Vierge à l'Enfant
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La Vierge à l'Enfant, ou Madone, est un thème récurrent en peinture et en sculpture religieuses, renvoyant à la Nativité du Christ et à la maternité de la Vierge Marie. Il s'agit d'un thème iconographique permettant d'évoquer la double nature du Christ, humaine et divine.
Aperçu historique[modifier | modifier le code]
Paradoxalement, alors que l'enfance de Jésus est presque totalement éludée par les évangélistes canoniques, le sujet de la Vierge à l'enfant est le thème le plus représenté de tout l'art chrétien devant la crucifixion, alors qu'il ne fait référence à aucun texte biblique[1], mais est probablement le fruit d'une réutilisation d'un thème archaïque (déjà présent dans la figure de la déesse égyptienne Isis allaitant Harpocrate, l'Horus enfant[2]). On trouve, ainsi, de nombreuses représentations de la « femme à l'enfant » (allaitante ou pas) dans la plupart des cultures du monde, y compris dans l'Europe pré-chrétienne[1].
Dans les premiers temps du christianisme, l'art européen privilégie la Vierge représentée dans l'Adoration des mages. En peinture et sculpture romane, les Vierges les plus fréquemment représentées, du XIe au XIIIe siècles, sont des « Vierge à l’Enfant » assises sur un trône et tenant un Jésus adulte en miniature sur ses genoux. Elles sont appelées sedes sapientiae, « Siège de la Sagesse » ou « Trône de la Sagesse ». Au XIIIe et XIVe siècles, l'art gothique privilégie la figure centrale de la Vierge au détriment de l'Enfant qui domine de moins en moins dans la composition, tandis que l'art baroque à l'époque de la Contre-Réforme le fait disparaître complètement pour mettre en exergue une Vierge pure[3].
L'axe des regards entre la mère et son enfant est fréquemment souligné, de même que les signes symboliques des doigts et mains du bébé, également trouvés chez un ensemble de personnages sculptés ou peints dans les églises de la chrétienté.
Peinture[modifier | modifier le code]
Vierge enceinte (Virgo paritura)[modifier | modifier le code]
Sujet moins fréquent mais ayant néanmoins donné de très belles représentations, notamment la Madonna del Parto de Piero della Francesca, fresque détachée, restaurée, et transférée au musée de Monterchi en Toscane (Italie).
Madone (Vierge à l'enfant)[modifier | modifier le code]
La Vierge à l'Enfant ou Madone, en français écrit avec un seul n, se différencie de la Madonna en italien, avec deux n, signifiant le personnage seul de la Vierge. En italien l'expression consacrée est Madonna col Bambino.
Les peintres du Moyen Âge représentent l'enfant Jésus « fréquemment une tête d’adulte (avec le début de calvitie de l’homme fait), parce qu’il est un puer senex, un enfant vieillard, manière imagée de figurer qu’il est bien la Sagesse de Dieu» ». À la fin du Moyen Âge et à la pré-Renaissance, les artistes privilégient un Jésus nu ou très légèrement vêtu, le sexe en général bien apparent, avec un corps d'enfant plus réaliste, les commanditaires des œuvres voulant montrer le mystère de l'Incarnation. Les peintres italiens dessinent un Jésus plus grassouillet que ceux de l’Europe du Nord, à la fois pour des raisons de préférences esthétiques, mais peut-être à cause de l’influence du climat sur la croissance des nourrissons (influence du soleil et de la vitamine D)[3].
