Marguerite Moreno

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Marguerite Moreno
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Marguerite Moreno en 1930.
Nom de naissance Lucie Marie Marguerite Monceau
Naissance
Paris 9e, France
Nationalité Drapeau de la France Française
Décès (à 76 ans)
Touzac, Lot
Profession Actrice
Films notables Les Misérables
Le Roman d'un tricheur
Regain
Ils étaient neuf célibataires
Joseph Granié, Marguerite Moreno (vers 1899), Paris, musée d'Orsay.

Marguerite Moreno, nom de scène de Lucie Marie Marguerite Monceau, est une actrice française[1] née le dans le 9e arrondissement de Paris et morte le à Touzac[2] (Lot).

Biographie[modifier | modifier le code]

Félix Valloton, Marcel Schwob (vers 1898).

Fille de Pierre Monceau, professeur de mathématiques, et de Charlotte Lucie Moreno[2], Marguerite Moreno étudie en pension à Paris et en Bretagne[3], puis elle entre au Conservatoire de Paris dans la classe de Gustave Worms[3]. Engagée à la Comédie-Française en 1890, elle côtoie sur scène Charles Le Bargy, Mounet-Sully, Julia Bartet, Coquelin cadet, Paul Mounet. Elle est alors « la muse des symbolistes ». Elle crée Le Voile de Georges Rodenbach en 1893 et dit des vers à la demande de Robert de Montesquiou pour l'inauguration du Monument à Marceline Desbordes-Valmore à Douai en 1896. Le peintre Lucien Lévy-Dhurmer et le sculpteur Jean Dampt fixent ses traits spirituels et sa coiffure en bandeaux typique de la fin de siècle ainsi que son costume de béguine de Bruges dans la pièce de Rodenbach. Confidente de Stéphane Mallarmé, elle ne parvient pourtant pas à le convaincre de monter Hérodiade. C'est elle qui organise en 1898 les funérailles du poète à l'église et au cimetière de Samoreau près la Seine où il avait une maison de campagne. Après avoir été la maîtresse de Catulle Mendès[4], elle épouse en Angleterre, le , l'écrivain et poète Marcel Schwob qu'elle a rencontré en 1895 auquel l'unit une passion dont témoigne une extraordinaire correspondance conservée à la bibliothèque municipale de Nantes. Malade, Schwob meurt en 1905 à l'âge de 37 ans[5].

Marguerite Moreno,
Album Mariani, 1896.

En 1903, Marguerite Moreno quitte la Comédie-Française et rejoint le théâtre de Sarah Bernhardt, puis plus tard le théâtre Antoine. Pendant sept ans, elle dirige à Buenos Aires la section française du conservatoire[6]. Quand éclate la Première Guerre mondiale, elle s'active à l'hôpital militaire de Nice. Elle s'est remariée en 1908 avec l'acteur Jean Daragon[7] mais elle perd son second époux au début des années 1920. Dès 1915, elle découvre le cinéma et, pendant la période du muet, elle joue notamment dans Vingt Ans après d'Henri Diamant-Berger où elle campe la reine Anne d'Autriche « sous un maquillage plâtreux, yeux cernés, bouche en cerise[4] » (1922), donne la réplique à Maurice Chevalier dans Gonzague et Le Mauvais Garçon du même réalisateur (1923), et figure dans Le Capitaine Fracasse d'Alberto Cavalcanti (1929). Sur les conseils de son amie l'écrivaine Colette, elle se tourne vers les rôles comiques[4] et, en 1929, elle remporte un grand succès sur scène dans Le Sexe faible d'Édouard Bourdet ; elle y joue « une vieille comtesse slave qui, pour occuper son ennui, lève et paie les beaux garçons[8] » (rôle qu'elle reprendra au cinéma dans la version filmée par Robert Siodmak en 1933).

La Source bleue dans le Lot, près de laquelle était située la maison de Marguerite Moreno.

Au début de l'entre-deux-guerres, elle s'installe dans sa propriété du Lot, rénovée pour elle grâce à son cousin Pierre Moreno[9], un de ses proches, lui aussi comédien et souvent son partenaire[10]). Sa carrière se partage dès lors entre théâtre et cinéma et, selon O. Barrot et R. Chirat, « Moreno accepte tout ce qu’on lui propose. Le rire du spectateur moyen à chacune de ses apparitions lui suffit[11] ». Elle apparait ainsi dans Un trou dans le mur de René Barberis (1930), Tout va très bien madame la marquise de Henry Wulschleger (1936), La Fessée de Pierre Caron (1937) ; mais elle est aussi dirigée, entre autres, par Raymond Bernard (Les Misérables, dans le rôle de la Thénardier, avec Harry Baur et Charles Dullin, 1934), Sacha Guitry (Faisons un rêve, Le Roman d'un tricheur et Le Mot de Cambronne en 1936, Les Perles de la couronne en 1937, Ils étaient neuf célibataires en 1939, Donne-moi tes yeux en 1943), Marcel Pagnol (Regain avec Fernandel en 1937, La Prière aux étoiles en 1941, film inachevé), Christian-Jaque (Carmen en 1942, Un revenant en 1946 avec Louis Jouvet), ou encore Claude Autant-Lara (Douce en 1943). En 1945, aux côtés de Jouvet, elle triomphe au théâtre dans le rôle d'Aurélie de La Folle de Chaillot, écrit pour elle par Jean Giraudoux. Son dernier film, L'assassin est à l'écoute, sort quelques semaines après sa mort en 1948, d'une pneumonie[12].

