Perrier (eau minérale)
Perrier | |
Logo de Perrier. | |
Pays d’origine | France |
---|---|
Ville d’origine | Vergèze |
Société | Nestlé Waters Emena[1] |
Distributeur | Perrier |
Conditionnement | 20 cl - 33 cl - 50 cl - 75 cl - 1 litre |
Date de création | 1903 |
Type | eau pétillante minérale naturelle |
Couleur | transparente |
Parfum(s) | original, citron, lime (citron vert), pamplemousse, menthe, fruits rouges, pomme verte, citron-orange, fraise, pastèque, etc. |
Site web | www.perrier.com |
modifier |
Perrier est une eau minérale gazeuse française issue de la source des Bouillens, nommée depuis 1903 source Perrier. Sa source se situe à Vergèze, dans le Gard, à quinze kilomètres de Nîmes.
C'est un établissement secondaire de Perrier Vittel SA, devenu Nestlé Waters France après le rachat de l'entreprise par Nestlé en 1992. Actuellement, le groupe comprend aussi Vittel, San Pellegrino, Hépar et Contrex.
Depuis le , la source est exploitée par la filiale Nestlé Waters Supply Sud[2], dont le siège social est à Issy-les-Moulineaux, en Île-de-France.
Depuis 2018[citation nécessaire], l'eau Perrier n'est plus « renforcée au gaz de la source » mais « avec adjonction de gaz carbonique »[3]. Selon l'entreprise, ce changement lui permet de réduire considérablement sa consommation totale en eau et de réduire son impact écologique[4].
Propriétés et composition analytique
C'est une eau minérale naturelle qui contient des éléments minéraux avec adjonction de gaz carbonique.
- Extrait sec à 180 °C : 456 mg/L
Espèce (formule) | Teneur (mg/L) |
---|---|
Calcium (Ca2+) | 150 |
Magnésium (Mg2+) | 3,9 |
Sodium (Na+) | 9,6 |
Potassium (K+) | <1 |
Sulfate (SO42−) | 25,3 |
Bicarbonate (HCO3−) | 420 |
Chlorure (Cl−) | 19,5 |
Nitrate (NO3−) | 7,3 |
Historique
Création et débuts
Il y a cent vingt millions d'années, l'eau de pluie s'infiltrait lentement sous terre alors que le gaz d'origine volcanique remontait à la surface. L'eau et le gaz se sont rencontrés et se sont frayé un chemin au gré des fissures ouvertes dans les roches calcaires. La présence de failles perméables a permis à l'eau de poursuivre son ascension et de jaillir en surface avec un aspect bouillonnant lié au dégagement de dioxyde de carbone, d'où l'origine du nom du lieu-dit de la source Perrier : les Bouillens (à Vergèze dans le Gard[5]).
La légende de l'entreprise veut que, dans l'Antiquité, le chef carthaginois Hannibal se serait désaltéré dans la source avant d'aller essayer de conquérir Rome, et que des soldats de Jules César auraient reçu en récompense cette source, édifiant un bassin de pierre qui préfigure l'établissement thermal du domaine des Bouillens[6].
En 1769, le domaine des Bouillens devient la propriété de la famille Granier. Alphonse Granier est le premier à s'intéresser aux vertus curatives de la source, en 1841, créant l’Établissement Thermal de Vergèze, nom donné à la source. L'exploitation commerciale (auparavant, l’eau était gratuite) de la source des Bouillens est autorisée par décret, le , par Napoléon III, qui reconnaît l'eau de source comme eau minérale naturelle. Grâce à de nombreux scientifiques qui mettent en évidence les vertus du thermalisme, le domaine voit arriver les premiers curistes. En 1869, un incendie ravage les installations de Vergèze. Malgré les tentatives d'Alphonse Granier pour réhabiliter le site, la société accuse de lourdes pertes, elle est mise en faillite et cesse toute activité en 1884. En 1888, Louis Rouvière, propriétaire cultivateur et négociant à Vergèze, rachète le domaine des Bouillens. Six ans plus tard, il accorde le bail de la Source, assorti d'une promesse de vente, à un médecin de Nîmes, Louis-Eugène Perrier, qui dirige alors la station thermale d’Euzet-les-Bains et qui découvre à l'eau des Bouillens de mystérieuses vertus thérapeutiques. En 1898, Louis Perrier rachète la source et transforme l’Établissement thermal de Vergèze en Société des Eaux Minérales, Boissons et Produits Hygiéniques de Vergèze[7].
