Sirop d'érable

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Sirop d’érable du Québec
Fabrication du sirop d'érable par les Amérindiens en Nouvelle-France (XVIIIe siècle) par Joseph-François Lafitau.

Le sirop d'érable est un sirop produit à partir de la sève brute, ou « eau d'érable », du début du printemps concentrée par ébullition. La sève brute est distincte de la sève élaborée ou sève d'érable qui arrive en fin de printemps et qui produit un sirop d'un goût tout autre. On appelle sa culture l'acériculture. Le sirop d'érable est produit dans les forêts du nord-est de l'Amérique du Nord (surtout au Québec, mais aussi en Ontario, dans les provinces maritimes du Canada et en Nouvelle-Angleterre), et se vend aujourd'hui partout dans le monde, dont au Japon (principal importateur).

La technique était déjà en partie maîtrisée par les populations indigènes du Canada établies sur le territoire de l’érable, lors de l'arrivée des Européens. On s'en servait en particulier comme aliment tonique, au printemps. De nombreuses légendes amérindiennes mettent en scène le sirop d'érable[1].

Aujourd'hui, la consommation de sirop d'érable est généralisée au Québec et en Ontario où le sirop est parfois consommé au quotidien, se vendant à un prix relativement peu élevé. Le sirop d'érable est aussi populaire dans des pays comme le Japon ou l’Allemagne en tant que produit exotique rare. Au Canada et aux États-Unis, le sirop peut être substitué par le « sirop de table », de prix moins élevé, contenant du sirop de maïs et des arômes artificiels. Au Québec, on appelle péjorativement « sirop de poteau » le sirop de maïs ou tout autre type de sirop sucré considéré comme étant inférieur au sirop d’érable.

Fabrication

Cabane à sucre dans son érablière à Pont-Rouge au Québec.

Parmi les nombreuses espèces d'érables, trois sont principalement utilisées pour la production de sirop d'érable : l'érable noir (Acer nigrum) et l'érable à sucre (Acer saccharum) mais aussi l'érable rouge (Acer rubrum) dans une moindre proportion[2].

Le sirop d'érable est majoritairement produit au Canada — 78 % de la récolte mondiale[3] — particulièrement au Québec (74 % de la production mondiale, plus de 90% de la production canadienne)[4], avec une plus faible production en Ontario et au Nouveau-Brunswick. Il est aussi produit dans certains états des États-Unis d'Amérique, notamment au Vermont, dans l'état de New York, au Massachusetts, au New Hampshire, au Connecticut, au Maine, et en Pennsylvanie. Le climat caractéristique de ces régions à la fin de l’hiver est un facteur déterminant de la production de sirop d’érable.

Récolte de l'eau d'érable

Seaux pour la récolte traditionnelle de l'eau d'érable.
Récolte aux États-Unis, où la méthode est très semblable à celle du Québec.

Les acériculteurs collectent l'eau d'érable essentiellement à la fin de l'hiver ou au début du printemps, suivant les régions, lorsque les nuits de gel sont suivies par des jours de dégel (température diurne positive, journée idéalement ensoleillée, et température nocturne négative) — on appelle cette période la « saison des sucres » ou le « temps des sucres » au Québec[5]. Une entaille (dans la version traditionnelle) permet de récupérer l'eau d'érable, liquide qui contient environ 2 % à 3 % de sucre. Ce sucre (essentiellement du saccharose)[6] provient des racines de l'arbre. Au printemps, il monte sous l’écorce, à travers le xylème, dans la totalité de l'arbre afin de fournir l'énergie suffisante pour relancer son métabolisme.

L'eau d'érable (ou sève brute) est différente de la sève élaborée. Celle-ci, nettement plus chargée en minéraux et molécules organiques complexes, ne remonte par les racines que lorsque le métabolisme de l'arbre est relancé. L'arrivée de la sève et de son goût amer marque la fin de la récolte d'eau d'érable.

