Malikisme

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La Grande Mosquée de Kairouan (également appelée mosquée Oqba Ibn Nafi) avait, depuis le IXe siècle, la réputation d'être l'un des plus importants centres d'enseignement de la jurisprudence malikite[1] ; elle est située à Kairouan en Tunisie.

Le malikisme ou malékisme (en arabe : مذهب مالكي) est l'un des quatre madhahib, écoles classiques du droit musulman sunnite. Il est fondé sur l'enseignement de l'imam Mālik ibn Anas (711 - 795), faqîh, théologien et mouhaddith qui naquit à Médine. Cette école est majoritaire au Maghreb (où elle fut introduite par Assad ibn al-Furat), en Afrique de l'Ouest, au Tchad, au Soudan et dans l'émirat de Dubaï. Par le passé, l’école malikite existait également dans certaines parties de l’Europe sous domination islamique, en particulier Al-Andalus et l’émirat de Sicile[2]. Dans le monde, c'est la deuxième école en nombre de mouqallidoune (personnes faisant son taqlid)[3] ; en France c'est la première.

En 2016, un concile, inauguré par le grand imam de l'Azhar, Ahmed al-Tayeb, rassemblant 200 personnalités sunnites du monde entier, s'est réuni dans le but de définir l’identité de ceux qui se font connaître comme « les gens du sunnisme » par opposition aux différents groupes considérés égarés. À l'issue de leurs travaux, les dignitaires sunnites ont convenu qu'au niveau du droit, les malikites sont bien des gens du sunnisme[4],[5].

Cette école diffère essentiellement des trois autres du fait qu'elle est plus structurée et hiérarchisée avec un primat à sa tête et par les sources qu'elle utilise pour déterminer la jurisprudence. Si les quatre écoles utilisent toutes le Coran, la sunna, ainsi que l'Ijmâ' (le consensus des compagnons de Mahomet) et les analogies (qiyâs), le malikisme utilise également les pratiques des premiers habitants musulmans de Médine (Amal ahl al-medina) comme source de la jurisprudence islamique (fiqh) et fait grand cas de la tradition de Mahomet (ahadith), tout en prenant en considération l'intérêt général (ou Maslaha).

Formation du madhhab

Le malikisme est l'école de jurisprudence sunnite prédominante en Afrique du Nord et en Afrique de l'Ouest[6].

L'imam Malik rapportait les ahadith et discutait leurs significations en contexte. Soit il citait des ahadith et des athar (dires des Sahabas — compagnons de Mahomet) sur des domaines de la charia en discutant leurs conséquences, soit il demandait à ses élèves s'il y avait dans leurs contrées un problème qu'ils pouvaient tenter de résoudre.

Après avoir achevé son recueil al-Muwatta, il le récitait à ses étudiants avec des variations en ajoutant ou en soustrayant quelques ahadith selon qu'il recevait des nouvelles informations.

Il évitait scrupuleusement le fiqh hypothétique; ainsi son école était rattachée aux « gens du hadith » (ahl al-hadith) en opposition aux « gens de la raison » (ahl al-râ'y).

Sources et méthodologie

Les sources sont, par ordre d'importance :

