Armorique

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L'Armorique, avec la Loire et la Seine en rouge.

Armorique est un nom propre d'origine gauloise qui désigne depuis l'Antiquité classique le territoire située entre la Loire et la Seine[1]. Les auteurs de la fin de la République et du début de l'Empire romain la présentent comme peuplée par sept tribus gauloises dont Jules César donne la liste. Les Armoricains pourraient avoir constitué une confédération de peuples rivale de celle des Vénètes.

Après la conquête, l'empire romain n'a pas repris cette division dans son découpage provincial (Belgique, Lyonnaise, Aquitaine) de la Gaule. Mais au IVe siècle, face aux menaces venues de la mer, est créé un secteur militaire, le Tractus Armoricanus et Nervicanus comprenant les territoires littoraux de l'embouchure de la Somme à celle de la Garonne[2].

Attestations anciennes des termes Armorique et Armoricain

Dans le dictionnaire français-latin de référence « Gaffiot » (Hachette, 1934), l’entrée « Armoric- » renvoie à « Aremoric- » où l'on trouve :

  • Aremorica, -ae, féminin, l’Armorique (province occidentale de la Gaule), Pline 4, 105
  • Aremoricus, -a, -um, de l’Armorique, César, G., 5, 53
  • Aremoricanus, -a, -um (décadent).

Donc, selon Félix Gaffiot, la forme normale en latin pour Armorique est Aremorica, tandis qu’Armorica est une variante contractée. En ce qui concerne les références littéraires disponibles, on trouve les énoncés suivants (dans l’ordre chronologique)

« In his ab Lucio Roscio, quem legioni tertiae decimae praefecerat, certior factus est magnas Gallorum copias earum civitatum, quae Armoricae appellantur, oppugnandi sui causa convenisse neque longius milia passuum octo ab hibernis suis afuisse, sed nuntio allato de victoria Caesaris discessisse, adeo ut fugae similis discessus videretur. »

« Il apprit notamment de Lucius Roscius, qu’il avait mis à la tête de la treizième légion, que des forces gauloises importantes, appartenant aux cités qu’on nomme Armoricaines, s’étaient réunies pour l’attaquer et étaient venues jusqu’à huit miles de son camp, mais qu’à l’annonce de la victoire de César elles s’étaient retirées avec tant de hâte que leur retraite ressemblait à une fuite. »

  • César, ibid°, VII, 75 (il s’agit des contingents demandés pour apporter de l’aide à Vercingétorix assiégé dans Alésia) :

«  [XXX milia] universis civitatibus, quae Oceanum attingunt quaeque eorum consuetudine Armoricae appellantur, quo sunt in numero Curiosolites, Redones, Ambibarii, Caletes, Osismi[3], Lemovices, Venelli. »

«  trente mille (hommes demandés) à l’ensemble des peuples qui bordent l’Océan et qui selon leur habitude se donnent le nom d’Armoricains : Coriosolites, Redons, Ambibarii, Calètes, Osismes, Lémovices, Unelles. »

Étymologie

Cette partie maritime de la Gaule avec son arrière-pays se nommait alors en celtique continental ou gaulois Aremorica « le pays qui fait face à la mer », le pays des Aremorici « ceux qui habitent devant la mer, près de la mer » : Armorica est la latinisation de ce terme[4],[5].

On peut distinguer les trois éléments celtiques suivants :

  • are issu de l’indo-européen p°ri- « devant, auprès » (cf. irlandais air, ar, sur / devant ; gallois er, sur / à / pour ; breton war ou ar, sur),
  • mori « mer » (irlandais muir, génitif mara ; thème en « i » ; gallois et breton : mor, d'où le composé armor « pays de la mer » cf. Côtes-d'Armor, avec mutation de /m/ à /v/ caractéristique des langues celtiques modernes)
  • suffixe -iko- (pluriel -ici « ceux qui ») comme dans Mediomatrici, Arecomici, Latobici, etc. et -ika qui sert à créer des substantifs que l'on retrouve dans des noms de pays Utica (pays d'Ouche), Pertica (Perche), etc.