On ne récolte jamais l'eau d'un érable dont le tronc fait moins de 20 cm de diamètre. La règle générale est donc d'attendre jusqu'à 45 ans après la plantation d'un érable avant de commencer à récolter son eau. Cependant, un érable à sucre peut vivre jusqu'à 300 ans, voire davantage. Il peut donc donner de l'eau à chaque printemps pendant un grand nombre d'années.

Évaporation

Exploitation traditionnelle et artisanale de l'eau de l'érable

C'est uniquement après l'évaporation que l'eau devient plus consistante et donne naissance au sirop d'érable. Il faut entre 35 et 40 litres d'eau d'érable pour obtenir un litre de sirop.

Il est important d’atteindre le juste niveau d’évaporation car, si le sirop est trop dense, il cristallisera ; par contre, s'il est trop liquide, il risque de fermenter. La température idéale à donner au sirop d'érable est de 3,5 °C de plus que la température d'ébullition de l'eau, par exemple, à 101,3 kPa, l'eau bouillant à 100 °C, le sirop sera prêt lorsqu'il atteindra 103,5 °C. Il faut adapter ces valeurs à celle de la pression atmosphérique du lieu (altitude) et du moment. On peut aussi mesurer la densité du produit fini à l'aide d'un hydromètre ou son indice de réfraction à l'aide d'un réfractomètre. La densité doit correspondre à 66 degrés Brix au minimum. Dans la pratique industrielle, la technique de l'osmose inverse permet une première étape de concentration pour une dépense énergétique moindre.

Le sirop d'érable est ensuite classé par teinte : d'extra clair à foncé. Plus le sirop est clair, meilleure est la classe, mais moins le goût est prononcé. Le sirop le plus fin est produit en mi-saison. Pendant longtemps, la préférence est allée vers un sirop d'érable qui soit le plus clair possible. Jusqu'au XVIIIe siècle, le sirop d'érable était principalement consommé directement par les producteurs ou par leurs proches. À l'époque, il était pour ces personnes plus difficile et plus cher d'obtenir du sucre de canne que du sirop d'érable. On cherchait à obtenir un sucre d'érable qui se rapproche le plus possible du sucre de canne. Aujourd'hui, certains reviennent à des sirops plus colorés car ils ont un goût plus prononcé.

Les différentes qualités de sirop et d'eau d'érable influent sur le processus, généralement réalisé à la cabane à sucre.

Classification

Différentes catégories de sirop d'érable.

Les acériculteurs classent le sirop d'érable en cinq catégories :

  • Extra clair : AA
  • Clair : A
  • Moyen : B
  • Ambré : C
  • Foncé : D

Certification biologique

Le sirop d'érable est un produit naturel sans aucun additif, cependant il peut être produit selon des normes plus strictes, les normes biologiques qui visent l’aménagement de l’érablière, la diversité végétale, la fertilisation éventuelle, le contrôle des ravageurs, l’entaillage, la collecte et la transformation de l’eau d’érable. Elles font l'objet d’un cahier des normes, respectées par les acériculteurs biologiques et contrôlées de manière indépendante. Selon les sources, entre 12 %[7] et 15 %[8] du sirop d’érable produit au Québec est certifié biologique.

Composition

Sirop d'érable
Valeur nutritionnelle moyenne
pour 100 g
Apport énergétique
Joules 1088 kJ
(Calories) (260 kcal)
Principaux composants
Glucides 67,04 g
Amidon ? g
Sucres 67,90 g
Fibres alimentaires 0,0 g
Protéines 0,04 g
Lipides 0,06 g
Saturés 0.007 g
Eau 32,39 g
Minéraux et oligo-éléments
Calcium 102 mg
Fer 0,11 mg
Magnésium 21 mg
Phosphore 2 mg
Potassium 212 mg
Sodium 12 mg
Zinc 1.47 mg
Vitamines
Provitamine A 0 mg
Vitamine A 0 mg
Vitamine B1 0.066 mg
Vitamine B2 1.270 mg
Vitamine B3 (ou PP) 0.081 mg
Vitamine B6 0.002 mg
Vitamine C 0 mg
Vitamine D 0 mg
Vitamine E 0 mg
Vitamine K 0 mg
Acides aminés
Acides gras

