnu, Aryaman et les Ashvins ; les devîs importants étaient Sarasvatî, Ûshâ et Prithivi. Indra est traditionnellement appelé le roi des dieux. Les Puranas louent la Trinité hindoue de Brahmâ, Vishnu et Shiva, c.-à-d., Trimûrti, symbolisant les aspects créateur, conservateur et destructeur du Divin. Notez que Brahmâ, Vishnou et Shiva ne sont pas considérés comme des devas ordinaires, mais comme des Mahâdevas (grand-devas). Les Puranas louent aussi d'autres devas et les avatars -- tel que Ganesha, Hanuman, Rāma, Krishna, etc. Les devîs, adorées comme la mère, incluent Lakshmî, et la plus importante, Durgâ ainsi que ses formes telles que Kâlî.

Considerez ceci — Un parallèle entre la Trimurti et la trinité chrétienne peut être établi (bien que le rapprochement théologique entre les traditions chrétiennes et hindoues soit stérile): en effet, en Inde, on représente la divinité comme triple, on appelle ce principe la Trimurti dans le Panthéon hindou : Brahma, Vishnu et Shiva, sont trois aspects du divin tout comme l’onde et le photon sont deux aspects de la lumière. Brahma désigne symboliquement le créateur, Vishnu représente le conservateur et Shiva représente le destructeur dans le cycle de l'existence.
On se reportera à cet article pour plus de précisions.

Dieu créateur et destructeur, Natarâja est une forme fascinante de Shiva. Le rythme suprême et parfait de cette joie dynamique et triomphante dans laquelle on s'intègre au grand « jeu » divin (lîlâ) du Monde, la danse pouvait l'évoquer bien mieux que les paroles. « Celui qu'aucun signe ne peut décrire, sa danse mystique nous le fait connaître », dit un poète shivaïte du sud de l'Inde[7].

La perception contemporaine de l'hindouisme dépeint une religion monothéiste inclusive, ou plus exactement non-dualiste, c'est-à-dire qui a la conviction que tout ce qui existe se ramène dans se réalité dernière à l'Un, l'Absolu. Depuis la Chandogya Upanishad, cette philosophie du « Pouvoir qui envahit Tout » (Brahman) est devenue très importante dans la littérature sacrée.

Cet Absolu, auquel les hindous donnent le nom donne de « Cela », en plus de Brahman, est par sa nature même impossible à représenter (puisque divine). L'Absolu est tantôt manifesté : Tat Vam Asi (तत्त्वमसि : Tu es Cela), ou « Tout cela est Brahman » disent les Ecritures, et tantôt non manifesté : « le Brahman est Vérité, le monde est Illusion », disent aussi les Ecritures. L'apparition des univers et leur disparition sont donc des événements non uniques, mais cycliques[7].

Dans les périodes où l'Absolu n'est pas manifesté, ce monde n'existe pas, l'Un n'est pas devenu Multiple, il n'y a ni Nature ni Âme, il n'y a même pas de Dieu personnel au sens où l'entend la doctrine chrétienne[13]. Cette complexité de l'Hindouisme ne transparait que relativement dans la pratique populaire, le peuple se tenant à l'écart des livres sacrés encore réservés à l'élite cultivée. Un épisode du Srimad Bhagavatam met en avant cette réalité: le dieu Krishna, avatar de Vishnu, demande aux habitants de Vrindâvana d'abandonner le culte d'Indra au sien, puisque Krishna se présente comme le Dieu suprême dont Indra n'est qu'un fragment.

Les dieux dans l'hindouisme se comptent par millions, et ce n'est pas sans raison ; chacun d'eux a des fonctions variées et porte beaucoup de noms différents, parfois plus de mille. Inversement, nombre de ces fonctions sont assumées, selon les cas, par des dieux différents, et l'on trouve bien des noms qui s'appliquent tantôt à l'un, tantôt à l'autre. Ces dieux s'engendrent mutuellement, tout comme la chaleur peut produire de l'électricité, et l'électrivité, la chaleur. A l'occasion, ils se résorbent les uns dans les autres, se substituent les uns aux autres, triomphent les uns des autres, se vénérent les uns les autres : la multiplicité innombrable des dieux et leurs interdépendances incalculables illustrent ce que devient l'Un, éternel, lorsqu'il se divise, à l'infini[7].

« Seigneur de la Danse », Shiva régit le rythme des mondes. Bien avant des millénaires avant que les savants occidentaux découvrent la similitude de structure entre les noyaux des atomes et les systèmes solaires, les hindous savaient que le même rythme se retrouve forcément à tous les échelons de la Création et dans tous les domaines[7]. C'est pourquoi les notions de rythme et de densité (car le rythme agit d'abord sur la densité) joue dans la pensée hindoue un rôle comparable à celui que l'on attribue au poids et à la forme, qui n'en sont que des manifestations dérivées[7]. Or quelle est pour l'homme la manifestation la plus pure du rythme, sinon la danse ? Shiva est donc la danseur par excellence, le Roi de la Danse, Nâtarâdjan. On le présente fréquemment comme tel, dans une pose de parfaite harmonie, au milieu d'une vaste couronne où s'allument et s'éteignent de multiples flammèches. Ainsi les mondes apparaissent et disparaissent, et réaparaissent à l'infini[7].

Le cycle de la vie, et la voie de la délivrance

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Statue de la divinité Lajjagauri : aucun texte ne la mentionne réellement, mais elle est présente partout en Inde ; on la nomme Lajjagauri (« déesse timide »), à cause de son visage en forme de fleur. Cela symbolise l'impersonnalité. Le corps féminin : la Nature, et les jambes écartées : la possibilité d'engendrer.

L'âme de l'homme est dans l'hindouisme destinée à suivre le cycle des renaissances ou de la transmigration (samsâra). Ce terme a essentiellement le même sens dans l'hindouisme et dans le bouddhisme[1].

Quand l'âme se sépare du corps au moment de la mort, elle attend durant trois époques sa transmigration dans le corps d'un autre être vivant ; la forme des renaissances et leurs conditions dépendront, selon la loi du karma, des qualités éthiques des actions accomplie par le passé[1].

Le karma est donc, en quelque sorte, le résidu d'actes d'existences antérieures ; chaque action aura ses conséquences dans les renaissances et les vies futures[1].

Une telle course est donc sans commencement ni fin[1].

Les hindous ont élaboré une sorte de classement d'événements fastes ou néfastes. Parmi ces derniers, aux premiers rangs, la sécheresse, la destruction des récoltes, la maladie, la stérilité, etc. ; quant à la félicité suprême, elle correspond au salut, c'est-à-dire à l'arrêt du cycle des renaissances (moksha)[1].

Les moyens pour atteindre ce salut varient selon la vision du monde propre à chaque courant[1].

Ainsi les exercices ou pratiques du yoga (mot équivalent à mârga, ou voie spirituelle) sont souvent complémentaires : 1. tantra-yoga : voie des rites magiques, la discipline personnelle suivant les ordres du tantra ; 2. yoga-mârga : voie des exercices physiques et spirituels ; 3. karma-yoga : voie de la connaissance, pratique de la réflexion et de la méditation ; chemin vers le salut que seuls peuvent parcourir ceux qui ont longuement pratiqué l'ascétisme ; 5. bhakti-yoga : voie de la pratique dévotionnelle[1].

La notion de bhakti, liée à la grâce rédemptrice de Vishnou, l'un des fondements du vishnouisme, représente « la conviction, jamais dissossiée de l'amour, que Dieu est au-dessus de toutes choses ». Ceux qui suivent le sentier de la bhakti sont appelés les bhaktas. Si la doctrine de la bhakti se retrouve dans toutes les écoles vishnouites, des divergences existent quant à son interprétation. Selon certains courants, l'homme doit répondre au besoin de partage pour mériter la grâce divine et donc le salut ; selon d'autres, il doit avoir une confiance totale dans la grâce divine. Le but ultime du bhakti-yoga est toujours, cependant, une approche graduelle de la divinité jusqu'à la fusion complète en elle et avec elle. Systématisée par le philosophe Râmânudja (env. 1017-1137, selon la tradition), la doctrine de la bhakti est la quintessence même des écoles vishnouites et krishnaïtes[1].

les 10 avatârs de Vishnou les plus célèbres : au centre, Krishna

Le but commun de tous les chemins de salut est la moksha (« libération »), c'est-à-dire le détachement, pour l'âtman (soi ou âme individuelle), du corps et du monde du mâyâ (illusion, jeu divin : lîlâ), ainsi que l'union avec le brahman (Absolu, âme du monde), dépassement ultime de tous les dualismes — bien et mal, dieux et hommes, animé et inanimé, masculin et féminin[1].