« Aremorici : antemorini quia are ante, more mare, morici marini. »

— Glossaire d'Endlicher, bibliothécaire de la Bibliothèque Palatine, Vienne, Autriche, 1836

« Aremorici, antemarini quia are ante ; cf. arm. mod. « arvor ». »

— Joseph Loth, Chrestomathie bretonne, armoricain, gallois, cornique, Paris, Émile Bouillon Libraire-éditeur, 1890

« Aremorici, (tardif : armorici) « antemarini », var. aremurici (Glossaire de Vienne) ; irl. « air », gall. bret. « ar- » « sur ». »

— Georges Dottin, La Langue gauloise, grammaire, texte et glossaire, Paris, C.Klincksieck, 1920

« En gaulois "Aremorica", anciennement "Paremorica", "le (pays) devant la mer", nom de la péninsule qui deviendra la Bretagne. Étaient dits aussi Armoricains à l'époque de César, les peuples riverains de la Manche. »

— Paul-Marie Duval, Les Celtes, Gallimard, Paris, 1977

Premières populations celtiques

Les peuples du nord-ouest de la Gaule

Les géographes grecs Posidonios et Strabon décrivent les Armoricains comme issus du groupe des Gaulois belges ayant peut-être été contraints à émigrer en raison de l'invasion de Germains cisrhénans en Gaule Belgique (voir également enclos belges ou picards)[6]. L'ethnonyme des peuples Aulerques qui signifierait « au large » ou « au loin » en serait un témoignage. L'exemple des Aulerques Éburovices et son rapprochement avec le nom des Éburons suggérerait aussi cette interprétation. Les fouilles archéologiques du sanctuaire de Ribemont montrent qu'effectivement vers -250 une invasion de Germains cisrhénans (Germani Cisrhenani) de très grande ampleur a provoqué le refoulement en masse des autochtones Belges.

Le terme Armorique désignait pour César, Guerre des Gaules, VII, 75, les territoires de l'Ouest de la Gaule, riverains de l'Océan et de la Manche, occupés par les peuples suivants :

Il ne mentionne pas dans sa liste les Vénètes (région de Vannes) et les Namnètes (région de Nantes), peuples qu'il connaît pourtant bien[7]. Il s'ensuit que l'Armorique de César ne recouvre pas exactement le futur duché de Bretagne, puisqu'il englobe le diocèse de Coutances, mais exclut ceux de Vannes et de Nantes.

  • les Viducasses (région de Vire) et les Baïocasses (région de Bayeux) ne sont pas mentionnés par César. Ils n'apparaissent dans les textes qu'après la conquête romaine. Là encore, on peut en déduire que leur pagus a été créé après la conquête romaine, à partir des territoires des Unelles et des Lexoviens[réf. nécessaire].

À l'ouest, les Osismes (celtique Osismii), que le navigateur grec Pythéas connaît sous le nom d'Ostimioi, et dont le nom signifie « les plus hauts » ou « ceux du bout du monde ».

Dans la période précédant la conquête romaine, les Lexoviens étaient gouvernés comme les Vénètes par un Sénat.

Au nord et à l’est de l'actuelle Bretagne se trouvaient les Coriosolites, « Coriosolitae » en latin. Leur nom comporte la racine Corio, « armée ». Ils résidaient dans l'est des actuelles Côtes-d'Armor et donnèrent leur nom à la ville de Corseul. Leur capitale fut Arvii puis Corseul (Fanum Martis en latin). Les Riedones qui demeuraient dans l'actuel Ille-et-Vilaine donnèrent leur nom aux villes de Rennes et Redon.

Au sud de la Normandie actuelle se trouvaient les Bajocasses, capitale Augustodurum - Bayeux - et les Abrincates, nommés en celtique Abrincatui ou Ambivariti par Pline l'Ancien) qui ont donné leur nom à Avranches, qu'ils sont supposés avoir bâtie. Au IXe siècle av. J.-C., ils occupent cette ville prospère de l'époque, qui, à la suite de l'invasion des Romains, va changer de statut et se développer. Au nord de la Normandie actuelle il y avait les Unelles, dans le Cotentin, dont le chef-lieu était Cosedia (aujourd'hui Coutances) et les Lexoviens (en celtique Lexovii) qui étaient établis au sud de l'embouchure de la Seine, le long de la côte normande. Ils donnèrent leur nom à Lisieux devenue cité romaine sous son nom gaulois de Noviomagus (le nouveau marché) et au Lieuvin. Encore aujourd'hui, on nomme les habitants de Lisieux, les Lexoviens. On trouve aussi les Esuvii (Bessin et pays de Séez), les Viducasses (Vieux-la-Romaine au sud-ouest de Caen), les Calètes, pays de Caux, dont la capitale est fondée à Lillebonne à l'époque romaine (du celtique Caleti = « les durs », « les vaillants »[8]), les Andecavi, (Anjou), les Diablintes, sur le Maine oriental avec Jublains en Mayenne, les Cenomanni avec Le Mans, les Aulerci Eburovices avec Évreux, les Véliocasses avec Rouen, les Arves dans la Sarthe et Argentan.

