Artémis

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Diane de Versailles, copie romaine d'un original grec de 330 av. J.-C. (?), musée du Louvre.

Artémis (en grec ancien Ἄρτεμις / Ártemis) est, dans la mythologie grecque, la déesse de la chasse et une des déesses associées à la Lune (par rapport à son frère Apollon, qui est lui, associé au Soleil). Elle est assimilée dans la mythologie romaine à la déesse Diane. Ses attributs sont le cerf, l'arc en or, le carquois, les flèches et le croissant de lune. Elle est la fille de Zeus et de Léto et la sœur jumelle d'Apollon (ou simplement sa sœur, selon l'hymne homérique qui lui est consacré), avec lequel elle partage beaucoup de traits communs.

Le nom d'Artémis

Sur l’étymologie du nom d'Artémis, les opinions divergent. Platon le rapprochait d'ἀρτεμές / artémès, intègre, sain et sauf : « C'est l'intégrité et la décence que son nom paraît signifier, à cause de son amour de la virginité[1] ». Mais ce caractère de « vierge » n'est pas du tout primitif. D'autres ont vu un rapprochement avec ἄρταμος / artamos, boucher, et Artémis serait ainsi « celle qui tue ou qui massacre ». Mais plusieurs hellénistes, entre autres V. Pisani, Pierre Chantraine et Jean Richer, établissent un lien entre son nom et l'ours, animal qui joue un grand rôle dans son culte[2]. Le nom d'Artémis se compose en effet d’Arth pour ἄρκτος / arktos, ourse, Grande Ourse, et de θέμις / thémis qui désigne chez les Grecs une grande force, l'ordre établi par les dieux. Compte tenu du fait que les signes du zodiaque étaient connus des Grecs, qu'ils ont fait probablement l'objet d'un enseignement religieux à Delphes, et que pour les peuples de l'Antiquité, l'ordre du monde était fondamentalement identique à l'ordre du ciel, Artémis pourrait donc être la Régente de la loi de l'Ourse, constellation qui se confond avec l'ordre même du ciel[3],[4]. On sait que dans le sanctuaire d'Artémis de Brauron, lors de la fête des Brauronies, certaines fillettes, revêtues d'une robe couleur de safran, étaient conduites à la déesse et consacrées pendant cinq ans à Artémis, sous le nom d’ourses ou oursonnes[5].

Divinité des frontières

Artémis versant une libation, lécythe attique à figures blanches à la manière du Peintre de Bowduin, 460-450 av. J.-C., musée du Louvre.

Née sur l'île d'Ortygie (« l'Île aux cailles »), appelée plus tardivement Délos, Artémis fait du pays des Hyperboréens sa résidence principale[6] où elle règne en maîtresse de la nature sauvage et des animaux. « Que toutes les montagnes soient les miennes », déclare-t-elle dans l'hymne de Callimaque de Cyrène. Elle erre aussi dans les agroi, les terres en friches, incultes et peu fréquentées. Comme le souligne Jean-Pierre Vernant, elle « a sa place en bordure de mer, dans les zones côtières où entre terre et eau les limites sont indécises[7] ». Toujours située à la frontière entre le monde civilisé et le monde sauvage, Artémis la chasseresse est aussi une κουροτρόφος / kourotrophós[8], qui préside à l'initiation des petits d'hommes et d'animaux et les accompagne jusqu'au seuil de la vie adulte.

Armée d'un arc et de flèches offerts par les Cyclopes[9], Artémis assiste son frère Apollon dans son combat contre le serpent Python ainsi que dans la gigantomachie. Pendant la guerre de Troie, elle est également aux côtés des Troyens. Comme lui, elle pourfend de ses flèches les Niobides. Elle l'aide à se venger de Coronis et de Tityos. De manière générale, elle envoie sur les femmes la mort soudaine, alors qu'Apollon se charge des hommes. Dans l’Iliade, Héra la qualifie ainsi de « lionne pour les femmes ». On lui chante, comme à Apollon, le péan.

Selon une légende, Artémis est née un peu avant Apollon et elle aurait aidé Léto, sa mère, à accoucher, remplaçant ainsi Ilithyie, déesse de l'accouchement.[réf. nécessaire]

Chasseresse à l'arc d'or

Diane chasseresse, par Auguste Renoir (1867)

Coureuse des forêts, sauvageonne insoumise et fière, Artémis appartient avant tout au monde sauvage, alors que son frère Apollon se présente comme un dieu civilisateur. Seule parmi les dieux, à l'exception de Dionysos, elle est constamment entourée d'une troupe d'animaux sauvages, d'où son épiclèse de Ἡγημόνη / Hêgêmónê, « Conductrice ». Elle est aussi à la tête d'une troupe de nymphes (20 nymphes du mont Amnisos, selon Callimaque) et de jeunes mortelles, qu'elle mène à travers les forêts. L'Iliade en parle comme de « l'agreste Artémis […], la dame des fauves (πότνια θηρῶν / pótnia thêrỗn)[10] ».