Un exemple dans les Oupanishads à propos du brahman :

« Tu es la femme. Tu es l'homme. Tu es l'abeille bleue et le vert papillons aux yeux rouges. L'éclair est ton fils. Tu es les saisons et les mers. Tu es le Tout, tu es l'omniprésent ; tout ce qui naît est de toi.[1] »

La migration des âmes individuelles (âtman) est comprise par les diverses écoles soit comme une manière idéale de se rapprocher de l'Absolu, soit comme une véritable transmigration. La délivrance consiste dans la perte de l'identité illusoire de l'âtman, qui s'unit à nouveau au brahman ; ces deux mots, par une corrélation mystérieuse, deviennent dans les Oupanishads, interchangeables. Quelle que soit la manière qui permet d'y aboutir, on parvient à la même réalité, le brahman étant l'âtman supérieur, ou paramâtman, ou moi suprême[1].

Les vishnouites, en outre, ont systématisé la doctrine des avatârs (descentes), selon laquelle le Ciel se manifeste dans l'univers pour le maintenir dans sa stabilité : Dieu, dans son infinie bonté, s'incarne périodiquement aux époques de décadence, quand le monde est proche de la fin, pour prêter secours aux hommes[1].

Les quatre objets de la vie

Le bindi est une marque qui orne le front des femmes hindoues. Les femmes mariées arborent leur statue matrimonial en s'appliquant un trait de sindoor, une poudre de vermillon, dans la raie des cheuveux ou un bindi rouge au milieu du front[14]. Le dharma de la femme se résume en une formule : servir leur époux comme leur dieu principal ; l'amour (kâma) est leur dharma ; mais quand on connaît la place centrale du désir amoureux dans le lien conjugal, la déduction va de soi et elle n'a rien de théorique[15].
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Miniature (XVII/XVIIIe siècle) tirée du Kâmasoûtra, représentant deux hommes et une femme durant le coït, l'un hétérosexuel, l'autre homosexuel. Le kâma représente un cas original. Si sa théorie n'est présente que dans un seul texte, la notion de kâma est omniprésente dans les spéculations indiennes et donne lieu à des doctrines et à des pratiques philosophico-religieuse où son rôle est central[15]
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Krishna et Arjuna. Krishna lui révèlera son enseignement (Bhagavad-Gita)
Un sadhu (ascète hindou) est sensé vivre une vie qui le mène au Moksha (« liberté », « délivrance » du cycle des réincarnations) ; ses doigts (pouce et index réunis) signifient : तत्त्वमसि, Tatvamaçi : « Tu est Cela » (Absolu)
Le poète Jayadéva, auteur du Gîtagovinda (XIIe siècle), vénérant Vishnou. (miniature datant de 1730)

En parallèle des quatre périodes de la vie hindoue, l'hindouisme considère qu'il existe quatre buts à l'existence ou purushârtha. Les désirs humains étant naturels, chacun de ces buts sert à parfaire la connaissance de l'homme puisque, par l'éveil des sens et sa participation au monde, il en découvre les principes. Toutefois, notons un point important ; la pensée européenne vient de découvrir que l’homme est implacablement conditionné, non seulement par sa physiologie et son hérédité, mis aussi, par l’Histoire et surtout par sa propre histoire[16]. C’est ce qui fait que l’homme est toujours en situation : il participe toujours à l’histoire, il est un être foncièrement historique. Le philosophe indien dira ainsi : cette « situation », nous la connaissons depuis très longtemps ; c’est l’existence illusoire dans la Mâyâ. Et nous l’appelons existence illusoire justement parce qu’elle est conditionné par le Temps, par l’Histoire, par tout ce qui est passager[16]. En ce sens, l'hindouisme est « existentialiste », mais à sa manière ; toute la pensée indienne insiste sur ce point précis : que l’ignorance et l’illusion n’est pas de vivre dans l’Histoire, mais de croire à la réalité ontologique (« relatif à l’être en tant que tel, indépendamment de ses déterminations particulières ») de l’Histoire. Le monde, bien qu’illusoire – parce qu’il est en perpétuel devenir – n’est pas moins une création divine. Le monde, lui-aussi, est sacré ; mais, chose paradoxale, on ne découvre la sacralité du monde qu’après avoir découvert qu’il est un « jeu » divin : lîlâ[16]. L’ignorance, et donc l’angoisse et la souffrance, sont nourries par la croyance absurde que ce monde périssable et illusoire représente la réalité ultime. Nous retrouvons une dialectique similaire à l’égard du Temps. D’après la Maitri-Upanishad, Brahman, l’Être absolu, se manifeste à la fois sous deux aspects polaires : le Temps et l’Éternité. L’ignorance consiste à ne voir que son aspect négatif, la temporalité, ce qui est éphémère (comme la richesse, le désir, etc.). La « mauvaise action (le mauvais karma) » comme disent les Hindous, n’est pas de vivre dans le Temps, mais de croire qu’il n’existe rien d’autre en dehors du Temps. On est dévoré par le Temps, par l’Histoire, non parce qu’on vit dans le Temps (le Non-Être), mais parce qu’on croit à la réalité du Temps et, partant, on oublie ou on méprise l’Éternité, l'Être suprême[16]. Ce qui signifie que les quatre but de l'homme suivants, ne sont pas contradictoires, mais interdépendants les uns des autres.

  1. Artha ou le profit : Désigne « but » d'une action, donc tout ce qui est utile, « intérêt » matériel, « ce qui est bon ». Les biens matériels sont utiles à cette vie, ils sont bons comme objets de jouissance, comme instruments de puissance. C'est la poursuite de la richesse, de la prospérité matérielle, dont le roi a la responsabilité plus particulière pour ses sujets. La période de Grihastha est propice au développement de ce but[15].
  2. Kâma : « Désir », et plus particulièrement « désir amoureux »[15]. Dans la mythologie, le dieu de l'amour ou désir, Kâma, est le fils de Vishnou et de Lakshmî quand ils s'incarnent en Krishna et Roukmini ; l'épouse de Kâma est Rati (« passion ») ; il est représenté par un très beau jeune homme à la peau noire, qui brandit un arc en canne à sucre, dont la corde est constitué par une enfilade d'abeilles, tandis que ses cinq flèches sont faites de fleurs, symbolisant les cinq sens qu'il peut atteindre[1]. Le Kâmasûtra expose les moyens d'exalter les sens et d'épanouir la vie amoureuse sans le moindre tabou, et est attribué au brâhmane Vâtsyâyana. Grâce aux plaisirs, le champ de connaissance s'élargit : l'acte d'amour en étant le paroxysme où les amants ne se distinguent plus que dans le coït, recréent ainsi symboliquement l'unité divine. Le Kâmasûtra est un ouvrage qui traite ainsi des règles de conduite permettant le succès dans l'amour (comme l' Artha-shastra conseille sur les moyens d'enrichissement), car l'hindouisme considère qu'il n'est pas d'homme vivant en ce monde qui ne désire un autre être humain, ou qui ne désire s'enrichir (sauf s'il choisit de mener une vie d'ascèse, de sâdhou) ; et on le formule de la façon la plus générale possible : en particulier, le désir amoureux inclut le désir homosexuel, qui doit trouver lui aussi son assouvissement et auquel on n'oppose aucun tabou de principe[15].
  3. Dharma ou le devoir : Le monde étant gouverné par la Loi, l'Ordre, le dharma, toutes les écoles philosophiques et théistes prescrivent des règles de vie qui obéissent à cet Ordre. Le dharma est donc la notion clef de l'éthique hindouiste. Il existe un dharma qui régit le lever et le coucher du soleil, un autre qui règle le flux des fleuves qui se jette dans la mer, un autre qui régit l'homme et ses actions[1]. Le dharma doit diriger toutes les quatre périodes de la vie hindoue ; ce n'est ni la morale, ni le bien, ni le droit, ni la justice, ni la loi ; on peut le traduire par « ordre socio-cosmique », qui maintient l'univers dans l'existence. Chacun a son dharma propre, personnel, son svadharma (du fait de son conditionnement familial, social, physique, etc., de tout ce qui nous détermine à être ce que nous sommes aujourd'hui). La Bhagavat-Gita affirme à ce propos : « Mieux vaut accomplir son "devoir" propre (svadharma), fût-ce médiocrement, qu'accomplir à la perfection les "devoirs" d'autrui.[1] » Le désordre, a-dharma, amène une fin du monde. Le soin du dharma est plus particulièrement confié aux brâhmanes. Le dharma est à tout le moins ce qui maintient l'homme dans la bonne orientation, en rappelant que l'homme est appelé à se résorber dans le Tout indifférencié où la notion d'ordre cosmique n'a plus de sens. Le dharma est donc cet ordre global qui inclut même ce qui le nie, et consiste dans la juste hiérarchie des quatre buts de l'homme et dans le respect de la hiérarchie des quatre varna et de leur articulation correcte. Que l' artha et le kâma soient inférieurs par rapport au dharma n'implique pas qu'ils doivent nécessairement se plier aux exigences du dharma . Celui-ci ne se présente pas comme un ordre de valeurs qui pénètre tout, mais, en son sens le plus large, comme une structuration de l'ensemble du réel qui laisse leur place aux niveaux de l'intérêt matériel et du désir amoureux. Ceux-ci sont aussi des niveaux de valeur en même temps qu'ils sont et parce qu'ils sont des niveaux de réalités qui gardent leur autonomie relative[15]. Le dharma permet à l'homme de poursuivre sa vie sur le droit chemin, en se conformant aux Dharma-Sûtra ou le Manu-Samhitâ, ou Mânavadharmashâstra dit Lois de Manu.
  4. Moksha ou la délivrance : Durant les deux dernières périodes de la vie de l'hindou (en théorie), celui-ci recherche le Moksha. Mais il s'agit surtout du but ultime de la vie de l'Hindou qui peut y parvenir selon différents moyens. La moksha n'est plus de ce monde, tandis que l' artha et le kâma se rapportent aux réalités visibles, aux satisfactions immédiates et tangibles. Le dharma est alors l'ordre des réalités invisibles à l'intérieur du triple monde (trailoka, terre, ciel et espace interméiaire), tout ce qui requiert de l'homme une activité rituelle ou un comportement réglé par autre chose qu'une satisfaction immédiate ; (autre façon de dire que le dharma est « l'ordre socio-cosmique » de l'homme vivant dans le monde, mais qui s'ajoute au reste de la réalité plus qu'il ne la transforme). Le moksha est le but réalisé par l'homme qui a dépassé tous ses conditionnements, qu'ils soient conscients et inconscients (en ce sens, le yoga diffère profondément de la psychanalyse, le yoga considérant que l'on peut maîtriser son inconscient, contrairement à la psychanalyse) [15].