Époque gallo-romaine

La conquête romaine

Les prétextes d'intervention furent tout trouvés quand des peuples gaulois, alliés des Romains, les Séquanes et les Éduens, demandèrent aux Romains, en toute inconscience du danger, de bien vouloir intervenir pour s'opposer à l'arrivée massive du peuple des Helvètes qui venaient de quitter leur territoire au nombre de 368 000 avec toutes leurs familles au complet à la suite du vote d'une loi pour leur départ et après avoir incendié et détruit tous leurs biens en Helvétie afin de rendre ce départ définitif. Les Helvètes souhaitaient échapper ainsi à une invasion de leur territoire par les Germains, sans doute déjà, les Germains d'Arioviste. Les Romains attaquèrent les Helvètes et les massacrèrent sur les bords de la Saône. Les rescapés retournèrent en Helvétie.

Un peu plus tard, en 58 av. J.-C., le Conseil des Gaules, qui regroupait les plus grands chefs des tribus gauloises demanda à César d'intervenir contre Arioviste et ses troupes de Germains qui s'étaient installés chez les Séquanes et menaçaient de faire de même chez les Éduens. Les légions romaines de César écrasèrent les Germains d'Arioviste près du Rhin et passèrent l'hiver chez les Séquanes Jusque-là, César se comportait en protecteur de la Gaule contre des peuples qui l'agressaient. Tout allait bien dans le meilleur des mondes celtiques et les peuples gaulois amis des Romains n'avaient qu'à se féliciter de l'efficacité d'un protecteur aussi puissant[réf. nécessaire].

Mais en -57, César changea complètement son attitude de défenseur de la Gaule contre les attaques des Germains : il lança soudainement une campagne contre la puissante Confédération des peuples belges puis contre la Confédération des peuples armoricains. C'en était fait de l'indépendance gauloise. La guerre de conquête de la Gaule avait commencé et fut menée à son terme jusqu'à l'asservissement de la Gaule tout entière. Pline l'Ancien, dans le livre VII de son Histoire Naturelle (§ 91-99), évalue à 1 200 000 morts les pertes subies par les peuples gaulois à seule fin de la conquête de la Gaule par Jules César. « Je ne peux placer parmi ses titres de gloire, écrit Pline l'Ancien, un si grave outrage fait au genre humain ». Plutarque, pour sa part, (dans Pompée 67,10, et César 15,5) retient le nombre de 1 000 000 de morts et de 1 000 000 de prisonniers emmenés pour servir d'esclaves. Selon les commentateurs, le prix des esclaves à Rome s'effondra à cette époque, lors des arrivées massives d'esclaves gaulois.

Jules César profitera des divisions entre Gaulois et de la complicité des peuples gaulois pro-romains qui lui fournissent des ressources, les Rémes, contre les autres Belges, les Pictons et Santons :

« Les Pictons étaient hostiles aux Vénètes comme on peut le déduire de leur liaison avec le Proconsul Julius Caesar dès sa première campagne[9] et des navires construits ou fournis aux Romains par eux, par les Santons et d'autres peuples gaulois pour leur faciliter la ruine des Vénètes. »

— César, Guerre des Gaules, III, 11.

En Armorique, en 56 av. J.-C., les navires de Jules César fournis par d'autres peuples gaulois détruisent la flotte vénète au cours de la bataille du Morbihan. Jules César rapporte qu'après la bataille, le « sénat » de ce peuple est mis à mort et le reste vendu à l'encan. De Bello Gallico de Jules César est à lire avec précaution car c'est avant tout un plaidoyer pro domo et, bien que son témoignage soit précieux et irremplaçable, il s'y met en valeur, avec le peuple romain, pour montrer sa toute-puissance de chef militaire sur le destin des peuples vaincus.

