Captage et stockage du dioxyde de carbone

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La séquestration géologique, aussi appelée stockage ou confinement du dioxyde de carbone, est envisagée comme une des formes possibles de traitement du carbone récupéré dans les processus expérimentaux de captage et de stockage du dioxyde de carbone (CCS pour les anglophones), à but de séquestration du carbone (ou du dioxyde de carbone), pour limiter la contribution de ce gaz à l'acidification des milieux et aux modifications climatiques dont il est une des causes.

Il fait l'objet d'un nombre croissant de projets internationaux, soutenu par les groupes pétroliers et certains États, avec quelques applications expérimentales.

Enjeux

Les forêts (relictuelles, secondaires ou cultivées) ou les tourbières et les puits océaniques de carbone ne suffisent plus à absorber les émissions humaines de CO2. Le protocole de Kyōto n'a en outre pas permis de diminuer le total des émissions de gaz à effet de serre, qui ont selon l'Ademe augmenté de 80 % environ de 1970 à 2004[1], pour atteindre environ 30 milliards de t/an en 2012[1]. La séquestration connaît donc un intérêt croissant, théorique vers la fin des années 1990, puis expérimental à partir de 1996 (Sleipner).

Le CO2 émis par les transports et l'habitat l'est de manière trop diffuses pour qu'il puisse être capté et ainsi stocké, mais les grandes sources industrielles peuvent le faire (en 2012, elles représentaient en France environ 75 Mt (millions de tonnes) de CO2/an, soit 20% des émissions du pays selon l'Ademe[1]).

Principes de la séquestration

Il s'agit d'enfouir dans le sous-sol, massivement et de manière sécurisée, du dioxyde de carbone préalablement « capté » en sortie de chaudière ou turbines à gaz puis comprimé.

Si les solutions géotechniques en cours d'expérimentation étaient validées, selon le GIEC (en 2005), cette solution pourrait potentiellement répondre de 10 % à 55 % de l'effort total de réduction à envisager pour le XXIe siècle.

Captage du CO2

Capturer artificiellement le dioxyde de carbone dans l'air ou à la sortie de toutes les cheminées et pots d'échappement est un préalable au stockage. Ce captage est aujourd'hui techniquement possible (déjà utilisé pour épurer le méthane de mauvais gisements), mais il est coûteux et énergivore (environ 20 % d'augmentation de la consommation d'énergie par le process global en 2010/2012[1]). Il n'est pas aujourd'hui économiquement rentable dans le cas du stockage ; l'Ademe dans son avis de 2013 évoque « des coûts élevés et des perspectives de baisse incertaines »[1] et selon cette Agence « le coût de la filière CSC est évalué à 60 euros en moyenne par tonne de CO2 évitée, dont les deux tiers pour le seul captage »[1].

Les promoteurs du stockage géologique projettent d'en réduire tant que possible les coûts, dont en ne le prélevant qu'en sortie de grosses installations industrielles. À titre d'exemple, l'entreprise norvégienne SARGAS a annoncé mi-2008 avoir réussi – après six mois de test – à capter 95 % du gaz carbonique de sa chaudière à haute pression de Värtan (Suède), pour un prix de l'électricité néanmoins supérieur de 25 % à celui d'une centrale au charbon classique[2].

Transport

Le transport se ferait par gazoduc ou, le cas échéant, par navires.

Stockage

Selon le GIEC, 99 % du CO2 injecté sur 1 000 ans pourrait être emprisonné pour plusieurs millions d'années sous réserve que les technologies nécessaires soient développées et validées.

Ce CO2 serait injecté dans des formations rocheuses profondes sous forme supercritique via des puits dans des roches perméables situées sous des formations jugées suffisamment hermétiques. Plusieurs lieux de stockage sont donc envisagés :

  • Les aquifères salins sont géologiquement pour partie comparables aux gisements d'hydrocarbures, mais avec une capacité bien plus grande. Plusieurs mécanismes de piégeage (structural, capillaire, par dissolution et par minéralisation) semblent pouvoir y immobiliser le CO2, avec moins de risque de fuite que dans les bassins houillers ou certains champs pétrolifères criblés de puits et parfois victimes d'affaissements. Leur répartition homogène dans le monde diminuerait les besoins de transport du CO2, mais ils sont mal connus et leurs saumures ne semblent pas pouvoir être vendues pour rentabiliser l'opération comme on peut le faire dans les champs gaziers et pétrolifères avec le gaz ou le pétrole poussés par le CO2 injecté.
  • Les gisements de gaz naturel et de pétrole sont les candidats les plus cités pour y séquestrer du CO2. L'injection de CO2 dans des gisements pétroliers étant d'ailleurs déjà pratiquée depuis des décennies (surtout au Texas), à des fins de récupération assistée : acidifiant et puissant solvant pour le CO2 supercritique), le CO2 aide à récupérer une partie du pétrole résiduel de gisements difficiles ou en baisse de production. Néanmoins, la grande majorité des projets de récupération assistée à base de CO2 (CO2-EOR, pour enhanced oil recovery) entrepris jusqu'à présent utilisent du CO2 issu de sources naturelles. C'est une option attrayante pour les pétroliers qui espèrent pouvoir compenser les coûts économiques et énergétiques du stockage par la récupération de pétrole supplémentaire qui serait extrait après injection de CO2. Cependant, les gisements de pétrole sont souvent éloignés des grandes sources de dioxyde de carbone et les anciens champs pétrolifères sont peu utilisables (on y a déjà injecté de l'eau de mer, ou du gaz, et le substrat a pu se colmater).
  • Le méthane des veines de charbon non exploitées pourrait être exploité et remplacé par du CO2, la vente du méthane finançant le stockage du CO2. Réinjecter du gaz dans les pores du charbon est théoriquement possible si les couches ne se sont pas tassées après extraction. Des pilotes expérimentaux testent cette solution, qui pourrait éventuellement être associée à la gazéification du charbon, si des méthodes probantes et sécurisées étaient développées. L'utilisation de bassins houillers souterrains déjà exploités est quasi impossible en raison des affaissements miniers qui ont suivi l'exploitation (bassin du Nord de la France ou lorrain par exemple). Des problèmes liés au gonflement du charbon et de pertes de perméabilité se posent.
  • Autres lieux possibles  : Les solutions aujourd'hui envisagées visent toujours des bassins sédimentaires. Dans des régions volcaniques, le basalte présente parfois une alternance de couches poreuses et de couches étanches, qui pourraient aussi servir à stocker du CO2.
  • Le stockage géologique entre des strates de schistes ou dans certaines formations basaltiques serait aussi envisagé.

