Provinces de l'Empire ottoman
Les provinces de l'Empire ottoman étaient des divisions administratives fondées sur l'administration militaire et civile ainsi que les fonctions exécutives.
Historique
L'organisation administrative de l'Empire ottoman a évolué au cours de l'histoire[1].
Les premières provinces ont été créées à partir du XIVe siècle, leur nombre s'accroissant progressivement au fur et à mesure de l'extension de l'empire.
La structure administrative a été refondée au cours des vastes réformes (Tanzimat) de 1864, visant à la modernisation de l'Empire et à faire de l'administration des provinces un relais de l'État. Elle préfigure les provinces de la république turque qui succède à l'Empire en 1922.
Hétérogénéité du système
Contrairement à ce que montrent par erreur beaucoup de cartes historiques (y compris anciennes), les états vassaux, musulmans ou chrétiens, payaient un tribut au Sultan ottoman mais ne faisaient pas partie de l'Empire, n'étaient pas des provinces ottomanes, n'avaient pas l'obligation de fournir des troupes à l'Empire, disposaient de leurs propres dynasties, conseils, lois, administrations, armées, flottes, diplomaties (attributs de la souveraineté).
Ces états vassaux étaient soit musulmans (Tlemcen, Alger, Qacentine et Khanat de Crimée ; le Sharifat de La Mecque, dévolu au Sultan en tant que Calife et « Commandeur des croyants », avait aussi un statut d'autonomie), soit chrétiens (Raguse, Transylvanie, Moldavie, Valachie, Abkhazie et Kakhétie-Imérétie).
En Crimée, le Khanat, qui s'étendait loin à l'intérieur de ce qui est aujourd'hui l'Ukraine et la Russie méridionale, ne possédait en revanche pas l'extrémité montagneuse de la péninsule, qui, elle, était bien province ottomane (ancienne principauté greco-arménienne conquise, dont les dynastes, passés à l'islam, ont conservé quelque temps leur statut héréditaire).
Dans les états vassaux chrétiens, les Ottomans ne pouvaient pas construire des mosquées ni y posséder de la terre : c'étaient des « protégés du Sultan » mais des étrangers, un statut symétrique à celui de certains chrétiens ou juifs de l'Empire ottoman vivant sous le « régime des Capitulations », qui étaient des « protégés » des souverains chrétiens d'Europe (comme la famille Balladur).
Période post-Tanzimat
Au début de l'année 1865, l'Empire ottoman comptait une cinquantaine de provinces en Europe, Asie et Afrique, qui s'étendaient des Balkans à l'Afrique du Nord en passant par le Moyen-Orient et l'Égypte. Les noms en français sont ceux figurant sur les cartes françaises de l'époque ; les noms ottomans sont donnés en italique entre parenthèses :
En Europe
- Albanie (Mirdit-eli, capitale İşkodra ou Scutari - il s'agit du Scutari d'Albanie)
- Bosnie (Bosna-eli, capitale Bosnasaray)
- Bosphore (Bolu-kaleh, capitale Istanbul ou Constantinople)
- Crète (Giritada-eli, capitale Haniye ou La Canée)
- Danube (Ton-eli, capitale Vidin)
- Dobrogée (Dobruc-beyliği, issu de l' Özi Eyaleti, capitale Dorostol)
- Crimée méridionale (Eyalet-i Mangup, capitale Mangoup)
- Djézireh des îles (Cezayir-i bahr-i Sefid adaları Akdeniz: "marche des îles de la mer du sud", en fait les îles égéennes, capitale Midillü, en fait dirigée d'Izmir ou Smyrne)
- Épire (Yanya-eli, capitale Yanina)
- Herzégovine (Hersek-beyliği, capitale Mostar)
- Maritza (Meriç-eli, capitale Edirne ou Andrinople)
- Roumélie méridionale (Güney Rum-eli, capitale Selanik ou Salonique)
- Roumélie occidentale (Batı Rum-eli, capitale Monastir)
- Métochie (Metohiye-eli, capitale Prizren ou Prizrend)
- Roumélie orientale (Doğu Rum-eli, capitale Filibe), autonome de 1878 à 1886 (date de son rattachement à la Bulgarie)
- Samos (Sisam beyliği, capitale Bafısam ou Vathy), île devenue principauté chrétienne autonome en 1834
- Sofia (Balı-efendi-eli, capitale Sofya)
- Syrfie (Serfiye sancağı, capitale Serfice ou Serfidzé).