Les Romains donnèrent le nom d'Armorique à un grand commandement militaire « Tractus Armoricanus » embrassant un groupe considérables de peuples qui tous paraissent avoir été jadis membres de la Confédération Armoricaine. Julius Caésar s'exprime ainsi :

« … Toutes les cités armoricaines voisines de l'océan qui se donnent le nom d'Armoricains (Aremorici) et au nombre desquels figurent les Coriosolites, les Riedones, les Ambibarii, les Calètes, les Osismes, les Lémovices[10], les Vénètes, les Unelles, devaient fournir 6000 hommes. »

— César, Guerre des Gaules, VII, page 35.

Romanisation de la région

Comme dans toutes les régions de l'Empire, les Romains employèrent en Armorique une politique de diffusion de leur propre culture au sein des élites locales. L'accès à la citoyenneté romaine (exemple de Titus Flavius Postuminus à Rennes) et l'ouverture de possibilités d'ascension sociale étaient conditionnés à la connaissance du latin et à l'acceptation des coutumes romaines. Ceci contribua, par effet de tache d'huile, à romaniser la région.

Il est certain que l'Armorique du Haut-Empire était, par son économie développée et sa population abondante, parfaitement intégrée à l'Empire romain, mais que cette romanisation était limitée comme le montre la faible présence de l'épigraphie latine dans la région. L'étude anthroponyme montre qu'à cette époque, les habitants de l'Armorique portaient encore des noms purement celtiques (tels « Moricus », « Smertulitanus », « Rextugenos », « Vertros », etc.).

La conquête ne modifia donc pas fondamentalement les structures de la société et le latin ne pénétra pas ailleurs que dans les villes, où se concentrait la faible population allogène. Lors de l'évangélisation de la région, les rusticani (???) étaient encore très fortement attachés à leur culture ancestrale, malgré une indiscutable évolution technique liée à la romanisation, et ils constituèrent une grande partie de l'opposition à l'Église.

Après l'appel de légionnaires bretons (insulaires) par les Romains chargés de défendre la péninsule contre les pirates germaniques, puis après l'immigration de Bretons fuyant les attaques et les tentatives de colonisation des Irlandais sur l'ouest de l'île de Bretagne, une partie de l'Armorique maritime fut appelée Petite Bretagne (Britannia minor) puis simplement Bretagne.

Haut Moyen Âge

La christianisation de l'Armorique

« La première christianisation de l'Armorique s’est faite de deux façons. Elle a commencé au IVe siècle par le sud-est (…) en transitant notamment par Lyon, puis Tours (…) ; dans les diocèses de Nantes et Rennes, il y a 84 églises dédiées à saint Martin, contre 7 plus à l'ouest. Elle ne s'était pas encore imposée en Armorique occidentale, éloignée et peu urbanisée, quand sont arrivés de Grande-Bretagne, du IVe siècle au VIIe siècle, des Bretons déjà christianisés et encadrés par des moines[11]. Ces Bretons sont venus en colonisateurs missionnaires, par petits groupes sous la conduite de chefs socio-religieux (...). Ce qui caractérise le pays breton (surtout sa partie occidentale), c’est le grand nombre de moines et d’ermites[12] (…). L’opinion révère ces moines fondateurs, modèles de piété (…). On ne sait pas grand-chose sur eux. Mais tous ne furent pas évêques. (...) Les communautés paroissiales étaient presque partout assez dépendantes des évêques (…) ; elles avaient, aussi bien que les évêchés, leurs saints fondateurs, notamment celles dont le nom commence par Gui ou par Plou (...). Les premiers chrétiens se disaient « saints » pour se distinguer des païens et signifier qu’ils étaient consacrés à Dieu »[13].

La migration des Britons

Établissements bretons au VIe siècle.

