Aller au contenu

Horloge atomique

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Ceci est une version archivée de cette page, en date du 24 octobre 2021 à 13:33 et modifiée en dernier par CodexBot (discuter | contributions). Elle peut contenir des erreurs, des inexactitudes ou des contenus vandalisés non présents dans la version actuelle.
Horloge atomique
Type
Invention
Date
Horloge atomique commerciale à césium ayant servi à réaliser le temps légal français dans les années 1980 et comme référence pour l'horloge parlante.
Horloge atomique à césium, vue interne.

Une horloge atomique est une horloge qui utilise la pérennité et l'immuabilité de la fréquence du rayonnement électromagnétique émis par un électron lors du passage d'un niveau d'énergie à un autre pour assurer l'exactitude et la stabilité du signal oscillant qu'elle produit. Un de ses principaux usages est le maintien du temps atomique international (TAI) et la distribution du temps universel coordonné (UTC) qui sont les échelles de temps de référence.

Histoire

L'horloge atomique est apparue au vingtième siècle.

En 1955, Louis Essen et Jack Parry, avec le National Physical Laboratory (NPL), prototypent une horloge atomique à une fréquence de 9 192 631 830 ± 10 cycles par seconde soit une erreur de l’ordre de 1s sur 30 ans.

En 1967, la treizième Conférence Générale des Poids et Mesures décide :

« La seconde est la durée exacte de 9 192 631 770 oscillations (ou périodes) de la transition entre les niveaux hyperfins de l’état fondamental de l’atome de 133Cs (atome au repos T=0K) »

— CGPM

Aujourd'hui, les horloges atomiques ont été transformées en horloges optiques et sont suffisamment précises pour que la mesure du temps soit influencée par une variation d'altitude de 30 centimètres de par l'effet gravitationnel dit de la théorie de la relativité générale[1]. De ce fait, le césium peut ne plus constituer une référence suffisamment précise.

Principe de fonctionnement

Introduction aux processus de transitions entre niveaux atomiques

Processus énergétiques atomiques

La stabilité des raies spectrales atomiques avait déjà été remarquée par Lord Kelvin en 1879[2].

Un atome passe d'un état excité d'énergie E2 à un état plus stable d'énergie inférieure E1 par l'émission spontanée d'un photon de fréquence :

où h = 6,626 070 040(81) × 10−34 J.s = 4,135 667 662(25) × 10−15 eV.s est la constante de Planck.

À l'inverse, un atome dans un état plus stable d'énergie E1 passera à un état excité d'énergie supérieure E2 par l'absorption d'un photon de fréquence ν = (E2E1)/h = ΔE/h.

On connaît aussi le principe d'émission stimulée consistant pour un atome à passer d'un état d'énergie excité vers un état plus stable après la rencontre d'un autre photon. L'énergie de l'atome sera alors dissipée par l'émission d'un autre photon qui possédera les mêmes caractéristiques que le photon initiateur.

Il existe également une probabilité non nulle pour qu'un atome se trouvant dans un état excité redescende dans un état plus stable et plus faible par un processus de désexcitation non radiative, c'est-à-dire sans émettre de photon. Le système devant alors satisfaire à la relation de conservation de l'énergie, il en résultera soit un échauffement de l'atome, soit un transfert de quantité de mouvement.

Ces processus atomiques élémentaires, dont la théorie a été développée en partie par Albert Einstein, vont être à la base de toute l'interaction permettant d'élaborer un étalon atomique de mesure du temps.

Notion de structure fine et hyperfine

L'observation à haute résolution des raies lumineuses d'un spectre d'émission ou d'absorption met en évidence la présence d'une superposition de plusieurs composantes au sein d'une même raie.

Une raie principale est donnée par le nombre quantique principal n caractérisant les états propres des fonctions d'onde de ses orbitales électroniques. Dans un même niveau quantique principal, la théorie va donner une série de sous-niveaux quantiques correspondant à des états quantiques dégénérés qui vont être créés par les diverses interactions physiques au sein de l'atome (interaction spin–orbite, effets de volume, effets de masse, etc.). Ces sous-niveaux sont en fait la cause de la structure composée de la raie principale observée dans le spectre. On parle alors de structure fine, voire hyperfine pour certains atomes dans des conditions particulières de champ magnétique.

Exemple de l'horloge atomique à jet de césium 133

Fonctionnement

L'horloge atomique à fontaine d'atomes de césium NIST-F1 (en). Cette horloge est l'étalon primaire de temps et de fréquence des États-Unis, avec une incertitude de 5,10 × 10−16 (en 2005).

Un système physique, ici une enceinte chauffée contenant du césium, permet de créer un jet d'atomes.

Dans ce jet, seuls les atomes correspondant à l'état d'énergie initiale désiré, ici E1, sont conservés (la sélection se faisant par déflexion grâce à un champ magnétique).

Un oscillateur à quartz (produisant un signal à 10 MHz) est multiplié afin de piloter un générateur micro-ondes à une fréquence ν′ (voisine de ν). Ce signal est ensuite injecté dans une cavité résonante dite de Ramsey.

Le jet d'atomes dans l'état E1 passe dans la cavité de Ramsey : plus la fréquence ν′ sera proche de ν, plus grand sera le nombre d'atomes qui, par absorption de l'onde, subiront la transition vers l'état E2.

À la sortie, le jet atomique subit une seconde déflexion magnétique qui sépare les atomes dans l'état E2 de ceux dans l'état E1.

Un détecteur, placé dans la trajectoire des atomes dans l'état E2, produit un signal proportionnel au nombre de ces atomes. Plus ν′ est proche de ν, plus le nombre d'atomes E2 compté en sortie est grand.