Limites et risques

Limites

Le nombre de sites se prêtant au stockage géologique sûr semble limité, or pour espérer un effet significatif pour le climat, il faudrait en enfouir environ 3,5 milliards de t/an, soit l’équivalent de 28,6 milliards de barils de pétrole (à titre de comparaison on extrait du sol dans le monde 27 milliards de barils de brut/an)[3].

Cette solution est limitée aux sources de CO2 fixes et importantes (centrales électriques thermiques, industries chimiques, sidérurgiques, cimenteries…). Généralement, la limite inférieure considérée est de 100 000 tonnes de CO2 par an.

De plus, ces sources de CO2 les plus importantes n'émettent pas ce gaz à l'état pur, mais dilué, à moins de 15 %, dans des gaz d'échappement, la combustion se faisant dans l'air. Il existe néanmoins quelques industries qui génèrent du CO2 concentré (épuration de certains gaz naturels prélevés dans des roches réservoir également riches en CO2).

Un avis de l'Ademe en 2013 cite d'autres points de vigilance[1] :

  • la technologie est « coûteuse et énergivore »[1] ;
  • il reste (en 2013) « des incertitudes sur les capacités de stockage[1] » dont les estimations reposent « à l’heure actuelle sur des estimations théoriques[1] » ;
  • il reste aussi des « risques environnementaux et sanitaires à maîtriser[1] » ;
  • sur la « concertation avec les populations nécessaire […] face aux oppositions fortes, quelques pays sont allés jusqu’à interdire cette technique[1]. »

Des projets de centrales électriques « propres » capable de capter le CO2 sont à l'étude, par exemple via l'extraction des gaz d'échappement de la chaudière ; système qui pourrait être adapté à des centrales existantes. Mais cela consomme beaucoup d'énergie : environ le quart de la production d'une centrale à charbon. Ce type de procédé est donc accompagné, à puissance nette produite égale, d'une augmentation[4] locale de la pollution de l'air (+ 11 % des émissions de NOx et + 17,9 % de SOx dans le cas d'une centrale au charbon en raison de l'augmentation de consommation de combustible. La désulfuration des fumées demandera une quantité plus importante de chaux et le traitement des NOx consommera plus d'ammoniaque.

Pour diminuer l'opération très coûteuse de séparation des gaz en aval, on a eu l'idée de brûler le combustible avec de l'oxygène pur et maintenir une température de combustion adéquate en remplaçant l'azote de l'air par du CO2 recirculé. Mais cette méthode demande de produire une quantité importante d'oxygène, ce qui est également coûteux et/ou consommateur d'énergie, si bien qu'en termes de bilan énergétique, il n'y aurait pas d'avantage significatif (sur le plan énergétique) par rapport à la séparation du CO2 dans les fumées.

La décarbonisation du combustible est très étudiée ; Il s'agirait par des réactions chimiques dite de gazéification pour les combustibles solides, ou reformage pour le gaz, de convertir le combustible en un mélange de CO (monoxyde de carbone) et d'hydrogène, mélange connu comme « gaz de synthèse ». Le CO peut alors fournir de l'hydrogène et du CO2 supplémentaires par réaction avec de la vapeur d'eau.

L'hydrogène et le dioxyde de carbone se séparent aisément, et l'hydrogène peut alors alimenter une centrale électrique (turbines ou piles à combustible), servir à la pétrochimie, au raffinage pétrolier, ou à la production d'engrais, avec un rendement énergétique final meilleur et une centrale multiproductrice (cogénération + production d'hydrogène). Le gaz de synthèse pourrait contribuer à produire du benzène, propylène ou méthanol, bases d'autres synthèses chimiques plus complexes (dont plastiques).

Les projets s'appuient souvent sur du charbon et sur d'autres combustibles peu coûteux (déchets pétroliers, de bois, municipaux ou agroalimentaire). La séquestration est ainsi de plus en plus associée au terme de « charbon propre ». Certains projets utilisent le gaz naturel plus cher, mais plus facile à transformer.

Par contre l'utilisation de source renouvelable mais fortement génératrice de CO2 pourrait diminuer la quantité de dioxyde de carbone actuellement présent (en effet dans le cadre de bois replanté le bilan est nul, la croissance du bois consommant le CO2 produit lors de la combustion, en le séquestrant le bilan serait donc positif, ce qui serait une manière plus simple que par captation de dioxyde de carbone présent dans l'atmosphère)

Risques

En plus d'être un gaz à effet de serre, le CO2 est un gaz plus lourd que l'air, asphyxiant s'il chasse l'oxygène présent, acide lorsqu'il est dissous. Ainsi, un relargage massif et brutal de grande quantité de CO2, dans une vallée ou une zone urbanisée aurait des conséquences humaines et écologiques immédiate graves à mortelles (au pire, asphyxie immédiate des humains et animaux). En effet, dans certaines configurations de fuite et de relief, le CO2 d'une fuite pourrait se déployer en une chape de gaz irrespirable.

Des fuites diffuses sont en théorie possible au niveau des puits d'injection ou d'observation, s'ils perdent leur étanchéité (en raison de défauts de réalisation ou suite au vieillissement des matériaux au contact du CO2, ou suite à des évènements sismiques.

D'éventuelles variations locales de la porosité de la roche, la réactivation possible de failles et les effets de la microsismicité induite par la mise sous pression de la roche-réservoir ou d'une cavité creuse (de mine de sel en général, car faciles à creuser au sein d'une couche épaisse, par injection d'eau (qui solubilise le sel en saumure facile à exporter), mais dont la roche se décompresse et évolue avec le temps) doivent être envisagées. Après que le GIEC ait considéré que le stockage était l'une des solutions envisageables, des géologues américains, experts en géo-mécanique ont estimé que le stockage géologique du CO2 risquait lui-même d'accentuer le risque sismique et de « compromettre l'étanchéité des poches géologiques contenant le CO2 séquestré » notamment en rouvrant des failles endormies[3].

Au même moment, un rapport (15 juin 2012) publié par l'Académie américaine des sciences, concluait aussi que cette séquestration géologique du CO2 « peut potentiellement induire des tremblements de terre importants » (plus important qu’avec la fracturation hydraulique telle qu’utilisée pour le pétrole ou le gaz dans les schistes bitumineux.