Léon Fleuriot a émis l'hypothèse que l'émigration bretonne en provenance des îles Britanniques ait pu avoir lieu également sur tout le territoire correspondant à l'actuelle Normandie, notamment dans le Cotentin et le département du Calvados - particulièrement dans la région autour de Caen. Cependant, cette théorie n'est pas reprise depuis par les spécialistes et aucun élément archéologique ou linguistique n'est venu confirmer ses affirmations. Les liens du territoire qui devint plus tard la Normandie avec l’île de Bretagne avaient toujours été des plus étroits[14].

Ce qui deviendra la Normandie actuelle a été particulièrement riche en saints bretons : sa côte faisant face à celle de la Grande-Bretagne, il serait invraisemblable que les immigrés des Ve siècle et VIe siècle aient évité systématiquement ses rivages. Saint Patrick, saint irlandais d'origine bretonne (né en Bretagne insulaire) est honoré dans plus de six paroisses normandes. Saint Méen dans trois d’entre elles. L’exemption de Sainte-Mère-Église est une enclave de cinq paroisses du Diocèse de Bayeux[15] survivance d’un ancien monastère de Saint Méen (forme bretonne moderne Mewen, cornique Mewan). Sainte Anne, Saint Armel, Saint Aubin[16], Saint Méen et Saint Samson sont honorés dans de nombreux lieux de Normandie. Le nombre de toponymes évoquant le culte de saints bretons en Normandie est remarquable, comme Saint-Maclou curieusement latinisé en Macutus, et qui n'est autre que Saint-Malo :

Ou encore Saint-Turiaf (évêque de Dol au VIIIe siècle), devenu Saint-Thurien (Eure, Sainct Turioult en 1376, Sanctus Thuriavus 1566).

Quatre paroisses situées à l'embouchure de la Seine, en plus du monastère de Pentale-Saint-Samson (Pental=Talben, pen=tête, tal=front), restèrent dépendantes de l’évêché de la métropole de Dol en tant qu’enclaves de Neustrie et des bords de la Seine, comme exemption de Dol, jusque 1790 :

La métropole bretonne de Dol-de-Bretagne était la plus ancienne et la plus importante abbaye-évêché bretonne de type celtique datant des premiers temps de l'émigration.

Le morcellement et la grande étendue des possessions et dépendances du diocèse de Dol, qui est le seul diocèse breton dans ce cas (ce qui prouve son ancienneté et son importance) s'explique par la dispersion des premières colonies bretonnes des premiers temps de l'émigration des Ve et VIe siècles, dont elle avait la charge et pour lesquelles elle devait être un grand centre spirituel, sur les côtes de la Bretagne et la Normandie actuelles. Le Havre, à l'embouchure de la Seine, fut aussi un grand centre d'émigration bretonne, dans la deuxième moitié du XIXe siècle et la première moitié du XXe siècle, notamment par bateau à vapeur au départ de Morlaix.

Si l'on compte aussi la participation de nombreux nobles bretons à la bataille de Hastings le et à la conquête de l'Angleterre avec l'armée normande de Guillaume le Conquérant, cela fait un ensemble de liens historiques et culturels communs très anciens et très nombreux entre les deux parties les plus importantes de l'ancienne Aremorica que sont la Bretagne et la Normandie actuelles.

Époque contemporaine

Le nom propre Armorique, et l'adjectif armoricain sont restés courants dans plusieurs emplois :

  • comme synonyme de « Bretagne », notamment dans certains guides touristiques et livres d'histoire ;
  • dans des désignations géographiques comme le « Massif armoricain » pour le relief montagneux qui s'étend de l’ouest de la Normandie, au Maine, en passant par la Bretagne jusqu’à la Vendée, comme « péninsule armoricaine » ;
  • dans des désignations culturelles comme la « sauce armoricaine » ;
  • pour désigner une région côtière comme dans le nouveau nom des Côtes-d'Armor donné au département des Côtes-du-Nord, sachant qu'il existe en Bretagne de nombreux toponymes « Armor » en Bretagne, par opposition à l’« Argoat » (koad « bois ») désignant le pays de l'intérieur, le pays des forêts.