Un système d'asservissement ajuste en permanence la fréquence de l'oscillateur à quartz pour maximiser le nombre d'atomes dans l'état E2, et donc conserver la fréquence de l'oscillateur proche de la fréquence optimale. La fréquence de l'oscillateur est ainsi asservie à la fréquence de la transition atomique.

Dans le cas du césium, la fréquence ν est de 9 192 631 770 Hz. Cette valeur est exacte puisque c'est celle utilisée pour définir tout à la fois la seconde et son inverse le hertz.

Le comptage du temps est ensuite assuré par une division des oscillations de l'oscillateur à quartz, associé à un circuit électronique affichant par exemple l'heure comme dans une montre à quartz.

Les oscillations peuvent aussi être utilisées directement pour piloter des dispositifs ou équipements nécessitant une fréquence de fonctionnement stable.

Performances

Les meilleures horloges au césium (en 2013) parviennent à une stabilité de l'ordre de 1 × 10−14 s.s−1, et atteignent 2 × 10−16 s.s−1 après plusieurs jours de fonctionnement[3]. Ceci signifie que l'horloge dérive de 2 × 10−16 seconde en une seconde, ce qui est souvent vulgarisé en donnant le nombre d'années nécessaire pour qu'une horloge dérive d'une seconde complète, dans ce cas une seconde en 160 millions d'années.

Applications

Le temps atomique international est la référence mondiale fondée sur la définition de la seconde atomique, calculée au Bureau international des poids et mesures à Sèvres, en faisant la moyenne d'environ 500 horloges atomiques (en 2016) réparties dans plus de 70 laboratoires dans le monde[4]. Ces horloges de référence sont majoritairement du type atomique au césium, d'autres fonctionnant au rubidium ou avec un maser à hydrogène[5].

En France, le temps légal est généré par le Laboratoire national de métrologie et d'essais - Système de références temps–espace (LNE-SYRTE) situé à l'Observatoire de Paris. Il repose sur les lectures d'une centaine d'instruments dont en particulier six horloges au césium et quatre masers actifs à hydrogène[6].

Les horloges atomiques sont également employées dans les systèmes de positionnement par satellites. Ainsi, les satellites des constellations du GPS, du système GLONASS ou ceux du programme Galileo embarquent chacun plusieurs horloges atomiques, jusqu'à quatre pour les satellites GPS.

Les deux satellites GIOVE de test du système Galileo, lancés en 2005 et 2008[7], emportaient l'un une horloge au rubidium, l'autre un maser à hydrogène supplémentaire, en faisant la référence temporelle la plus stable jamais envoyée en orbite et le satellite de navigation le plus performant du monde[8].

Les horloges atomiques sont aussi utilisées dans les réseaux de télécommunications pour fournir un signal de référence aux oscillateurs internes des équipements, afin d'assurer une qualité de transmission des services en accord avec les normes internationales. On utilise soit les signaux directement produits par des horloges atomiques soit les signaux élaborés à partir des émissions des satellites de la constellation GPS qui ont la stabilité des horloges atomiques embarquées.

Histoire et développement

Les débuts

Horloge atomique aux fréquences optiques

Les recherches récentes pour améliorer la précision des horloges atomiques se sont portées sur d'autres atomes (calcium, ytterbium, strontium, mercure, aluminium) piégés dans des treillis optiques dont les transitions énergétiques s'effectuent à des fréquences optiques (d'un ordre de grandeur 100 000 fois supérieur à celle de la transition de l'atome de césium; le BIPM a fixé la transition du strontium à 429 228 004 229 873.2 Hz en ). En 2018, le JILA a construit des horloges manipulant les atomes avec des lasers dépassant la précision des meilleures horloges au césium : une précision de 2,5 × 10−19 s s−1 a été atteinte par une horloge utilisant un treillis tridimensionnel d'atomes de strontium[11].

Références

  1. « L’horloge atomique - UFR DE PHYSIQUE », sur sorbonne-universite.fr (consulté le ).
  2. (en) Thomson, William; Tait, Peter Guthrie, Treatise on Natural Philosophy, Cambridge, England, Cambridge University Press, , p. 227
  3. Antoine Cappelle, « Les horloges atomiques montent en fréquence », La Recherche, no 483,‎ , p. 50 (lire en ligne).
  4. (en) « Establishment of International Atomic Timeand of Coordinated Universal Time », dans BIPM Annual Report on Time Activities, Bureau international des poids et mesures, (lire en ligne [PDF]).
  5. (en) « Table 4. Equipment and source of UTC(k) of the laboratories contributing to TAI in 2016 », dans BIPM Annual Report on Time Activities, Bureau international des poids et mesures, (lire en ligne [PDF]).
  6. « Références Nationales de Temps », SYRTE.
  7. (fr + en) Philip Tuckey, « Galileo : l’espace au service du citoyen européen », Le Magazine de l'Observatoire de Paris, Observatoire de Paris, no 10 « Spécial spatial »,‎ , p. 15 (lire en ligne [PDF], consulté le ).
  8. Frédéric Guérin, « GIOVE-B prévu pour le 27 avril », Air et Cosmos, No 2116, 14 mars 2008.
  9. (en) « NIST Time and Frequency Division History », National Institute of Standards and Technology.
  10. (en) « A Brief History of Atomic Clocks at NIST », National Institute of Standards and Technology (consulté le ).
  11. (en) G. Edward Marti; Ross B. Hutson; Akihisa Goban; Sara L. Campbell; Nicola Poli; Jun Ye, « Imaging Optical Frequencies with 100  μHz Precision and 1.1  μm Resolution », Physical Review Letters,‎ , p. 120 (10): 1–6 (arXiv:1711.08540)

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes