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Histoire de la Provence

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L'Histoire de la Provence liée à sa position géographique

L'histoire de la Provence, région du sud-est de la France, couvre l'ensemble des périodes historiques. La position de la Provence avec une large façade ouverte sur la mer Méditerranée, au sud, flanquée à l'ouest du Rhône, voie fluviale essentielle pour faire communiquer le nord et le sud de l'Europe, et à l'est par des cols alpins ouverts quasiment toute l'année, expliquent l'importance de son histoire à travers siècles et millénaires.

Préhistoire

La région provençale est habitée dès le Paléolithique inférieur. La grotte du Vallonnet, à Roquebrune (Alpes-Maritimes), est ainsi occupée vers - 950 000. La grotte de l'Escale, à Saint-Estève-Janson, montre des traces de feux entretenus au début de la glaciation de Mindel ( vers - 600 000). Les foyers de Terra Amata, à Nice, datent de - 400 000.

Lors de l'Acheuléen et du Paléolithique moyen (Moustérien), l'homme occupe les bassins et les versants des collines, qu'il s'agisse de grottes (Lazaret à Nice) ou d'habitats de plein air (Ste-Anne d'Evenos). La grotte Cosquer, à Cassis, est ornée de peintures pariétales datant de - 20 000.

La Provence présente une certaine originalité au cours du Paléolithique supérieur : le Solutréen est inconnu à l'Est du Rhône et la Magdalénien ne franchit pas la Durance. Ils sont remplacés par des industries locales ou régionales. Les gisements apportant les plus anciennes preuves de la domestication du mouton se situe en Provence, à Châteauneuf-les-Martigues. Les sépultures mégalithiques (hypogées d'Arles) et les premiers habitats perchés munis d'une enceinte (à Miouvin et Istres) apparaissent au Néolithique final et au début de l'âge des métaux. Des camps retranchés apparaissent à l'âge du bronze (camp de Laure) et de nombreux opida à l'âge du fer. Les Ligures autochtones entrent en relation avec des commerçants étrusques et des colons grecs de Phocée.

Antiquité

Carte des tribus gauloises de Provence.

Colonisé par les Grecs au VIe siècle av. J.-C., le territoire de la région actuelle Provence-Alpes-Côte d'Azur[1] fit ensuite partie de la province romaine transalpine dénommée Gaule narbonnaise ou Provincia Romana d’où dérive son nom actuel, du latin Provincia.

Marseille et les Celto-Ligures

À partir du IVe siècle av. J.-C., des populations celtes arrivent en Provence. Elles laissent parfois subsister les tribus des anciens occupants (environ une douzaine). Celles des vallées alpestres et de la partie orientales de la côte, Oxybiens et Décéates, sont ainsi à peine touchées. Dans la basse Provence, en revanche, les Celtes se mêlent aux anciens habitants et finissent par former une population celto-ligure. Ils regroupent les tribus en une confédération, celle des Salyens, dont la capitale est sans doute Entremont.

Peu après sa fondation, Marseille doit se défendre contre les attaques des populations ligures. La ville n'a pas un territoire très étendu. Son action dans le sud de la Gaule ne doit cependant pas être sous-estimé. Par la vallée du Rhône et de la Saône, elle draine des matières premières venues du nord et exporte des produits grecs. Sous l'influence grecque, les indigènes se mettent à cultiver la terre, à construire des remparts, à tailler la vigne et planter des oliviers. Les céramiques modelées laissent la place à des céramiques faites au four, fabriquées en Grèce, à Marseille ou dans des centres indigènes. Les habitats s'organisent en plan régulier et s'entourent de fortification en grand appareil à la manière grecque (Saint-Blaise). Au Ier siècle av. J.-C., Glanum (Saint-Rémy-de-Provence), possède un véritable centre monumental de cité grecque, avec une agora entourée de portiques.

La sculpture est le domaine où se manifeste le mieux la synthèse entre les traditions indigènes et les formes de l'art hellénique (piliers d'Entremont, sculptures de Roquepertuse, chapiteaux sculptés de Glanum). C'est par Marseille que les sites gaulois de Provence entrent dans l'économie monétaire et que s'élabore l'écriture gallo-grecque, adaptation de l'alphabet grec à l'écriture du gaulois.

