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Liste des maisons fortes en France

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Cet article présente une liste des maisons fortes en France.

En Lorraine, Gérard Giuliato[1] situe l'apparition des maisons fortes entre 1250 et 1340, le plus souvent érigées par des chevaliers sous le contrôle des princes. Ces derniers imposent des règles de construction et en limitent le niveau de fortification. Comme en Normandie, les maisons fortes ont comme rôle de renforcer les frontières.

La construction des maisons fortes entre le XIIe siècle et le XVIe siècle était contrôlée par la noblesse, qui décidait de la nature, de la taille et de la transmission des biens[2].

Vue de la dite « Maison forte de Saint-Menges »

Pendant la construction de la ligne Maginot, quinze à vingt maisons fortes ont été construites, devant la barrière naturelle de la Meuse ou devant les fortifications de la ligne Maginot[3].

il s'agit d'un avant-poste disposant d'un logement intégré. Son rôle était la surveillance des voies principales d'accès de la frontière, leur destruction éventuelle, le retardement des attaques surprises et l'alarme de la ligne principale de résistance[4]. Leur installation est spécifique à la défense de la frontière entre la Belgique et la France dans les Ardennes.

Ces ouvrages défensifs sont mis en scène notamment par Julien Gracq dans le roman Un balcon en forêt[3].

Hauts-de-France

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Une maison forte datant de la fin du Moyen Âge se trouve à Hargicourt[5].

En Gascogne, il existe un type de maison forte caractéristique, appelé « salle » ou « tour-salle » : plan carré ou rectangulaire, murs épais, rez-de-chaussée aveugle servant de cave ou de cellier, accès par le premier étage par un escalier amovible, étages supérieurs résidentiels. La salle est le premier état avant le « château gascon » des XIIIe et XIVe siècles, qui est une salle à laquelle on a généralement adjoint de hautes tours carrées à deux angles opposés.

La maison forte en Gascogne correspond au même type de bâtiment, mais située à l’intérieur d’une agglomération, en tant que résidence, souvent secondaire, fortifiée. Ainsi le comte d’Armagnac Jean V disposait-il dans la ville de Lectoure (Gers) de plusieurs maisons fortes, dont celle dite de Sainte-Gemme où il fut assassiné lors de la prise de la ville par les troupes de Louis XI. Une autre maison forte subsiste, la tour d’Albinhac.

Bernard Fournioux[6] a pu identifier 608 lignages nobles et leurs lieux de résidences cités comme : repayrium noble, hospitium ou « hostel » noble, qui se compose de mottes ou structures fossoyées, sur lesquelles on a érigé dans une deuxième phase des tours de pierre quadrangulaires et qui a donné le nombre important de gentilhommières, manoirs et châteaux que recèle le Périgord.

Auvergne-Rhône-Alpes

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Selon les nombreux inventaires dressés, en Auvergne-Rhône-Alpes, aussi bien en plaine qu'en zone de montagne, on dénombre en moyenne trois maisons seigneuriales par commune.

Grésivaudan

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Humbert II projette de céder ses états du Dauphiné au pape Benoît XII. Ce dernier reçoit une estimation du vendeur mais fait procéder à une enquête menée par deux commissaires. À la demande d'Humbert II une contre-enquête est pratiquée, qui confirme la première. Les données papales recensent 40 châteaux avec 202 maisons fortes. Dans cette enquête, 21 familles nobles, ou se prétendant telles, ne possédant pas de maison forte sont tenues pour négligeables : « XXI foci nobilium vel se gerentium pro nobilibus non habentium domos fortes ». Le dauphin pratique également une évaluation[7],[8],[9].

Au XIVe siècle, le modèle le plus courant de maisons fortes se présente sous la forme d'une maison-tour de plan quadrangulaire divisée en quatre niveaux.

Les derniers travaux effectués sur cet ancien bailliage du Dauphiné ont permis de recenser 65 châteaux et 235 maisons fortes mentionnés par les textes. Quelques 154 maisons fortes ont pu être localisées sur le terrain. Parmi 58 sites, 38 correspondent à une maison forte avec tour, 20 autres en sont dépourvues et appartiennent pour la plupart à une période de fortification tardive.

L'enquête de 1339[7] mentionne 15 familles nobles détentrices d'une maison forte sous la forme : « nobles et vassaux ayant fortification (fortalicium) dans ledit mandement » avec comme précision : habet domum fortem (« possède maison forte ») ou habet domum et turrim fortem (« possède maison et tour forte[10] »).

