Marine indonésienne
La Tentara Nasional Indonesia Angkatan Laut ("armée nationale indonésienne force navale") ou TNI-AL est la marine militaire de la République d'Indonésie. Ses effectifs sont d'un peu plus de 57 000 hommes (2007).
Dans les années 1990, la marine indonésienne a acquis plusieurs bâtiments de combat de la marine de l'ex-République démocratique allemande. Janvier 2015 elle possède notamment 9 frégates, 20 corvettes, 2 sous-marins, 23 navires d'attaque rapides et 44 patrouilleurs. Son tonnage global en 2002 était de 50 400 tonnes, soit équivalent que celui de la Koninklijke Marine des Pays-Bas, l'ancienne puissance coloniale (voir l'article Marine militaire).
Le devise de la marine indonésienne, Jalesveva Jayamahe, signifie « C'est sur les eaux que nous vaincrons » en sanskrit, la langue des textes sacrés de l'hindouisme. La culture indonésienne est en effet encore fortement imprégnée d'éléments empruntés à l'Inde.
L’ular-ular perang, étendard de guerre de la marine indonésienne, est hérité du royaume javanais de Majapahit (XIVe-XVe siècles).
Mission
La mission de la marine indonésienne est d'être une force territoriale responsable de l'immense littoral de l'Indonésie ainsi que des eaux archipélagiques de ses mers intérieures. Un premier volet de cette mission est la surveillance des détroits stratégiques, notamment le détroit de Malacca. Un deuxième volet est la lutte contre la contrebande et la pêche illégale, en particulier dans le secteur des îles Natuna, au large de Kalimantan et de la Nouvelle-Guinée occidentale. Pour ce deuxième volet, la marine indonésienne envisage de construire des bases dans les régions isolées de l'est et de l'ouest de l'archipel.
Organisation
La majorité des bâtiments sont stationnés dans sa base principale à Surabaya (est de Java). Ils sont regroupés en flottilles mobiles qu'on peut détacher selon les besoins. L'essentiel de l'activité jusqu'ici a été concentrée dans l'ouest de l'archipel, à partir des bases de Belawan à Medan (nord de Sumatra), Tanjungpinang sur Bintan (îles Riau), et un peu dans l'est à partir de la base de Manado (nord de Célèbes).
Le quartier général de la marine est à Jakarta, la capitale.
La marine indonésienne était organisée en deux flottes. Elle est en train d'en mettre en place une troisième[1]. Les trois flottes sont ainsi : la flotte occidentale basée à Jakarta, la flotte centrale à Surabaya et la flotte orientale à Sorong;
- Un corps de fusiliers marins ;
- Une aéronautique navale ;
- Un commandement du transport aérien.
Flotte occidentale
Le Komando Armada RI Kawasan Barat (commandement de la flotte occidentale) est basé à Tanjung Priok, le port de Jakarta. Il couvre les 4 bases principales suivantes :
- Belawan, le port de Medan (Sumatra du Nord) ;
- Padang (Sumatra occidental) ;
- Jakarta ;
- Tanjung Pinang, (îles Riau).
La flotte occidentale comprend notamment les corvettes Silaspapare, Imam Bonjol et Pati Unus (de la classe Sigma) et Kapitan Patimura, Cut Nyak Dien, Sutan Thaha Syaifuddin et Teuku Umar (de la classe Kapitan Pattimura, ex-Parchim).
Flotte centrale
Le nouveau Komando Armada RI Kawasan Tengah (commandement de la flotte centrale) est basé à Surabaya (Java oriental). La flotte orientale comprend pour l'instant notamment les frégates Karel Sasuit Tubun (de la classe Ahmad Yani), Fatahillah, Malahayati et Nala (de la classe Fatahillah) et Ki Hajar Dewantara, et le sous-marin Nanggala.
Flotte orientale
Le Komando Armada RI Kawasan Timur (commandement de la flotte orientale) sera déplacé à Sorong (Papua occidental)[2]. Les navires proviendront des deux autres commandements.
