Autochtones d'Amérique

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Amérindiens
Description de cette image, également commentée ci-après
Peinture de groupes ethniques en Amérique au début du XXe siècle.

Populations importantes par région
Drapeau du Mexique Mexique 25 000 000 (21.5%)[1]
Drapeau de la Bolivie Bolivie 6 755 532 (60%)[2]
Drapeau du Pérou Pérou 14 712 018 (45%)[2]
Drapeau du Guatemala Guatemala 9 509 137 (55% ~ 60%)[2]
Drapeau de l'Équateur Équateur 4 236 828 (25%)[2]
Drapeau des États-Unis États-Unis 5 000 000 (2.2%)[3]
Drapeau de la Colombie Colombie 1 989 658 (3.4% ~ 4%)[2]
Drapeau du Chili Chili 2 312 358 (10.8%)[2]
Drapeau du Brésil Brésil 900 000 (~1%)[2]
Drapeau du Canada Canada 1 800 000 (4.9%)[4]
Drapeau du Honduras Honduras 660 612 (7%)[2]
Drapeau du Venezuela Venezuela 812 651 (2.8%~3%)[2]
Drapeau de l'Argentine Argentine 500 000-700 000(1.49%~1.5%)[2]
Drapeau du Nicaragua Nicaragua 314 682 (5%~6%)[2]
Drapeau du Panama Panama 529 739 (13%~14%)[2]
Drapeau du Paraguay Paraguay 138 167 (2%)[2]
Drapeau du Guyana Guyana 78 200 (10.5%~11%)[2]
Drapeau du Salvador Salvador 641 604 (10%)[2]
Drapeau du Costa Rica Costa Rica 149 417 (2.4%~3%)[2]
Drapeau du Belize Belize 40 000 (10.6%~11%)[2]
Drapeau du Suriname Suriname 22 759 (3.8%~4%)[2]
Drapeau de la Guyane Guyane 11 000-13 000 (5%)[2]
Population totale 81 millions ~ (2018)
Autres
Langues Langues amérindiennes
Anglais, Espagnol, Portugais, Français, Danois, Hollandais, Créole
Religions Religions amérindiennes
Christianisme

Les Amérindiens, Indiens d'Amérique, Indiens, Autochtones ou encore membres des Premières Nations, aborigènes, natifs américains ou Autochtones américains, comme revendiqué par certains d'entre eux, sont les habitants de l'Amérique avant la colonisation européenne et leurs descendants. La présence humaine dans cette partie du monde remonte au Paléolithique. En 1492, ils occupent la totalité des Amériques : Amérique du Nord, Amérique centrale, Amérique du Sud, ainsi que les Caraïbes.

La colonisation européenne a été un événement central et dramatique pour les différents peuples amérindiens. Souvent réduits en servitude ou esclavage, chassés de leurs territoires, victimes d'épidémies apportées par les colons, ces peuples furent également tragiquement confrontés à la disparition de leur organisation sociale traditionnelle et de leur mode de vie, et à la transformation par les colons des paysages, de l'occupation des sols, de l'architecture urbaine ou rurale dont ils étaient les concepteurs et qui traduisaient le génie propre des civilisations précolombiennes. Les effectifs de leur population ne cessèrent de diminuer depuis le XVe siècle, et de nombreux peuples disparurent entièrement, et avec eux leur langue et leur culture.

Depuis les années 1960, les Amérindiens revendiquent leur identité (politique, culturelle, linguistique…), et interviennent de plus en plus souvent pour défendre l'environnement des petits territoires qui leur ont été laissés au terme de la conquête.

Terminologie

L'ethnonyme « Amérindien » dérive d'« Indien d'Amérique ». Le mot a été formé à la suite de l'erreur de l’explorateur Christophe Colomb qui, en 1492, pensait avoir atteint les rivages des Indes orientales, nom sous lequel on désignait alors l'Asie du sud et du sud-est, alors qu’il débarquait en Amérique. C'est dans ce contexte que les Européens ont nommé ce territoire les Indes occidentales, pour les différencier de celles dites orientales (qui donnèrent aussi leur nom à différentes entités coloniales européennes nommées Compagnie des Indes orientales). À cause de cette confusion, on continue d’utiliser le mot « Indiens » pour parler des populations d'un Nouveau Monde (le mot pouvait naguère être utilisé pour les aborigènes d'Australie). Avec les travaux du cartographe Martin Waldseemüller au début du XVIe siècle, on commence à parler de « continent américain », en mémoire du navigateur italien Amerigo Vespucci ; ses habitants sont alors désignés sous le nom d'« Indiens d’Amérique » pour les distinguer des populations asiatiques, sans modifier complètement l'usage de les désigner comme des Indiens.