Des inconnues subsistent aussi quant au comportement et aux effets chimiques (ex. : précipitation d'évaporites dont par exemple la halite) et géologiques à long terme de ce gaz acide et plus ou moins pur, qui devient solvant en phase supercritique, et aux effets de la pression, du type de roche et de la vitesse de remplissage du réservoir sur ces facteurs.

Risques de fuites

Le CO2 est acidifiant et corrosif, il est en outre solvant sous forme liquide. Il peut donc interagir avec les roches, les canalisations métalliques et le béton des puits. Des exemples naturels laissent penser que la séquestration longue durée est possible à condition de maitriser le colmatage durable des puits d'injection : certains gisements de gaz naturel contiennent une proportion importante de CO2, conservé sous pression depuis des millions d'années. Néanmoins, des fuites naturelles existent, parfois mortellement brutales comme dans le lac Monoun (1984) ou dans le lac Nyos où l'émission soudaine d'une énorme « bulle » de CO2 a, en 1986, tué plus de 1 700 personnes et des milliers d'animaux. Cependant, une configuration semblable au lac Nyos (lac méromictique de cratère) est extrêmement rare. Il existe aussi des gisements étanches de CO2 tels qu'à Montmiral (Drôme, France) par exemple. En cas de fuite, le gaz sous pression monte dans l'atmosphère, où il se refroidit rapidement, et redescend en chape sur la zone environnante. Dans le cas d'une fuite massive, il y a risque d'asphyxie.

Rappel médical : La toxicologie du CO2 pour les êtres qui respirent de l'air :

– à 4 % dans l'air, le CO2 entraîne des effets irréversibles sur la santé humaine ;
– à 10 % dans l'air, le CO2 entraîne la mort par asphyxie en 10 minutes.

Critiques

Les experts, les écologues, les ONG et les écologistes sont encore divisés sur la séquestration géologique du CO2, par exemple soutenue par des organisations comme la fondation Bellona[5] alors que Greenpeace s'y oppose. Parmi les arguments des opposants, on peut citer :

  • Solution incertaine, qui semble déjà servir de prétexte à la pérennisation de l'emploi massif et croissant d'énergies fossiles, et d'un développement accru de la société de consommation, d'autant que la technique « CO2-EOR » de séquestration souvent évoquée, est associée à une augmentation de la production de pétrole du gisement où le CO2 serait séquestré. Les investissements consentis pour la séquestration seraient mieux employés dans les économies d'énergies et les énergies renouvelables ajoutent ces détracteurs.
  • Solution n'encourageant pas à réduire le gaspillage croissant de carburants fossiles, sans considération de leur valeur carbochimique pour l'industrie.
  • Solution non immédiatement opérationnelle avec garanties de sécurité, et coûteuse en ressources/temps/argent, qui se mettrait en place au détriment des alternatives aux carburants fossiles polluants et sources de conflits géostratégiques, alors que des économies importantes à court et moyen terme seraient faites si l'effort financier, humain et de recherche était porté sur des sources alternatives ; en termes de négawatts et d'énergie solaire notamment (qui pourrait aussi produire de l'oxygène et de l'hydrogène par électrolyse d'eau de mer, en zone sub-saharienne littorale notamment, ce qui serait aussi une source possible de développement dans des pays souvent « pauvres » ou émergents mais riches en ressources solaires et en espace susceptibles d'accueillir des panneaux photovoltaïques (Sénégal, Mauritanie, Maroc, Algérie…).
  • Solution ne réglant pas le problème des émissions rapidement croissantes des transports (voiture et avion notamment) (sauf s'il y avait décarbonisation en amont, solution dont l'écobilan total reste à produire).
  • Demi-solution, car les centrales thermiques (à charbon surtout) restent polluantes en amont avec le cycle de l'extraction et du transport du combustible, en fonctionnement, et en aval même avec des émissions atmosphériques pour partie annulées (ex. : cendres et mâchefers pollués, soufre, métaux lourds ou les NOx associés). Les mines de charbon étant par ailleurs source de dégazage dans l'air de méthane (21 fois plus à effet de serre que le CO2).
  • Solution consommant elle-même de l'énergie (plus 10 à 40 %) une fraction de la production de la centrale devant être détournée pour séparer, traiter et compresser puis enfouir le CO2, réduisant l'efficacité énergétique du procédé.
  • Seuls au mieux 90 % du CO2 émis peut être récupéré, sur les centrales neuves ou très récentes avec les meilleures technologies disponibles, mais ceci impose une énergie correspondant selon le GIEC à 10 à 40 % de celle produite par la centrale. D'autres coûts systémiques pourraient porter ce chiffre à 30-60 %. Ces coûts calculés pour des centrales au charbon vers 2004, pourraient être augmentés ou pondérés selon les prix du carburant et/ou des écotaxes[6].

À cela, les partisans répondent :

  • Qu'il n'existe pas, selon l'Agence internationale de l'énergie de scénario crédible permettant une baisse des émissions de CO2 suffisante pour stabiliser le climat uniquement à base de renouvelable et d'économies d'énergie.
  • Que la séquestration n'est pas une solution miracle, mais peut s'inscrire dans une action plus générale incluant aussi les économies d'énergie, les renouvelables, la reforestation et, sujet plus polémique, le développement du nucléaire.
  • Que les sites à employer peuvent et doivent être choisis soigneusement après expertise des réservoirs. Ainsi, le gisement De Lier aux Pays-Bas, un gisement de gaz épuisé, avait été envisagé comme site de séquestration, mais après étude a été écarté du fait des risques de fuites liés à d'anciens puits abandonnés.
  • Que les critiques oublient de s'intéresser aux gisements naturels de CO2>, dont certains sont exploités industriellement[7]
  • Que les réserves de charbon sont encore abondantes et peuvent assurer l'indépendance énergétique de pays comme les États-Unis, la Chine et l'Inde.
  • Dans le cadre du Protocole de Kyōto, les entreprises séquestrant le carbone éviteraient des taxes et pourraient vendre leurs droits d'émission, tout en pouvant bénéficier de subventions et programmes de recherches.
  • Que personne n'est capable d'affirmer que le carbone aujourd'hui présent sous forme de charbon dans le sous-sol ne se retrouvera pas demain dans l'atmosphère sous forme de CO2, participant ainsi à l'effet de serre.