L'installation de Rome en Gaule transalpine

Ce sont les Marseillais qui appellent les Romains en Provence et par la suite en Gaule. Avec l'aide des Romains, les Marseillais brisent la coalition étrusco-carthaginoise et, après la prise de Rome par les Gaulois en 387, ils les aident à payer le tribut exigé par les vainqueurs. Un traité assure une parfaite égalité entre les deux cités et l'obligation mutuelle d'aide en cas de guerre. Lors de la seconde guerre punique, Marseille rend à Rome d'importants services : elle participe à la victoire navale de l'Ébre en 217 et, contre Hannibal, elle fournit aux Romains l'escale de son port.

Marseille fait donc appel à Rome quand, au IIe siècle, les Oxybiens et les Déciates menacent ses colonies de Nice et d'Antibes. Les Romains interviennent deux fois, en 181 et en 154, sans rien demander en échange[2].

En 125, une coalition des Ligures, des Salyens, des Voconces et des Allobroges menace Marseille. Les Marseillais font encore appel aux Romains. Ces derniers arrivent, mais ils sont cette fois décidés à agir pour leur propre compte. Les Romains viennent en effet de terminer la pacification de l'Espagne et ils veulent assurer la liaison par terre entre les Alpes et les Pyrénées. La guerre dure de 125 à 121. Les Romains battent les Ligures, les Salyens, les Voconces, les Allobroges et les Arvernes. En 122, Sextius Calvinus fonde, au pied d'Entremont, Aquae Sextiae Salluviorum et y établit une garnison.

Peu après, le consul Domitius Ahenobarbus commence au-delà du Rhône la construction de la voie Domitia en direction des Pyrénées. Une fraction de l'aristocratie romaine obtient l'envoi d'un groupe de citoyens pour fonder la colonia Narbo Martius, en 118.

La nouvelle colonie de Narbonne a un rôle stratégique important. La Provincia Gallia Transalpina, dont elle est la place forte la plus importante, est soumise à l'autorité d'un chef militaire. C'est aussi une barrière contre les Barbares, notamment les Cimbres et les Teutons. En 102, Marius bat les Teutons et sauve ainsi Rome et Marseille.

C'est cette Gaule transalpine, ou Gaule romaine, qui est devenue par la suite la Prouincia narbonensis, la Narbonnaise, par opposition à la Gaule chevelue, devenue ensuite les Trois Gaules (Aquitaine, Lyonnaise, Belgique). Cette Prouincia, d'où dérive le nom de Provence, englobait la future Provence, allait au nord de la vallée du Rhône jusqu'à Vienne, et s'étendait à l'ouest du Rhône sur un territoire correspondant à peu de chose près au futur Languedoc. C'est de cette Prouincia narbonensis que Pline l'Ancien disait « Italia uerius quam prouincia », elle ressemble plus à l'Italie qu'à une simple province[3]. Par ailleurs, la partie de la Gaule transalpine qui a constitué par la suite la Provence était plus peuplée de Ligures et de Grecs que de Gaulois. En quelques siècles, du Ier siècle av. J.-C. au Ve siècle ap. J.-C., cette population ligure et grecque a adopté le latin populaire et la culture latine.

La Gaule transalpine de Marius à Auguste

Le contrôle romain n'est pas totalement accepté dans la première moitié du Ier siècle av. J.-C.. Il s'exerce par l'intermédiaire des cadres politiques préexistants. Les communautés de Gaule transalpine ont des statuts différents selon leurs particularités et leur attitude passée envers Rome. Marseille a ainsi un statut privilégié. Les tribus indigènes gardent leurs institutions et leurs magistratures. Rome favorise l'accession au pouvoir de chefs indigènes.

Le contrôle romain en Gaule transalpine s'exerce au profit de Rome, qui lève l'impôt, recrute des auxiliaires pour ses légions et impose des corvées. Il cependant aussi[Quoi ?] au profit des negociatores romains et d'une aristocratie indigène ralliée.

Au début des années 40 av. J.-C., la seule collectivité romaine connue est la colonie de Narbonne. Jusqu'au début du règne d'Auguste, les provinces vivent au rythme des luttes intérieures de Rome. Les guerres entre César et Pompée ont pour conséquences l'abaissement de Marseille et la fondation de nouvelles colonies militaires. Marseille s'est en effet prononcée pour Pompée. César l'assiège en 49 av. J.-C. et la ville doit capituler. Elle conserve son gouvernement et sa situation de ville fédérée, mais elle perd ses vaisseaux, ses remparts et ses territoires, à l’exception de Nice et des îles d’Hyères.