En l’absence d’appellation qui fasse consensus, on utilise parfois les expressions de « peuples autochtones » ou « aborigènes », ou plus précisément, « Premières Nations » ou « Premiers peuples » (traductions littérales de l'anglais). L'expression « Peaux Rouges » est ancienne, mais péjorative et n'est plus beaucoup utilisée en Amérique. Le géographe grec Pausanias le Périégète aurait décrit une terre située au-delà de l'océan Atlantique, qu'il nomme terre d'outre-océan, peuplée par des « hommes à peau rouge, à chevelure noire et raide comme le crin d'un cheval »[5],[6].

On parle aussi de « peuples précolombiens » pour les territoires américains de l'Empire colonial espagnol, qui incluent la Mésoamérique et la cordillère des Andes. En anglais, au Canada comme aux États-Unis, on utilise les expressions « Native Americans » (« Américains d'origine »), « American Indians », « Native peoples » (« peuples d'origine »), « First Nations », « First Peoples », « Aboriginal Peoples ». Toutefois, ces termes politiquement corrects sont souvent rejetés par les intéressés qui préfèrent être appelés en fonction des noms originels de leurs peuples.

Au Québec, le terme « autochtone » est de loin le plus courant, à côté de « Premiers peuples », et « Premières Nations »[7] quand cela concerne des revendications territoriales ou spécifiques. Dans le contexte québécois le terme englobe également les Inuits, qui ne sont pas des Amérindiens[8], et les Métis reconnus[9].

En Guyane, on parle d'« Amérindiens » répartis en six ethnies.

Au Mexique, on préfère dire « indígena » (« indigène ») qu’« indio » (« indien »), qui prête à confusion avec les citoyens de l'Inde et qui est ressenti comme une insulte.

Répartition géographique des groupes ethniques

Amérique du Nord

Carte des groupes ethniques majoritairement composés d'Amérindiens aux États-Unis.

La concurrence nationaliste entre les pays d'Amérique du Nord, et plus particulièrement entre le Mexique et les États-Unis, qui se sont disputé la suprématie sur le continent américain jusqu'à la guerre américano-mexicaine, ont suscité des traditions historiques différentes et une distinction devenue commune entre les groupes amérindiens établis en Mésoamérique (y compris parfois certains d'Oasisamérique et d'Aridamérique) avec les groupes établis plus au nord. Les recherches archéologiques, historiques et anthropologiques ont pourtant établi qu'il existait des échanges culturels entre ces différentes aires culturelles qui, de ce fait, s'influençaient mutuellement et partageaient certains traits culturels.

Mésoamérique

Entre le Sud de l'Amérique du Nord et le Nord de l'Amérique centrale, les Mésoaméricains ont développé de véritables civilisations, tant dans la construction des villes que par l'écriture ou la connaissance astronomique. Parmi les principales ethnies, on peut citer en particulier les Olmèques, les Mayas, les Purépechas, les Mixtèques, les Zapotèques, les Huaxtèques, les Totonaques et les Nahuas (dont les Aztèques).

Grandes et petites Antilles

Amérique du Sud

Une femme quechua et son enfant au Pérou.

Les Chibchas (aux confins de l'Amérique centrale et du Sud), les nations Quechuas, la nation aymara, les Mapuches, peuples d'Amazonie, peuples Patagons. Les derniers Amérindiens contactés hors du bassin amazonien (en 2004 dans le Paraguay occidental) sont les Totobiegosodes (ou Ayoreo-Totobiegosode) dont le territoire forestier est illégalement et rapidement détruit par deux compagnies forestières brésiliennes (Yaguarete Porá SA et River Plate SA) au moins depuis mai 2008 selon Survival International qui a alerté l'opinion internationale sur ce fait en novembre 2008. Les Totobiegosodes avaient déjà perdu 6 000 hectares de leur forêt au profit des éleveurs de bétail en 2007[10].

Histoire

Peuplement originel

Théories anciennes

Couple d'Indiens Carajà au Brésil.

Les spécialistes ont dans un premier temps pensé[11] que l’arrivée des premiers humains en Amérique remontait à 12 000 ans environ, mais des découvertes archéologiques récentes feraient remonter les premières migrations à plus de 40 000 ans. Venant de Sibérie, ils auraient traversé le détroit de Béring, alors au-dessus de la ligne de rivage maritime en période glaciaire (voir Béringie). Après une période d'habitation en Béringie, et après la disparition des masses glaciaires d’Amérique du Nord, ils auraient pu continuer la colonisation du nouveau continent[12].

