Girolamo Fracastoro

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Girolamo Fracastoro
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Girolamo Fracastoro, connu également sous son nom de plume latinisé Hieronymus Fracastorius ou encore sous son nom francisé de Jérôme Fracastor (né en 1478 ou 1483 à Vérone et mort à Affi le [1]), était un médecin, philosophe, poète et humaniste italien.

Il est principalement célèbre pour sa théorie sur la propagation des maladies infectieuses. C'est de l'un de ses poèmes que la syphilis tient son nom.

Biographie[modifier | modifier le code]

Né à Vérone au sein d'une famille prospère depuis plusieurs générations, Girolamo Fracastoro passe son enfance dans la propriété familiale à Affi sur les bords du lac de Garde à une vingtaine de kilomètres de Vérone[2].

Il étudie le droit à Bologne avant de rejoindre l'université de Padoue où il rencontre l'astronome Nicolas Copernic[3]. À Padoue il étudie les mathématiques, la philosophie et la médecine et une fois diplômé en 1502, il reste au moins un an à l'Université comme professeur de philosophie, pour ensuite retourner à Vérone y pratiquer la médecine avec beaucoup de succès[4]. À tel point que vers 1509 il devient le médecin personnel de celui qui deviendra en 1536 le pape Paul III, Charles Quint le consulte en 1535, ainsi que le médecin Jean Fernel au sujet de la stérilité de Catherine de Médicis. Toujours comme médecin, il assiste au concile de Trente qu'il fait déplacer à Bologne à cause de l'épidémie de peste qui sévit[5].

Il décède le des suites d'une attaque dans la maison de son enfance près du lac de Garde. Deux ans plus tard, la ville de Vérone lui rend hommage en édifiant une statue[4].

Travaux[modifier | modifier le code]

Médecine[modifier | modifier le code]

Il s'intéresse à une maladie sexuellement transmissible qui fait des ravages en Europe, la syphilis. Au XVIe siècle, cette maladie porte différents noms selon les régions, qui ont chacun pour objectif de rejeter la faute sur son voisin. Ainsi, elle est connue comme la maladie espagnole, la gale napolitaine ou encore la vérole française. À partir du XVIIe siècle, le terme de maladie vénérienne est utilisée et le terme de syphilis n'est quant à lui largement utilisé qu'à partir du XIXe siècle. Fracastoro fait la synthèse de ses travaux dans Syphilis Sive Morbus Gallicus (Syphilis, ou la maladie française) écrit en 1521[6] et qui est publié en 1530[7]. Écrit sous forme de poèmes et composé de trois livres, Fracastoro présente dans le premier tome l'apparition de la maladie et les troubles qu'elle cause, dans le deuxième les traitements possibles et l'étude du cas d'un homme qui aurait trouvé un remède par des bains de mercure[8] et enfin le troisième tome est un conte allégorique où un beau berger du nom de Syphilis (qui en grec signifie un « don d'amitié réciproque »[9]) se voit atteint d'une maladie le rendant hideux après avoir mis en colère le dieu du Soleil Apollon. Mais finalement, ce dernier est guéri par le bois de gaïac, nouveau médicament révélé[4],[10].

Portrait par Le Titien.

Son ouvrage De Contagione et Contagiosis Morbis (De la contagion et des maladies infectieuses) parait en 1546. Il y étudie plusieurs maladies et présente le diascordium, préparation à base de scordium[11].

Statue de Fracastoro édifiée par la ville de Vérone deux ans après sa mort.

Se basant sur l'étude de diverses maladies comme la syphilis, la tuberculose, la lèpre ou encore la gale, il propose une théorie sur la contagion, la théorie du contagium vivum. Théorie sur l'observation et le raisonnement, sans aucun élément scientifique à cette époque. Selon cette théorie, les maladies infectieuses se propagent via des organismes vivants (des seminaria contigionis). Pour passer d'un individu à l'autre les seminaria contigionis doivent être petits (à tel point qu'ils sont invisibles à l'œil nu) et pouvoir se reproduire. Il propose trois modes de transmissions selon les maladies[10],[9] :

  • direct : où les individus infectés par les seminaria contigionis entrent en contact direct avec des personnes saines
  • indirect : où les seminaria contigionis ont comme support l'air et divers objets qui entrent en contact avec les individus, comme c'est le cas de la tuberculose
  • à distance : où les seminaria contigionis seraient attirés par les humeurs de certains individus. Par humeur, il faut comprendre les prédispositions génétiques. Car il avait remarqué que certaines personnes d'une même famille étaient atteintes de la même maladie sur plusieurs générations et au même âge.

Bien qu'ayant utilisé un instrument optique de grossissement en 1539[12], il ne put confirmer ou infirmer scientifiquement l'existence réelle des seminaria contigionis, car à cette époque les instruments étaient encore rudimentaires. Donc cette vision totalement abstraite, théorique, ne sera pas marquante de l'époque, car allant à l'encontre de la théorie de la génération spontanée, cette dernière ayant pour fondement la médecine hippocratique, qui dominait largement. Ce n'est qu'avec l'invention du microscope optique et son utilisation en biologie par Antoni van Leeuwenhoek que les micro-organismes (alors appelés animalcules) ont été observés, confirmant ainsi l'intuition de Fracastor, mais également celle de Ibn al-Khatib deux siècles plus tôt, et les résultats expérimentaux de Louis Pasteur. Les travaux de ces trois hommes ont posé les bases de l'épidémiologie[10],[5].