Pour récompenser ses soldats, César fonde des colonies. Les colonies de Narbonne et d'Arles sont ainsi créées avec des soldats des 10e et 6e légions. En 31 av. J.-C., au lendemain de la bataille d'Actium, Octave installe à Fréjus une partie de sa flotte. Il y établit peu après des vétérans de la 8e légion.

Au Ier siècle av. J.-C., les chefs politiques des cités reçoivent le droit de cité romain et sont ainsi intégrés dans le système romain de clientèles. À la fin du siècle, leurs descendants font carrière à Rome. Plusieurs sont inscrits parmi les chevaliers, voire les sénateurs. Au Ier siècle ap. J.-C., cette romanisation s'étend à l'ensemble des élites politiques et se double d'une romanisation culturelle (adoption du mode de vie urbain).

Les magistrats municipaux reçoivent, pour eux-mêmes et pour leurs proches le droit de cité romaine. 37 colonies latines sont ainsi fondées sous Auguste et les premiers empereurs. Trois reçoivent ensuite le droit romain (Valence, Vienne et Aix-en-Provence).

Les agglomérations se dotent de monuments romains : enceintes fortifiées, arcs de triomphe, forum, temples, théâtres, amphithéâtres et cirques (Arles, Cimiez, Orange, Vaison-la-Romaine), aqueducs.

La Narbonnaise au Haut-Empire

Rome change d'attitude à l'égard des provinces à partir d'Auguste. En 22 av. J.-C., Auguste organise définitivement les provinces gauloises. La Provincia Narbonensis est gouvernée par un proconsul assisté d'un questeur, désignés par le Sénat romain et résidant à Narbonne.

La Narbonnaise est une province inermes : aucune troupe n’y stationne. La pacification des confins alpestres n'est cependant terminée qu'en 6 av. J.-C., comme le montre le trophée d’Auguste (trophée des Alpes) à La Turbie, qui commémore sa victoire sur les peuples des Alpes. Le nouveau territoire occupé entre les Gaules et l’Italie est divisé en trois petites provinces confiées à des procurateurs qui ont sous leurs ordres des cohortes militaires. À l’est de la Provence, la région montagneuse (Cimiez, Vence, Senez et Castellane) forme la province procuratorienne des Alpes Maritimes.

L'Antiquité tardive

La Narbonnaise est épargnée par les invasions qui ravagent la Gaule au IIIe siècle. Le IVe siècle est marqué par la conquête du pouvoir par Constantin. En 309 ou 310, il met le siège devant Marseille, où s'est réfugié l’usurpateur Maximilien. Celui-ci doit se rendre, les Marseillais ouvrant les portes à l’empereur[4].

La fin du IIIe siècle et le IVe siècle sont marqués par de profondes réformes administratives. Par une première réforme commencée par Dioclétien et achevée par Constantin, le Sud de la Gaule est divisée en cinq provinces. Les Alpes-Maritimes sont accrues des territoires de Digne et Embrun. Les provinces d'Aquitaine et de Narbonnaise sont divisées. Pour cette dernière, le territoire à l'ouest du Rhône garde son ancien nom tandis que les cités de l'autre rive du fleuve forment la Viennoise. Avec Embrun, qui remplace Cimiez comme chef-lieu des Alpes-Maritimes, Vienne est la principale bénéficiaire de cette réforme. Elle joint en effet à son rôle de chef-lieu de province celui de chef-lieu de diocèse. Entre la Viennoise et les Alpes-Maritimes, la Narbonnaise Seconde regroupe autour d'Aix les cités de Gap nouvellement créée, Sisteron, Riez, Antibes, Fréjus et Apt[5].