  1. Le Coran : c'est la source première et l'imam Malik l'appliqua sans restrictions aucune.
  2. La Sunna : tout comme Abou Hanifa, Malik imposa quelques restrictions à son utilisation : si un hadith contredisait la pratique des Médinois, il le rejetait. Toutefois il ne demandait pas que le hadith soit connu (mashhûr) pour l'appliquer, à la différence d'Abou Hanifa ; il utilisait tout hadith pour peu que les narrateurs aient été fiables et n'étaient pas des forgeurs de hadith ou à mémoire faible.
  3. La pratique des Médinois (amal ahl al-Madinah) : l'imam Malik soutient que puisque beaucoup de médinois étaient descendants de sahaba et que c'était la place où Mahomet avait passé les dix dernières années de sa vie terrestre, la pratique générale des médinois devait être au moins autorisée, voire encouragée par Mahomet lui-même. Malik considérait ainsi ce point-là comme une sunna plus qu'authentique où l'action parle plus que les mots : le mode de vie des habitants de la cité est vu comme une sunna appliquée.
  4. Le consensus des compagnons (Ijmâ') : l'opinion unanime des sahabas sur un point donné non mentionné dans une source précédente prend le dessus sur toute opinion personnelle de tout juriste.
  5. L'opinion individuelle d'un compagnon : l'imam Malik donnait toute son importance aux déclarations des sahabas, qu'ils soient d'accord entre eux ou non, et les inclut dans son livre Al-Muwatta. Le consensus des sahaba était cependant plus fort qu'une opinion individuelle d'un sahaba.
  6. Le raisonnement par analogie ou Qiyâs : dans les domaines où il n'y avait aucune preuve claire disponible, le qiyas était admis, mais Malik prenait toutes les précautions face à cette science subjective.
  7. La coutume isolée de certains médinois : Malik pensait que même les pratiques isolées des médinois devaient être d'origine sahabi, voire venir de Mahomet : tant qu'elles n'étaient pas en contradiction avec un quelconque hadith elles étaient acceptées.
  8. L’Istislâh (intérêt général) : comparable au principe d'istihsân (préférence) de l'école hanafite, c'est en fait chercher ce qui est le plus adéquat. Cela concerne un évènement qui n'est pas considéré par la charia mais qui est pour l'intérêt commun. Un exemple est la décision d'Ali, le quatrième calife, sur un groupe, jugé coupable d'un meurtre, quand bien même un seul membre du groupe l'avait commis.
  9. La coutume locale ('urf) : les coutumes locales entrent en jeu quand il n'y a pas d'injonctions religieuses disponibles. C'est ce principe qui est à l'origine de l'inclusion de certaines pratiques culturelles vues comme religieuses par un observateur extérieur. Par exemple, le mot arabe "Daabbah" signifie en Syrie un cheval, mais dans les autres contrées arabes il désigne tout animal à quatre pattes. Ainsi un contrat passé en Syrie avec ce terme ne nécessiterait pas de plus amples explications, à la différence des autres régions.


Élèves et savants malikites célèbres

Classiques (jusqu'au XIIe siècle de l'Hégire)

Contemporains (à partir du XIIIe siècle de l'Hégire)

D'autres élèves de l'imam Malik modifièrent quelque peu ce qu'ils avaient appris de lui tels que Mouhammad Al-Chaybani, le hanafite. Muhammad Ibn Idris ash-Châfi'î pour sa part combina ce qu'il avait appris de l'Imam Malik avec d'autres connaissances et créa son propre madhhab, le chafi'isme.

Notes et références

  1. (en) Roland Anthony Oliver et Anthony Atmore, Medieval Africa, 1250-1800, éd. Cambridge University Press, Cambridge, 2001, p. 36
  2. Lewis, Bernard, 1916-, The Muslim discovery of Europe, W.W. Norton, 2001, ©1982 (ISBN 0393321657 et 9780393321654, OCLC 48159639, lire en ligne), p. 67
  3. Jurisprudence and Law – Islam Reorienting the Veil, University of North Carolina (2009)
  4. « Schisme en Islam : le Wahhabisme exclu du sunnisme », sur Metamag (consulté le )
  5. « Islamic conference in Chechnya: Why Sunnis are disassociating themselves from Salafists » Sep, 09 2016.

    « He stated: “Ahluls Sunna wal Jama’ah are the Ash’arites or Muturidis (adherents of Abu Mansur al-Maturidi's systematic theology which is also identical to Imam Abu Hasan al-Ash'ari’s school of logical thought). In matters of belief, they are followers of any of the four schools of thought (Hanafi, Shaf’ai, Maliki or Hanbali) and are also the followers of pure Sufism in doctrines, manners and [spiritual] purification. »

  6. Abdullah Saeed (2008), The Qur'an: An Introduction, Routledge (ISBN 978-0415421256), pp. 16–18.
  7. Connu en Europe sous le nom d'Averroès.

Voir aussi

Bibliographie

  • Mohammad Aboû Zahra, L'imam Mâlik, éditeur Al-Qalam, 2007, 392 p., (ISBN 978-2-909469-41-6)
  • Saʻd al- Gurāb, Ibn Arafa et le malikisme en Ifriqiya aux VIIIe / XIVe siècles, éd. Études arabo-islamiques-Paris 3, 1984

Articles connexes

Liens externes