Précisons une chose : selon la vision hindoue, et pour l'homme encombré de devoirs (dharma), le renonçant (sanyaçin) est un homme libéré de la société, qui a rompu les amarres, mais qui paie assez cher cette recherche de la liberté pour qu'il l'estime supérieure et inimitable ; pour l'ascète (le renonçant), l'homme vivant dans sa caste (en d'autres termes : dans tous ses conditionnements) ne pense qu'à assouvir ses désirs et ne se prépare que de la douleur[15].

Ce dont la théorie ne rend jamais compte, c'est du passage d'un état à un autre : comment concevoir l'acte par lequel on renonce aux actes ? Mais la tension qui existe entre les deux pôles n'aboutit pas à une vision dramatique et déchirée de l'homme[15].

Si l'on se pose parfois la question de savoir pourquoi le monde existe, on l'élude très vite en répondant qu'il est sans commencement ni fin, donc sans cause ni raison d'être. Le jeu divin, lîlâ, donne une forme théologique définitive à l'idée que la vie humaine n'a pas de sens et qu'elle n'en a pas besoin. Ceux qui la trouvent bonne quand même s'accrochent à la transmigration : ils sont légions. Rien n'empêche les autres de chercher la délivrance (moksha)[15].

Le Swastika est un symbole de ces quatre buts, les quatre Vedas et périodes de la vie. Ce signe très ancien se retrouve dans de nombreuses civilisations et symbolise la révolution du soleil et les forces cosmiques. Les quatre branches sont les saisons de la vie qui convergent vers un même centre, le bindu. Ce point central qui représente l'éther (le cinquième élément en Inde) rayonne sur les quatre autres, ainsi que sur les points cardinaux, comme sur les buts et saisons de la vie. Comprendre ce symbole et méditer dessus, permet de réaliser l'unité de l'univers et de l'Absolu (Brahman).

La vie en société — Les quatre classes religieuses et les 3000 castes professionnelles

Jeune brahmane shivaïte pendant le puja (« culte »)
Vaishnavi et varahi tuant des Açouras (1675/1700)
L'action la plus connue en faveur des Dalit est celle de leur grand défenseur : le Mahâtmâ Gândhî. Celui-ci a obtenu leur égalité devant la loi, afin qu'ils puissent entrer dans les temples comme tous les hindous, et ennobli leur nom en les appelant Harijan, « enfant de Hari » (Vishnou). Gândhî Jî ne remit pas en cause le système des castes en soi, mais en condamna tous les excès, néfastes à la dignité humaine
Miniature réalisée vers 1675-1700, représentant la Déesse tuant des Asuras
Madurai, Tamil Nadu

Après l'arrivée des aryens, un peuple de nomades indo-européens, les prêtres de l'Indus affirmèrent leur suprématie en mettant en place le système des classes, qui repose sur une division de la société en quatre varna ou groupes de classes socioreligieuses. La société hindoue a été traditionnellement divisée à partir de ces quatre grandes classes, basées sur les qualités religieuses de l'individu : Brahmanes : les enseignants et les prêtres, (ils se doivent d'avoir les neuf qualités prescrites) ; les Kshatriyas : les guerriers, les rois et les administrateurs ; les Vaishyas : les fermiers, les marchands, les gardiens de troupeau et les hommes d'affaires ; et les Shudras : les serviteurs et les ouvriers, ceux qui ne possède qu'une seule qualité. Ces classes sont dénommées varna et le système a été appelé Varna Vyavastha. On ne sait pas vraiment si le système de varna est une partie intégrale de l'hindouisme ou pas, et s'il est strictement sanctionné par les écritures. Les textes de la Shruti font de très rares mentions de ce système, et restent assez flous. Les textes de la Smriti (y compris les Lois de Manou) ont élaboré les règles de ce système. On sait en tout cas que l'homme « hindou » qui vit dans un espace dont on ne sait plus s'il est humain ou sauvage (le shudra en l'occurence), se place dans l'échelle des êtres qui le place sans doute au-dessous des animaux domestiques[15]. Une des conséquences, donc, de l'origine rituelle de la hiérarchie des êtres est qu'il n'y pas de coupure nette entre l'humanité et l'animalité dans la vision hindoue du monde [15], le principe de transmigration des âmes renforçant ce point de vue.

Il ne faut pas commettre l'erreur familière de confondre les varna (littéralement : « couleur », classes socioreligieuses) et les jati (qui signifient « naisance »), c'est-à-dire castes socioprofessionnelles, qui n'ont rien à voir avec les précédentes : il y en a autant que de métiers différents (3000 jati en Inde, dont le nom sert de nom patronymique, et qui sont liées à une zone géographique définie). Les varna, purement théoriques, ne sont pas condamnées pas la constitution indienne, contrairement aux jati. Ce système des jati était au départ seulement basé sur la profession, et les gens pouvaient librement changé de profession ou se marier[17].

Plus tard, (les historiens ne savent pas quand) ce système fut fixé sur la naissance. Ainsi, avec l'évolution de plusieurs jati (et avec une classe des intouchables hors du Varna Vyavastha, qui se développa vers 1500/900 Av. J.C.), le système a évolué vers le système de castes comme nous le connaissons aujourd'hui. Avec la modernisation, les différences des castes s'estompent dans l'Inde moderne, mais les tensions et des préjugés restent persistants, surtout avec les Dalit, ou la caste des « intouchables » (le terme est occidental), qui ont des métiers et des pratiques « impurs » (les familles de bouchers, d'éboueurs, de tanneurs ou d'incinérateurs sont des « dalit », par exemple : ce qui ne veut pas dire la misère matérielle, forcément : les familles d'intouchable qui s'occupent de l'incinération des corps à Varanasi sont fortunées, comme celles qui possèdent des usines pour le travail du cuir, tandis que la plupart des paysans brahmanes sont pauvres, comme un paysan indien peut l'être : il faut bien se garder de penser que les castes socioreligieuses correspondent aux classes sociales). Il ne faut pas non plus croire que les Dalits rejettent l'hindouisme : ils se sentent « hindous ». On notera qu'en fin de compte, peu d'intouchables se sont convertis pour « fuir » l'hindouisme, car les autres communautés religieuses (musulmanes, chrétiennes, bouddhistes ou autres...) reprennent aussi ce schéma : le système des castes socioprofessionnelles (et l'exclusion qui peut entrer en jeu) est surtout un problème de société, propre à la société indienne en définitive, plus que lié profondément à la religion (on remarquera que le Mahâtmâ Gândhî réveilla les consciences face à ce scandale, en se réclamant des valeurs propres à l'hindouisme classique, justement, en accentuant en particulier sur le renoncement, la non-violence, et la recherche constante de la vérité où qu'elle se trouve)[18].