Quelques exemples :
La Madone à l'œillet (1478) musée de Munich (Alte Pinakothek) de Léonard de Vinci
La Vierge à l'Enfant de Martin Schongauer avec une clôture de roses (1473), église des Dominicains de Colmar
La Madone à la prairie, c 1505-06. Raphael. Kunsthistorisches Museum, Vienne
Madonna col Bambino de Cimabue
Vierge à l'Enfant de Fra Filippo Lippi avec un Jésus potelé
La Sainte Famille de Jan Cornelisz Vermeyen représente un Jésus à la musculature imposante
Vierge à l'enfant, vers 1509, de Quentin Metsys, musée des beaux-arts de Lyon
Madonna et l'enfant avec deux anges Musée national de Varsovie de Giambattista Pittoni
Vierge à l'enfant, 1642, de Laurent de La Hyre, musée du Louvre
La Madone byzantine[modifier | modifier le code]
La Madone byzantine, dite Hodigitria, est une Vierge au trône, soutenant l’Enfant sur le bras gauche, la main droite ramenée devant le buste :
La Madone allaitant[modifier | modifier le code]
La Madone allaitant ou Madonna del Latte, et en latin Maria lactans et en grec Galaktotrophousa :
Vierge allaitant (Madonna litta) de Giovanni Antonio Boltraffio
Virgo lactans couronnée du livre d'heures de Marie de Bourgogne (1477)
Jan Gossaert, ca 1508-10. Musée Calouste-Gulbenkian
La Madone allaitant. Le Corrège, Musée des beaux-arts de Budapest
Vierge allaitant l'Enfant, Lucas Cranach l'Ancien
La Madone lisant[modifier | modifier le code]
La Madone lisant (en italien : Madonna leggente). La Vierge tient un livre ouvert devant elle, qu'elle lit ostensiblement, parfois même avec l'Enfant.
- Nombreuses Madone lisant chez Raphaël
La Madone lisant de Bernardino Butinone (1490)
Vierge à l'Enfant lisant, National Gallery of Victoria, Flandres, XVe siècle
La Madone Connestabile, Raphaël (1504)
Vierge et l'Enfant, au centre du tableau, entourés[modifier | modifier le code]
Sainte Famille[modifier | modifier le code]

Parfois, l'Enfant Jésus n'est pas seul avec sa mère Marie, mais accompagné de sainte Anne, mère de Marie, ou d'un saint, lui aussi enfant. La mythographie christique veut que ce soit saint Jean-Baptiste, avec sa peau de mouton (ou un agneau du sacrifice le symbolisant). Cette représentation rappelle qu'ils se connaissent de prime jeunesse puisque sainte Élisabeth, sa mère, est une cousine de Marie. On peut voir présents également d'autres personnages de la Sainte Famille.
Conversation sacrée[modifier | modifier le code]
Le thème de la Conversation sacrée (ou Sainte Conversation) comporte, en plus de la Vierge à l'Enfant (trônant au centre) et outre quelques personnages de la Sainte Famille, la présence de saints et du donateur ou commanditaire du tableau souvent dans un groupe parlant entre eux.
La Sainte Famille (1507)
RaphaëlVierge à l'Enfant avec Sainte Élisabeth , Jean le Baptiste enfant et un ange. Andrea del Sarto
Vierge trônant[modifier | modifier le code]
Vierge à l'Enfant trônant de Carlo Crivelli
Vierge à l'Enfant trônant avec deux anges musiciens (livre d'heures de Marie de Bourgogne, 1477)
Vierge à l'Enfant de Jean Poyer (Musée du Louvre) XVe siècle
Vierge à l'Enfant de Simone Vaulchier du Deschaux. Premier quart du XIXe siècle.
Vierge entourée d'anges[modifier | modifier le code]
La Vierge et l'Enfant entourés d'anges, Diptyque de Melun (1450) de Jean Fouquet
La Vierge aux anges (1900) de William Bouguereau
Vierge de l'humilité[modifier | modifier le code]
Il s'agit d'une représentation sans trône, la Vierge assise sur le sol, portant l'Enfant nu.
Vierge à l'Enfant accompagnée d'un objet particulier[modifier | modifier le code]
Un certain objet majeur (outre un quelconque attribut vestimentaire traditionnel), présent dans le décor du tableau, peut en soutenir le titre dans un but descriptif, mais aussi révélant parfois le commanditaire :
- Chez Michel-Ange : Vierge à l'escalier
- Chez Raphaël :
- Madone de la chaise, pour le style désignant le pape Léon X, commanditaire du tableau
- Madone aux œillets
- Les différentes Madones au livre (Madonna leggente) renvoient, elles, à l'iconographie chrétienne de la Vierge issue d'une famille lettrée.