En 1903, Louis Perrier, âgé de 70 ans, cherchant des fonds pour moderniser la source, accorde un bail à un jeune Anglais de 27 ans, Sir John Harmsworth, pour ensuite lui vendre sa société. Gentleman, John Harmsworth, en rachetant les parts de Louis Perrier en 1906, donne à la source le nom de celui qui a tant fait pour elle. Harmsworth décide de délaisser les activités de thermalisme — une mode en perte de vitesse au début du siècle — et de recentrer la source sur la production d'eau consommable. Une décision logique pour un Anglais puisque, à cette époque, les Britanniques raffolent des boissons non alcoolisées. Il cherche à rentabiliser son investissement en donnant un nom à son produit unique et reconnaissable, en hommage au docteur : Perrier. Quant à la forme de la bouteille, la légende veut que John Harmsworth se soit inspiré des « indian clubs », massues indiennes qu'il utilise pour se rééduquer à la suite d'un accident de la route[8]. Son idée est simple : il veut désaltérer les sujets de l'Empire britannique tout entier. Sa conquête du marché débute par l'armée des Indes, puis le reste des colonies britanniques et enfin la métropole, où l'eau de Perrier est bue au palais de Buckingham. En 1905, il se voit décerner le titre de « Fournisseur breveté de sa Majesté le Roi d'Angleterre ». Ce n'est qu'après avoir conquis l'Empire et la Grande-Bretagne, qu'il se tourne vers la France. En 1906, il baptise sa société « La compagnie de la Source Perrier »[7].
En 1908, l'usine est reliée à une voie de chemin de fer pour le transport des cinq millions de bouteilles qui y sont produites par an. En 1933, La source Perrier produit 19 millions de bouteilles, dont 10 millions partent à l'exportation. L'eau Perrier est déclarée d’utilité publique par le décret du , ce qui accélère sa conquête du marché français[7].
À la mort de John Harmsworth en 1933, la source passe entre les mains de ses héritiers, un groupe d'actionnaires anglais. En 1936, Perrier fusionne avec la petite « Société d’eaux minérales de Vergèze » et devient « La source Perrier SA ». Entre 1939 et 1945, les Allemands placent la source sous séquestre, car ses actionnaires sont britanniques. Elle tourne alors au ralenti. En 1946, les eaux minérales prennent un essor considérable, mais, pour suivre, il faut rénover et la source Perrier n'a pas les fonds suffisants. En 1947, Georges Leven, à qui on demande de vendre la société, est interpelé par son fils Gustave Leven, alors jeune agent de change à Paris, qui comprend tout le potentiel de l'eau minérale : Georges et Gustave Leven, associés avec leurs amis Maurice Epry (le gestionnaire) et Jean Davray (le publicitaire de la marque jusqu’en 1985) rachètent les actions de la société Perrier et l'introduisent en Bourse. Pour développer le site, Gustave Leven met en place un vaste plan de modernisation (notamment en important les meilleures machines américaines) afin d'en faire un produit de consommation de masse. Dans ce cadre, le processus de production est complètement revu, et une stratégie industrielle intégrant la fabrication de tous les composants de la bouteille est mise en place. Enfin, pour faire décoller les ventes, Gustave Leven confie à Jean Davray la mission de faire connaître la marque Perrier. De 1948 à 1952, la production passe de 30 à 150 millions de bouteilles[7].
Le groupe Perrier, un acteur majeur de l'eau
En 1950, une nouvelle usine est construite. De 6 000 m2, l'usine qu'on appelle désormais la cathédrale s'étend désormais sur plus de 26 000 m2. La France devient alors le premier marché de Perrier en absorbant les cinq sixièmes de la production. En 1954, les capsules sont usinées sur place, et une fabrique de caisses pour emballer les bouteilles est créée. Parallèlement, Gustave Leven rachète la source Contrex[9] et lance Pschitt, une boisson non alcoolisée aromatisée citron ou orange[10], puis Gini en 1971. Il poursuit sa diversification, rachetant Saint-Yorre, Vichy, les caves de Roquefort, et en 1984 Sellier Leblanc, comprenant Volvic et Oasis[11]. Le groupe s'élargit même en dehors de l'agroalimentaire en investissant dans les chaussures André, dirigées par l'ami de Gustave Leven, Jean-Louis Descours[12].
Le jeune cinéaste Jean-Luc Godard publie un reportage sur les conditions de travail des ouvriers dans l'usine dans le numéro de du journal J'accuse.
En 1973, la stratégie d'intégration verticale conduit à créer Verrerie du Languedoc : unité intégrée à l'embouteillage, elle produit l'ensemble des bouteilles et permet à Perrier de contrôler ses coûts de fabrication face à l’abandon des consignes des bouteilles en verre et au blocage des prix. De plus, alors que se développe l'usage des bouteilles en plastique (« emballage perdu »), cette technologie n'est pas encore assez performante (pression, perméabilité du gaz) et le verre reste le matériau nécessaire. Une carrière de sable au pied du Mont Ventoux est rachetée pour fournir le sable siliceux avec lequel on fabrique le verre[7].