Cette importance nouvelle de Vienne ne dure pas. À la fin du IVe siècle ou au début du Ve, la préfecture du prétoire des Gaules, située à Trèves, est installée à Arles à cause de la pression des Barbares. Arles devient une ville importante. L'empereur Constantin y passe en août 316, y donne des jeux, y transfère l’atelier monétaire d’Ostie (en 313) et y installe de grandes manufactures d'État. La Cour impériale y fait de plus longs séjours, l’impératrice Fausta y accouche de son premier fils entre août 316 et février 317. Devant l’échec du synode de Rome, en 313, c’est Arles qui est choisie pour accueillir un nouveau concile en 314 (voir concile d'Arles). Déjà riche de son commerce, elle est couverte de nouveaux monuments et gagne le surnom de Constantina urbs, la ville de Constantin[6]. Constance II réside lui à Arles[réf. nécessaire].

Après avoir pris Rome, les Wisigoths d'Alaric en marche vers l'Espagne traversent le sud-est de la Gaule en 413. Une fois installés à l'ouest du Rhône, ils tentent ensuite leur chance sur l'autre rive par des incursions en 426, 452 et 458[réf. nécessaire]. De leur côté, les Burgondes, transférés en Savoie depuis 443, gagnent progressivement Valence, Die, Embrun et vont jusqu'à la Durance en 470[7] avec l'accord de l'empereur[réf. nécessaire]. Le partage d'influence devient effectif à partir de la fin du Ve siècle, au moment où disparaît l'Empire romain d'Occident : les pays au nord de la Durance reviennent aux Burgondes et ceux du sud vont aux Wisigoths d'Euric, qui a pour capitale Toulouse[8]. Les Burgondes occupent le sud de la Provence à la mort du Wisigoth Euric en 483[9]. Trente ans plus tard, le roi ostrogoth Théodoric le Grand envoie une armée, conduite par le dux Ibba qui fait lever le siège d'Arles, entre à Marseille et prend Avignon en 508. L’année suivante, il prend Nîmes et Narbonne, puis Orange et Valence en 510. Ayant ainsi reconstitué la préfecture des Gaules dans ses limites de 462, il nomme Liberius préfet des Gaules. Le reste de la Provence est conquise dans un second temps : Théodoric le Grand, qui se pose en restaurateur de la préfecture du prétoire des Gaules, joue d’une querelle entre ariens et catholiques et intervient contre Sigismond pour sécuriser sa conquête : il s'avance jusqu'à l'Isère en 523. Les liaisons routières entre le royaume ostrogoth (en Italie) et le royaume wisigoth (en Espagne) dont Théodoric a la tutelle, sont protégées[10].

Le sort de la Provence se joue ensuite dans les conséquences d'une révolution de palais : en 535, Théodat, roi des Ostrogoths, enferme puis fait exécuter son épouse Amalasonte. Celle-ci avait maintenu l'alliance avec l'Empire byzantin et était la cousine des quatre rois francs : c'est un casus belli. Théodat s'en sort temporairement en payant une amende (wergeld) de 50 000 sous aux rois francs. Il est remplacé par Vitigès, mais celui-ci doit affronter les armées byzantines dès l'année suivante. Pour être tranquille à l'ouest, il offre la Provence aux Francs, qui est ainsi intégrée en 536 ou 537, sans nouveau combat, à un royaume germanique dont la capitale est très au nord[11].

C’est à cette époque, quand la région est subordonnée à l’Empire romain d'Orient par l’intermédiaire des Ostrogoths, que le terme de Provence apparaît pour la première fois[12]. Jean Guyon et Marc Heijmans datent cette apparition du terme, distingué de celui de province, de la fin du VIe siècle[13].

La christianisation

Au milieu du IIIe siècle, un évêque est en poste à Arles. La liste des Églises représentées au concile d'Arles en 314 atteste l'existence de communautés à Narbonne, Marseille, Nice, Apt, Orange et Vaison. Ces communautés ne connaissent pas les grandes persécutions du IIIe siècle et du début du IVe siècle. Certaines sont riches et importantes, comme celle d'Arles. De nouveaux évêchés apparaissent autour des années 400 et au cours du Ve siècle à Aix, Avignon, Antibes, Carpentras, Cavaillon et Riez. En Provence orientale, la carte ecclésiastique est calquée sur la carte civile : Aix et Embrun deviennent églises métropolitaines. Dans la Provence rhodanienne, Arles obtient juridiction sur la partie méridionale de la Viennoise. La ville connaît d'importants évêques issus du monachisme, comme Honorat, Hilaire et Césaire.

