Langues rhéto-romanes

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Rhéto-roman
Pays Suisse, Italie
Région Massif alpin
Nombre de locuteurs 864 000
Typologie SVO
Classification par famille

Les langues rhéto-romanes appartiennent au groupe des langues romanes (langues indo-européennes). Trois langues sont distinguées : celles parlées en Suisse et dans le nord de l'Italie, soit vers le centre de l'arc alpin ou sa proximité, c'est-à-dire approximativement sur le territoire de l'ancienne province romaine de Rhétie.

Description

Les langues rhéto-romanes

La grande variété interne de cette famille linguistique et des raisons historiques et génétiques (le frioulan n'a pas connu le substrat rhétique) font qu'est parfois préférée la dénomination de « rhéto-frioulan », plus rigoureuse, à la dénomination traditionnelle rhéto-roman[réf. nécessaire].

Se distinguent d'ouest en est :

Le groupe rhéto-roman est le plus petit groupe des langues romanes en nombre de locuteurs. Son domaine géographique est assez éclaté, et chacune de ses parties est isolée des autres, généralement dans de profondes vallées montagnardes, d'où l'existence de nombreux dialectes et la forte concurrence des langues voisines (italien, allemand, slovène) qui se sont peu à peu substituées aux langues rhéto-romanes avec les installations de populations.

Normalisation linguistique

Ce n'est que récemment qu'a été entreprise l'instauration de langues communes dotées d'une grammaire et d'une orthographe, afin d'enrayer leur disparition. Ces efforts se heurtent parfois à des oppositions des groupes les moins pris en compte[réf. nécessaire].

Selon les pays les normes sont les suivantes :

  • En Suisse, l'état fédéral se sert des travaux de la Lia rumantscha (Ligue romanche) sur le Rumantsch Grischun (RG), « romanche grison » en français, pour rédiger ses textes législatifs dans les Grisons.
  • En Italie, il n'y a pas de politique étatique pour le ladin ou le frioulan. Cependant, la revue Noeles[1] (« nouvelles concernant la langue ladine ») utilise le « Ladin Standard - Ladin Dolomitan » – la langue écrite standard pour la région du Trentin-Haut-Adige.

Aire linguistique

L'aire linguistique des idiomes rhéto-romans a varié dans le temps

L'aire linguistique des idiomes rhéto-romans a varié dans le temps, ils formaient un ensemble continu avant leur morcellement et leur réduction au nord de leur espace actuel (dans le canton de Saint-Gall, dans le nord du canton des Grisons, au Liechtenstein, et en Autriche au Vorarlberg et au Tyrol) sous la pression germanique. La tradition romane et la langue romanche s'y maintinrent jusqu'à la fin du Moyen Âge comme en attestent les plus anciennes chansons populaires[2].

Le romanche a disparu lentement à partir du milieu du XVIe siècle, face à un puissant mouvement de germanisation, mais comme le note G. Kremnitz « en Vorarlberg autrichien il y a eu des îlots de langue romanche qui ont perduré jusqu'au XIXe siècle »[3]. Il existe de nombreux noms rhéto-romans dans les noms de villages, de lieux et de personnes :

  • dans le canton de Saint-Gall (rhéto-roman Son Gagl), était parlé le rhéto-roman autour de Walenstadt, jusqu’aux rives du lac de Constance comme dans les communes de Pfäfers de « faveras » champs de fèves, Pizol de « piz » sommet[4]. Il en reste des traces dans les dialectes suisses alémaniques (schweizerdeutschen) qui, dans les secteurs du sud du canton, ont aujourd'hui encore un accent roman (Sarganserland et montagne)[5].
  • en Autriche :
    • au Vorarlberg, ils étaient anciennement présents dans la vallée de l'Ill qui prend sa source dans le massif de la Silvretta (3 312 m, au nom rhéto-roman). Notamment dans la partie supérieure, la vallée du Montafon, de peuplement ancien rhéto-romanche, autour de sa petite capitale de Schruns. Cette aire est mentionnée pour la première fois dans le polyptyque rhétique (milieu du IXe siècle), sous le nom de Ferraires en raison de l'extraction du minerai de fer. Apparu vers 1100, le nom de Montafon (de mons/munt et de tofus/tovum en latin) signifie montagne aux nombreux ravins. À partir du milieu du Moyen Âge, des paysans libres de langue romanche entreprirent des défrichements dans le Montafon jusque-là peu peuplé. Au XVe siècle, quelques clans de Walser s'y installèrent, surtout dans le Silbertal. Il existait vers 1500 des liens étroits avec le Prättigau (Partenz en rhéto-roman) et l'Engadine, également de langue rhéto-romane[6]. Par exemple, la partie sud du Vorarlberg appartint jusqu’en 1818 à l’évêché de Coire.

Quelques noms rhéto-romans, par exemple les communes de Fontanella (Autriche) de « fontana » petite fontaine[7], Gaschurn de « Gaschurra » (attesté en 1423, cf de:Gaschurn), Vandans de « ad fontanas », à la fontaine[8] avec le très ancien site fortifié aujourd'hui en ruines du Valcastiel (de)[9], Lorüns}[10] appelée en 1430 « Aruns », 1442 et 1490 « Laruns » et à partir de 1630 « Lorüns » (agglutination de l'article rhéto-roman l' + Aruns), Valentschina sur la commune de Blons, Garsella, Plazera, Montjola, Bazora et Gampelün et, des montagnes comme Vermunt (de) parfois germanisé en Fermunt[11] ou la Vergalda (ou vallée Galda) appelée Val calda (en 1423, Vallgalda), « vallée chaude » car exposée au sud[12]. Certains noms ont totalement changé comme Sankt Anton am Arlberg, St Antoni en dialecte local, auparavant « Pra zalanz » littéralement pré Zalanz, d'un seigneur Edlen von Zalans en 1376[13],[14].