D’autres théories parlent de peuples océaniens ayant traversé l'océan Pacifique (théorie exprimée par Paul Rivet), ou encore de peuples européens (hypothèse de l'archéologue Dennis Stanford confirmée aujourd'hui par une analyse d'ADN[13]). On estime en effet qu'une peuplade serait venue d'Europe entre 12 000 et 36 000 ans ; elle correspondrait aujourd'hui à un groupe très restreint d'autochtones que sont les Ojibwés, les Nuu-Chah-Nulth, les Sioux, et les Yakamas.

Les Amérindiens, s'appuyant sur leur tradition orale, soutiennent que leurs ancêtres ont toujours habité là[14]. Quoi qu'il en soit, la diversité des milieux naturels du continent a engendré des cultures très différentes.

Découvertes et hypothèses plus récentes

Diversité des peuples d'Amérique du Nord (illustration publiée en 1914).

On notera cependant des découvertes qui remettent en cause le schéma général de la colonisation de l'Amérique par les Amérindiens. Certains spécialistes pensent que le peuplement du continent américain n'a pas une seule origine :

  • Un squelette entier de type europoïde, l'homme de Kennewick, datant de plus de 9 000 ans a été découvert dans l'État de Washington en juillet 1996, sur les bords de la Columbia[15].
  • Les ossements de la femme de Peñon (environ 13 000 ans), découverts près de Mexico présentent aussi des caractéristiques europoïdes.
  • Des momies furent exhumées sous plusieurs mètres de dépôts de guano dans la caverne de Lovelock en 1911 par des exploitants-récolteurs. Elles étaient du type europoïde. Elles furent datées d'environ 5 000 ans par l'analyse au radiocarbone 14. D'autres furent découvertes en 1931 de même type non loin de la caverne de Lovelock.
  • 75 crânes, dont le crâne de Luzia, ont été mis au jour au Brésil[16],[17] datés de près de 35 000 ans, soit plus que le site de Clovis, au Nouveau-Mexique, considéré jusqu'alors comme le plus ancien du continent ; ils sont d'aspect africain ou aborigène australien.
  • 250 crânes et squelettes du site de Cerca grande, sont âgés de 9 000 ans à 1 000 ans et sont également de type mélanésien et africain.

L'autre question problématique est celle de la date du peuplement. Là encore, le travail des archéologues semble repousser l'origine du peuplement à des époques plus anciennes qu'on ne l'a longtemps cru :

  • En 2005, dans une ancienne carrière située près du volcan Cerro Toluquilla (Puebla au Mexique), des traces humaines vieilles de 38 000 ans ont été découvertes par une équipe britannique sur une couche de cendres fossilisées.
  • Sur le territoire des États-Unis, l'homme de Folsom trouvé au Nouveau-Mexique aurait 20 000 ans. En 1997, l'analyse au carbone 14 de fossiles amérindiens trouvés en Virginie les fait remonter à 17 000 ans av. J.-C. Les Algonquins seraient apparus il y a 4 500 ans. Des traces de maisons en rondins iroquoises sont attestées pour le Xe siècle av. J.-C.. En 2019, des charbons de bois et des ossements de grands mammifères accompagnés de lames de pierre et de pointes de lance, provenant du site de Cooper's Ferry (sur les rives d'une rivière de l'ouest de l'Idaho), sont datés à environ 16 000 ans, plus d'un millénaire avant que la fonte des glaciers n'ait ouvert un corridor sans glace à travers le Canada il y a environ 14 800 ans. Les premiers paléoaméricains ont donc dû venir par voie maritime, en parcourant rapidement la côte du Pacifique et en remontant les rivières[18],[19].

Génétique

Les Amérindiens d'aujourd'hui sont étroitement liés aux Asiatiques de l'Est. Néanmoins, les chercheurs estiment que 14 à 38 % de l'ascendance amérindienne provient d'une population semblable à celle qui vivait en Sibérie il y a 24 000 ans. L'étude de l'ADN d'un garçon sibérien du Paléolithique supérieur découvert près du village de Mal'ta, le long de la rivière Belaya en Sibérie a montré que certaines parties de son génome se retrouvent aujourd'hui chez les Eurasiens occidentaux, d'autres se retrouvent chez les Amérindiens et sont uniques aux Amérindiens aujourd'hui. L'ADN du garçon est rare ou absent en Asie centrale et en Asie de l'Est. Le scénario le plus probable est celui d'une population telle que celle qui vivait en Sibérie il y a 24 000 ans qui s'est mélangée aux ancêtres des Asiatiques de l'Est. Ainsi, les Amérindiens sont formés par la réunion de deux populations - un groupe est-asiatique et des populations ouest-eurasiennes - sans que l'on sache où ce mélange a eu lieu[20].