Honorat est l'un des pères du monachisme en Occident. Sa fondation des îles de Lérins, en 410, précède de peu l'arrivée à Marseille de Jean Cassien. Ce dernier fonde des communautés religieuses d'hommes et de femmes vers 416. Ses Conférences connaissent un grand succès. Le rayonnement des Lériniens et des Cassianites dépasse largement la Provence. L'élite chrétienne vient, parfois de loin, chercher une formation à Lérins ou à Marseille. Des clercs comme Gennade ou Fauste de Riez prennent part aux débats théologiques de l'époque. L'afflux des réfugiés qui fuient les Barbares attire en outre de fortes personnalités, comme Paulin de Pella, Prosper d'Aquitaine et Salvien. Lérins et Marseille fournissent des évêques à toute la région (Arles, Cimiez, Vence, Riez, Orange), mais aussi à des cités plus lointaines comme Narbonne, Lyon, Genève ou Troyes.

Au VIe siècle, l'implantation chrétienne est achevée dans les villes. Des évêchés sont même créés dans des agglomérations qui ne sont pas des cités, comme Toulon ou Uzès. Dans les campagnes, l'évangélisation progresse.

Moyen Âge

La région fut successivement occupée par différentes peuplades germaniques comme celles des Ostrogoths, des Burgondes et des Francs. Et Arabes lors de la Présence Arabe sarrasine

Les royaumes germaniques

Du Ve au IXe siècle, intégré dans des royaumes fluctuants, occupé mais très peu germanisée, voire pas du tout, le territoire de la Provence s'est constitue progressivement. Au début du IXe siècle le royaume franc connut son extension maximale, mais pour une courte durée. Son démembrement, processus long et complexe du milieu du IXe siècle à la fin du Xe, a donné naissance aux principautés des siècles suivants.

La formation de la Provence

Croix des Bosonides

En l'an 879, la région fut incorporée à la Bourgogne Cisjurane ou Cisjurásica, et elle fut ensuite intégrée au royaume d'Arles au Xe siècle. En 947, Boson d'Arles, comte d'Arles fut investi du comté de Provence. Ce dernier fut détenu, en indivis, par ses descendants. Pendant que le titulaire du royaume d'Arles (autrement dit de Bourgogne-Provence) perdait progressivement toute autorité réelle, le comte Guillaume d'Arles réunissait une armée afin de chasser les pirates sarrasins qui sévissaient à partir de leur base du Fraxinet, aujourd'hui la Garde-Freinet, et qui venaient d'enlever Mayeul, abbé de Cluny, natif de Valensole. Victorieux, il se vit surnommé Guillaume le libérateur et étendit son autorité sur l'ensemble de la Provence. Il est à noter que ce comté de Provence correspond à peu de chose près au territoire d'origine ligure et grecque où, progressivement, s'est constitué une langue issue du latin, et une culture propre. Bien entendu il serait vain de chercher des frontières précises à ce territoire. D'une part parce que, culturellement, il existe bien plus des zones de transition et d'échange que des ruptures brusques, d'autre part en raison de l'organisation politique féodale qui existait alors.[réf. nécessaire]

La division de la Provence

Carte des trois fiefs provençaux en 1125

Les droits sur le comté furent transférés, par mariage, aux comtes de Toulouse (1019) et aux comtes de Barcelone (1112). Les maisons des deux comtés entrèrent en conflit pour la possession de la Provence. À la suite d'un traité conclu en 1125, le comté fut divisé en un marquisat de Provence - au nord de la Durance - attribué aux Toulouse - et un comté de Provence - au sud de la Durance - attribué aux Barcelone. La partie nord-est de la Provence forma le comté de Forcalquier qui devint autonome au début du XIIe siècle. Toutefois, en 1193, le mariage d'Alphonse II de Provence avec Gersande de Sabran, petite-fille de Guillaume II, comte de Forcalquier, permit l'unification du comté de Provence et de celui de Forcalquier.

Le comté d'Orange, vassal du marquisat de Provence, fut érigé en principauté autonome en 1181. À la suite de la Croisade des albigeois, le Traité de Meaux-Paris (1229) imposa le passage du marquisat de Provence à la papauté. Toutefois, il resta aux comtes de Toulouse jusqu'à en 1271, lorsqu'il passa au roi de France. Philippe III de France le céda finalement, en 1274, au pape et le marquisat format le Comtat Venaissin.