  • au Tyrol autrichien : les communes de Pians de « pedaneus » pont piétonnier[15], Gramais de « graminosa » zone d'herbe[16], Ischgl de « Yscla » île, refuge[17], Pfafflar de Pavelaers, lat. pabularium[18], Grins. L'ancienne présence d'aire rhéto-romane en Autriche explique par le passé le lien continu, aujourd'hui rompu, avec les zones parlant ladin dans le Trentin-Haut-Adige (ou Sud-Tyrol) et frioulan[19].
  • au Liechtenstein, avec un grand nombre de noms comme : la capitale Vaduz mentionnée pour la première fois en 1150 qui proviendrait de « avadutg » en rhéto-roman de « ava » eau et « dutg » conduit, signifiant l'aqueduc, la commune de Planken de « plaunca » signifiant les terrasses de culture en montagne, Balzers de « Palazoles » petit palais, Gamprin de « camp » le champ, sur la commune de Triesenberg les hameaux de Lavina, Malbun, mais aussi Valüna.

Un écrivain romanche, le Pader Placidus a Spescha (1752-1833) s'est livré à des études sur l’histoire de la langue en recherchant les traces des rhéto-romans au Vorarlberg et au Tyrol[20]

À noter enfin, beaucoup de noms de villes situés dans l'ancienne Rhétie romaine terminent leur nom en -enz (Frastanz, Bludenz, Tarrenz, Bregenz, Constanz...) ; leur correspondant rhéto-roman est en -anza.

Romanche et Ladin

Le puter et le vallader forment ensemble dans le romanche un groupe appelé rumantsch ladin (de). Il est le plus proche géographiquement de la langue romane parlée dans le Trentin-Haut Adige, également appelée ladin et qui fait partie du même ensemble rhéto-roman.

Exemples

Français Surselvan Sutselvan Surmeiran Putèr Vallader Rumantsch Grischun Frioulan Ladin (Gherdëina) Latin Italien
or aur or or or or, aur, ar aur aur or aurum oro
dur dir dir deir dür dür dir dûr rie durus duro
œil egl îl îgl ögl ögl egl voli uedl oculus occhio
léger lev leav lev liger leiv lev lizêr lesier levis lieve/leggero
trois treis tres treis trais trais trais trê trei tres tre
neige neiv nev neiv naiv naiv naiv nêf nëif nix (acc.: nivem) neve
roue roda roda roda rouda rouda roda ruede roda rota ruota
fromage caschiel caschiel caschiel chaschöl chaschöl chaschiel formadi ciajuel caseolus (formaticus) formaggio
maison casa tgeasa tgesa chesa chasa chasa cjase cësa casa casa
chien tgaun tgàn tgang chaun chan chaun cjan cian canis cane
jambe comba tgomba tgomma chamma chomma chomma gjambe giama gamba gamba
poulet gaglina gagliegna gagligna gillina giallina giaglina gjaline gialina gallina gallina
chat gat giat giat giat giat giat gjat giat catus gatto
tout tut tut tot tuot tuot tut dut dut totus tutto
forme fuorma furma furma fuorma fuorma furma forme forma forma forma
je jeu jou ja eau eu jau jo ie ego io

Notes et références

  1. Site officiel de Noeles
  2. Beriato
  3. Actes du colloque INALCO de septembre 2004
  4. http://archives.24heures.ch/VQ/LAUSANNE/-/article-2010-10-3406/les-romanches-n8217occupent-aujourd8217hui-que-la-moitie-de-l8217espace-grison
  5. Voir de:Kanton St. Gallen#Sprachen
  6. « Montafon » dans le Dictionnaire historique de la Suisse en ligne.
  7. cf. de:Fontanella
  8. cf. de:Vandans
  9. parfois germanisé en Valkastiel, cf. de:Burgruine Valcastiel
  10. cf. de:Lorüns
  11. cf. http://www.via-alpina.org/fr/stage/244
  12. cf. http://www.via-alpina.org/fr/stage/243
  13. cf. Montafoner Heimatbuch
  14. Le rôle des grandes familles seigneuriales comme les Montfort dans le processus de germanisation. Les comtes de Montfort portent le nom de leur château ancestral, Montfort, nom rhéto-roman, situé près de la frontière suisse actuelle, près de Götzis dans le Voralberg. Ils avaient un rôle important dans toute la région, comme Rodolphe V († 1390), longtemps chanoine puis doyen du chapitre de Coire. Voir Comté de Montfort et Feldkirch (Vorarlberg)
  15. cf. de:Pians
  16. cf. de:Gramais
  17. cf. de:Ischgl
  18. cf. de:Pfafflar
  19. Robert Klien: Serfaus. 2002, siehe Literatur.
  20. [PDF] [1]

Annexes

Bibliographie

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • (de) Ricarda Liver, Rätoromanisch. Eine Einführung in das Bündnerromanische, Tübingen, (ISBN 3-8233-4973-2)

Articles connexes

Liens externes

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