Le système des castes s'explique théologiquement ainsi : en Inde, on considère que la société est également organisée selon l'équilibre du dharma. Cette organisation permet l'harmonisation des rapports entre les hommes et de définir les actes qui leur incombent. Ce souci d'équilibre a une origine doctrinale, car elle répond de fait, à la symbolique des guna, ou qualités/saveurs. Aux trois Guna, correspondent trois couleurs (le noir, le rouge et le blanc) qui sont chacune associée à une classe. À l'origine, l'hindou ne naît pas dans une caste : il acquerra sa caste en fonction du rôle qu'il sera amené à jouer et des responsabilités qui lui reviendront. Beaucoup de textes mythologiques dénoncent l'usurpation au titre de brahmane de certains personnages qui, sous couvert de la naissance, profitaient d'un statut valorisant sans s'acquitter de leurs devoirs. Mais, à la suite des invasions islamiques comme de la colonisation britannique, la système s'est ossifié au profit des castes dirigeantes, enfermant les shudra dans un statut de dominés par la société. Le système de caste basé sur la naissance, qui existe en Inde moderne, non seulement chez les hindous, mais dans toutes les autres communauté religieuses (on retrouve l'équivalent au Pakistan), n'existait pas dans l'Hindouisme védique antique. Un hymne célèbre du Veda indique :

« je suis un poète, mon père est un médecin, le travail de ma mère est de moudre le blé...... »

— (Rig-Veda 9,112,3)

Tandis que le Mahâbhârata déclare :

« Qui est brahmane ? C'est celui en qui se manifeste la charité, le pardon, la bonne conduite, la bienveillance, la compassion et l'observation des rites de son ordre. Les gens en qui ses qualité n'existent pas, sont des shoudras, même s'ils seraient nés de parents brahmanes »


Il est possible d'être banni de sa caste (par les membres de sa caste, puisqu'il n'y a pas d'autorité reconnue dans l'hindouisme), mais, pour cela, les fautes de l'individu doivent être relativement graves. En Inde, on reconnaît cinq péchés majeurs ou mahâpataka, le plus grave étant le meurtre d'un brahmane. Perdre sa caste socioprofessionnelle peut s'avérer assez douloureux pour un hindou, puisque vivre au sein d'une communauté soudée offre un certain nombre d'avantages et de protections.

Beaux-arts et littérature

Les danses de l'offrande

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Danseuse du Bharata natyam. La danse indienne accorde une grande importance aux positions des mains, ou moudra. Les traités chorégraphiques en recensent plusieurs centaines permettant d'exprimer une gamme complète d'émotions, de suggérer l'apparition d'un dieu ou d'un animal, voire d'évoquer un paysage[19].
Danseurs du Theyyam, au Kerala
Koodiyattam par le Gourou Padma Shri Mani Madhava Chakyar.
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La danse est, pour un hindou, le plus beau moyen de plaire à son dieu. En plus des fleurs et offrandes, il honore la divinité en figurant devant elle la part la plus noble et la plus créative de son être: « Adorer Dieu en dansant accomplit toute inspiration et la voie de la délivrance s'ouvre à celui qui danse », dit un texte ancien.[19]

Véritable art rituel, la danse classique indienne naît dans les temples[19].

Plusieurs siècles avant l'ère chrétienne, les grands sanctuaires utilisent les talents des jeunes danseuses[19].

Artistes sacrées, elles sont attachées au temple, portent le nom de devadaçi (« esclaves de dieu »), et participent aux cérémonies d'offrandes et d'adoration[19].

Lorsque, plus tard, la danse sera pratiquée à la cour des princes, elle conservera cette inspiration religieuse[19].

L'Inde classique a connu deux grands types de danse. Le Bharata natyam est la forme la plus ancienne, étroitement liée aux cérémonies religieuses. Pour cet art sobre, délicat, au rythme généralement lent, le danseur est seul sur scène[19].

Beaucoup plus spectaculaire, le Kathakali trouve ses thèmes dans les grands épisodes du Râmâyana et du Mahâbhârata. Chaque danseur porte un costume somptueux et un maquillage épais correspondant à son personnage : les dieux sont généralement peints en vert, les démons en rouge ou en noir[19].

Dès le IVe siècle av. J.-C., l'Inde dispose d'un système musical très élaboré, basé sur le raga, série d'au moins cinq notes prises comme base mélodique. Un traité attribué au sage Bharata, le Natya Shastra, codifie la pratique du théâtre, de la musique et de la danse (ces disciplines étant solidaires les unes des autres)[19].

Les gestes et les attitudes des artistes font l'objet d'une classification détaillée : l'ouvrage mentionne ainsi dix positions fondamentales du corps, treize de la tête, neuf du cou, trente-six des yeux, et trente-sept des mains. Au fil des siècles, des dizaines de mimiques sont ajoutées à cette liste[19].

En combinant ces attitudes, alphabet d'un véritable langage, le danseur peut évoquer une histoire très complexe et la faire comprendre aisément au spectateur averti. Il doit s'éveiller en lui le raça (saveur esthétique), sensation fondamentale que tout artiste se doit de faire goûter à son auditoire[19].

Le raça est un plaisir de l'esprit qui n'est pas individuel, mais partagé par tous les spectateurs. On dénombre généralement huit raça : l'amour, le rire, le chagrin, la colère, l'héroïsme, la terreur, la haine et l'émerveillement. des spectacles aussi complet que le drame théâtral et la danse doivent combiner adroitement ces différents raça. Ils parviennent alors à en susciter un neuvième, la sérénité, forme la plus achevée de l'émotion artistique, but suprême de tout danseur[19].

Ahimsâ (« non-violence »), le régime végétarien et la vache sacrée

Hindou en prière face à deux vaches
ici, Haridwar : les alcools et les aliments non-végétariens sont totalement prohibés dans cette ville sainte de l'hindouisme

Ahimsâ est un concept qui recommande la non-violence et le respect pour toute vie, humaine et animale, et même végétale (voir à Bishnoï). Le terme ahimsâ apparaît pour la première fois dans les Upanishad-s et dans le Raja-Yoga, c'est le premier des cinq yamas, ou les vœux éternels, les restrictions du yoga.

Beaucoup d'hindous embrassent le végétarisme afin de respecter le plus de formes de vie possible. Même si le végétarisme n'est pas un dogme ou une condition, cette pratique apparaît comme l'idéal brahmanique alimentaire par excellence, car il est recommandé pour le respect à l'ahimsa, ses vertus purificatrices (« satva »), et une hygiène de vie plus saine. L'hindouisme enseigne que la consommation de viande affecte le mental et la santé physique et le bien-être de tous. A ce sujet, Krishna dit dans le Mahâbhârata :

« La viande des animaux est comme la chair de nos propres fils »

D'après les estimations, 51% de la population hindoue suit un régime végétarien (pas de viandes, de poissons ni d'œufs ; les oeufs sont considérés comme aliments non végétariens, en Inde[20]) : surtout dans les communautés orthodoxes de l'Inde du Sud, dans certains Etats du nord comme le Gujarat ou du sud au Karnataka (où l'influence des jaïns est significative). Ce régime alimentaire est principalement fondé sur une nourriture à base de laitages et produits verts. Quelques-uns évitent même l'oignon et l'ail, étant considérés comme ayant des propriétés rajas, c'est-à-dire passionnelles.

Mâ Ananda Moyî (1896-1982), une grande sadhvi de l'Inde, qui répondit à la question, demandant à savoir si la violence était un péché, en ces termes : « Le grand pécheur est celui qui considère son propre corps comme son moi réel. »
Vache à Varanasi (Bénarès)
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vache sacrée à Delhi avec un sadhu

Les hindous qui sont des végétariens « imparfaits » (ils consomment des oeufs) ou qui mangent du poisson, ou plus rarement, de la viande, s'abstiennent d'une manière prédominante de consommer le bœuf, quelques-uns bannissent même l'usage de ses sous-produits comme le cuir.

La plupart des hindous regarde la vache comme le meilleur représentant de la bienveillance de tous les animaux — puisqu’elle est l'animal le plus apprécié pour son lait, elle est révérée comme la mère de l'humanité. La Tradition veut que la totalité du panthéon hindou s'incarne en elle.

La consommation de viande est permise (sauf celle de la vache, donc), si celle-ci est nécessaire, et pourvue que l'animal soit tué correctement, c'est-à-dire dignement, respectueusement, en l'offrant toujours en sacrifice à une divinité qui accepte ce genre de sacrifice, souvent en utilisant la décapitation, cérémonie sanglante qui doit être accompagnée avec les mantras et les prières appropriées.

