Messerschmitt Me 264
Constructeur | Messerschmitt |
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Rôle | Bombardier et avion de reconnaissance à grand rayon d'action |
Statut | Prototype (Projet abandonné) |
Premier vol | |
Date de retrait | |
Nombre construits | 3 |
Équipage | |
8 | |
Motorisation | |
Moteur | Jumo 211J ou BMW 801 |
Nombre | 4 |
Type | Moteur en étoile |
Puissance unitaire | 1 730 ch |
Dimensions | |
Envergure | 43,00 m |
Longueur | 21,3 m |
Hauteur | 4,3 m |
Surface alaire | 127,8 m2 |
Masses | |
À vide | 21 150 kg |
Avec armement | 45 540 kg |
Maximale | 56 000 kg |
Performances | |
Vitesse maximale | 565 km/h |
Plafond | 8 000 m |
Rayon d'action | 15 000 km |
Charge alaire | 356 kg/m2 |
Rapport poids/puissance | 0,11 kg/ch |
Armement | |
Interne | 4 Mitrailleuses MG 131 de 13 mm 2 canons MG 151/20 de 20 mm |
Externe | 3 000 kg de bombes |
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Le Messerschmitt Me 264 était un projet de bombardier et avion de reconnaissance à long rayon d'action développé par Messerschmitt avant et pendant la Seconde Guerre mondiale à partir de 1937. Trois prototypes furent construits mais la production ne fut jamais lancée. Les travaux des ingénieurs furent stoppés en 1943.
Historique
En 1937, Messerschmitt entreprit le développement du « Projekt 1061 », qui devint plus tard le Me 264. C’était un avion quadrimoteur à long rayon d’action, prévu pour être utilisé pour des missions de bombardement et de reconnaissance lointaine. Du fait de la priorité accordée aux chasseurs Messerschmitt Bf 109 et Bf 110, le « Projekt 1061 » n’avança que de manière sporadique jusqu'en 1940.
Le , les autorités responsables de la politique intérieure du Troisième Reich, ainsi que l’état-major de la Kriegsmarine, réclamèrent au Reichsmarschall Hermann Göring un avion à long rayon d’action, capable d'atteindre le futur Empire colonial du Reich allemand qui devait être installé en Afrique centrale. Aussi, le Ministère de l'Aviation du Reich (Reichsluftfahrtministerium, RLM) publia un cahier des charges pour un avion ayant une autonomie de 12 000 km. Devant la possibilité d’une guerre future avec les États-Unis, cet avion devait pouvoir atteindre les côtes ouest de l'Amérique du nord et centrale.
Le , Willy Messerschmitt informa son équipe composée des ingénieurs Wolfgang Degel, Paul Konrad et Waldemar Voigt des exigences pour cet avion à long rayon d’action. Le projet initial avait été revu à la hausse : l’autonomie était maintenant portée à 20 000 km, tant dans sa version militaire que civile. Le « Projekt 1061 » militaire devait pouvoir emporter une charge de 5 tonnes de bombes dans une soute interne. Des bombes plus légères, devaient pouvoir être accrochées à des pylônes sous les ailes. À titre de comparaison, l’autonomie du Focke Wulf 200 Condor était d’environ 4 000 km, tandis que celle du Heinkel He 277, une évolution du Heinkel He 177 Greif, devait atteindre 6 000 km. Au début de 1941, Willy Messerschmitt reçut donc l’ordre de construire six prototypes du « Projekt 1061 », désormais re-désigné Messerschmitt Me 264. Si l'appareil prouvait ses capacités, 24 avions supplémentaires seraient fabriqués, afin de conduire des attaques de harcèlement contre les États-Unis. Parallèlement, Messerschmitt étudia une version hexamoteur du Me 264, le « Projekt 1075 ». Messerschmitt proposa au RLM la dénomination de Me 364 pour cette version, mais celle-ci fut refusée. Comme les bureaux d'études de chez Messerschmitt tournaient à pleine capacité, la création des plans fut déléguée aux bureaux Fokker à Amsterdam.
Le , l’Oberkommando der Luftwaffe (OKL) exigea un avion à grande autonomie pour la guerre maritime au-dessus de l’océan Atlantique. Le Focke-Wulf Fw 200 Condor, le Heinkel He 177 Greif, le Blohm & Voss BV 222 et le Messerschmitt Me 264 devaient être comparés, par les services techniques du RLM, pour déterminer quel serait le meilleur avion à pouvoir s’acquitter de cette mission. En raison de données très optimistes sur ses performances et sur sa masse, le RLM désigna le Me 264 comme étant le meilleur candidat. De plus, Willy Messerschmitt promit à Ernst Udet, chef de l’OKL, que le Me 264 V1 volerait en mai 1942. Afin d’augmenter l’autonomie, plusieurs solutions furent envisagées par le bureau d’études Messerschmitt : le remorquage d’un Me 264 par un autre jusqu’à une haute altitude, le réapprovisionnement en combustible par un second Me 264, ainsi que l’ajout de moteurs fusée, du type Rauchgerate, pour les décollages à charge maximale. À noter que des essais de ravitaillement en vol, entre un Focke-Wulf Fw 58 et un Junkers Ju 90, avaient été menés avec succès. Grâce à ces solutions, l’autonomie du Me 264 fut estimée à 18 100 km avec une charge de 5 tonnes de bombes, ou 26 400 km pour la version reconnaissance. Cependant, une telle autonomie ne pouvait être obtenue avec les moteurs disponibles sur le moment. Même améliorés, ces moteurs resteraient encore insuffisants. L'armement devait être composé de tourelles télécommandées avec des MG 131 de 13,1 mm ou des MG 151 de 15 mm.