Savoie et Genevois

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Il y a 4 maisons fortes en Savoie. Elles appartiennent soit à des cadets, à des parents ou à des alliés des grandes familles seigneuriales[11]. La maison forte de Saint-Jean-de-Chevelu est en restauration[12].

Bourgogne-Franche-Comté

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L'étude qu'a menée Hervé Mouillebouche[13] en Bourgogne portant sur 710 communes a permis d'identifier 644 sites fortifiés, dont 360 maisons fortes. Ces dernières sont élevées par une aristocratie en toute liberté, hors du contrôle ducal.

Franche-Comté

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Château de Châteauvieux de Cuisia (Jura). Armoiries de la famille de Vienne et Vergy.

Travaux de Éric Affolter et Jean-Claude Voisin[14].

Le département du Jura (Franche-Comté) offre de très nombreux exemples de maisons-fortes pour ne citer que quelques échantillons :

  • Cuisia : massif corps de logis cantonné de tours avec archères-cannonières ;
  • Maison forte de Nanc-lès-Saint-Amour : corps de logis cantonné de deux tours, le tout précédé d'une tour d'escalier en vis avec bouches à feu.

Voir les travaux de Michel Brand'Honneur[15].

Dans ceux qu'a menés Michaël Jones[16], le terme qui prévaut en Bretagne pour désigner les résidences des nobles est celui de manoir (manerium), qui désigne un centre de petite seigneurie ceint de fossés, alors qu'à la fin du XIIe siècle, la maison d'un chevalier est désignée comme : domus defensabilis.

Pays de la Loire

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Maine-et-Loire

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Les ruines d'une maison forte furent mis au jour en 1961 sur la commune de Brain-sur-Allonnes. Elle date de [17].

En Normandie, comme en Lorraine, les princes ont établi des règles strictes d'édification qui s'appuient sur un document de 1091 Consuetudines et Justitie qui précise l'interdiction d'élever un château sur un terrain plat, un roc ou une île. Il est permis simplement de s'« enclore » derrière une palissade, constituée d'un seul rang de pieux, qui ne doit comporter ni flanquements ni saillies. Le fossé qui la précède est limité en profondeur tel qu'un homme puisse en retirer la terre sans relais. Il en sera de même au XIIIe siècle avec les licences to crenelatte qui obligent le détenteur de la maison forte à demander une autorisation à son seigneur pour toute élévation de murs ou crénelage de ces derniers.

L'étude qu'a menée Marie Casset[18] met en avant les termes de « domus, hostel ou manerieum » qui désignent les résidences épiscopales rurales (« résidences secondaires »). Ces résidences édifiées au centre de vastes parcs à gibier, en marge des villages, présentent toutes les caractéristiques de la maison forte.

Seine-Maritime

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Elbeuf a sur son territoire une maison forte du XVe siècle[19].

La naissance d’un État génois en Corse dans la seconde moitié du XVe siècle marqua l’avènement d’un nouvel ordre social fondé sur la tradition communale génoise. Vaincus, les seigneurs féodaux (appelés Cinarchesi), qui dominaient le sud de l’île et qui s’étaient toujours opposés à la Commune de Gênes, n’eurent d’autre choix que de se soumettre ou de s’exiler en Sardaigne. La victoire de Gênes sur les « tyrans » corses semblait donc totale et induit une nouvelle aristocratie dans l'île[20].

Avec la destruction des châteaux par l'Office de Saint Georges, des maisons fortes furent ainsi construites par certaines familles de notables corses (dits sgiò[21]) pour assurer leur défense à partir du XVe siècle. Il ne s’agissait pas de se défendre des envahisseurs barbaresques, mais des familles voisines avec lesquelles ils pouvaient être en guerre, sur un temps long, ce qui donnait lieu à des vendettas sanglantes. Ces architectures civiles fortifiées se distinguent donc des édifices défensifs, comme les tours littorales ou citadelles, mais sont tout aussi identitaires de la Corse et en particulier de la Rocca (rocca pouvant également signifier en corse et italien maison forte ou château) et du Viggiano.