Aspects juridiques et de normalisation

Dans le monde, la séquestration est une option évoquée en 2006 par le GIEC[8] et OSPAR[9] alors que la législation commence à peine à préparer un cadre réglementaire[10] adapté à un éventuel stockage géologique du carbone[11]. Entre 2010 et 2012, dans plusieurs pays, dont en France, des injections profondes de CO2 sont déjà expérimentées dans le sous-sol, alors qu'en 2012, les normes ISO pour le captage, le transport, le stockage géologique du CO2 (mais non sa réutilisation) étaient encore en préparation, dans le cadre d'un travail conduit sous l'égide du Comité Technique ISO/TC265, avec en 2012 plusieurs pays producteur de CO2 (France, Canada, Chine, Japon, Norvège, Pays-Bas, Allemagne, Royaume-Uni, Italie, Espagne, Suède et Brésil) et en lien avec l'European Industrial Gases Association, le Global CCS Institute, l’International Energy Agency, l’IEA GHG, l’ISO/TC67 et le CEN/TC234[12].

Des questions nouvelles[13] se posent au législateur, dont notamment :

En Europe

  • Depuis 2009, au-delà de 100 kilotonnes de CO2, une directive européenne (2009/31/CE[14]) cadre la séquestration géologique. Le stockage doit notamment être permanent et sûr pour l’environnement, prévenant et maîtrisant les remontées de CO2 vers la surface, tout en limitant les perturbations du milieu souterrain. L'étude de faisabilité doit notamment garantir la stabilité géologique (faible risque sismique) et de l’étanchéité du réservoir souterrain envisagé[15] ; « Le stockage du CO2 dans la colonne d'eau ou dans un site de stockage situé dans un complexe de stockage s'entendant au-delà du territoire, des zones économiques exclusives ou des plateaux continentaux des États-membres n'est pas autorisé »[14] ; En Europe, un permis, délivré par l'autorité compétente de chaque État est nécessaire pour exploiter un site de stockage. La demande de permis doit renseigner sur l’exploitant, le site le complexe de stockage proposé, l'évaluation des risques, la quantité total de CO2 à injecter, la composition des flux de CO2 (qui est rarement pur), les mesures de prévention, de surveillance, de correction, le plan post-fermeture provisoire, les garanties financières[14];
  • D'autres travaux de l'Union européenne ont porté sur la limitation des émissions, dont via la séquestration[16] ;
  • Un moratoire a été émis par la convention de Londres contre le stockage géologique en strates sous-marines.

En France

  • En 2006, le Conseil général des mines, à la demande du gouvernement français[17].
  • Après le Grenelle de l'environnement de 2007, la loi Grenelle II ([Art 80 de la loi Grenelle II, modifiant le code minier et le code de l'environnement) a apporté quelques précisions :
    • les permis exclusifs de recherche de stockage souterrain de dioxyde de carbone délivrés conformément à l'article 3-1 du code minier, dont la demande est intervenue avant l'entrée en vigueur de la loi Grenelle II, valent permis exclusif de recherche de formations souterraines aptes au stockage géologique de dioxyde de carbone ;
    • le dioxyde de carbone (dans ce contexte) est considéré comme un fluide composé « essentiellement de dioxyde de carbone », mais ne devant contenir « ni déchet ni aucune autre matière ajoutée en vue de son élimination ». Il peut néanmoins contenir des « substances qui se sont associées dès la source ou lors des opérations de captage ou d’injection. Des substances traces peuvent y être ajoutées afin d’aider à contrôler et à vérifier la migration du dioxyde de carbone. « Les concentrations de toutes les substances associées ou ajoutées sont inférieures aux niveaux qui seraient susceptibles de compromettre l’intégrité du stockage ou des infrastructures de transport appropriées ou de présenter un risque significatif pour l'environnement ou la santé humaine.
      « Des formations souterraines sont aptes au stockage géologique du dioxyde de carbone si elles présentent les qualités requises pour le confinement sûr et permanent du dioxyde de carbone à des fins de lutte contre le réchauffement climatique »
       ;
    • Les Art. L. 229-29 et 229-30 du code de l'environnement stipulent respectivement 1) que le code minier s'applique aux « formations souterraines aptes au stockage géologique de dioxyde de carbone » qui sont par la loi Grenelle « assimilées à des mines ou gisements miniers, les travaux de recherche de formations souterraines aptes au stockage géologique de dioxyde de carbone sont assimilés aux travaux de recherche de mines, et le périmètre fixé par la décision d’octroi d’un permis exclusif de recherche de formations souterraines aptes au stockage géologique de dioxyde de carbone est assimilé à un périmètre minier. » ; 2) que la recherche de sites souterrains aptes au stockage de CO2 nécessitent un permis exclusif ad hoc, délivré ou prorogé dans les conditions prévues aux articles 9 et 10 du code minier. Si les formations souterraines recherchées sont déjà couvertes par des titres miniers ou des titres de stockage souterrain, sans règlement amiable, il y a arbitrage du ministre chargé des mines, après avis du Conseil général de l'industrie, de l'énergie et des technologies ;
    • « Des essais d'injection de dioxyde de carbone peuvent être autorisés par l’arrêté d’ouverture de travaux prévu à l’article 83 du code minier, et ce pour une quantité limitée ». Une « commission de suivi de site » est alors créée en application de l’article L. 125-2-1 du présent code de l'environnement, (aux frais de l’explorateur) ;
    • Le transport de CO2 par canalisations, même pour un essai d'injection est conformément à l’article L. 229-30[18], constitue une opération d'intérêt général (au sens de la loi de 1965 relative au transport des produits chimiques par canalisations[19].

Puis :