Notes et références

  1. (en) Bernard S. Bachrach, Merovingian Military Organization, 481-751, U of Minnesota Press, (ISBN 9780816657001, lire en ligne), p. 10
  2. Félix Le Royer de La Sauvagère, "Recueil d'antiquités dans les Gaules, enrichi...", p. 298-303, Paris, 1770. Lire en ligne
  3. Le site utilisé pour cette citation latine C. IVLI CAESARIS COMMENTARIORVM DE BELLO GALLICO LIBER SEPTIMVS indique les Veneti, mais il semble que ce peuple soit absent de la liste.
  4. I.C.Zeuss, GRAMMATICA CELTICA e monumentis vetustis tam Hibernicae linguae quam Britannicarum dialectorum Cambriacae Cornicae Aremoricae comparatis Gallicae priscae reliquis construxit I.C.Zeuss, Phil.DrHist.Prof., editio altera curavit. H.Ebel,.Ph.Dr, Acad.Reg.Hib.Soc.Hon., Acad.Reg.Boruss.Adi.Comm.Epist. Berolini, Apud Weidmannos MDCCCLXXI (1871)
  5. Franz Bopp, Grammaire comparée des langues indo-européennes traduction de Michel Bréal de l'École pratique des hautes études et du Collège de France (de 1866 à 1905), membre de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, quatre tome in-quarto, Paris, Imprimerie impériale et Imprimerie nationale, 1866-1874
  6. Tacite explique, sous l'effet de migrations germaniques : "Les premiers [Germains] qui passèrent le Rhin et chassèrent les Gaulois, et qui maintenant se nomment Tongres, se nommèrent alors Germains. Ce nom, borné d'abord à une simple tribu, s'étendit peu à peu, et, créé par la victoire pour inspirer plus de crainte, il fut bientôt adopté par la nation tout entière", Tacite, Mœurs des Germains II.
  7. a et b Vinceslas Kruta, Les Celtes, Histoire et dictionnaire, Paris, Robert Laffont, 2000, Ve Armorique, page 427.
  8. Gallois : caled, vieil-irlandais : calath, « héroïque », breton : kalet
  9. César, Guerre des Gaules, VIII, 26
  10. À noter que les Lémovices est le nom des Gaulois installés dans l'actuel Limousin, ce qui donne une idée large de l'Armorique.
  11. Ces Bretons venaient principalement du Devon et de Cornouailles, où vivaient des peuples nommés Dumnonii et Cornovii, qui ont donné leur nom à la Bretagne du nord (Domnonée) et du sud-ouest (Cornouaille)
  12. Ces ermites et moines vivent en des endroits nommés lan : il y en a 260 en Léon et 207 en Cornouaille finistérienne
  13. Jean Rohou, "Catholiques et Bretons toujours ? (essai sur l'histoire du christianisme en Bretagne)", éditions Dialogues, Brest, 2012, (ISBN 978-2-918135-37-1)
  14. Camille Jullian Hist. de la Gaule
  15. Il s'agit de Sainte-Mère-Église, Neuville-au-Plain, Chef-du-Pont, Vierville et Lieusaint, dont on notera qu'aucune église paroissiale n'est sous le vocable d'un saint breton, voire celtique et dont aucun toponyme n'est d'origine bretonne, ce qui est tout de même curieux si l'on accepte cette théorie. Il n'y en a d'ailleurs aucun dans tout le département de la Manche, ni même ailleurs en Normandie. Cf. François de Beaurepaire, Les Noms des communes et des anciennes paroisses de la Manche, p. 21, 42 et 44, éditions Picard 1986.
  16. Dans la plupart des cas, il s'agit d'une référence à Saint Aubin en tant qu'évêque d'Angers au VIe siècle, sans rapport avec l'origine bretonne du personnage.

Voir aussi

Bibliographie

Toute l'histoire de Bretagne, chapitre La civilisation de l'Armorique Romaine, de Paul Boutouiller, Jacques Briard, Christian Brunel, Corentin Canévet, Sébastien Carney, Jean-Christophe Cassard, Yves-Pascal Castel, Patrick Galliou, Claude Geslin, Pierre Grall, Jean Kerhervé, Pierre-Yves Le Rhun, Jean-Jacques Monnier, Alain Pennec, Yann-Ber Piriou, Charles Robert, Jean Tanguy, Jean-Yves Veillard, éditions Skol Vreizh.

  • Eugène Halléguen, L'Armorique bretonne celtique, romaine et chrétienne ou les origines armorico-bretonnes, 2 volumes, Paris : Durand/Didier, 1864-1872.

Articles connexes

Liens externes