Préhistoire et histoire

Pétroglyphes amérindiens, Nevada.
Objets de la vie quotidienne des Indiens du Sud-Est des États-Unis.

L'utilisation de l'écriture, par opposition à la tradition orale, est habituellement la ligne de démarcation entre l'histoire et la préhistoire[21] et les années 1500, époque des premiers contacts, représentent plutôt cette ligne séparatrice. Il faut donc adapter constamment le concept de « vérité historique », car les autochtones contemporains fondent une bonne partie de leurs revendications sur cette antériorité historique, sur la période que l'on qualifie habituellement de préhistorique[Quoi ?].

L'histoire, chez les peuples indigènes des Amériques, se transmettait le plus souvent oralement, même si l'usage de supports mnémotechniques plus ou moins semblables à des systèmes d'écriture furent développés en Mésoamérique (codex) et dans les Andes (quipu). Légendes, contes, aventures de chasse et faits historiques ont voyagé à travers le temps et se sont transformés dans la bouche des conteurs. Contrairement aux historiens contemporains, les Inuits et les Amérindiens accordent à la valeur mythique et symbolique des événements, dans le cadre de leur conception cyclique du temps, une place plus importante que l'exactitude des lieux, des dates et des acteurs. Ces différences perceptuelles de l'histoire n'ont pas toujours facilité les relations passées et présentes entre les Amérindiens et les allochtones.

Époque moderne : la colonisation européenne

L'arrivée des Européens au XVe siècle a bouleversé la vie des peuples d'Amérique. Parmi les centaines de nations qui peuplaient le continent, beaucoup ont disparu, déculturées ou exterminées. Le désastre démographique est dû aux épidémies principalement, mais aussi aux guerres, au travail forcé, aux déplacements de tribus entières. La population indienne en Amérique latine est passée, selon les estimations, de 30 à 80 millions d'habitants lors de la « découverte » de l'Amérique par Christophe Colomb à 4,5 millions un siècle et demi plus tard[2], pour remonter à 44 millions à l'aube du XXIe siècle[22].

La conquête espagnole

Massacre de Cholula, selon le Lienzo de Tlaxcala.

Au Mexique, Hernán Cortés débarque à proximité de Veracruz en 1519 ; il est tout d'abord bien accueilli par Moctezuma, empereur aztèque. Les Espagnols entrent dans Tenochtitlan le . Mais le , ils sont chassés par une révolte de la population. Cortez, soutenu par les autres peuples amérindiens, remporte la bataille d'Otumba le et vient assiéger la capitale qui finit par tomber le . Le dernier empereur, Cuauhtémoc, fait prisonnier pour éviter une nouvelle révolte, est exécuté vers 1524-1526, tandis que Tenochtitlan est rasée pour laisser la place à Mexico.

Lorsque Pizarro arrive au Pérou en 1532, il est perçu comme un dieu. Il enlève l'empereur Atahualpa et encourage la révolte des peuples soumis aux Incas. L'empire se morcelle et l'empereur est finalement exécuté par les Espagnols en 1533. Les conquistadors contrôlent le territoire inca au milieu du XVIe siècle, même si des résistances ont encore lieu. La formation de l'Empire colonial espagnol s'accompagne de pillages, de maladies nouvelles qui font des ravages, de la famine, de l'asservissement des Amérindiens dans les encomiendas et de l'évangélisation de la population.

Le , Charles Quint ordonne d'interrompre les conquêtes du Nouveau Monde pour des raisons morales. Le débat qui s'ensuit, confié aux théologiens verra les fameuses joutes de Bartolomé de las Casas et Sepulveda lors de la controverse de Valladolid. À son issue, l'Église catholique romaine réaffirme l'opposition à l'esclavage des Indiens qu'elle avait déjà exprimée par les bulles Veritas ipsa () et Sublimis Deus (le 9 juin 1537) dans lesquelles Rome condamnant l'esclavage des Indiens avait affirmé leur droit, en tant qu'êtres humains, à la liberté et à la propriété mais l'Église ne condamna pas, dans le même temps, l’esclavage des Africains.

En 1556, la terminologie change, « Conquista » est officiellement remplacé par « descubrimiento » (« découverte »), et « conquistador » par « poblador » (« colon »).