Néanmoins, on peut constater que dans la plupart de villes saintes hindoues, il existe une interdiction de tous les aliments non-végétariens et de tous les alcools, et une interdiction légale existe même sur l'abattage de vaches dans presque tous les Etats de l'Inde. La pratique rare de sacrifier des chèvres dans les temples pour la Mère-Déesse, comme d'autres animaux, disparaît à la suite de la critique des autres hindous (la pratique est interdite dans la plupart des Etats de l'Union Indienne) : les célèbres « marches sur le feu », pratiquées dans le sud de l'Inde, sont des substitutions antiques aux sacrifices sanglants (car elles correspondent aussi à un « sacrifice de soi » au nom de la déité). Il faut comprendre que dans l'optique des croyances hindoues, celui qui tue un animal (ou un homme, ou n'importe quel être vivant) devra se réincarner en cet être pour mourir de la même manière (loi du karma : actes de l'ancienne vie rétribués), croyance qui ne peut que renforcer l'empathie envers autrui.

Les écritures sacrées

Les écritures sacrées de l’Inde antique se classent grossièrement en trois catégories. Tout d’abord, il y a les Vedas, les écritures antiques de la religion védique de laquelle l’hindouisme moderne dérive. En second lieu, on trouve les écritures hindoues post-védiques. Enfin, il y a l'ensemble les écritures des mouvements dissidents comme le bouddhisme et le jainisme. Ceux-ci étaient en grande partie des réactions contre les Vedas, mais ils ont beaucoup emprunté aux deux premières, en terme d’enseignement et de conception générale de la vie. Nous discuterons ici seulement des deux premières catégories. En aucun cas ces écritures ne peuvent être considérées comme l'origine de la religion hindoue puisque les sources de l'hindouisme sont plus anciennes encore.

La Shruti : Les Veda

Passage en sanskrit du Rig-Veda

On s’accorde à penser que les Vedas sont les textes religieux les plus anciens au monde. Les Vedas sont considérés comme Shruti (indiqués) par les Hindous. On dit qu'ils sont indiqués par l'Esprit suprême (ou Dieu) Brahman aux sages/scombres (rishis), tandis que les rishis étaient dans la méditation profonde. Les idées exprimées dans les Vedas ont été, tout d’abord, traditionnellement transmises oralement de père en fils et de professeur à disciple. Par la suite, ces idées, qui circulaient depuis longtemps, ont été codifiées et compilées par un sage appelé Vyasa (littéralement, le compilateur). Sur la base d’indices internes et externes, les chercheurs ont avancé diverses dates pour l’origine du Veda, s’étendant approximativement de 5000 av. J.-C. à 1500 av. J.-C..

Dans la vision hindoue traditionnelle, les Vedas seraient non personnels et sans commencement ni fin, ce qui signifie que les vérités décrites dans les Vedas sont éternelles et qu’elles ne sont pas des créations de l’esprit humain, ce en quoi elles diffèrent des enseignements du bouddhisme et du jainisme .

Il y a quatre Vedas : le Rig-Veda, le Yajur-Veda, le Sama-Veda et l’Atharva-Veda plus tardif. Le Rig-Veda contient des mantras pour invoquer les devas pour les rites de feu-sacrifice ; le Sama-Veda a des chants pour chanter là-bas ; le Yajur-Veda a des véritables instructions pour les sacrifices ; et le Atharva-Veda comprend des charmes philosophiques et demi-magiques (sic) — des charmes contre les ennemis, les sorciers, les maladies et les erreurs pendant le rite sacrifiant. Chacun est divisé en quatre sections :

Les Vedas sont pleins de mysticisme et d'allégories. Beaucoup d'écoles comme Smartisme et Advaitisme encouragent les gens à interpréter les Vedas philosophiquement et métaphoriquement, mais pas trop littéralement. Le son des mantras védiques est considéré comme « purifiant » par beaucoup d'hindous, cela implique donc la rigueur dans l'érudition de prononciation. La tradition orale rigoureuse de transmettre les Vedas a aidé dans sa préservation parfaite.

La religion védique, issue de l'invasion aryenne, en particulier dans sa période archaïque, était différente de l’hindouisme actuel par de nombreux aspects, en particulier la référence aux femmes comme autorité religieuse (avec existence de femmes rishis), (sanskrit, rsi: sage), un manque apparent de croyance en la réincarnation (qui était par contre une croyance typique des autochtones, les dravidiens, pratiquant la zoolâtrie, le culte des arbres et des fleuves — voir à religion harappienne, Gange et vache sacrée), et un panthéon nettement différent, avec Indra comme « roi des dieux », et de rares mentions de la trinité postérieure de Brahma, Vishnou (qui, par la suite, est devenu le « dieu des dieux »), et Shiva. Les Aryens ont exécuté des feux-sacrifices appelés yajña, avec le chant des mantras védiques, mais ils ne construisaient pas de temples, d'idoles ou d'icônes ( — encore une fois : contrairement aux autochtones dravidiens). Les animaux ont probablement été également sacrifiés dans quelques plus grands yajñas, comme réclamés par les textes bouddhistes et jain.

La Smriti : Les écritures hindoues post-védiques

Les Vedas sont désignés sous le nom de Shruti (ce qui est révélé). Les livres plus récents sont appelés Smriti (ce qui est rappelé ou mémoire/tradition). Tandis que la littérature shruti est écrite en sanskrit védique, les textes smriti sont en sanskrit classique (plus facile), et pour certains, en prâkrit, ou langue commune. Puisqu’accessible à tous, la littérature smriti a connu une grande popularité parmi toutes les couches de la société indienne, et ce dès le début. Aujourd’hui même, la plus grande partie du monde hindou est plus familière avec le smriti qu’avec la littérature shruti réservée (tardivement) à la caste dominante des brahmanes. La smriti correspond donc à la littérature populaire, et, en tant que telle, elle est théoriquement moins ardue que la shruti (la shruti remontant à l'aube de l'Inde c'est-à-dire à l'époque védique, est aujourd'hui, du fait de son langage et son vocabulaire, sujet à interprétation). La smriti (collection de 36 textes selon Paithina) est le pendant populaire de la shruti, à travers l'histoire des Dieux et des héros, elle instruit sur la pensée indienne. Les Shrutis prennent la priorité sur les Smritis dans n'importe quelle question de dispute mutuelle apparente.

Passage du Mahâbhârata

La littérature smriti inclut :

Les Dharmashâstras (ou livres de loi) font également partie du smriti. De temps en temps, apparaissent de grands législateurs (comme par exemple Manu, Yajnawalkya et Parasara) qui codifient les lois existantes et éliminent les règles désuètes pour s’assurer que la façon de vivre hindoue reste conforme à l’esprit védique tout en étant en accord avec le temps présent. Mais puisque la religion hindoue n'a pas de dogme, ces textes de Smriti ne sont pas obligatoirement suivis par la plupart des hindous. En fait, quelques personnes disent que les Britanniques ont popularisé le Manu-Smriti pour imposer un code uniforme de loi sur les hindous.

La philosophie hindoue décrite dans les épopées et les Puranas est la doctrine de l’avatar ou incarnation, partielle ou totale, d'un dieu en être d’humain. Les deux avatars principaux de Vishnou qui apparaissent dans les épopées sont Râma, le héros du Râmâyana, et Krishna, le protagoniste majeur du Mahâbhârata. À la différence des dieux de la Samhitâ védique et du concept abstrait de Brahman des Upanishads, qui parlent d'un dieu omniprésent et sans forme, les avatars de ces épopées sont des intermédiaires humains entre l’être suprême et les mortels.

Cette doctrine a eu un grand impact sur la vie religieuse hindoue, parce qu’elle montre que Dieu s’est manifesté sous une forme qui pourrait être appréciée même par le plus modeste des hommes. Râma et Krishna sont depuis des milliers d’années des manifestations du divin, aimées et adorées des hindous. Le concept du brahman des Upanishad est assurément le pinacle de la pensée religieuse indienne, mais le concept des avatars a certainement eu plus d’influence sur l’hindou moyen. Il est intéressant de noter que les hindous attachent plus d'importance à l'éthique et aux sens métaphoriques transmis par ces textes, qu'à la mythologie littérale.

La philosophie de l'Inde

Un sadhou, à Kathmandu, au Népal

L'hindouisme a comme particularité vis-à-vis des autres religions le fait qu'il soit intimement lié à la philosophie (ou Darshana) et à la science en général (sociale comme physique). Contrairement à l'Occident où les conflits furent nombreux entre les autorités religieuses et les savants, l'hindouisme assimile chaque découverte. Souvent, à la lecture d'un ouvrage qui traite d'un domaine particulier comme la mythologie (tel un purâna), les auteurs y ont distillé des informations sur la théologie, la philosophie, l'astrologie... Lire un purâna, c'est avant tout lire une encyclopédie (le Bhâgavata-purâna étant le meilleur exemple).

On trouve donc classiquement deux sortes de philosophies indiennes : les philosophies astika, qui suivent le Veda et les philosophies nastika qui, comme nous l'avons vu plus haut, sont le jaïnisme, le bouddhisme et le chârvâka, l'athéisme ancien, philosophies qui rejettent le Veda. Les philosophies hindoues de la Mimamsa, le Yoga et le Vedanta continuent à enrichir l'hindouisme aujourd'hui.