Au début de 1942, du fait de la détérioration de la situation militaire de l’Allemagne, les développements complémentaires du Me 264 furent annulés par le Generalfeldmarschall Erhard Milch, Ministre de l’Aviation et donc, patron du RLM. Le nombre de prototypes du Me 264 fut réduit de six à trois, et la construction des 24 appareils de série fut abandonnée. Et pourtant, comme les différents services du RLM étaient toujours en pleine contradiction, de nouvelles spécifications furent élaborées au même moment. La première pour une version équipée de quatre Daimler-Benz DB 600, ayant 13 000 km d’autonomie et 3 tonnes de charges offensives. La seconde devait être équipée de six BMW 801, avoir une autonomie de 12 000 km et une charge offensive de 2 tonnes. La troisième était identique à la seconde sauf en ce qui concernait la motorisation : elle devait recevoir six Jumo 211.
Le Messerschmitt Me 264 en soufflerie
Le , au cours d’une réunion à laquelle participaient tous les constructeurs aéronautiques allemands, l’ingénieur général Friebel, du RLM, déclara qu’aucun des projets de bombardiers à long rayon d’action ne serait en mesure d’atteindre les États-Unis, à moins d’opérer un ravitaillement en vol. Le général Jeschonnek, qui remplaça Ernst Udet à la tête de l’OKL, État-major de la Luftwaffe, après le suicide de ce dernier, le , n’était pas en faveur de cette option qu’il jugeait trop futuriste, malgré les essais réussis précédemment évoqués.
Le , afin d’augmenter la production du Bf 109, il fut envisagé de confier temporairement le développement du Me 264 à Dornier, mais les usines Dornier fonctionnaient elles aussi au-delà de leur capacité maximale. La participation de la firme d'avion Wesser dans le sud de l’Allemagne fut également envisagée, mais cette idée resta sans suite. Sur les ordres du Generalfeldmarschall Milch, le général von Gablenz fut chargé d’une analyse objective sur la validité des projets des avions à grande autonomie. Le général von Gablenz envoya, le , une commission, dirigée par l’Oberstleutnant Petersen, sur le complexe de Messerschmitt à Augsbourg. Cette commission, chargée de contrôler l’état d’avancement du Me 264, constata que les réalisations n’étaient environ que de 90 % de ce qui avait été annoncé par Willy Messerschmitt. Toujours aussi habile, Willy Messerschmitt réussit à retourner la situation en sa faveur en montrant les avantages que le Me 264 présenterait lors de missions sur l’Atlantique, ou lors d’attaques de harcèlement sur la côte Est américaine.
Deux semaines plus tard, le , un nouveau rapport très détaillé fut soumis au RLM. Ce rapport stipulait qu’avec une masse au décollage de 45 tonnes et quatre moteurs Jumo 211J, le Me 264 pouvait afficher une autonomie de 13 000 km, cette autonomie pouvait atteindre 14 000 km avec quatre moteurs BMW 801. Le RLM était alors impatient d’assister au premier vol du Me 264 V1 afin de pouvoir valider ces données. Le vol des prototypes V2 et V3 était prévu pour le début de 1943.
Dans un but de propagande, Erhard Milch autorisa la reprise des développements du Me 264 dans une version « Amerika Bomber ». Le , l’Oberstleutnant Petersen tint une réunion à Berlin en présence de l’OKL afin de présenter les points forts du Messerschmitt. L’ingénieur général Friebel, du RLM, s’opposa à ces prévisions optimistes, fit suspendre les développements complémentaires du Me 264 et n’autorisa la construction que des trois prototypes. L’OKL fut invité à préciser le profil des missions qui devaient être confiées à cet avion.
Pour ajouter encore à la confusion, le eut lieu une réunion ayant pour thème tous les avions de grande autonomie. Friebel démontra que tous les vols de plus de 13 500 km auraient besoin de ravitaillement de carburant en vol. Le général Jeschonnek, chef de l’OKL, n’était toujours pas favorable à cette option. Milch décida alors de stopper le programme du Me 264 jusqu’à ce qu’une décision définitive fût prise. Cette réunion mit donc provisoirement un terme à tous les projets concernant des attaques de harcèlement contre les cibles nord-américaines, ainsi qu’à ceux concernant les missions de reconnaissance au-dessus de la ligne de chemin de fer du Transsibérien et même aux missions de reconnaissance au-dessus de l’Afrique Équatoriale.
Cependant la carrière de l’avion ne s’arrêta pas net. Début 1944, le premier prototype fut versé à une unité de transport de la Luftwaffe afin de servir de remorqueur pour les planeurs d’assaut Messerchmitt Me 321. Mais l’avion n’y demeura pas longtemps, il fut détruit au sol lors d’un bombardement alliés le 18 juillet 1944. Quand aux deux autres prototypes, ils avaient été détruits dans des raids alliés, avant même leurs premiers vols respectifs.
À la suite de l'annulation du concurrent He 277 en avril 1944, le 23 septembre 1944, les travaux sur le projet Me 264 sont officiellement annulés. Messerschmitt proposa une version à six moteurs du Me 264, le Me 264/6m (ou alternativement Me 364 ), mais elle ne fut jamais construite.
Article connexe
Notes et références
Bibliographie
- Enzo Angelucci et Paolo Matricardi, Multiguide aviation – Les avions : 3/ la seconde guerre mondiale – France, Allemagne, Angleterre, etc., Elsevier Sequoia, , 320 p. (ISBN 978-2-80030245-4), p. 181.