Surnommée « la Bruyante » (Κελαδεινή / Keladeinế), elle mène sa meute et la pousse de la voix. Artémis possède en effet le double visage de la compagne des animaux sauvages et de la chasseresse. La biche symbolise bien son ambivalence : la bête est sa compagne favorite, et de nombreuses représentations la montrent à son côté. Néanmoins, Artémis est aussi celle qui est réputée pour suivre de ses flèches cerfs et biches, même si peu de textes l'attestent.

Didrachme de Ionie représentant la déesse Artémis.

La déesse sagittaire est enfin appelée par Homère Artémis khrysêlakatos, « à l’arc d’or », et par Hésiode iokhéairê, « l'archère »[11]. Chez Homère, l'arc se dit βιός / biós, qui se rapproche de βίος / bíos, « la vie ». C'est pourquoi, Artémis, encore appelée « la radiante », est aussi celle qui guide les égarés, les étrangers, ou les esclaves en fuite au cœur de la nuit. Aussi Artémis porte-t-elle en latin le nom de Trivia, « celle qui éclaire la route aux carrefours de la vie ».

Sa dextérité à l'arc est illustrée dans l'épisode nommé catastérisme où elle tue par erreur son amant Orion.

Déesse vierge

Diane au bain, par François Boucher (1742)

Tout comme Athéna et Hestia, Artémis est une déesse « vierge ». Elle a demandé à son père l'autorisation de garder sa virginité pour toujours, à cause de son aversion pour le mariage que sa mère lui a transmis dès la naissance. Improprement considérée par les mythocritiques jusqu'au XIXe siècle comme « chaste », jusqu'à ce que Jean-Pierre Vernant éclaire davantage les adjectifs accolés à son nom. Artémis est parthenos, la vierge qui s'occupe du feu, ou, comme le rapporte Plutarque, celle qui s’abstient de tout commerce sexuel avec des hommes. Elle punit sévèrement les hommes qui tentent de la séduire : « Tristes noces, celles que briguèrent Otos et Orion[12] ». Quand Actéon la surprend par hasard dans son bain, elle le métamorphose en cerf et le fait déchiqueter par ses propres chiens.

Elle surveille également la chasteté de ses compagnes : elle menace de tuer Callisto, enceinte de Zeus.

Épithètes, attributs et sanctuaires

Artémis multimammia du type d'Éphèse, IIe siècle apr. J.-C., Musée de Selçuk.

Hommage

Artémis est une des 1 038 femmes représentées dans l'œuvre contemporaine de Judy Chicago, The Dinner Party, aujourd'hui exposée au Brooklyn Museum. Cette œuvre se présente sous la forme d'une table triangulaire de 39 convives (13 par côté), chaque convive étant une femme, figure historique ou mythique. Les noms des 999 autres femmes figurent sur le socle de l'œuvre. Le nom d'Artémis figure sur le socle, elle y est associée à la déesse serpent, cinquième convive de l'aile I de la table[14].

Notes et références

  1. Platon, Cratyle, 406 b.
  2. Louis Séchan et Pierre Lévêque, Les grandes divinités de la Grèce, Éditions E. de Boccard, 1966, p. 358.
  3. Jean Richer, Géographie sacrée du monde grec, Guy Trédaniel Editeur, 1983, p. 65 et 70.
  4. Pierre Chantraine, « Réflexions sur les noms des dieux helléniques », L'Antiquité classique, XXII, 1953, p. 65 à 78.
  5. Henri Grégoire, Notice d’Iphigénie en Tauride, Les Belles Lettres, 1964, p. 91.
  6. Pindare, Odes [détail des éditions] (lire en ligne) (III, 26).
  7. Vernant, op. cit., p. 17.
  8. Diodore de Sicile, Bibliothèque historique [détail des éditions] [lire en ligne] (V, 73).
  9. Callimaque, Hymnes [détail des éditions] (lire en ligne) (III).
  10. Iliade (XXI, 470).
  11. Hésiode, Théogonie (14, 918).
  12. Callimaque (V, 264–265).
  13. La divinité vénérée était sans doute, à l'origine, une déesse mère semblable à la Cybèle des Phrygiens.
  14. Musée de Brooklyn - Artémis

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Jean-Pierre Vernant, La Mort dans les yeux, Hachette, coll. « Pluriel », 1998 (ASIN 2012788947).
  • Ovide, Les Métamorphoses, Gallimard, coll. « Folio » no 2404, septembre 1992 (ISBN 2-07-038564-7)
  • Pierre Ellinger, Artémis, déesse de tous les dangers, Larousse, coll. « Dieux, mythes et héros », 2009 (ISBN 2-03-583940-8).

Lien externe

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