Purva-Mimamsa

L'objectif principal de l’école de la Purva(« tôt »)-Mimâmsâ (ou simplement appelé Mimâmsâ) était d'établir fermement l'autorité des Vedas. Par conséquent, la contribution la plus marquante de cette école fut d'avoir formulé des règles d'interprétation des Vedas. Ses adhérents ont cru que cette vraie connaissance était évidemment prouvée, et ont essayé de découvrir la base du ritualisme védique par la raison. La Mimamsa forme la base du ritualisme (dans lequel les gens croient que les rites d'adoration des demi-dieux ont des pouvoirs inhérents) dans l'hindouisme moderne, qui apparaît ainsi de manière générale polythéiste.

Yoga

Shirshasana
Le lotus

Dans l'hindouisme, le Yoga est considéré comme étant la façon ultime d'atteindre les buts spirituels. Le yoga signifie union et est généralement interprété comme l'union avec l'Absolu, ou l'intégration du corps, de la psyché et de l'esprit. Ses buts sont le moksha (la délivrance du cycle des réincarnations). Comme les Upanishads, le Yoga dans son aspect spirituel met en évidence les rêts de l'égo, permettant la libération du Soi, par la méditation, les exercices physiques et spirituels. En Occident, sa reconnaissance auprès du plus large public se cantonne aux bienfaits des postures, de la respiration et de la détente.

Sa philosophie est bien souvent délaissée, car très rapidement elle invite à une remise en cause des routines, convictions où parade un égo redondant, fier de sa pratique posturale et autres prouesses. Quand le voile s'entrebâille sur l'amour propre et la souffrance / frustration que l'égo entraîne, cette philosophie, qui pourrait éradiquer le stress, est bien souvent jugée dérangeante et par suite n'est pas poursuivie.

Uttara-Mimamsa ou Vedanta

L’école Uttara (supérieur, dernier) Mimamsa, appelée aussi Vedanta, est peut-être le pilier central de l'hindouisme et est certainement responsable du nouvel enseignement philosophique et méditatif, du renouvellement et de la renaissance de l'hindouisme en en établissant les fondations philosophiques. Le concept du Brahman est extrêmement important en Vedanta. Bien qu'il y ait six écoles philosophiques hindoues majeures, la plus importante est l'Advaita Vedanta fondé par Adi Shankara. La secte mondialement connue du Vaishnavisme, adorant Krishna, appelée l’ISKCON, suit une autre philosophie de Vedanta par Chaitanya Mahaprabhu — nommée « Achintya Bhedabheda ».

Les fêtes hindoues

Krishna célébrant le Holi avec les Gopis (« bergères »)

Excepté les fêtes les plus populaires, comme celle de Holi, de la naissance de Krishna ou de Diwali, la fête des lumières, qui sont célébrées dans toute l'Inde, la plupart des célébrations ont une importance locale[1].

Habituellement, le déroulement de la fête est centré autour d'un grand char richement orné portant les images des divinités du temple, et qui est tiré à travers le village ou la région toute entière[1].

L'une des fêtes les plus connues est celle qui se tient à Puri (en Orissa) en l'honneur de Krishna-Vishnou qui représente à cette occasion les figures de Jaqannatha (« seigneur du monde »), de son frère Balarama et de sa soeur Soubhadra[1].

Il y a aussi le Janmâshtami, « huitième jour de naissance », fête de la nativité de Krishna, au mois d'août. Une poupée représentant Krishna bébé est placée dans une crèche, autour de laquelle la famille veille une grande partie de la nuit en récitant des invocations et des chants. Le jeûne est souvent observé à l'occasion de cette cérémonie[21].

La Koumbh Mélâ (« assemblé, ou foire du Pot »)

Les Mélâs, auxquels on attribue une importance toute particulière, sont de grandes fêtes à mi-chemin de la célébration religieuse et du marché, moment annuel de réunion de swâmis, de sâdhous, pèlerins, ascètes, mendiants et fidèles. Comme les hindous considèrent qu'il est de bon augure de voir ou de toucher un saint homme, un rassemblement de mystiques et d'ascètes provoque une grande affluence de pèlerins venus de partout, poussés par le désir de faire l'expérience du darshan (: « vue », du sanskrit darshana-, « fait de regarder, de voir » : il s'agit de la contemplation d'une image divine, dans le domaine de l'art ou « fait homme », dont la seule vue produit des effets bénéfiques)[1].

Parmi ces fêtes, la plus importante est celle du Kumbh Mela d'Allahabad, qui a lieu tous les douze ans. Des millions de pélerins se réunissent au point de confluence des deux fleuves visibles, le Gange et le Yamunâ, avec le fleuve invisible (Sarasvatî), selon la croyance qui plonge ses racines dans la symbolique du yoga. Un bain dans les eaux sacrées peut conduire à la délivrance du cycle éternel des réincarnations[1].

Au Népal, outre les fêtes de Holi et celles de la déesse Sarasvatî, les shivaïtes accordent également une importance particulière à la « nuit du grand Shiva », ou Mahâshivarâti, qui célèbre le réveil de Shiva après une longue méditation[1].

L'hindouisme dans le monde

Zone historique de l'hindouisme : Inde, Népal, Bhoutan, Bangladesh, Indonésie, Birmanie, Sri Lanka, Pakistan, Malaisie, Thaïlande, Laos, Cambodge, Viet Nam, Maldives, Philippines, Afghanistan, une partie de l'Iran et de la Chine
En rouge, les pays au nombre d'hindous le plus important, en violet d'importance secondaire, en bleu, faible

L’Inde, Maurice et le Népal sont des nations majoritairement hindouistes. Le Népal est le seul État dans le monde dont la religion officielle est l'hindouisme.

L’Asie du Sud-Est a été largement hindouisée depuis le IIIe siècle. Il en reste un grand nombre de monuments, comme la ville-temple d’Angkor Vat au Cambodge ou les temples de l'île de Java en Indonésie, ainsi que la grande popularité des épopées du Mahabharata et du Ramayana. L'influence dans la danse est moins évidente. L’île indonésienne de Bali est ainsi restée essentiellement hindouiste, avec des éléments bouddhistes, le syncrétisme étant plus faciles dans ces cultures. La culture javanaise est encore fortement imprégnée d'éléments indiens, et il reste des enclaves d'hindouisme à Java. La Thaïlande et l'Indonésie ont comme armoiries nationales Garuda, le véhicule de Vishnou, qu'on retrouve également dans le nom de la compagnie aérienne nationale, Garuda Indonesia.

Depuis le dix-neuvième, un isolement des minorités hindoues de par la partition indienne et une diaspora indienne se sont constitués. On trouve actuellement des minorités hindouistes importantes dans les pays suivants : le Bangladesh (11 millions), l'Indonésie (plus de 3 millions), le Myanmar (2,1 millions), le Sri Lanka (2,5 millions), les États-Unis (1,7 million), le Pakistan (1,3 million), l’Afrique du Sud (1,2 million), le Royaume-Uni (1,2 million), la Malaisie (1,1 million), le Canada (0,7 million), les Fidji (0,5 million), la Trinité-et-Tobago (0,5 million), le Guyana (0,4 million), les Pays-Bas (0,4 million) et le Surinam (0,2 million).

L'hindouisme et la minorité hindoue aprés la partition indienne

Le départ des colonialistes britanniques en 1947 a laissé l’Inde divisée en deux territoires. Un à majorité musulmane, le Pakistan (constitué de deux régions : le Pakistan oriental et occidental) et l’autre à majorité hindoue, l’Inde. Alors que l’Union indienne adoptait la laïcité, le Pakistan, lui, se proclamait République islamique du Pakistan, adoptant une Constitution basée sur une jurisprudence islamique, qui réduisait considérablement les droits politiques de ses minorités religieuses dont la plus importante était la communauté hindoue. De fait, jusqu’à aujourd’hui, et contrairement à l'Inde qui reste le troisième pays musulman au monde, pratiquement aucun hindou n’a pu accéder à une position significative dans la société (gouvernement, armée...).

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Taslima Nasreen, menacée par des fondamentalistes islamiques à la suite de la publication de son premier roman Lajja (La honte), qui dénonçait l'oppression courante sur la communauté hindoue au Bangladesh, fut obligée de quitter son pays natal, le Bangladesh, menacée d'une fatwa qui la condamne à mort. Habitant désormais Calcutta, en mars 2007, sa tête à été mise à prix par un groupe islamiste indien[22]. La prime pour sa décapitation est de 500 000 roupies (8 842,62€). Une pétition à été mise en place pour faire pression sur le gouvernement indien pour qu'il fasse retirer cette prime[23].

En 1947, la communauté hindoue du Pakistan représentait 23 % de la population au Pakistan occidental et 29 % au Pakistan oriental. En 1998, elle représentait seulement 1,60 % de la population totale du Pakistan – réduit à sa partie occidentale depuis 1971 avec la sécession de sa partie orientale devenue le Bangladesh. Cet effondrement démographique est la preuve éclatante des discriminations dont les citoyens pakistanais de confession hindoue ont souffert, et des violations des droits de l’homme dont ils font l’objet. Au Pakistan oriental, aujourd’hui le Bangladesh, deux millions de personnes ont été massacrées lors de la répression menée par la junte militaire d’Islamabad au cours de la guerre d’indépendance de 1971. Ce nettoyage ethnique et l’exode vers l’Inde de la communauté hindoue, portent à 10 millions le nombre de Bangladeshis disparus. Selon Saleem Samad, journaliste militant pour le respect des droits de l'homme, la population hindoue au Bangladesh en 1991 aurait dû, avec un taux normal de croissance, atteindre 32,5 millions. Elle n’était que de 12,5 millions. Cette « tragédie silencieuse », pour reprendre les termes de Afsan Chowdhury, journaliste bengali militant pour les droits de l’homme, est en grande partie ignorée par les médias régionaux et, par conséquent, par les médias internationaux, et ces violations des droits de l’homme figurent rarement dans les rapports annuels des organisations concernées. Aujourd’hui, le destin de la minorité hindoue dans ces trois régions (en comptant le Kashmir) est celui d’une population discriminée et opprimée dont la situation est globalement ignorée par les organisations internationales de défense des Droits de l’Homme.

Controverses autour de l'Hindouisme

La satî (« vertueuse », fidèle jusque dans la mort), symbole du dévouement total de la femme à son mari, qui consiste pour la veuve à monter sur le bûcher du défunt et mourir brûlée vive. Pratique tardive en Inde (VIe siècle apr. J.-C.) limitée à la caste des kshatriyas, absente dans l'Atharva-Veda où sont exposés les rites de la cérémonie funéraire (il n'en est fait aucune prescription), elle a pour origine l'interprétation d'une légende où la déesse Satî, si dévouée à son mari, qu'elle est prête à se jeter dans les flammes pour défendre l'honneur que celui-ci a perdu en se disputant avec son beau-père. Interdite sous le raj britannique, la satî a engendré une méfiance infondée à l'égard de l'hindouisme.[1]

L'hindouisme est critiqué à cause de ses traditions sociales jugées régressives et passéistes, telles que la dot que les parents doivent assurer à la mariée, dot que la constitution indienne a par ailleurs rendue illégale, et qui était encore monnaie courante dans les milieux bourgeois à la fin du XIXe siècle en Europe ; le rite funéraire de la satî — le suicide de la veuve sur le bûcher funéraire de son époux — le mariage entre enfants, le refus aux veuves de se remarier, la pratique des sacrifices, les pèlerinages, et, bien sûr, le système de castes, choses par ailleurs condamnées par des réformateurs et philosophes hindouistes tel que Basava dès le XIIe siècle. Ainsi, nombreux sont les hindous cultivés qui se préoccupent de l'avenir de leur religion. Les analyses qu'ils font ne manquent pas de pertinence. On nous dit, par exemple, que le système des castes meurt en Inde, ou est-il du moins en sursis, mais que l'hindouisme n'est pas lié à la caste. En théorie, Le Brahman absolu ou le Purusha suprême est, en effet, au dessus des distinctions de caste : c'est bien ce que les textes révélés (veda) eux-mêmes ont essayé d'enseigner dès le début. Il est vrai aussi que, au moins dans la vie urbaine, les interdictions concernant la commensalité et les intermariages sont de moins en moins observées[24]. On rapellera que l'avantage d'un système des castes socioprofessionelles (bien que non liées religieusement à l'hindouisme), est une société où l'esprit de compétition n'existe pas, esprit de compétition qui peut se révéler destructeur et particulièrement néfaste à la dignité humaine, en résumant l'homme en une «  machine à produire et à consommer »[24].

En rappel à ce qui vient d'être évoqué, on se souviendra de ses termes fort critique de Rabîndranâth Tagore (1861-1941), premier prix Nobel de littérature d'Asie, en 1913), lors d'un discours devant l'université de Tokyo, le 18 juin 1916 : « La civilisation qui nous vient d'Europe est vorace et dominatrice : elle consume les peuples qu'elle envahit, elle extermine ou anéantit les races qui gênent sa marche conquérante. C'est une civilisation toute politique, aux tendances cannibales ; elle opprime les faibles et s'enrichit à leurs dépens. C'est une machine à broyer. Elle sème partout les jalousies, les dissensions. C'est une civilisation scientifique et non humaine (...). Elle concentre ses forces dans l'unique but de s'enrichir, comme le ferait un millionnaire qui acquiert une fortune au prix de perdre toute éthique. Nous prophétisons sans la moindre hésitation que cela ne pourra durer indéfiniment, car le monde est régi par une loi morale souveraine qui s'applique aux collectivités comme aux individus. »

Gravure française représentant Râma et Hanuman ; Râma est considéré comme un modèle de dévotion aux règles du dharma, et comme un adversaire actif de ceux qui veulent le détruire.
Swami Vivekananda (1863-1902)
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Le Grand Bouddha avant 2001, à Bâmiyân

Du point de vue des trois religions abrahamiques, l'hindouisme est également critiqué comme étant polythéiste et promouvant l'idolâtrie — qui sont de leur point de vue des actes impies. Le contre-argument hindou est que l'hindouisme n’est pas strictement polythéiste (le « théisme monistique » ou « monisme » est plus juste), bien qu'il puisse présenter une apparence de polythéisme strict aux observateurs externes peu familiers avec sa philosophie. Aussi en ce qui concerne l'idolâtrie — qui est définie à partir du point de vue abrahamique et vue comme l'adoration d'un Dieu qui n'est pas conforme aux croyances occidentales — les accusations sont dues à la différence de point de vue. Les icônes sont des supports dévotionnels, qui permettent d'adorer la déité (dieu peut s'incarner dans une simple pierre, après des prières appropriées qui ont comme but de sacraliser l'objet, car le divin est en toute chose, puisque l'idée de Dieu est l'Absolu, le « Brahman ») ; bien qu'il ne soit pas indispensable de vénérer les idoles pour être hindou.

L'hindouisme est d'autre part plus tolérant envers les autres idées religieuses, les considérant plutôt comme autant de voies d'accès à la spiritualité. Pour l'hindou, il n'existe pas de fausses religions. De plus, on présente trop souvent en Occident l'hindouisme comme une religion où les « dieux et les déesses » ainsi que la mythologie ont un caractère fortement sexuel et violent — ce qui décrédibilise l'hindouisme et ses croyants. Les hindous condamnent fortement de telles interprétations : selon eux, c'est non seulement une analyse inexacte qui se soucie peu de comprendre le dharma hindou, mais aussi, pour d'autres, ces critiques, dans un contexte d'évangélisation par les autres religions de l'Inde (voir le voyage de Jean-Paul II en Inde) sont perçues somme une désinformation voulue afin d'éclipser le savoir hindou, de la connaissance mondiale actuelle auquel il a fortement participé. N'oublions pas que la conférence des Missionnaires de l'Inde du Sud, définissait en 1858 les buts de l'éducation en Inde en ces termes : « L'objet de tout travail missionnaire ne devrait pas être de prime abord l'apport de la civilisation, mais l'Évangélisation des païens… Les écoles peuvent donc être considérées comme des centres de conversion et leur valeur estimée par le nombre d'élèves qui renoncent à l'idolâtrie et professent ouvertement la chrétienté. » Swamy Vivekananda, l'apôtre de la renaissance hindoue s'exclamait : « Lorsqu'un jeune enfant indien est amené à l'école, la première chose qu'on lui apprend, c'est la haine de sa propre culture ! » Les choses ont-elles vraiment changé aujourd'hui ? Rien ne symbolise mieux la continuité de l'esprit missionnaire en Inde que Mère Thérèsa, qui projeta une image totalement négative de l'Inde.

En Inde, le problème de la conversion concerne principalement les hindous et les sikhs, dans la mesure où la petite communauté Jaïn s'est complètement immunisée contre les sollicitations extérieures et que les bouddhistes ont reçu un afflux régulier de nouveaux adeptes. La raison pour laquelle il n'existe pas d'hostilité de la part des hindous contre les bouddhistes, c'est que l'acceptation de cette foi n'implique pas la négation du passé hindou. Le Dr. Ambedkar était catégorique sur le fait que la conversion à une foi monothéiste ferait perdre aux Dalits le sentiment de leur appartenance à la Nation et constituerait pour eux une terrible injustice[25].