Source : USDA Nutrient Database (en)

Le sirop d'érable contient principalement des glucides, 68 % de sucrose (ou saccharose), 0,4 % de glucose et 0,3 % de fructose et de l'eau (31 %). Il est aussi riche en sels minéraux tels que le potassium (1 300-3 900 ppm), le calcium (400-2 800 ppm), le magnésium (12-360 ppm), le manganèse (2-220) et le phosphore (79-183 ppm)[9]. Il contient aussi des acides organiques tels que l'acide malique (de 0,1 à 0,7 %), et en moindre quantité les acides citrique, succinique et fumarique (moins de 0,06 ppm)[10]. Le pH du sirop d'érable varie entre 5,6 et 7,9[10].

L'apport énergétique d'une cuillère à table (15 ml) de sirop d'érable est de 50 kilocalories[2].

Produits dérivés

Étalage des produits à base de sirop d'érable à Ottawa

Plus on réduit par évaporation le sirop, plus on obtient un produit consistant.

  • La tire d'érable est constituée de sirop, chauffé jusqu'à avoir une consistance beaucoup plus ferme. Traditionnellement, on la dépose chaude sur de la neige, qui la fait refroidir, pour la déguster molle enroulée autour d'un bâton. Une fois refroidie, beaucoup plus dense, elle se vend aussi en pot et se mange à la cuillère.
  • Le beurre d'érable, sorte de fondant qui peut être utilisé comme pâte à tartiner. Le beurre d'érable ne contient pas de matière grasse, que du sucre.
  • Le sucre mou, moulé en pains, coulé en cornets ou en bonbons.
  • Le sucre dur (appelé sucre d'érable), aussi moulé en pains ou en bonbons.

Bénéfices sur la santé

Le sirop d'érable comporte des polyphénols et affiche une valeur ORAC (Oxygen Radical Absorbance Capacity) comparable à celle de fruits et légumes courants de notre alimentation, tel le brocoli[note 1]. Il faut noter que l'USDA ne considère plus les valeurs ORAC comme ayant une valeur scientifique[11]. L'eau d'érable et le sirop d'érable contiennent également d'importantes quantités de terpènes, et plus particulièrement d'acide abscissique. Cet acide est reconnu, entre autres, pour stimuler le relâchement de l'insuline par les cellules pancréatiques et accroître la sensibilité des cellules adipeuses à l'insuline, ce qui lui confère des propriétés thérapeutiques pour le syndrome métabolique et le diabète[12].

Le sirop d'érable du Canada renferme plus de 20 composés antioxydants selon des travaux du chercheur américain Navindra Seeram de l'Université de Rhode Island[13].

Utilisations culinaires

Les gaufres accompagnées de sirop d'érable
  • La principale utilisation du sirop d’érable consiste à en verser sur des crêpes, des gaufres ou des pancakes.
  • Il peut être utilisé à la place des fruits dans le yogourt nature pour en rehausser le goût. Il est aussi souvent ajouté aux céréales pour la même raison.
  • On le mélange à la crème glacée, au parfum de vanille ou nature, sous forme de sirop ou encore de brisures de pain de sucre d’érable, sa forme cristallisée, pour une texture plus croustillante.
  • Des vins apéritifs, mousseux ou plats sont fabriqués par fermentation du sirop d’érable pur ou macéré avec d’autres herbes, plantes ou jus de fruits. Une distillation subséquente permet d’obtenir des liqueurs apéritives ou digestives, à des degrés divers de concentration éthylique. Des cuisines plus tendance, des pâtisseries également, usent judicieusement des divers alcools d’érable en finition ou en composition d’un mets, pour cuire, déglacer, flamber.
  • On l’utilise dans plusieurs recettes, dont celle des « fèves au lard » qui consiste à les faire longuement cuire au four à feu doux dans la graisse de porc avec bouquet garni et à les servir toujours chaudes nappées de sirop dans un mélange sucré-salé. Ce plat québécois a traditionnellement utilisé la gourgane pour sa taille et sa richesse nutritive, mais toute autre fève cultivée localement remplissait bien cet office.
  • On badigeonne de sirop d’érable certaines viandes, dont le porc, le jambon ou les côtes levées avant de les cuire. Sa saveur particulière, son goût sucré et ses arômes naturels pénètrent la viande et il caramélise la surface des morceaux de viande rôtis à laquelle il donne un glaçage brillant.