Histoire
La marine indonésienne a été créée le 22 août 1945, cinq jours après la proclamation de l'indépendance, sous le nom de Badan Keamanan Rakyat Laut (« agence de sécurité du peuple pour la mer »). Elle récupérait des bateaux en bois et quelques navires de débarquement laissés par la marine impériale japonaise. Avec la création des forces armées indonésiennes le 5 octobre 1945, elle prend le nom d'Angkatan Laut Republik Indonesia ou ALRI (« force navale de la République d'Indonésie »), qu'elle gardera jusqu'en 1970, avant de prendre son nom actuel. Pendant le conflit qui, de 1945 à 1949, oppose la jeune république aux Pays-Bas qui tentent de récupérer leur colonie, la mission de l'ALRI est notamment de rompre le blocus naval imposé par les Hollandais. En 1947 en baie de Cirebon dans l'ouest de Java, une flottille indonésienne composée du KRI Gajah Mada, un patrouilleur à coque de bois récupéré des Japonais et seulement armé d'un canon de 20 mm et d'une mitrailleuse lourde de 12,7 mm, de 3 remorqueurs et d'une barque à moteur, fut prise à partie par la frégate hollandaise Hr. Ms. Kortenaer. Le Gadjah Mada fut coulé dans l'engagement.
Après le transfert formel de souveraineté en 1949, l'ALRI hérite de bâtiments de la Koninklijke Marine, notamment des corvettes et des destroyers.
En 1959, elle commence à acquérir du matériel de l'Union soviétique et autres pays d'Europe de l'Est, dont un croiseur léger de la classe Sverdlov, 8 destroyers de la classe Skoryi, 8 frégates de la classe Riga, 12 vedettes lance-missiles de la classe Komar, 14 vedettes lance-torpilles, 28 patrouilleurs, 9 dragueurs de mines, 2 ravitailleurs et 12 sous-marins de la classe Whiskey[3], ces derniers avec l'équipage soviétique et dépendant toujours de la marine soviétique. L'infanterie de marine reçoit des véhicules blindés et amphibies et l'aéronautique navale des hélicoptères de lutte anti-sous-marine et des bombardiers Iliouchine Il-28.
En 1962, en plein conflit pour la Nouvelle-Guinée occidentale, encore sous administration hollandaise, que Soekarno revendique, la bataille de la mer d'Arafura met aux prises une flottille de 3 vedettes lance-torpille indonésiennes d'une part, et un destroyer et une frégate hollandais d'autre part. L'une des vedettes indonésiennes est coulée.
En raison de son implication dans le « mouvement du 30 septembre 1965 », en particulier du rôle des KKO (infanterie de marine), la marine est négligée par le régime de Soeharto, un général de l'armée de terre. Son matériel d'Europe de l'Est devient bientôt non-opérationnel en raison du manque de pièces détachées et d'entretien[4].
En 1970, la marine indonésienne reçoit d'anciens escorteurs de l'US Navy et une ancienne vedette d'attaque de la Royal Australian Navy. En 1974, elle acquiert encore 4 frégates de l'US Navy.
Dans les années 1980, la marine achète 2 sous-marins allemands du type 209-1300, 3 frégates britanniques de la classe Tribal, 3 frégates de construction néerlandaise de la classe Fatahillah et 4 patrouilleurs construits en Corée du Sud du type PSK qu'elle équipe de missiles Exocet MM38.
La polémique sur les bateaux est-allemands
En 1993, à l'initiative du ministre de la Technologie B. J. Habibie, le gouvernement décide l'acquisition de 39 navires de la marine de l'ex-République démocratique allemande (dont 16 corvettes de la classe Parchim, devenue classe Kapitan Pattimura). La réparation et la modernisation de ces bâtiments coûtera 1 milliard de dollars américains[5]. La dénonciation de ce projet par la presse conduira le régime Soeharto à fermer 3 hebdomadaires.