Il existe aujourd'hui une perception grandissante du fait que les conversions par les religions monothéistes, qui nient le mérite spirituel et les richesses culturelles des autres pays, constituent une forme extrême de violence et d'intolérance. On assiste également à une prise de conscience croissante au niveau populaire : il est maintenant évident que toutes les religions n'ont pas les mêmes buts pour leurs adhérents et que l'incitation politique à privilégier telle ou telle foi a (eu) des effets délétères sur la stabilité sociale[26]. Enfin, on ne doit pas oublier que le nombre de non chrétiens tués par des militants chrétiens est nettement plus élevé que le contraire[27]. Par exemple, en 2001, des militants séparatistes du Tripura, un État à moitié christianisé, ont enlevé quatre activistes hindous dont les corps décapités ne furent retrouvés qu’un an plus tard. Autre exemple : une tribu qui refuse la conversion, les Riang, a été expulsé de ses villages et de l’état de Mizoram par la force[27].

Loin de constituer une activité bénigne, la conversion implique une offensive ouverte et soutenue contre les traditions vivantes et les cultures des autres peuples. L'incapacité de percevoir les traditions vivantes, comme celle de l'Inde, comme faisant partie de l'héritage vivant de l'humanité dans son ensemble, explique l'échec de la tentative de protéger les Bouddhas de Bâmiyân des exactions des Talibans en 2001. Pour les Nations Unies et le monde occidental, les Bouddhas n'étaient tout au plus que des statues antiques d'une certaine valeur aux yeux des amoureux de l'art, des défenseurs de l'environnement et des touristes. Mais pour l'Inde, ils étaient des dieux vivants, et les Talibans, armés par le Pakistan, les ont détruites pour humilier l'Inde publiquement. L'imam Shahi de New Delhi a aussi justifié leur démolition de ce point de vue[28].

Shivâjî Bhonsla, héros marathe du XVIIe siècle, devant Bhâvanî, pour laquelle il fait le voeu de fonder un royaume hindou, est le précurseur, pour ne pas dire le fondateur, de l'hindutva : il annexa en effet une grande partie de l'Empire moghol.

Une autre critique est celle appelée Hindutva. Au XXe siècle, le patriotisme indien émergeant a commencé à valoriser l'hindouisme, dans l'opposition au Raj britannique, mais aussi par opposition à l'islam, et après l'Indépendance à propos des disputes territoriales avec le Pakistan. Cet hindouisme patriotique est généralement nommé Hindutva (« le fait d'être Hindou », qui paradoxalement n'est pas un mot formé du sanscrit, puisque « hindou » est un mot persan). Mais les frontières sont fluides ; la Cour Suprême indienne a légiféré dessus « le sens flou peut être attribué aux termes « hindou », « Hindutva » et « hindouisme » ; mais il ne se limite pas à la sphère étroite de la religion, qui exclut les idées de culture et l'héritage indien ». Un des desseins à court terme des membres les plus décidés de l'Hindutva est la reconstruction déjà amorcée du temple de Râma sur le site de la mosquée Babri controversée, symbole de répression à Ayodhya (Il est important de souligner que la structure qui fut détruite le 6 décembre 1992 ne fonctionnait plus en tant que mosquée depuis des décennies, mais comme un temple hindou depuis 42 ans). Car le Seigneur Râma est, selon la Tradition et d'après certains historiens, né sur ce site. Le Moghol qui administrait le lieu, Mir Baki, avait construit la mosquée Babri après avoir détruit un temple Vaishnavite commémorant ce lieu de naissance, pour la raison invoquée d'idolâtrie (shirk).

V. S. Naipaul, qui a obtenu en 2001 le prix Nobel de littérature, « pour avoir mêlé narration perceptive et observation incorruptible dans des œuvres qui nous condamnent à voir la présence de l'histoire refoulée », rejetant les critiques négatives à l'encontre du mouvement, déclare, au contraire, comme bienvenue la vague de l'Hindutva, considérant qu'elle honore fondamentalement (car permet) une renaissance et une affirmation de la culture indienne.[29]

Voir aussi

Les Indianistes français

Les penseurs et philosophes indiens

Quelques enseignants et maîtres spirituels indiens

Sources

Louis Frédéric, Dictionnaire de la civilisation indienne, Robert Laffont, , 1276 p. (ISBN 2-221-01258-5) ISBN 2221012585

  • Alain Daniélou, Mythes et Dieux de L'Inde, le polythéisme hindou, ed. Champ-Flammarion, 1994, ISBN 2080813099
  • Jean Herbert, La mythologie Hindoue, son message, ed. Albin Michel, 1980
  • Aurobindo, La Bhagavad-Gita, ed. Albin Michel, 1970
  • Six Upanishads Majeurs, ed Le courrier du Livre, 1971
  • Louis Renou, Hymnes spéculatifs du veda, ed: Gallimard, 1956

Références

  1. a b c d e f g h i j k l m n o p q r s t u v w x y z aa ab ac ad ae et af Encyclopédie des religions, de Gerhard J. Bellinger, ISBN 2253131113 Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : le nom « Bellinger » est défini plusieurs fois avec des contenus différents.
  2. Voir Religion
  3. d'après La Vache sacrée et autres histoires indiennes de Taru Chopra, éditions Prakash Books ISBN 8172340419
  4. a b c et d Le yoga, immortalité et liberté de Mircea Eliade, ISBN 2228883506
  5. Ce truisme est d’une application générale : l’image que l’on s’est créée des « sociétés inférieures » durant le XIXe siècle, dérivait en bonne mesure de l’attitude positiviste, antireligieuse et a-métaphysique de quelques excellents explorateurs et ethnologues européens, qui avaient abordé les « sauvages » avec l’idéologie d’un contemporain d’Auguste Comte, de Darwin ou de Herbert Spencer : on découvrait partout, chez les « primitifs », du « fétichisme », de l’ « infantilisme » religieux tout bonnement parce qu’on ne pouvait pas y voir autre chose. Il a fallu l’essor de la pensée métaphysique occidentale, les multiples acquisitions de la psychologie des profondeurs, de la poésie, de la microphysique, pour arriver à comprendre l’horizon spirituel des « primitifs », à la structure de leurs symboles, la fonction de leurs mythes, la maturité de leurs mystiques.Le yoga, immortalité et liberté de Mircea Eliade, ISBN 2228883506
  6. L'enseignement de Mâ Ananda Moyi. Traduction de Josette Herbert. Éditions Albin Michel S.A., Collection « Spiritualités vivantes », Paris, 1988. 383 p./ p.42 ISBN 2-225-15178-8
  7. a b c d e f g h i j k l m et n Mythologie de la Méditerranée au Gange, Larousse
  8. Autobiographie ou mes expériences de vérité, Mahâtmâ Gândhî
  9. L'Enseignement de Ramana Maharshi, trad. A. Dupuis, A. Perelli, J. Herbert, Albin Michel, 1972
  10. Gerhard Bellinger, Encyclopédie des Religions ISBN 2253131113
  11. encyclopédie des religions Gerhard J. Bellinger ISBN 2253131113
  12. Mythologie de la Méditerranée au Gange, Larousse, P. Grimal
  13. Mythologie de la Méditerranée au Gange, Larousse
  14. La vache sacrée, de Tarun Chopra, ISBN 8172340419
  15. a b c d e f g h i j k et l L'hindouisme, anthroplogie d'une civilisation, Madeleine Biardeau
  16. a b c et d Mytthes, rêves et mystères, Mircea Eliade. ISBN 2070325202
  17. La méthode Assimil, Akshay Bakaya & Annie Montaut ISBN 2700501721
  18. L'encyclopédie de la Philosophie, ISBN 2253130125
  19. a b c d e f g h i j k et l Les civilisations de l'Asie, Véronique Ageorges, Jean-Michel Coblence, Casterman, ISBN 2203157070
  20. Autobiographie ou mes expériences de la vérité, Mohandas Karamchand Gandhi
  21. Autobiographie, ou mes expériences de vérité, Mahâtmâ Gândhî, ISBN 8172340168
  22. (Indian Muslim group calls for beheading of writer, Khaleej Times Online / AFP, 17 March 2007
  23. voir le texte de la pétition "In Defence of Taslima Nasreen"
  24. a et b d'après L'HINDOUISME, ANTHROPOLOGIE D'UNE CIVILISATION Madeleine BiardeauFlammarion
  25. "Conversion disrupt the social fabric", the Pioneer, du 22 octobre 2002, par Sandhya Jaïn
  26. "Conversion disrupt the social fabric", the Pioneer, du 22 octobre 2002, par Sandhya Jaïn
  27. a et b Le nationalisme hindou dans le politique actuelle de l'Inde, Dr Koenraad Elst, dans LA REVUE DE L'INDE, N°1, octobre/décembre 2005
  28. "Conversion disrupt the social fabric", the Pioneer, du 22 octobre 2002, par Sandhya Jaïn
  29. Naipaul V.S. India, a million Mutinies now, Penguin 1992

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