  • En 2007, ce thème devient (pour 4 ans) le programme principal de recherche no 3 de l’ADEME[20].
  • En 2011, 3 décrets sont attendus. Un décret (no 2011-1411 du 31 octobre 2011[21]) d'application transpose la directive européenne dans le droit français et l'Ademe se dote d'une feuille de route sur le stockage géologique[20]. Il relève à la fois du code de l'environnement (pour la recherche et l'exploitation de sites de stockage (la notion de « sites de stockage géologique de dioxyde de carbone » étant ajoutée à celle d'« installations de stockage de déchets ») et du code minier précise la règlementation en l'adaptant au droit européen (cf. Directive 2009/31/CE du 23 avril 2009 relative au stockage géologique de dioxyde de carbone), lequel devrait être réformé avant fin 2013. Il complète et met à jour un décret (du 2 juin 2006) sur les titres miniers et les titres de stockage souterrain[22] et un autre décret (du 2 juin 2006) sur les travaux miniers, travaux de stockage souterrain et la police des mines et des stockages souterrains[23].
    Le décret[21] prévoit notamment un « plan de postfermeture » « incluant notamment la mise à l'arrêt définitif du site et sa surveillance durant une période d'au moins trente ans après sa mise à l'arrêt définitif. Ce montant correspond au minimum au montant de la soulte prévue »[24].
  • L'Ademe avec l’IFPEN et le BRGM a créé un « Club CO2[25]» associant les grands acteurs français (industriels, organismes de recherche, pôles de compétitivité…) parties prenantes[1] ;
  • l'effort de recherche porté par la collectivité (via le BRGM et l'Ademe) a été soutenu depuis 2001, avec de la part de l'Ademe un soutien à 30 projets de R&D (de 2002 à 2012). 16 thèses ont aussi été cofinancées par l'Ademe de 2003 à 2012 (2 sur le captage et 14 sur le stockage géologique). Il s'agit notamment d'explorer avec des partenaires industriels (Armine, Alstom, Total, Air liquide, Atanor, IFP, EN, IPGP, INERIS, BRGM, GDF, Geostock, Mines ParisTech, Cired, universités et laboratoirs (ex :Laboratoire des Fluides Complexes de l'Université de Pau), SMASH, Oxand, Gaz Intégral, Petrometalic, S.I.T.E.S, Saipem, Technip, Geogreen, Oxand, PHIMECA, et sur le thème de l'acceptabilité sociale SMASH, CIRED, TNS-Sofres…) les conditions d'efficacité énergétique et de maîtrise des risques sanitaire, géophysiques et écologiques[1]. Avec l'aide de l'Ademe, trois pilotes-démonstrateurs ont été financés :
  1. C2A2 ; projet de captage de CO2 en post‐combustion par amines avancées (2010‐2013, avec EDF, ALSTOM (pour 21 M€ dont 5,13 d'aides)[20].
  2. France Nord ; Projet de stockage géologique conduit avec TOTAL, AIR LIQUIDE, EDF, GDF SUEZ, LAFARGE, Vallourec, BRGM, IFP EN, INERIS, EIFER (2009‐2019) pour 54 M€ dont 22 d'aides[20].
  3. TGR-BF (ou « Top Gas Recycling Blast Furnace ») ; à Florange, avec captage en haut-fourneau sidérurgique, transport et stockage géologique en aquifères salins avec ArcelorMittal, Air Liquide, BRGM (2009‐2012) pour 28,5 M€ dont 11 d'aides[20]. Une économie de 11 % des émissions est espérée sans stockage géologique, et de 55 % avec stockage (étudié dans le nord de la Lorraine, si l'on y trouve un aquifère salé profond capable de recevoir les quantités de CO2 correspondant à la durée de vie de l’installation[20].

Le stockage géologique, associé à la valorisation du CO2 est éligible aux « investissements d'avenir », sans succès jusque début 2013, probablement en raison du faible prix du carbone[1].

Acteurs de la recherche et du développement

Sites opérationnels

Voici les sites où la séquestration du CO2 est déjà en cours fin 2007.

Sleipner, Norvège

À Sleipner en mer du Nord, la Compagnie Statoil extrait le CO2 d’un gisement de gaz naturel (qui ne doit pas contenir à la vente plus de 9 % de CO2) avec des solvants aminés et le réinjecte depuis 1996 environ un million de tonnes de CO2 par an dans une formation saline, économisant ainsi des millions d'euros de taxes-carbone. En avril 2008, quand une fuite fut découverte et l'expérience interrompue, la quantité de CO2 ainsi stockée depuis 1996 atteignait un total de 10 millions de tonnes. À la suite de l'incident la Direction norvégienne du pétrole a changé sa description de la formation géologique utilisée de « pouvant stocker toutes les émissions européennes pendant des centaines d'années » en « pas très adaptée ».

Weyburn, Saskatchewan, Canada

À Weyburn depuis 2000, on injecte et stocke dans un champ pétrolier découvert en 1954 et partiellement épuisé dans le sud-est de la Saskatchewan (Canada) le dioxyde de carbone produit par une unité de gazéification du charbon située à Beulah (Dakota du Nord, États-Unis). Ce dioxyde de carbone à raison d’1,5 million de tonnes par an permet d’augmenter la production de pétrole (et donc de dioxyde de carbone, indirectement). C'est le premier projet CO2-EOR, ayant disposé d'un budget d'environ un milliard de dollars, associant des partenaires publics et privés de plusieurs pays. Ce gisement initialement estimé à un milliard de barils de pétrole, dont 350 millions environ récupérables selon les techniques conventionnelles. L’application de la technologie CO2-EOR devrait permettre d’extraire 130 millions de barils de plus, le gisement restant actif jusqu’en 2030. Bien sûr, il ne faut pas déduire de cet exemple que la technologie CO2-EOR permet d’augmenter de 35 % les réserves ultimes de pétrole de façon globale : elle ne peut s’appliquer que dans certains gisements, et Weyburn a été choisi parce qu’il s’y prêtait particulièrement bien[26].

L’injection de dioxyde de carbone a commencé en l’an 2000 et a atteint depuis un rythme d’environ 1,8 million de tonnes par an. C'est l'entreprise EnCana qui est chargée de l'opération[27].

In Salah, Algérie

Sur ce site gazier d'Algérie, ce sont 1,2 million de tonnes de CO2 qui sont à partir de 2004 extraite du gaz naturel et réinjectés dans un ancien gisement de gaz naturel chaque année[28]. Ce site de séquestration fait partie intégrante d'un vaste projet de développement des gisements de gaz de la région, dont la production est exportée vers l'Europe après transit par Hassi R'Mel.

Snøhvit, Norvège

Le projet consiste à réinjecter dans un aquifère le CO2 coproduit avec le gaz de ce gisement, à l’image de ce qui est fait à Sleipner et à In salah. L'injection a commencé à Snøhvit en septembre 2007.

K12b, Pays-Bas

Il s’agit un petit gisement de gaz offshore épuisé, dans lequel du CO2 provenant de gisements voisins est injecté. L’opérateur est Gaz de France

Blue Lake, Colorado, États-Unis

Entré en service fin 2007, un petit gazoduc transporte un million de tonnes de CO2 par an depuis une usine de traitement de gaz naturel vers le réseau de pipe-lines existant qui achemine le CO2 du gisement de sheep mountain vers les projets EOR du Texas.

Zama, Canada

Ce petit projet de récupération assistée dans un vieux gisement de pétrole est actif depuis décembre 2007. S'il est d'une toute petite échelle comparé à Weyburn, avec quelque 25 000 tonnes de CO2 par an, il a particularité d'utiliser tel quel le « gaz acide » (70 % CO2, 30 % H2S) issu du traitement de gaz naturel local.