À la mort, en 1245, de Raymond-Bérenger V de Provence, les comtés de Provence et de Forcalquier passent à sa fille Béatrix qui les transmettra à son fils qui fondera la première maison capétienne d'Anjou. Cette dynastie accumula rapidement les titres royaux (Naples-Sicile, Jérusalem, Chypre, Acre, Thessalonique, Hongrie, Bosnie).

Les conséquences de la guerre de Cent Ans se font sentir en Provence : en mai 1357, les routiers d’Arnaud de Cervole, l’Archiprêtre, arrivent dans le comté et y restent jusqu’en 1358 ; elles sont suivies en 1361 par des bandes espagnoles, en 1365 par les troupes que Du Guesclin mène en Espagne, puis par d’autres fréquemment jusqu’en 1376[14].

À la mort de la reine Jeanne, en 1382, le comté de Provence passera à Louis Ier d'Anjou, que la reine Jeanne avait adopté. Ceci entraina une période de troubles opposant les partisans de la seconde maison d'Anjou-Provence aux partisans de Charles de Durazzo, issu de la première maison d'Anjou-Provence, dont les partisans formèrent l'Union d'Aix (1382-1387). La défaite politique de Charles de Durazzo assit la seconde dynastie d'Anjou sur le comté de Provence (1387). La seconde maison capétienne d'Anjou-Provence donnera, notamment, le célèbre Bon Roi René. En revanche, la Provence orientale (à l'est du Var) restée fidèle à Charles choisit, en 1388, la dédition de Nice à la Savoie, se constituant en Terres neuves de Provence.

La Provence devient française

Le roi René d'Anjou mourut le 10 juillet 1480. Il avait déshérité son successeur naturel René II de Lorraine au profit de Charles V d'Anjou qui reçut l’hommage de la Provence et devint le comte Charles III. N'ayant pas d'enfants, ce dernier légua son État à Louis XI et à ses successeurs. À la mort de Charles III, en décembre 1481, la Provence passa au roi de France Louis XI. Le 15 janvier 1482, les États de Provence approuvèrent un document en 53 articles, souvent improprement appelé "constitution provençale", qui fit de Louis XI le comte de Provence et proclama l'union de la France et de la Provence « comme un principal à un autre principal ». Charles VIII succéda à Louis XI en 1483 et, en 1486, les États de Provence lui demandèrent l'union perpétuelle, accordée par le roi de France par lettres patentes rédigées en octobre 1486 et communiquées aux États en avril 1487, « sans que à icelle couronne ne au royaulme ils soient pour ce aulcunement sualternez »[15],[16]. Ce processus est souvent présenté de façon simplificatrice comme l'intégration au domaine royal. En droit, pourtant, la Provence restait indépendante, et elle l’est restée jusqu'à la Révolution française[17]. Mais si elle conserva bien des droits spécifiques, elle fut de fait annexée par la France, et fut bel et bien gouvernée et organisée comme une province française — création du Parlement de Provence en 1501[18], etc. Par ailleurs, les rois de France, y compris les monarques absolus comme Louis XIV, étaient tenus de respecter les droits et coutumes locaux. La Provence, à l'instar de la Bretagne, bénéficiait d'un certain degré d'autonomie, jalousement défendu, notamment en matière fiscale, même si l'indépendance relevait plus de la fiction juridique que de la réalité[19].

Société provençale avant la Révolution

La société provençale vit selon ses propres coutumes, dont le droit de pelote.

Évolution historique du rattachement de la Provence

Révolution française

Nihil aliud in nobis, Champfleury, Histoire des faïences patriotiques sous la Révolution

Lors de la Révolution française, la Provence est divisée en départements : Bouches-du-Rhône, Var et Basses-Alpes (renommé plus tard en département des Alpes-de-Hautes-Provence). Le 14 septembre 1791, Avignon et le Comtat Venaissin sont rattachés à la France. Le territoire est partagé entre Drôme et Bouches-du-Rhône et le le département de Vaucluse est créé.

Toujours en 1793, la Provence retrouve le comté de Nice et donne naissance au département des Alpes-Maritimes avant que celui-ci ne repasse sous le contrôle piémontais et sarde à la Restauration. En 1860, à la suite d'un plébiscite, le rattachement définitif du comté de Nice à la France ramène Nice à la Provence. Quelques territoires alpins du comté restent cependant italiens jusqu´en 1947 où un référendum demande leur rattachement à la France, mettant un terme à près de sept siècles de division de la Provence.