Dans un communiqué de presse publié le 4 décembre 2008, l'INFID (Inter-NGO Forum on Indonesian Development), une coalition d'ONG indonésiennes, a déclaré que « l'Indonésie avait de bonnes raisons de cesser de rembourser à l'Allemagne une dette de 560 millions de dollars américains pour l'achat de 39 navires de guerres usagés et de demander la restitution des remboursements passés. » Ce point de vue a été exprimé par son directeur, M. Donatus K. Marud, le 3 décembre 2008, en soutien aux efforts déployés par le DPR (assemblée nationale) pour élaborer des recommandations destinées au gouvernement indonésien dans ses discussions avec le gouvernement allemand[6].
Flotte
Le préfixe des navires de la marine indonésienne est "KRI", qui signifie Kapal Perang Republik Indonesia ou "navire de guerre de la République d'Indonésie.
Infanterie de marine
Le corps des fusiliers marins indonésiens, le Korps Marinir, a été créée le 15 novembre 1945.
Le Pusat Penerbangan TNI AL ou Puspenerbal est l'aéronautique navale indonésienne, basée à Surabaya dans l'est de Java. Ses effectifs en 2 007 sont de 1000 hommes. Elle possède en 2008 61 appareils (dont 13 hélicoptères) pour la reconnaissance navale et les patrouilles côtières, organisés en 3 flottilles d'appareils légers, des avions de transport et des hélicoptères.
Créé en 1958, le Puspenerbal a notamment acquis en 1959 14 appareils de lutte anti-sous-marine Fairey Gannet AS4 et 2 appareils d'entraînement Fairey Gannet T5 de construction britannique. Ils ont été retirés du service en 1967.
Actuellement (2008), le matériel du Puspenerbal consiste en GAF Nomad N22 Searchmaster australiens, hélicoptères de lutte anti-sous-marine Westland Wasp britanniques et appareils PT Dirgantara Indonesia (l'Aérospatiale indonésienne) comme des avions de transport CASA et des hélicoptères Aérospatiale Super Puma et Bölkow Bo 105 C. Elle est en train d'acquérir 16 hélicoptères de lutte anti-sous-marine Aérospatiale AS565 Panther.
Elle est divisée en deux "wing udara" : la Wing Udara 1, composée des flottilles 600 et 800 et basée à Juanda à Surabaya, et la WIng Udara, constituée des flottilles 200 et 400 et basée à Tanjungpinang dans l'île de Bintan.
Flottille | Appareils | Nombre |
---|---|---|
200 | Bölkow Bo 105C | 4 |
400 | Westland Wasp Mk 1 | 9 |
600 | CN 212, Commander 100, C-47 | |
800 | GAF Nomad N22 Searchmaster | 12 |
Les bases du Puspenerbal se trouvent à :
- Sabang (Aceh,
- Surabaya (Java oriental),
- Kupang (Nusa Tenggara oriental),
- Tanjung Pinang (îles Riau,
- Manado (Sulawesi du Nord),
- Biak, (Papua),
- Matak dans les îles Anambas (îles Riau),
- îles Kai (Moluques)
- en mer de Chine du Sud,
- Pasuruan (Java oriental).
Incidents
En attendant l'entrée en fonctionnement de l'Agence de la sécurité maritime indonésienne (Badan Keamanan Laut ou Bakamla), c'est la marine indonésienne qui assure la surveillance des vastes eaux archipélagiques du pays. C'est elle qui réagit aux intrusions dans les eaux territoriales indonésiennes.
Le 18 décembre 2014, le nouveau gouvernement indonésien a décidé qu'après des années de négligence qui auraient coûté chaque année au pays 25 milliards de dollars, il prendrait des mesures radicales contre les milliers de bateaux étrangers qui pêchent illégalement dans les mers du pays[7]. Depuis l'investiture du président Joko Widodo en octobre 2014, la marine indonésienne a déjà capturé et coulé des dizaines de bateaux de pêche étrangers.