Corse du sud

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Notes et références

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  1. Gérard Giuliato, « Châteaux et maisons fortes en Lorraine centrale », Documents d'archéologie française, t. 23, no 33,‎ , p. 529-531 (lire en ligne).
  2. Gérard Giuliato, « Les maisons fortes de Lorraine à la fin du Moyen Âge », Publications de l'École Française de Rome, vol. 275, no 1,‎ , p. 231–259 (lire en ligne, consulté le )
  3. a et b Alain Trouvé, « Sur Un Balcon en Forêt », Carnets. Revue électronique d’études françaises de l’APEF, no Deuxième série - 19,‎ (ISSN 1646-7698, DOI 10.4000/carnets.11892, lire en ligne, consulté le )
  4. « Saint-Menges 12 mai 1940 : ils se souviennent », Journal L'Union,‎ (lire en ligne)
  5. Didier Bayard, « Description des structures, éléments d'interprétation », Revue archéologique de Picardie, vol. 3, no 1,‎ , p. 107–140 (DOI 10.3406/pica.1989.1559, lire en ligne, consulté le )
  6. Bernard Fournious, « Les chevaliers périgourdins et leur assise territoriale au XIIIe – XIVe siècle », Archéologie médiévale, t. XVIII,‎ , p. 256-272.
  7. a et b Deux versions portant sur une quarantaine de châtellenies du Grésivaudan sont conservées aux archives départementales de l'Isère (B3120) et (B4443) sous le nom d'« Enquête Delphinale de 1339 » ; la seconde, généralement plus riche de renseignements, semble être la mise au propre de la première.
  8. Claude Faure, « Un projet de cession du Dauphiné à l'Église romaine (1338-1340) », Mélanges d'archéologie et d'histoire, Paris ; Rome, E. Thorin ; Joseph Spithöver, vol. 27, no 1,‎ , p. 153-225 (ISSN 2036-0258, lire en ligne).
  9. C. Mazard, Châteaux Rhône-Alpes, , « Les châteaux delphinaux de Grésivaudan d’après l’enquête de 1339 », p. 83-87.
  10. Annick Ménard-Clavier, doctorante à l'EHESS, Les Maisons fortes du Grésivaudan au Moyen Âge, mémoire pour l'obtention du DEA, Jean-Marie Pesez (dir.), Lyon, EHESS, 1996.
  11. « Combien de maisons fortes en Savoie ? », sur museedupatrimoine.fr (consulté le )
  12. « Château de la Grande Forêt à Saint-Jean-de-Chevelu », sur www.fondation-patrimoine.org (consulté le )
  13. Hervé Mouillebouche, Les Maisons fortes en Bourgogne du Nord, du XIIIe au XVe siècle, Presses universitaires de Dijon, 2002.
  14. Éric Affolter et Jean-Claude Voisin, L'Habitat médiéval fortifié du Nord de la Franche-Comté. Vestiges de fortifications de terre et de maisons fortes, Montbéliard, AFRAM, 1986.
  15. Michel Brand'Honneur, Manoirs et châteaux dans le comté de Rennes, habitat à motte et société chevaleresque (XIe – XIIe siècle), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2001.
  16. Michaël Jones, « The Naming of Parts », Remarques sur le vocabulaire des résidences princières et seigneuriales en Bretagne au Moyen Âge, dans Annie Renoux (dir.), Aux marches du palais…, Le Mans-Mayenne, 9-11 septembre 1999, Publications du LHAM, Le Mans, Université du Maine, p. 45-54.
  17. Patrimoine | Brain sur Allonnes (brain-sur-allonnes.fr)
  18. Marie Casset (numéro thématique : « Aux marches du Palais ». Qu'est-ce qu'un palais médiéval ? Données historiques et archéologiques), « Le vocabulaire des résidences “secondaires” des archevêques et évêques normands au Moyen Âge : une image du bâti ? », Publications du LHAM, Le Mans, Université du Maine,‎ 9-11 septembre 1999, p. 163-177 (lire en ligne).
  19. Louis Serbat, « Construction d'une maison forte à Elbeuf », Bulletin Monumental, vol. 70, no 1,‎ , p. 414–415 (lire en ligne, consulté le )
  20. Vannina Marchi van Cauwelaert, « Una insula habitata de homini carnifici e pleni di rixe : Gênes face à la violence aristocratique corse à la fin du Moyen Âge » » Accès libre, sur journals.openedition.org, (consulté le ).
  21. Dictionnaire de l'Adecec, Infcor [1]