Les Amérindiens étaient utilisés pour exploiter les ressources en Amérique du Sud (sucre, rhum, café, etc.). Les Espagnols récoltaient ces ressources, qu'ils exportaient en Europe. Les Espagnols partaient d'Europe avec des marchandises (armes, tissus, métaux en lingots , etc.), qu'ils échangeaient en Afrique contre des esclaves qu'ils transportaient en Amérique pour exploiter les ressources. Ce système se nomme le « commerce triangulaire »[23].

Le choc infectieux

La démographie historique estime qu'une majorité d'Amérindiens sont morts à la suite des maladies infectieuses introduites par les Espagnols, contre lesquelles les Amérindiens n'étaient pas immunisés. Le processus a commencé dès les années 1500 et les épidémies de variole (1525, 1558, 1589), de typhus (1546), de grippe (1558), de diphtérie (1614), de rougeole (1618) ou encore de peste bubonique (1617-1619, en Nouvelle-Angleterre) ont décimé des millions d'indigènes.

Le bilan de ces épidémies est cependant difficile à donner avec exactitude. Les sources sont insuffisantes et les historiens ne sont pas d'accord sur les estimations. À la fin du XXe siècle, notamment à la suite de recherches publiées en 1966[24], les historiens ont favorisé les estimations hautes[25], qui calculent un taux de mortalité, selon les régions, compris entre 50 % et plus de 95 % de la population amérindienne[26],[27].

Certains[Qui ?] avancent un bilan de 10 millions de victimes indigènes sur l'ensemble du continent américain ; d'autres[Qui ?] pensent plutôt à 90 millions, dont 10 pour l'Amérique du Nord. Si l'on prend les données d'Anne Garrait-Bourrier et Monique Venuat (voir la bibliographie), le continent américain entier (de l'Alaska au cap Horn) abritait environ 50 millions d'habitants en 1492 ; pour comparaison, il y avait 20 millions de Français au XVIIe siècle. Pour le territoire des États-Unis d'aujourd'hui le recensement de 2005 donne une population d'Amérindiens de 2 821 311 habitants répartis sur les 50 États, l'Arizona venant en tête avec 300 288 Amérindiens. Environ 500 000 Amérindiens peuplaient la côte est de cet espace. Ils ne sont plus que 100 000 au début du XVIIIe siècle. Dans l'Empire espagnol, la mortalité des Amérindiens provoquait de tels ravages qu'ils durent aller chercher des esclaves en Floride pour pallier le manque de main d'œuvre en Amérique du Sud.

Exemples parmi d'autres des ravages causés par ces pandémies :

Les Timicuas, en Floride, qui en 1650 étaient 13 000 répartis sur 40 villages, ne furent après une épidémie de petite vérole que 35 en 1728, regroupés dans un seul hameau.

Les Wampanoag qui occupaient le territoire de l'actuel Massachusetts furent emportés jusqu'au dernier en 1617, trois ans avant l'arrivée des premiers colons débarqués du Mayflower qui fonderont Plymouth.

Époque coloniale

Indépendantisme

XXe siècle : le réveil identitaire

Amérindiens dans la première guerre mondiale. Photographie L'Argonnaute (La Contemporaine) parue dans Le Miroir, .

Au début du XXe siècle, les Amérindiens sont presque toujours des prolétaires ; leur statut social leur est assigné par leur appartenance ethno-culturelle et les voies de la mobilité sociale leur sont fermées. Les communautés amérindiennes ont été dépossédées de leurs terres, notamment sous les régimes inspirés par le positivisme de Porfirio Diaz au Mexique, Rafael Reyes Prieto en Colombie et Manuel Estrada Cabrera au Guatemala. Ils sont prolétarisés en les faisant devenir ouvriers agricoles de plantations ou mineurs. Leurs salaires sont très bas et, étant généralement analphabètes, le droit de vote leur est refusé[28].

Des soulèvements collectifs d'indigènes ont lieu en Amérique latine entre 1915 et 1917, dont les plus importants au Mexique pendant la période révolutionnaire. La révolution mexicaine exerce ainsi une influence considérable sur la question indigène. Dans une certaine mesure, elle a tenté de réaliser un renversement de valeurs, en réaction contre la suprématie raciale imposée par le régime de Porfirio Díaz. Les élites mexicaines ne sont pas seules à éprouver une violente répulsion pour ce changement : l'ambassadeur américain appelle au retour à la suprématie blanche grâce à l'aide des Etats-Unis aux « réels gouvernants du Mexique »[28].