Sa maison La Source bleue à Touzac (Lot) est un domaine aujourd'hui transformé partiellement en maison d'hôte par ses héritiers.

Obsèques de Marguerite Moreno à Touzac, en . Photographie d'André Cros, Archives de Toulouse.

Paul Valéry considérait qu'elle était la seule à savoir dire des vers et l'invitait à en réciter lors de ses cours au Collège de France. Sur elle, Paul Léautaud a écrit : « Ce soir, en écoutant Moreno dans Aricie, je pleurais tout bas… » et « On la trouve laide, on n'est pas laide avec un visage si expressif, si fin en même temps - les yeux, le nez, la bouche sont pleins d'esprit. Elle en a d'ailleurs comme rarement chez une femme. C'est la malice et la satire féminines en personne[13] ».

Publications[modifier | modifier le code]

  • Une Française en Argentine, Georges Crés éditeur, 1914.
  • La Statue de sel et le bonhomme de neige : souvenirs de ma vie et quelques autres, Flammarion, 1926.
  • Le Moderne savoir-vivre, Société parisienne d'édition, 1930.
  • Souvenirs de ma vie, préface de Colette, introduction de Robert Kemp, Éditions de Flore, 1948.

Filmographie[modifier | modifier le code]

Suzy Vernon et Marguerite Moreno (1934), photographie de l'agence Meurisse.

Théâtre[modifier | modifier le code]

Carrière à la Comédie-Française[modifier | modifier le code]

Discographie[modifier | modifier le code]

  • "La Marseillaise" (Rouget de Lisle), Mademoiselle Moreno de la Comédie Française, disque simple face Zon-O-Phone no 12160, 17 cm de diamètre, janvier-février 1903
  • "L'âne et le petit chien" (La Fontaine), Mademoiselle Moreno de la Comédie Française, disque simple face Zon-O-Phone no 12162, 17 cm de diamètre, janvier-février 1903

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. « La mort du pélican (A. de Musset) Marguerite Moreno », sur Bibliothèques spécialisées de la Ville de Paris (consulté le )
  2. a et b Acte de naissance sur archivesenligne.paris.fr (acte no 1089, image 7).
  3. a et b Marguerite Moreno, Souvenirs de ma vie, préface de Colette, introduction de Robert Kemp, Éditions de Flore, 1948. Réédité par les Éditions Phébus, 2002.
  4. a b et c Olivier Barrot et Raymond Chirat, Noir & Blanc, 250 acteurs du cinéma français 1930-1960, Flammarion, 2000 (ISBN 2-08-067877-9), pp. 387-390.
  5. Biographie de Marcel Schwob.
  6. Cette période lui inspire un récit romancé, Une Française en Argentine, publié en 1914
  7. Jean Daragon sur data.bnf.fr.
  8. Maurice Martin du Gard, Carte rouge, Ernest Flammarion, 1930.
  9. Pierre Moreno sur La Comédie musicale en France.
  10. Marguerite Moreno, op. cit., Éditions Phébus, 2002, note de l'éditeur.
  11. O. Barrot et R. Chirat, op. cit.
  12. « L'écrivain Colette aimait la Source bleue », sur ladepeche.fr (consulté le )
  13. Paul Léautaud, Journal littéraire, tome I (1893-1906), Mercure de France, 1954, cité par O. Barrot et R. Chirat, op. cit.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Raymond Chirat, La Vie de Marguerite Moreno, 1871-1948, Éditions du Rocher, 2003.
  • Raymond Chirat, Olivier Barrot, Les Excentriques du cinéma français : 1929-1958, Henri Veyrier, Paris, 1983 (ISBN 9782851993045).
  • Yvan Foucart, Dictionnaire des comédiens français disparus, Éditions cinéma, Mormoiron, 2008, 1185 p. (ISBN 978-2-9531-1390-7).
  • François Soustre, Marguerite Moreno, la parfaite amie de Colette, Éditions Mon Limousin, , 228 p. (lire en ligne) :

    « Merci, Marguerite, de m’avoir fait rencontrer en François Soustre le frère que j’aurais aimé avoir, cette complicité qui suscite, chez l’un, chez l’autre, à tour de rôle, de nouveaux accomplissements artistiques, nouveaux livres, expositions, etc. Et il advint, curieusement, qu’on me proposât de jouer à mon tour le rôle de ton triomphe, La Folle de Chaillot, et ce fut un immense bonheur... (Anny Duperey, préface) »

Article connexe[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]