En 1976, Perrier part à la conquête de l'Amérique et un bureau est ouvert à New York. En 1986, Vergèze est la troisième verrerie française derrière BSN (futur Danone) et Saint-Gobain. L'ensemble compte 3 000 salariés avec quatre fours qui débitent 120 000 bouteilles à l'heure. Vergèze est la seule usine au monde à réunir verrerie et embouteillage sous le même toit. Entre l'arrivée du sable à l'entrée de l'usine et la sortie d'une bouteille remplie, il s'écoule moins de cinq heures. En 1980, Perrier devient la « Bulle officielle » de Roland Garros, ce sponsoring étant reconduit depuis chaque année. Une direction marketing est créée en 1987. En 1988, Perrier vend près de 300 millions de bouteilles aux États-Unis, soit l'équivalent de 80 % des eaux importées. La compagnie y lance des Perrier aromatisés, avant d'être commercialisés en France[7]. Parallèlement, le groupe choisit de se centrer uniquement sur l'eau non aromatisée, en cédant en 1990 sa filiale la Compagnie d'Exploitation des Boissons Rafraîchissantes, comprenant Gini, Oasis et Bali, à Cadbury Schweppes[13].
La crise du benzène et le rachat par Nestlé
En 1990, la crise du benzène met un frein à l'expansion de Perrier (la marque vendait alors un milliard de bouteilles par an) qui décide le retrait global des bouteilles. Des traces de benzène sont découvertes par un laboratoire américain dans quelques bouteilles de Perrier (treize bouteilles). Gustave Leven décide alors de retirer les bouteilles de six pays : États-Unis, Canada, Japon, Allemagne, Pays-Bas et Danemark[14]. Dans le monde, 280 millions de bouteilles seront détruites dont 160 millions aux États-Unis. Coût total du retrait : plus d'un milliard de francs, pour ce qui semble n'être qu'une simple erreur humaine. À l'entrée des chaînes d'embouteillages, le filtre chargé d'arrêter les impuretés contenues dans le dioxyde de carbone de la source, en principe remplacé tous les six à huit mois, ne l'a pas été à temps. D'où une présence intempestive de benzène d'origine fossile dans le produit fini[7].
Lorsque Gustave Leven quitte la présidence du groupe en 1990, Perrier est devenu la première marque d'eau minérale dans le monde, ayant acquis le statut de produit masstige (en) (« prestige pour les masses »[15]). Le , Nestlé prend le contrôle de Perrier par une OPA d'un coût de huit milliards de francs à la suite de quatre OPA et quatre contre-OPA en 1991[16]. Cependant, afin d'éviter une position dominante, il est obligé de revendre certaines marques[17]. Le groupe Perrier est alors démantelé : Nestlé récupère les marques Perrier et Contrex et revend les autres sociétés pour cinq milliards, Roquefort à Besnier, Volvic à BSN, Saint-Yorre et Vichy au groupe Castel[12]. L'ambition de Nestlé : devenir le leader mondial des eaux minérales pour former le groupe Nestlé Waters SA, la division Eaux. En 2001, Perrier lance le format 50 cl en plastique prêt à être emporté partout. En 2002, Perrier lance Perrier Fluo : bleu glacier pour la menthe poivrée, jaune épicé pour le citron-genièvre, et rose acidulé pour le cerise-gingembre. En 2003, Perrier lance Eau de Perrier, une eau finement pétillante[7].
Logo et slogans
Le nom de Perrier (avec une typographie à empattement de la lettre P qui symbolise une entreprise ancrée dans ses valeurs) est inscrit dans une bulle verte qui évoque naturalité, vitalité et son caractère rafraichissant. Sous le logo peut apparaître l'emblème du domaine « SP » (Source Perrier) au milieu duquel jaillit une source qui encercle les deux lettres dans un pur esprit Art nouveau. Assimilé au « champagne des eaux de table », la marque a repris la forme originale d'une étiquette de champagne et sa couleur dorée pour évoquer son excellence[5].
Les slogans marquants de Perrier sont[18] :
- 1870 : première réclame de Perrier « La princesse des eaux de table »
- 1939 : l'illustrateur Jean-Gabriel Domergue invente la première publicité avec une « Perrier Girl ». Le slogan est « Avec le whisky ou le cognac, un jus de fruit ou un rond de citron, l’Eau Perrier est incomparable »
- 1954 : "L'eau qui fait pschitt".