Outre le Mexique, c'est aussi au Pérou que l'indigénisme apparaît, notamment en raison du débat culturel à la recherche de l'identité latino-américaine par rapport à l'Europe, et à la diffusion d'idées socialisantes parmi les intellectuelles qui les conduit à poser la question du statut des Amérindiens. Les écrits de Manuel González Prada, considéré comme l'un des pères de l'indigénisme moderne, exercent une importante influence sur le mouvement de la réforme universitaire et sur l'APRA (parti politique nationaliste latino-américain et indigéniste). Pour José Carlos Mariátegui, penseur indigéniste et fondateur du Parti communiste péruvien, socialisme et indigénisme sont indissociables au Pérou : « les masses — la classe des travailleurs — sont pour quatre cinquième indigènes. Notre socialisme ne sera pas péruvien, ni même socialiste, s'il ne se solidarise pas avec les revendications indigènes[28]. »

Le Chef Raoni au milieu d'autres chefs indigènes.

Depuis 1968, est constaté un réveil politique et culturel des Amérindiens et des métis :

  • des manifestations d'Amérindiens ont lieu lors de la Thanksgiving, en souvenir des Amérindiens qui ont été progressivement oubliés dans cette fête d'action de grâce ;
  • reconnaissance par l'ONU ;
  • participation à de nombreux mouvements internationaux : ATTAC
  • au Mexique, des actions armées en 1994 ont également été menées au Chiapas par l'Armée zapatiste de libération nationale (EZLN) au nom de la lutte pro-indigène ou pour la reconnaissance des droits fondamentaux des cultures indigènes chiapanèques.
  • En Équateur, l'engagement politique des indigènes, représentés principalement par la Conaie (Confédération des nationalités indigènes d’Equateur), aboutit notamment au renversement du gouvernement corrompu d’Abdalá Bucaram en 1997, puis de celui de Jamil Mahuad en 2002, et à la victoire électorale de Lucio Gutierrez en 2002, bien que celui-ci se retourne ensuite contre ses anciens alliés indigènes. En 2006, un nouveau soulèvement se produit contre la décision du gouvernement d’Alfredo Palacio de signer un traité de libre-échange avec les Etats-Unis[29].
  • En Bolivie, Evo Morales, d'origine indigène, est élu à la présidence de la république en 2006.
  • en 1990, une loi fédérale américaine, The Native American Graves Protection and Repatriation Act (NAGPRA), exige que les biens culturels amérindiens découverts soient rendus aux peuples natifs. Cette loi autorise néanmoins les équipes d'archéologues à analyser les découvertes mais dans un délai très court. Par biens culturels, la loi désigne les restes humains, les objets funéraires et sacrés, et tout objet et artefact du patrimoine amérindien. Cette loi fédérale avait été rendue nécessaire pour mettre un terme aux pillages de sites historiques mais les archéologues et chercheurs américains lui reprochent de restreindre gravement la recherche archéologique sur les origines des premiers habitants des États-Unis. Le cas de l'homme de Kennewick est symptomatique, les tribus amérindiennes demandant le retour sur leurs terres respectives de ce squelette dont une étude avait révélé une origine caucasienne ou europoïde, avant qu'une étude génétique montre la parenté avec les amérindiens actuels. Ces restes humains sont finalement restitués en 2016, soit vingt ans après leur découverte[30] ;
  • le , les Indiens sioux rompent les traités signés avec les États-Unis, par la voix de leur dirigeant Russell Means qui accuse les États-Unis d'avoir « violé maintes fois (le traité) afin de voler notre culture, notre terre et nos coutumes ». Il poursuit : Nous ne sommes plus citoyens des États-Unis d'Amérique et tous ceux qui vivent dans les régions des cinq États que comprend notre territoire sont libres de nous rejoindre., lors d'une conférence de presse à Washington. Il a précisé que des passeports et des permis de conduire seraient délivrés à tous les habitants du territoire s'ils renonçaient à leur nationalité américaine.
  • Au Vénézuela, le Parc national indigène populaire Caura est créé en 2017 dans l'Etat de Bolivar. Espace vierge de 7,5 millions d’hectares (20 % de l’Etat du Bolivar), sept ethnies indigènes y vivent – Yekwana, Sanema Hoti, Pemón, Hivi (Guajibo), Eñepa et Kariñas. Le parc est considéré par le Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) comme la zone forestière humide protégée la plus grande du monde[31].

Culture amérindienne

Langues amérindiennes

Les langues amérindiennes sont les langues indigènes d'Amérique, parlées par les différents peuples amérindiens depuis l'Alaska et le Groenland jusqu'à la Terre de Feu. Les linguistes qui en sont spécialistes sont appelés américanistes.