Notes

  1. Sauf le Pays niçois, qui depuis le 1er siècle de notre ère et jusqu’en 1860, est situé dans la géographie de la péninsule italienne.
  2. Danièle Roman, « M. Fulvius Flaccus et la frontière transalpine », In Yves Roman (directeur de publication) La Frontière, Séminaire de recherche, Lyon : Maison de l'Orient et de la Méditerranée Jean Pouilloux, 1993.
  3. Pline l'Ancien, Histoire naturelle, III, 31
  4. Jean Guyon, « 309 ? 310 ? Quand Constantin mettait le siège devant Marseille », in Jean Guyon, Marc Heijmans (directeurs de publication), L’Antiquité tardive en Provence (IVe-VIe siècle) : naissance d’une chrétienté, coédition Arles : Actes Sud Éditions/Venelles : Aux sources chrétiennes de la Provence, 2013 ; 28 cm ; 223 p. (ISBN 978-2-330-01646-3), p. 59
  5. Marc Heijmans, « Une nouvelle donne administrative », in Guyon, Heijmans, L’Antiquité tardive en Provence, op. cit., p. 32
  6. Marc Heijmans, « Arles, résidence impériale sous Constantin », in Guyon, Heijmans, L’Antiquité tardive en Provence, op. cit., p. 34
  7. Christiane Boekholt, « Les prieurés de Psalmody en Provence », Chroniques de Haute-Provence, Revue de la Société scientifique et littéraire des Alpes-de-Haute-Provence, 2012, n° 369, 132e année, p. 77. ISSN 0240-4672
  8. Jean-Louis Jouanaud, « Le cours du siècle : l’irrésistible ascension des royaumes barbares », in Guyon, Heijmans, L’Antiquité tardive en Provence, op. cit., p. 71
  9. Raymond Boyer, carte 35 « La Provence après la chute de l’Empire romain », in Baratier, Duby & Hildesheimer, Atlas historique de la Provence, et commentaire
  10. Jean-Louis Jouanaud, « La Provence au pouvoir de Théodoric le Grand », in Guyon, Heijmans, L’Antiquité tardive en Provence, op. cit., p. 159
  11. Bruno Dumézil, « L’ascension des Francs en Gaule au VIe siècle et leur prise de possession de la Provence », in Guyon, Heijmans, L’Antiquité tardive en Provence, op. cit., p. 165
  12. Jacqueline Suteau, « Le rattachement du comté de Provence au royaume de France : 1481-1487 », Chroniques de Haute-Provence, 2012, no 368, p 105.
  13. Jean Guyon, Marc Heijmans, « Introduction », in Guyon, Heijmans, L’Antiquité tardive en Provence, op. cit., p. 17-18
  14. Noël Coulet, « La désolation des églises de Provence », Provence historique, volume 23, no 23, 1956, p. 43.
  15. Histoire de la Provence, PUF 1987, p. 50-52
  16. Histoire de la Provence, Privat, 1990, p. 219-222.
  17. Le provençal pour les nuls, 2011, p. 43
  18. Archives départementales des Bouches du Rhône
  19. Histoire de la Provence, Privat 1969, 1990 ; Histoire de la Provence, Agulhon et Coulet, PUF 1987 ; La Provence pour les nuls, Blanchet, Turc, Venture, First 2012

Voir aussi

Bibliographie

  • Jean-Pierre Papon, Histoire générale de Provence, dédiée aux États, Volume 1, Chez Moutard, Paris, 1776 ; p. 747 Texte
  • Jean-Pierre Papon, Histoire générale de Provence, dédiée aux États, Volume 2, Chez Moutard, Paris, 1778 ; p. 760 Texte
  • Jean-Pierre Papon, Histoire générale de Provence, dédiée aux États, Volume 3, Imprimerie de Ph.-D; Pierres, Paris, 1784 ; p. 792 Texte
  • Jean-Pierre Papon, Histoire générale de Provence, dédiée aux États, Volume 4, Imprimerie de Ph.-D; Pierres, Paris, 1784 ; p. 885 Texte

Articles connexes

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