En Asie
En Asie mineure
- Anatolie (Anadolu-eli, capitale Kütahya, ensuite Ankara ou Angora)
- Bithynie (Eyalet-i Hüdavendigâr ou Hodavendkiar, capitale Bursa ou Brousse, ensuite Kütahya)
- Paphlagonie (Kastamonu-eli, capitale Kastamonu ou Castamonie)
- Cilicie (Adana-eli, capitale Adana)
- Granique (Kale-i Sultaniye Antlaşması ou Biga sancağı), sandjak autonome et non vilayet
- Caramanie (Konya-eli ou Karaman-eli, capitale Konya)
- Lydie (Menderes-eli, capitale Aydın)
- Nicomédie (Ismid sancağı, capitale Izmit), sandjak autonome et non vilayet
- Paphlagonie (Kastamonu-eli ou Castamonie, capitale Kastamonu)
- Sébastée (Sivas-eli, capitale Sivas ou Sébastée).
Au Proche-Orient
- Arzanène (Bağeş-eli, capitale Bitlis)
- Adiabène (Diyarbakır-eli, capitale Diyarbakır également connue sous les noms de Diarbékir ou Douar-Bakr)
- Acilisène (Erzurum-eli ou Erzéroum, capitale Erzurum)
- Vasparacène (Van-eli, capitale Van)
- Kharpout (Mamuret-ül-Aziz-eli, capitale Elâzığ)
- Commagène (Halep-ve-Maraş-eli, capitale Halep ou Haleb)
- Djézireh de Syrie (Osrhoène ou Deyrizor-eli, capitale Deir ez-Zor ou Deyr-i Zor)
- Syrie (Suriye-eli, capitale Damas)
- Mossoul (Musul-eli, capitale Musul, à partir de 1879)
- Baghdad (Bağdat-eli, capitale Bagdad)
- Bassorah (Basra-eli, capitale Basra ou Bassorah)
- Hasa (Eyalet-i Lahsa, capitale Elığuf)
- Chypre (Kibris-ada), île avec statut d'autonomie (cédée à la Grande-Bretagne en 1878; capitale Lefkoşa ou Nicosie)
- Mont-Liban (Lubnan Dağlari mutasarrıflığı, Cebeli-Lubnan ou Djebel-i Lubnan, capitale Beirut ou Béryte), mutasarrifat et non vilayet
- Beyrouth (Beirut-eli ou vilayet de Beyrouth)
- La Mecque (Mekke şeriflığı), sharifat personnellement dévolu au Sultan et non vilayet
- Hedjaz (Hicaz-eli, capitale Medîne)
- Yémen (Yemen-eli, capitale Sana).
En Afrique
- Égypte (Mısır hidivliği, capitale Kahire ou Le Caire), khédivat autonome, et non vilayet ; les Khédives sont devenus héréditaires à partir de Méhémet Ali
- Nubie (Sudan-eli, capitale Hartum ou Khartoum), dépendance de l'Empire ottoman gouvernée en commun avec le khédivat autonome d'Égypte
- Cyrénaïque (Bingazi sancağı, capitale Bingazi), sandjak autonome, et non vilayet
- Tripolitaine (Trablusgarp-eli ou Trablus-Garb, capitale Tripolitaine)
- Tunisie (Tunus beyliği ou Eyalet-i Tunus, capitale Tunus), eyalet autonome, régi par des beys devenus héréditaires.
Avant 1830, l'empire comptait aussi en Afrique du Nord :
- La Djézireh de l'occident (Cezayir-i bahr-i Mağrib, "marche du pays d'occident" : Maghreb = "occident") : plus ou moins l'actuelle Algérie septentrionale avec trois deylıks : Tlemcène (Tlemcen), Alger (Al-djazaïr, en turc Cesayir, Djézireh en transcription française) et Kacentine (Constantine) (à noter : on trouve des traces de la présence Ottomane en Algérie, notamment dans des patronymes comme : Khodja, Kara, Stambouli, Sandjak...).
Article connexe
Sources
- Robert Mantran, Histoire de l'Empire ottoman, Fayard, 1989 ; Jean-Paul Roux, Histoire des Turcs, Fayard, 1984 ; André et Jean Sellier : Atlas des peules d'Orient, la Découverte, 2000 ; Alphonse Lamartine, Voyage en Orient, Arléa 2008 ; Taner Akçam, De l'Empire à la République, l'Aventurine, 2005 et Revue L'Histoire n° spécial 45 : Les Turcs.