Projets

Ils sont nombreux dans le monde, répertoriés par l’Agence internationale de l'énergie[29] et en France par le BRGM[30].

Projets européens

L'Europe espère que d’ici 2030, 14 % du CO2 émis dans le monde sera stocké de la sorte, et qu'en 2050, 60 % des émissions mondiales du secteur de l’électricité pourrait être ainsi « éliminées », avec une réduction espérée de 87 % des émissions des centrales électriques équipées de système CSC.

Il existe plusieurs projets pilotes dans l'UE, ne concernant aujourd'hui que quelques dizaines de milliers de tonnes par an et pour une période plutôt courte, visant à valider la stabilité de formations géologiques et/ou les technologies utilisables.

  • Miller[31], Royaume-Uni : le projet comprend la construction d’une centrale à décarbonisation utilisant du gaz naturel, et l’emploi du CO2 dans le gisement Miller en mer du Nord.
  • Ketzin, Allemagne : près de Berlin, ce projet de démonstration utilise une formation anticlinale dans un aquifère qui servit au stockage saisonnier de gaz naturel avant d'être abandonnée[32]. Entre juin 2008 et août 2013 environ 67 000 tonnes de CO2 ont été injectées sur ce site pilote de grès poreux à une profondeur de 630 m à 650 m ; un essai in situ de récupération de ce dioxyde de carbone stocké a été mené en octobre 2014[33].
  • Lindach, Autriche : les sources seraient ici deux usines (pâte à papier et engrais) émettant 300 000 tonnes/an. Le piège serait un petit gisement de gaz épuisé.
  • Gisement "Casablanca", Espagne : ce projet de séquestration utilise un ancien gisement de pétrole, mais sans récupération assistée : la production de pétrole sera définitivement arrêtée avant que l’injection de CO2 commence. Ce petit gisement se situe au large de Tarragone et 500 000 tonnes/an de CO2 provenant de la raffinerie de cette ville y seront enfouis.
  • Lacq, en France (Aquitaine) a été le lieu du premier projet, porté par Total inauguré (pour les premières installations) le 22 janvier 2010, 5 ans après son annonce officielle[34], visant la démonstration de toute la chaîne d'oxycombustion, depuis la production d'oxygène à l'injection et stockage de CO2 dans un gisement onshore de gaz naturel épuisé. Une chaudière existante sur le site de Lacq a été convertie à l'oxygène utilisant une technologie d'oxycombustion élaborée par Alstom, Air liquide[35] (partenaire technologique) fournissant l'unité de séparation d'air nécessaire à la production d'oxygène pur. Les fumées d'oxycombustion, dépourvues du ballast azote de l'air, sont composées majoritairement de CO2 et de vapeur d'eau. Après condensation de l'eau, elles sont comprimées, séchées et transportées en tête du puits de Rousse, ou elles sont recomprimées avant d'être injectées. Une importante étude géotechnique est faite, associant des partenaires industriels et universitaires, visant à garantir l'intégrité du réservoir et à obtenir un premier et précieux retour d'expérience sur ce pilote (un pilote de transformation de biomasse est également prévu dans le cadre d'un projet de recherche dit Prebiom public/privé piloté par l'institut français du pétrole, il ne traite que 2 kg/h en 2010 mais doit préfigurer une installation industrielle prévue pour 2013, devant traiter 300 kg/h de résidus agricoles et forestiers torréfiés à 250 °C puis broyé et injecté comme combustible de cogénération ou biocarburant
    Veolia Environnement a annoncé le 13 mars 2008 lancer une étude pilote de captage et stockage géologique de CO2 à Claye-Souilly (77) où le groupe exploite déjà un centre de valorisation et de stockage de déchets. Le CO2 issu de la combustion de biogaz (200 000 t/an de CO2 sur plusieurs années) sera injecté à plus de 1 500 m de profondeur dans un aquifère salin dépourvu d'intérêt écologique et économique. Le groupe fera appel à Geogreen filiale commune de l’IFP, du BRGM et de Géostock, créée en 2008, spécialisée dans le transport et stockage souterrain de CO2.

Projets nord-américains

Les États-Unis ont une longue expérience de la technologie CO2-EOR. Le principal objectif est maintenant de construire des centrales électriques équipées de séquestration du CO2.

  • Canada occidental : nombre de gisements de gaz de cette région contiennent une part appréciable de H2S et de CO2. Nombre d’opérateurs injectent ces gaz dans des aquifères ou des gisements épuisés. Ces opérations ont été entreprises dans le but de se débarrasser du H2S, gaz très polluant, mais elles séquestrent aussi de petites quantités de CO2.
  • Rangely, Colorado : CO2-EOR actif depuis 1986 utilisant une partie du CO2 produit en association avec du gaz naturel et de l’hélium provenant du site de LaBarge.
  • Gisements de pétrole du Wyoming : le CO2, provenant également de l’usine de traitement de LaBarge, est acheminé vers plusieurs gisements via un nouveau pipeline. Il alimente principalement les deux grands gisements de Salt Creek (projet commercial d’Anadarko, visant surtout à la production de pétrole) et de Teapot Dome (projet public, privilégiant la séquestration du CO2. Plusieurs gisements moindres seront reliés.
  • Carson (Californie) : le projet comprend la construction d’une centrale à gazéification transformant les résidus de pétrole produits par une raffinerie en hydrogène, et l’utilisation du CO2(4 millions de tonnes par an pendant 10 ans à compter de 2011, ce qui en fait un des plus grands projets du monde) dans un gisement de pétrole.
  • Centrale de Saskpower : cette compagnie électrique canadienne prévoit une centrale à charbon utilisant la technologie d’oxycombustion, d’une capacité de 300 MW, qui entrerait en service dès le début de la prochaine décennie si le projet est approuvé.
  • New Haven, Virginie-Occidentale : annoncé[36] par American Electric Power en mars 2007, ce projet appliquera la séquestration post-combustion à une partie des gaz d'échappements d'une grande centrale à charbon. Environ 100 000 t/an de CO2 seront séquestrés dans un aquifère local, très profond. Le projet pourrait être opérationnel dès 2008, et devrait donner naissance à une version plus grande, installée dans l'Oklahoma, pour 1,5 Mt/an en 2010.
  • Beulah (Dakota du Nord) : un million de tonnes de CO2 par an seront capturés d'une centrale au charbon existante, et injectés dans le pipeline déjà construit pour le projet Weyburn. La capture sera post-combustion, à base d'ammoniac.
  • Mount Simon (Ohio) : cette formation aquifère recevra 100 000 tonnes de CO2 par an venant d'une usine d'éthanol. Ce projet mené dans le cadre du Midwest Regional Carbon Sequestration Partnership devrait démontrer la capacité de cette grande structure géologique à servir plus tard au stockage à plus grande échelle.
  • Kimberlina (Californie) : une centrale Oxy-combustyion DE 50 MW fournira un million de tonnes de CO2 par an, qui dans le cadre du West Coast Regional Carbon Sequestration Partnership sera réparti entre plusieurs structures souterraines à la verticale de la centrale, pour comparer leur capacité à stocker le CO2.
  • Alberta (Canada) : le producteur d'engrais Agrium et la compagnie pétrolière naissante Enhance Energy ont signé un accord[37] selon lequel du CO2 provenant d'une usine d'engrais Agrium servira à la récupération assistée dans plusieurs petits gisements à partir de 2011.
  • Occidental : cette compagnie pétrolière entend appliquer la technologie CO2-EOR à plusieurs gisements du bassin permien actuellement à l'abandon ou proche de l'abandon. Le CO2 viendra d'une nouvelle usine de traitement du gaz naturel, il s'agit donc d'une source anthropique. 500 millions de barils doivent être rendus extractibles[38].