Conseils

  • Des cristaux de saccharose peuvent précipiter dans le sirop. Ce phénomène s'explique par un déséquilibre entre la quantité de sucre et d'eau contenue dans le sirop. Pour remédier à la situation, une solution consiste à chauffer le sirop en bain-marie jusqu'à ce que les cristaux soient dissous.
  • Lorsqu'on profite de la saison des sucres pour faire provision de sirop d'érable, il peut être conservé au réfrigérateur ou au congélateur jusqu'au prochain printemps. Une fois la boîte de conserve ouverte, le contenu peut être transféré dans un récipient muni d'un couvercle hermétique.
  • L'apparition de pellicules blanchâtres (moisissures) à la surface peut être supprimée en passant le sirop à travers un coton à fromage et en l'amenant à ébullition ; une utilisation rapide est ensuite nécessaire.
  • Lors de l'ébullition de l'eau d'érable, si celle-ci s'emporte comme le fait parfois le sucre chauffé, il suffit d'y ajouter une faible quantité de corps gras, tel de la crème ou du beurre.

Notes et références

Notes

  1. Les valeurs ORAC du sirop d'érable semblent variables et comprises entre 391 et 2651 selon la Fédération des Producteurs Acéricoles du Québec

Références

  1. « Légendes amérindiennes », Érablière du lac Beauport (consulté le )
  2. a et b (en) William M. Ciesla. CHAPTER 5 - SAP AND RESIN - SYRUPS, SUGAR AND CONFECTIONERY PRODUCTS - MAPLE SYRUP AND RELATED PRODUCTS. Non-Wood Forest Products from Temperate Broad-Leaved Trees. Rome, 2002. FAO ISBN 92-5-104855-X
  3. Pourcentage obtenu par calcul à partir des données de la page http://www.siropderable.ca/Afficher.aspx?page=38&langue=fr
  4. Site de la Fédération des Producteurs Acéricoles du Québec
  5. Explication de la saison des sucres sur le site de Citadelle
  6. Le temps des sucres
  7. Site de la Fédération des Producteurs Acéricoles du Québec
  8. Article de Canoë sur le sirop d'érable biologique, 1er avril 2008
  9. (en) David W. Ball The Chemical Composition of Maple Syrup Journal of Chemical Education, October 2007, 84(10), 1647-1650. [PDF]
  10. a et b (en) J.G. Stuckel and N.H. Low. The chemical composition of 80 pure maple syrup samples produced in North America. Food Research International, Volume 29, Issues 3-4, 1996, Pages 373-379. DOI 10.1016/0963-9969(96)00000-2
  11. (en) Note sur les valeurs ORAC, sur le site de l'USDA
  12. (fr) Dr Desjardins L'eau d'érable et le sirop d'érable contiennent des quantités appréciables d'acide abscissique, une phytohormone reconnue par la communauté scientifique pour ses bénéfices sur la santé. MONTRÉAL, Communiqué, mars 2010.
  13. (fr) Le sirop d'érable du Canada renferme plus de 20 composés antioxydants reconnus pour leurs effets bénéfiques sur la santé et inhiberait la prolifération de cellules cancéreuses

Voir aussi

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Articles connexes

Liens externes