- Liste d'œuvres, chez Raphaël, la Madonna del Cardellino
- et autres peintres
La Vierge à l'Enfant à la rose
Simon Vouet
Vierge au Chardonneret[modifier | modifier le code]
Thème de la Vierge au Chardonneret
Sculpture[modifier | modifier le code]
Céramique vernissée ou émaillée Terracotta invetriata[modifier | modifier le code]
Vierge à l'Enfant accompagnée de trois chérubins en terracotta invetriata, d'Andrea della Robbia, musée du Louvre, Paris.
Vierge à l'Enfant et aux chérubins en terracotta invetriata à Havré (Belgique)
Vierges de gloire[modifier | modifier le code]
Siège de la sagesse ou Sedes sapientæ[modifier | modifier le code]
Notre Dame d'Usson, groupe en bois sculpté polychrome, XIIe siècle, Clermont-Ferrand, Musée d'art Roger-Quilliot
Vierges couronnées[modifier | modifier le code]
La Vierge dorée du portail sur de la Cathédrale Notre-Dame d'Amiens
Statue de la Vierge à l'Enfant, cathédrale de Strasbourg
Vierge à l'Enfant du trumeau du portail inférieur de la Sainte-Chapelle
Vierge à l'Enfant, statue du XIIIe siècle, abbaye de Fontenay
Vierge à l'enfant, statue du XIVe siècle, basilique de Saint-Quentin
Vierge à l'Enfant, narthex de l'abbaye Sainte-Marie de la Pierre-qui-Vire
Sculpture de la Madonna del Rosario (Vierge du Rosaire) de Giacomo Colombo
Belle Madone de Toruń (Pologne)
Vierge et l'Enfant[modifier | modifier le code]
La Vierge et l'Enfant, statue du XVIe siècle, Domenico del Barbieri, Musée du Louvre.
La Vierge et l'Enfant, statue du XVIe siècle, Musée du Louvre.
La Vierge et l'Enfant, statue du XVIe siècle, Musée du Louvre.
Sculpture da la Vierge à l'enfant dégradée, datée de 1619 sur une croix de carrefour à Pargny-sous-Mureau, Vosges.
Autres[modifier | modifier le code]
- La Vierge de miséricorde, sans l'Enfant, en posture de protection des humbles et des faibles, les rassemblant sous son manteau ouvert ;
- Vierge à l'Enfant, statue de pierre du XVIe siècle, le visage chagrin de la Vierge, et le visage éveillé de l'Enfant. À noter le corps disproportionné. (Église Saint-Jean-Baptiste de Chaource, chapelle Ste Barbe ;
- Vierge à l'enfant de l'église paroissiale Saint-Pierre-et-Saint-Paul ;
- On trouve également ce genre de statues dans des endroits publics comme la vierge à l'enfant du no 61 rue de Sèvres (Paris VIe) dans une niche d'angle.
- La Vierge à l'Enfant de Jacques Mimerel, à la Chapelle de l'Hôtel-Dieu de Lyon.
- La Vierge à l'Enfant est la spécialité reconnue d'Yves Le Pape, qui en sculpte plusieurs milliers d'exemplaires au XXe siècle.
- La Vierge à l'enfant dite de Nozé de Pierre Biardeau (1660) , collégiale Saint-Martin d'Angers.
Fouesnant : église Saint-Pierre-et-Saint-Paul
Angle rue de Sèvres, Paris.
Place de la Fontaine-Timbaud, Paris.
Vierge à l'enfant de Jacques Mimerel (v. 1659)
Vierge à l'enfant dite de Nozé de Pierre Biardeau.
Notes et références[modifier | modifier le code]
- François Bœspflug, Jésus a-t-il eu une vraie enfance ? L'art chrétien en procès, Cerf, .
- Éliane Burnet et Régis Burnet (préf. Régis Debray, ill. Brunor), Pour décoder un tableau religieux, Cerf, coll. « Fides », , p. 150
- Marie-France Morel, « Le corps du petit enfant et ses représentations dans l’histoire et dans l’art », in Bébés et cultures sous la direction de Michel Bugnat, Éditions Érès, 2008, p. 21-34