- 1991 : Le slogan « l’eau, l’air, la vie » est créé par l’agence Ogilvy & Mather, le slogan précédent étant abandonné, car une étude de marché en 1990 prouvait qu'il avait plus d’impact sur la notoriété de la marque que sur ses ventes. « Perrier, c’est fou » réapparaît en 1995.
Perrier en chiffres
- La première marque mondiale d'eaux gazeuses embouteillées[5].
- Production en 2002 : près de 750 millions de bouteilles tous formats confondus.
- Production en 2012 : près de 950 millions de bouteilles tous formats confondus.
- Production en 2015 : 1,2 milliard de bouteilles tous formats confondus.
- Production en 2016 : 1,4 milliard de bouteilles tous formats confondus.
- 46 % de la production part à l'export dans 114 pays
- Le site de Vergèze a une superficie de 75 hectares, dont 23 hectares bâtis
- Près de 950 employés (CDD/CDI) Perrier travaillent sur le site de Vergèze.
- 13 lignes d'embouteillage.
Perrier est aussi une verrerie, la verrerie du Languedoc ou VDL.
- 201 500 tonnes de verre produites en 2002.
- 600 millions de bouteilles en verre par an, dont 30 à 40 millions de bouteilles de vin, et travaille notamment pour Perrier et San Pellegrino.
- En 2006 VDL (la Verrerie du Languedoc) est reprise par la Financière de la Croix Blanche, dirigée par Michel Roquette
Notes et références
- « Nestlé Waters EMENA à ISSY-LES-MOULINEAUX (582022091), CA, bilan, KBIS - Infogreffe », sur infogreffe.fr (consulté le ).
- « Nestlé Waters Supply Sud : Chiffre d'affaires, résultat, bilans... », sur www.societe.com (consulté le )
- « PERRIER | Perrier France », sur perrier.com, : « "Eau minérale naturelle avec adjonction de gaz carbonique" (voir étiquette de la bouteille) »
- Perrier France, « Bonjour @senanemalek ! Pas d'inquiétude, l’adjonction de gaz carbonique ne modifie en rien les caractéristiques de Perrier et ne modifie pas l’expérience sensorielle. (1/2) », sur @PerrierFr, (consulté le )
- Frank Tapiro, « Perrier », émission À vos marques sur BFM Business, 26 mai 2013
- Florence Halimi, « Elle bulle depuis 150 ans », Le Figaro Magazine, 26 avril 2013, page 104.
- Perrier. Une histoire unique
- « Saga Perrier », Revue des marques, no 12, (lire en ligne)
- Contrex, sur Prodimarques
- Perrier, c'est fou!, sur Prodimarques
- Quelques dates, Volvic sur Prodimarques
- Irène Favier, Perrier-Nestlé : histoire d'une absorption : Histoire sociale d'une entreprise à l'heure des changements culturels (1990-2000), Éditions de l'Atelier, , p. 27-28
- Une dose de fruits, trois de marketing, la formule magique d’Oasis, Capital.fr.
- Patrick Arpino. Voici 20 ans : Perrier ou l'analyse qui fit « pschitt ! » . L'actualité chimique, mai 2010, No 341, p. 46-51. http://www.lactualitechimique.org/larevue_article.php?cle=2347
- « Masstige », terme d'origine anglophone venant de la contraction de « mass market » et « prestige » : mise sur le marché par une distribution de masse de produits industriels laissant à penser à une fabrication de luxe.
- « Perrier : OPA obligatoire ou dérogation », Les Échos, no 16040, , p. 15
- Arrêt du tribunal de première instance (deuxième chambre élargie) du 27 avril 1995 - Concurrence - Règlement 4064/89 - Décision déclarant une concentration compatible avec le marché commun
- Perrier
Voir aussi
Bibliographie
- Daniel Cauzard, Le livre des marques, Du May, Prodimarques, Style marque, 1993
- Culture pub, Saga Perrier, Enquête : Folie dans la pub, no 28, 1990
- Jean Watin-Augouard, Histoire d’une marque : Perrier, La revue des marques, no 12,
- Nicolas Marty, « Les liens entre l'entreprise et la société : le cas de la source Perrier, une grande entreprise en Languedoc et son personnel », Revue d'histoire moderne et contemporaine de Nîmes et du Gard, SHNG, no 17, , p. 44-49 (ISSN 1763-4946, BNF 39081996).
- Nicolas Marty, Perrier, c'est nous ! : histoire de la source Perrier et de son personnel, Paris, L'Atelier, 2005 (ISBN 2-7082-3816-7).
- Irène Favier, Perrier-Nestlé, histoire d'une absorption : histoire sociale d'une entreprise à l'heure des changements culturels (1990-2000), Ivry-sur-Seine, L'Atelier, 2008 (ISBN 978-2-7082-3993-7)
Article connexe
Liens externes