Les autorités australiennes ont reconnu que des navire de sa marine avaient par six fois violé les eaux territoriales indonésiennes du 1er décembre 2013 au 20 janvier 2014 dans le cadre de ses opérations de refoulement de bateaux d'immigrants illégaux[8].
En juin 2010, un patrouilleur indonésien arrête un groupe de bateaux de pêches chinois qui pêchaient sans autorisation dans la zone économique exclusive indonésienne au nord-ouest des îles Natuna. Deux bâtiments chinois, plus grands et mieux armés, de l'administration chinoise des pêches, ont menacé le patrouilleur indonésien de tirs si celui-ci ne relâchait pas les bateaux de pêche, affirmant que ces eaux étaient traditionnellement chinoises et déclarant ne pas les reconnaître comme partie de la ZEE indonésienne. Le patrouilleur indonésien a dû céder[9].
Ainsi le 30 mai 2009, une canonnière de la marine royale malaisienne, le KD Baung, a pénétré les eaux indonésiennes dans le secteur d'Ambalat, à la position 4° 00′ 00″ N, 118° 09′ 00″ E[10]. L'intrus a été repoussé par la corvette KRI Untung Surapati qui patrouillait dans la zone.
Le 12 octobre 2006, le KRI Pandrong, qui patrouillait en mer d'Arafura, a dû tirer 14 coups de canons contre le Chang Sun, un bateau de pêche battant pavillon du Bélize qu'il avait interpelé et qui s'enfuyait en direction de l'Australie. Le bateau, qui transportait 300 tonnes de poisson, a été conduit à Surabaya[11].
Le 19 septembre 2005, également en mer d'Arafura, à la position 8° 57′ S, 137° 17′ E, un patrouilleur indonésien a tiré sur une flottille de quatre bateaux de pêche chinois qu'il soupçonnait de pêche illégale. Un marin est mort et deux ont été blessés[12].
En mars 2005, l'Indonésie a accusé un navire de la marine royale malaisienne, le KD Renchong, de percuter un de ses patrouilleurs, le KRI Tedong Naga, également dans le secteur d'Ambalat[13].
Pour la surveillance de ses côtes et de sa zone économique exclusive (ZEE), l'Indonésie possède une « agence de la sécurité maritime », en indonésien Badan Keamanan Laut ou en acronyme Bakamla, qui dépend du président de la République. Toutefois, au 20 décembre 2014, cette agence ne possédait que 3 bateaux pour l'exécution de sa mission.
Notes et références
- Kenneth Conboy, "Indonesia confirms plans for regional commands, third fleet", IHS Jane's Defence Weekly, 1er décembre 2014"
- "TNI AL Bentuk Armada Wilayah Baru" ("La marine indonésienne forme un nouveau territoire"), tempo.co, 28 avril 2014
- Navires & Histoire n°42, juin 2007, p. 38
- GlobalSecurity.org - Reliable Security Information
- "A Harebrained Schemer Habibie Is More Mad Scientist Than Politician", Newsweek, 1er juin 1998
- Antara News, 4 décembre 2008
- Jeffrey Hutton, "Indonesia Takes Tough Stance in Fighting Illegal Fishing", The New York Times, 18 décembre 2014
- "Australian naval vessels breach Indonesian territorial waters", www.dur.ac.uk, 20 février 2014
- Denny Roy, 'Return of the Dragon: Rising China and Regional Security, Columbia University Press, New York, 2013
- "Malaysia Warship Continued Provoking Indonesia", kompas.com, 31 mai 2009
- "KRI Pandrong Tembak Kapal Berbendera Belize" ("Le Pandrong tire sur un bateau au pavillon de Belize"), www.antaranews.com, 12 octobre 2006
- USA Today 21 septembre 2005
- Wu Shicun,Zou Keyuan, Non-Traditional Security Issues and the South China Sea: Shaping a New Framework for Cooperation, Ashgate Publishing, Farnham, Royaume Uni (2014), p. 78