Autres projets

  • Gorgon[39], Australie : autre projet en aquifère, associé à l’exploitation d’un groupe de gisements de gaz naturel contenant trop de CO2. C'est un projet à très grande échelle, visant un total de 120 Mt de CO2 sur 40 ans.
  • Stanwell, Australie : une centrale à charbon, cousin du projet Futuregen américain, dont le CO2 serait envoyé dans un aquifère. Si le projet est mené à bien, il pourrait être en opération dès 2010.
  • Prelude, Australie : il s'agit d'un projet d'usine de gaz naturel liquéfiée flottante (2012), qui pourrait inclure la séquestration du CO2.
  • Daqing, Chine : une petite partie de ce grand gisement de pétrole pourrait recevoir une injection de CO2 (environ 1 million de tonnes par an) dès 2009, ce qui permettrait la production d'environ 30-40 000 barils/supplémentaire. Le CO2 viendrait d'une centrale au charbon, les détails techniques ne sont pas connus. Le Japon est impliqué dans le projet[40].
  • Sécunda, Afrique du Sud : Encore au stade des premières études, ce projet stockerait du CO2 issu de la production de carburants synthétiques dans des veines de charbon.

Prospective

Dans les projets existant, une source de CO2 est reliée directement à un projet de séquestration. Ce n'est pas forcément la meilleure solution : cette connexion directe rend les deux éléments interdépendants. La durée de vie d'un projet CO2-EOR est typiquement d'une quinzaine d'année, alors qu'une centrale électrique est construite pour 40 ans. À terme, plusieurs sources et plusieurs sites de séquestrations seront probablement reliés. Un réseau expérimental de CO2 est en cours de développement dans le Permian Basin.

Des applications « en amont » au secteur du transport, voire du chauffage sont envisagées, en convertissant préalablement des énergies fossiles en une forme d'énergie « décarbonisée » (totalement : électricité, hydrogène, ou partiellement, comme du méthanol).

Une combustion chimique de carburants sur lit fluidisé, éventuellement catalysée est aussi envisagée ;
l’oxygène n'y serait pas gazeux mais absorbé sur des particules d'oxydes métalliques théoriquement réutilisables un certain nombre de fois en boucle chimique (chemical looping combustion). Les émissions seraient alors essentiellement constituée de CO2 et vapeur d'eau pouvant être séparées par condensation (avec possibilité de récupérer quelques calories), après quoi les particules de métal pourraient être rechargées en oxygène dans l'air sur un autre lit fluidisé, avec récupération de la chaleur dans les phases suivant la « combustion ».

Des systèmes de photosynthèse artificielle ou à partir de végétaux marins ou terrestres dopés, ou à partir d'OGM sont évoqués ou en cours d'étude, qui pourraient être associés à un stockage géologique passif (sédimentation dans les océans) ou actifs, mais dans tous les cas avec des coûts élevés et/ou des risques environnementaux, de larges incertitudes et des rendements très inférieurs à ceux des puits de carbone végétaux, planctoniques ou coralliens naturels.

Coûts

Il combine les coûts de captage et filtration, compression, transport, injection, ainsi que ceux de creusement de cavités ad hoc et des mesures de suivi et de sécurité qui s'imposeront. Le seul coût du seul captage en sortie d'une centrale thermique est estimé entre 20 et 40  par tonne de CO2, ce qui conduit par exemple à un coût de 4 à 11 milliards d'euros par an pour capter le carbone émis par les centrales à charbon allemandes[41]. Le coût du transport par gazoduc varie de 0,5 à 15  par tonne et par centaine de kilomètres[42].

Une partie de ces coûts pourrait être compensée par la valorisation du carbone récupéré. celui-ci peut notamment être injecté dans certains puits de pétrole pour en chasser les hydrocarbures (« récupération assistée »). Une petite partie des coûts pourrait aussi être prise en charge de la commercialisation de CO2 comme solvant ou réfrigérant (neige carbonique) ou comme produit chimique utile dans certains procédés (intermédiaires chimiques pour la chimie organique ou la production de carburants de synthèse…)[1].

Conclusion

La séquestration du CO2 étudiée par le GIEC, intéresse un nombre croissant de chercheurs et de décideurs, ainsi que le public, mais ne semble pas être une solution disponible à court terme ni opérationnelle à grande échelle à moyen terme. Des expérimentations sont en cours et une dizaine de projets d'envergure industrielles pourraient être opérationnels en 2010, mais ils resteront insignifiants par rapport aux émissions mondiales d'environ 25 milliards de tonnes par an de CO2. Pour séquestrer rien que 10 % de ces émissions, il faudrait environ 1 000 projets de grande envergure, et plusieurs centaines de sites sécurisés, ainsi que des milliers de kilomètres de pipe-line ou des milliers de navires spéciaux pour transporter le CO2 liquéfié ou inerté. Une diminution des émissions à la source (facteur 4 ou 5) et la protection et restauration des puits naturels de carbone semblent donc rester une priorité urgente, encore à mettre en œuvre.