Les langues amérindiennes ne forment pas une famille de langues unique, mais comprennent de nombreuses familles de tailles très variables, ainsi que des langues isolées. Diverses hypothèses rassemblant ces divers groupes en un plus petit nombre de superfamilles ont été formulées, avec un niveau d'acceptation très variable parmi les américanistes. Les Indiens des Plaines avaient développé une langue des signes auxiliaire pour communiquer par-delà la variété de leurs langues maternelles. Beaucoup de langues amérindiennes sont aujourd'hui menacées de disparition.

Techniques de communication

Les Amérindiens utilisent des tambours, qui permettent de communiquer à distance à l'instar des appareils modernes. Ainsi, en frappant sur un tambour, un chaman peut échanger des informations avec un autre chaman ou localiser le gibier.

Musique amérindienne

La musique amérindienne comprend la musique précolombienne, mais aussi celle que les Amérindiens ont continué de pratiquer après et malgré les premiers contacts, ou en marge de ceux-ci. Elle se caractérise par une grande variété d'aérophones, de membranophones et d'idiophones, et de lorophone avec de très rares cordophones. On ne connaît aucun traité ou système musical amérindien ; la musique est aussi variée que le nombre de peuples l'est et a justement une fonction sociale, identitaire voire culturelle essentielle. Elle est souvent associée à des interdits ou des tabous, étant réservée parfois aux hommes, aux célibataires, etc. Si elle est en général très simple et monophonique, il existe néanmoins des exemples de musique polyphonique ou orchestrale. L'instrumentarium est très riche du fait des variations linguistiques, culturelles et naturelles (grande variété de végétaux utilisés), mais les cordes sont très rares du fait de l'absence de métal.

Sport

Le softball, variante « allégée » du baseball est l'un des loisirs typiquement nord-américains pratiqué par les Amérindiens[32]. Parmi les rares sportifs d'origine amérindienne, la joueuse WNBA de basket-ball Shoni Schimmel connaît une forte popularité aux États-Unis[33].

Iconographie

Notes et références

  1. (es) JOSÉ NOÉ RIZO AMÉZQUITA ("21,5% de 119 530 573 population totale du Mexique en 2015"), « Población Indígena en cifras », Boletín CONAMED - OPS,‎ juillet - août 2017, p. 8 (lire en ligne)
  2. a b c d e f g h i j k l m n o p q r s et t Courrier International, Hors-série « Fiers d'être indiens », juin-juillet-août 2007, p. 19.
  3. https://www.cia.gov/library/publications/the-world-factbook/geos/us.html.
  4. https://www.cia.gov/library/publications/the-world-factbook/geos/ca.html.
  5. L.-H. Parias, Histoire universelle des explorations, en 4 volumes, éditions Nouvelle Librairie de France, Paris, 1959, tome 2, p. 226.
  6. Association Guillaume Budé, volume 1, 1967, p. 38.
  7. Par exemple dans le nom de l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador.
  8. Nations autochtones et tribus amérindiennes du Québec.
  9. Appelés aussi en anglais « Métis », compte tenu de l'importance parmi eux des personnes d'origine française.
  10. Bulletin d'alerte de l'ONG Survival International.
  11. Récit de la colonisation selon Sciences.ac.ca.
  12. http://www.sfu.museum/journey/fr/05p_secondary/beringia.php.
  13. (en) mtDNA haplogroup X: An ancient link between Europe/Western Asia and North America? M D Brown, S H Hosseini, A Torroni, H J Bandelt, J C Allen, T G Schurr, R Scozzari, F Cruciani, and D C Wallace. Center for Molecular Medicine, Emory University School of Medicine, Atlanta, GA, États-Unis.
  14. Voir par exemple cette description des traditions orales chez les Saskatchewan.
  15. (fr) « Le défunt le plus controversé du monde », Agence Science-Presse.
  16. (fr) « 11 000 ans sur une carte », Agence Science-Presse.
  17. (en) « Who were the first Americans? », National Geographic.
  18. (en) Lizzie Wade, « Ancient site in Idaho implies first Americans came by sea », Science, vol. 365, no 6456,‎ , p. 848-849 (DOI 10.1126/science.365.6456.848).
  19. (en) Loren G. Davis, David B. Madsen, Lorena Becerra-Valdivia, Thomas Higham, David A. Sisson et al., « Late Upper Paleolithic occupation at Cooper’s Ferry, Idaho, USA, ~16,000 years ago », Science, vol. 365, no 6456,‎ , p. 891-897 (DOI 10.1126/science.aax9830).
  20. (en) Ancient DNA from Siberian boy links Europe and America, bbc.com, 20 novembre 2013
  21. Il est intéressant de savoir que 90 % des langues parlées sur cette terre sont ou étaient de culture orale et c'est le cas de la très grande majorité des langues autochtones des Amériques.
  22. « 44 millions d'indiens en Amérique latine », carte des peuples indigène d'Amérique latine, Courrier international [PDF].
  23. François Hudon et Michel Vervais, Réalités, histoire et éducation de la citoyenneté, éditions du renouveau pédagogique Inc., 2006.
  24. (en) Henry Dobins, « Estimating aboriginal populations: An appraisal of techniques with a new hemispheric estimate », Current Anthropology, 1966 (cf. Massimo Livi-Bacci, The Depopulation of Hispanic America after the Conquest, pages 204 et 231).
  25. Massimo Livi-Bacci, The Depopulation of Hispanic America after the Conquest, pages 204-205 et note 8 page 227.
  26. Pierre Vidal, Myrtille Tibayrenc, Jean-Paul Gonzalez, « Infectious Disease and Arts », in Encyclopedia of Infectious Diseases, John Wiley & Sons, 2007,p. 722 : « The decimation of populations in a few decades, particularly in the Caribbean and Central America, was unprecedented, wiping out between 50% and 95% of the indigenous population, depending on the colonized regions ».
  27. Plus de 95%, même, sur l'île d'Hispaniola, selon Noble David Cook (cité par Andrew W. Artenstein dans Vaccines : a biography, Springer, 2010, p. 4 : « smallpox epidemics ravaged the island of Hispaniola in the first quarter of the sixteenth century, reducing the population by more than 95% (Cook 1998) ».
  28. a b et c Leslie Manigat, L’Amérique latine au XXe siècle,1889-1929, Points, , p. 328
  29. Raúl Zibechi, « Mouvements indigènes : entre néolibéralisme et gouvernements de gauche », CETRI, Centre Tricontinental,‎ (lire en ligne, consulté le )
  30. « Kennewick Man closely related to Native Americans, geneticists say », ScienceDaily, 18 juin 2015.
  31. Maurice Lemoine, « L’Arc minier de l’Orénoque, les « écologistes » et les mafias », sur www.medelu.org,
  32. GEO no 404 d'octobre 2012 p. 104.
  33. Kate Bennert, « "Showtime" Shoni Schimmel Earns Her Nickname at the 2014 WNBA All-Star », WNBA, (consulté le ).