Ses travaux l'amènent à donner des conseils de santé publique dans De Contagione et Contagiosis Morbis, tels qu'être « dans une maison propre et aérée, pas trop chaude pour que les pores de la peau ne s’ouvrent pas trop ». Cette notion de chaleur est interprétée faussement en perpétuant l'idée que la toilette à l'eau chaude favorisait l'entrée des miasmes dans le corps par la dilatation des pores sous l'effet de la chaleur[13].

Astronomie[modifier | modifier le code]

Il s'intéresse également à l'astronomie et est l'auteur en 1538 de Homocentricorum Sive De Stellis Liber (Homocentricité, ou le livre des étoiles), dans lequel il développe un vaste système de 77 ou 79 sphères homocentriques[14] (théorie initiée par Eudoxe de Cnide avec beaucoup moins de sphères). Ce modèle n'est pas aussi révolutionnaire que celui de Nicolas Copernic dans son ouvrage Des révolutions des sphères célestes qui initie l'héliocentrisme[4]. Il observe, indépendamment de l'astronome allemand Petrus Apianus, que la queue des comètes est orientée à l'opposé du Soleil, mettant ainsi en évidence l'effet des vents solaires[15].

Œuvres[modifier | modifier le code]

Poemata omnia, 1718
  • (la) Syphilidis, sive Morbi Gallici (1530) et traduit dans plusieurs langues, notamment en français en 1753 par Philippe Macquer et Jacques Lacombe. (Le poème de 1840 de Barthelémy n'est pas une adaptation en vers de celui de Fracastor, mais un poème original, ayant le même sujet.)
  • (la) Di Vini Temperatura (1534)..
  • (la) Homocentricorum sive de Stellis, de Causis Criticorum Dierum Libellus (1535)
  • (la) Homocentrica (1538).
  • (la) De Contagione et Contagiosis Morbis (1546).
  • (la) De sympathia et antipathia rerum (1546).
  • (la) Syphilis sive de morbo gallico (1539, poème).
  • (la) Opera omnia : quorum nomina sequens pagina plenius indicat, [Reprod.], apud juntas (Venetiis), (1584), lire en ligne sur Gallica.
  • (la) Operum pars prior [philosophica & medica continens quorum elenchum pagina sequens indicat] (1591).

Il avait aussi entrepris un poème latin en trois chants sur Joseph, qui est resté inachevé. Francesco Luigini a ajouté un troisieme chant au poème. Luigi, son frère, le publia en 1569 à Venise, avec une préface, et il a été réimprimé dans l’édition des œuvres de Frascatoro, donnée par Volpi, Padoue, 1739, in-4°.

  • Les Trois livres de Jérôme Fracastor sur la contagion, les maladies contagieuses et leur traitement. Paris : Société d'éditions scientifiques. 1893.

Ses Œuvres complètes ont été publiées à Venise, 1555.

Ses Poésies latines ont paru à part, Padoue, 1728 : on y remarque un poème De cura canum venaticorum.

Le célèbre biologiste américain Stephen Jay Gould, lui a consacré l'un de ses articles, dans lequel il confesse que Girolamo Fracastoro est l'un de ses auteurs favoris[16].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. «octavo Idus Augusti MDLIII.» (Vita: Opera omnia,1555; 1574; 1584); pour convertir la date voyez ici.
  2. (en) Brook Hall, Science and Its Times, vol. 3 : 1450-1699, The Gale Group, (ISBN 0-7876-3937-0), « Girolamo Fracastoro - 1478?-1553 - Italian Physician », p. 184.
  3. « Girolamo Fracastoro », Encyclopædia Britannica, (consulté le ).
  4. a b c et d (en) John Galbraith Simmons, Doctors and DiscoveriesLives That Created Today's Medicine, Houghton Mifflin, , 448 p. (ISBN 0-618-15276-8, lire en ligne), « Girolamo Fracastoro - A Poem About Syphilis, A Theory Of Contagion », p. 127.
  5. a et b Claude Brezinski, Histoires de sciences : Inventions, découvertes et savants, Paris/Budapest/Torino etc., L'Harmattan, , 278 p., Broché (ISBN 2-296-00350-8, lire en ligne), p. 125.
  6. Girolamo Fracastoro, Encyclopædia Universalis.
  7. « La Syphilis ou le mal français / Syphilis sive morbus gallicus », sur Lesbelleslettres.com.
  8. qui est un produit toxique pour l'Homme.
  9. a et b Patrick Berche, Une histoire des microbes, Montrouge, John Libbey Eurotext, , 278 p. (ISBN 978-2-7420-0674-8 et 2-7420-0674-5, présentation en ligne), p. 37.
  10. a b et c « Girolamo Fracastoro dit Fracastor », sur Medarus (consulté le ).
  11. « Encyclopédie ou dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers », sur Université de Chicago (consulté le ).
  12. Berche 2007, p. 20.
  13. Gaël Le Vacon, « Histoire de l'hygiène », (consulté le ), p. 6.
  14. (en) James M. Lattis, Between Copernicus and Galileo, University of Chicago Press, , 314 p. (ISBN 0-226-46927-1, présentation en ligne), p. 93 et 94.
  15. (en) Andrew Pettegree, The Reformation World, London/New York, Routledge, , 600 p., Broché (ISBN 0-415-16357-9, présentation en ligne), p. 531.
  16. (en) Stephen Jay Gould, « Syphilis and the Shepherd of Atlantis, Renaissance poem about syphilis attempts to explain its origin, genetic map revealed in 1998 », Natural History, 109 (October): 38-42, p. 74-82. (en ligne, en anglais), repris dans le recueil Cette vision de la vie (I Have Landed: The End of a Beginning in Natural History) (2002), (ISBN 0609601431).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]