Le gouvernement des États-Unis a approuvé la construction de la première centrale du CCS du monde (FutureGen), et BP prévoit une usine de capture et de stockage de carbone de 350 MW en Écosse (ce projet a été annulé pour des raisons financières)[43] ; le CO2 séparé du gaz naturel sera injecté dans le champ gazier de Miller (mer du Nord). En Europe, le projet CASTOR est de « définir des stratégies » permettant à terme de séquestrer 10 % des émissions de CO2 européenne, soit 30 % de celles des centrales électriques et autres grandes sources fixes (raffineries, industrie lourde). Ce chiffre n'est fixé que pour l'étude de scénarios et non comme un réel objectif.

Selon le GIEC, si les lacunes au niveau des connaissances sont comblées et si diverses conditions sont remplies, les systèmes de piégeage et de stockage du CO2 pourraient être déployés à grande échelle d’ici quelques décennies, pour autant que des politiques explicites limitant fortement les émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère soient mises en place. Ces systèmes ne sont susceptibles d’être largement adoptés par le secteur de la production d'électricité – où le potentiel est de loin le plus grand – que quand le prix de l'émission d'une tonne de CO2 dépasse les 25-30 dollars US pour toute la durée du projet [44].

Notes et références

  1. a b c d e f g h i j k l m n o et p ADEME (2013), Captage et stockage géologique du CO2 (CSC), coll. Les avis de l'Ademe, PDF, 5 p.
  2. Enerpresse, 19 juin 2008, p. 4
  3. a et b RTBF (2012) Climat: le risque sismique rend hasardeux le stockage géologique du CO2 2012-06-19.
  4. (Table 3;5, IPCC, 2005 cité par Carbon capture and storage)
  5. Rapport Carbon Dioxide Storage: Geological Security and Environmental Issues – Case Study on the Sleipner Gas Field in Norway de Semere Solomon, Fondation Bellona, juillet 2006 [PDF]
  6. (en) en:Carbon capture and storage
  7. [PDF]Gisements naturels de CO2 en France, BRGM, voir archive.
  8. IPCC Guidelines, 2006. 2006 IPCC Guidelines for National Greenhouse Gas Inventories. Carbon dioxide Transport, Injection and Geological Storage (Chapter 5).
  9. OSPAR, 2006. OSPAR Commission. Placement of CO2 in subsea geological structures. À report prepared by Norway and the United Kingdom and reviewed by the OSPAR Offshore Industry Committee and the OSPAR Biodiversity Committee
  10. Hendriks, C., Mace, M.J., Coenraads, R., 2005. The Impacts of EU and International Law on the Implementation of Carbon Capture and Geological Storage in the European Union.
  11. MJ Mace, C Hendriks, Rogier Coenraads, Regulatory challenges to the implementation of carbon capture and geological storage within the European Union under EU and international law ; International Journal of Greenhouse Gas Control, 2007 - Elsevier, [PDF]
  12. Club CO2, Les travaux sur la normalisation internationale du CSC sont lancés, Paris, 01/10/2012, consulté 2013-03-27.
  13. Purdy, R., Macrory, R., 2004. Geological carbon sequestration: critical legal issues, Tyndall Centre Working Paper No. 45, at 24–25.
  14. a b et c Directive 2009/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 relative au stockage géologique du dioxyde de carbone et modifiant la directive 85/337/CEE du Conseil, les directives 2000/60/CE, 2001/80/CE, 2004/35/CE, 2006/12/CE et 2008/1/CE et le règlement (CE) no 1013/2006 du Parlement européen et du Conseil
  15. Stockage géologique du dioxyde de carbone, résumé
  16. (en) European Technology Platform on Zero Émission Fossil Fuel Power Plants (ETP ZEP)
  17. (fr) Rapport : les stockages souterrains de gaz carbonique ; cadrage juridique, 5 avril 2006[PDF]
  18. Art. L. 229-31 du code de l'environnement, modifié par l'art. 80 (V) de la loi Grenelle II no 2010-788 du 12 juillet 2010
  19. Article 1 de la loi no 65-498 du 29 juin 1965 relative au transport des produits chimiques par canalisations
  20. a b c d e et f Ademe (2012), Bilan des activités de l’ADEME sur le CSC, octobre 2011, Colloque : Captage, stockage, valorisation du CO2 du 11 octobre 2011 ; Alcazar - Marseille, octobre 2011, PDF, 30 p.
  21. a et b Décret no 2011-1411 du 31 octobre 2011 relatif au stockage géologique de dioxyde de carbone afin de lutter contre le réchauffement climatique (JO, 1er-11-2011, p. 18415)
  22. décret no 2006-648 du 2 juin 2006 relatif aux titres miniers et aux titres de stockage souterrain
  23. Décret no 2006-649 du 2 juin 2006 relatif aux travaux miniers, aux travaux de stockage souterrain et à la police des mines et des stockages souterrains
  24. Soulte prévue au d du I de l'article L. 229-47
  25. Site du Club CO2, consulté 2013-03-27.
  26. (fr) Dans les profondeurs de la terre : le projet Weyburn de surveillance et de stockage du CO2 sur le site Ressources naturelles Canada du gouvernement canadien.
  27. (en) CO2 miscible flood sur le site d'Encana
  28. (en) IPCC Special Report on Carbon Dioxide Capture and Storage p. 33,
  29. (en) Base de données de l’IEA.
  30. (fr) Base de données du BRGM sur les projets passés et en cours.
  31. (en) site officiel BP
  32. Le Monde, 2 juillet 2008
  33. Essai in situ : récupération de CO2 stocké en couche géologique, Bulletins électroniques du Ministère des affaires étrangères, 24 octobre 2014.
  34. (fr) page du site officiel
  35. (fr) page du site officiel
  36. (en) annonce : AEP to Test New Technology at New Haven Site
  37. Agrium to supply CO2 to Enhance Energy's EOR projects 5/27/2008 7:44 AM ET (RTTNews)
  38. Occidental to Develop Major New Texas Enhanced Oil Recovery Assets, Increasing U.S. Production; LOS ANGELES, 30 juin 2008 (PRIME NEWSWIRE)
  39. (en) site officiel de Gorgon
  40. Japan, China to join in 300 $ mln CO2 project : paper, Reuters, 2 mai 2008
  41. Captage du carbone, étude du cas allemand
  42. Demain, l'énergie, Christian Ngo
  43. (en) Near-term opportunities for carbon dioxide capture and storage
  44. (fr) Consensus scientifique sur le piégeage et stockage du CO2 du site GreenFacts, mars 2008.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Bibliographie