Annexes

Bibliographie

  • Paul Rivet, Les origines de l'homme américain, éd. Gallimard, NRF, 1957 – livre ancien.
  • Gilles Havard et Mickaël Augeron, Un continent en partage. Cinq siècles de rencontres entre Amérindiens et Français, Paris, Les Indes savantes, 2013.
  • Christophe Magny, La Voie de la nuit, cérémonies des Indiens Navajo, Alphée, 2008.
  • David Cornut, Little Big Horn, autopsie d'une bataille légendaire, éd. Anovi, 2006 (ISBN 2-9148-1810-6).
  • Theodora Kroeber, Ishi - Testament du dernier indien sauvage de l'Amérique du Nord, éd. Plon, 1968 (ISBN 2-2661-2100-6).
  • Dee Brown, Enterre mon cœur à Wounded Knee, éd. 10/18, 1995.
  • Charles C. Mann, 1491. Nouvelles révélations sur les Amériques avant Christophe Colomb, Marina Boraso (trad.), éd. Albin Michel, 2007 (ISBN 978-2-2261-7592-2).
  • Marine Degli et Marie Mauzé, Arts premiers, le temps de la reconnaissance, coll. « Découvertes Gallimard / Arts » ([[Liste des volumes de « Découvertes Gallimard » (2e partie)|no 393]]), éd. Gallimard, 2000 : décrit, entre autres, des arts primitifs amérindiens.
  • George Sand, Relation d'un voyage chez les sauvages de Paris, Éditions du Sonneur, 2010 (ISBN 978-2-9161-3627-1).
  • Julia M. Keleher, Elsie Ruth Chant, The Padre of Isleta, The Story of Father Anton Docher , Sunstone Press Publishing, 2009.
    Vie d'un missionnaire français chez les indiens Tiwas du Nouveau-Mexique

Articles connexes

Liens externes

Livres anciens

Album des principaux outils, amulettes et autres objets d'origine caraïbe faisant partie d'une collection ethnographique recueillie à la Guadeloupe par le docteur F. L'Herminier et Math. Guesde (lire l'ouvrage en ligne), 1860, Collectivité territoriale de Martinique. Bibliothèque Schoelcher.

Autres ressources

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