Musique LGBT

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Musique LGBT
Origines stylistiques Idéologiquement
Sujets LGBTChants de révolte • Hymnes gays
Musicalement
Influences variées
Origines culturelles Année 1980 aux États-Unis
Instruments typiques Spectre entier des instruments de musique
Popularité Croissance rapide depuis les années 2010
Voir aussi DiscoHomo hopQueercoreDiva house

On appelle musique LGBT (ou musique lesbienne, gay, bisexuelle et transgenre) la musique focalisée sur les questions LGBT interprétée par des artistes LGBT[1].

Les paroles sont particulièrement orientées sur l'émancipation homosexuelle, les relations entre personnes de même sexe, l'amour, la liberté, la fierté homosexuelle et l'encouragement du coming out. Depuis les années 2010, ce style musical est devenu très populaire aux États-Unis, notamment à travers des artistes ouvertement homosexuels comme Adam Lambert qui atteint le sommet du Billboard 200 en 2012. Un festival de musique LGBT existe également[2]. Cela traduit une évolution de l'industrie musicale par rapport à ce phénomène durant les dernières années.

Musique LGBT par des artistes de la communauté

Première moitié du XXe siècle : l'âge d'or des cafés-concerts et des music halls

Les café-concerts, puis plus tard les music halls, sont un vivier de nombreux chanteurs et chanteuses plus ou moins ouvertement homosexuels : Félix Mayol, Henri Varna, Gaston Gabaroche, Reda Caire, Jean Lumière, André Claveau, Reda Caire, André Pasdoc, Jean Sablon, Charles Trenet pour les hommes, Damia, Fréhel, Suzy Solidor, Dora Stroeva, Yvonne George, Sidonie Baba, Agnès Capri pour les femmes[3].

Outre les artistes qui s'y produisent, une partie des music halls parisiens servent aussi de lieux de rencontre aux homosexuels qui s'y rendent et entretiennent des relations sexuelles dans les promenoirs[3].

Années 1940 à 1970 : Une visibilité difficile à négocier

Liberace dans son salon en 1974, photographie d'Allan Warren.

Le début des années 1970 est marqué par de nombreux coming-out : celui de Dusty Springfield en 1970 dans l'Evening Standard, celui de David Bowie dans Melody Maker en 1972, ou celui d'Elton John dans Rolling Stone en 1976[4].

L'année 1972 est particulièrement riche avec la sortie de l'album Transformer de Lou Reed, dont le titre Walk on the Wild Side est un hommage aux personnalités trans Holly Woodlawn et Candy Darling et la contractualisation du chanteur Jobriath se voit proposé pour deux albums par David Geffen ; celui-ci devenant ainsi le premier chanteur rock ouvertement gay[4]. Geffen lui-même fera son coming-out par la suite[4].

Ces coming-out se traduisent par des baisses des ventes ; pour cette raison, des artistes préfèrent ne révéler leur homosexualité qu'après l'apogée de leur carrière : c'est le cas de Johnny Mathis, populaire dans les années 1960 et ne réalisant son coming-out qu'en 1982, ou de Lesley Gore, qui effectue le sien au début des années 2000[4]. Le pianiste Liberace ne révèlera jamais son homosexualité de son vivant, attaquant en justice les journalistes qui osaient en parler ; celle-ci ne sera confirmée que 30 ans après sa mort[4]. La position de Freddie Mercury, leader de Queen, est plus ambigüe : s'il ne l'a jamais officiellement confirmée, son homosexualité était connue de tous[4].

Le label Olivia Records est créé en 1973 par des lesbiennes afin de promouvoir la musique alternative féminine[4].

Parmi d'autres exemples, on peut citer des artistes tels que les Village People, Szilveszter, Tom Robinson, les Indigo Girls, K.d. lang, les Dead or Alive, Little Richard ou Marc Almond, parmi d'autres.

Dans les années 1980, l'exposition d'artistes ouvertement LGBT est devenue plus importante avec Boy George (de Culture Club), George Michael, Frankie Goes to Hollywood, les Pet Shop Boys et Andy Bell (d'Erasure).

Dans les années 2010, des artistes ouvertement homosexuels comme Tegan and Sara ont gagné en popularité allant jusqu'à produire une publicité pour la tolérance pour Oreo en 2014[5]. En France, Kiddy Smile et Christine and the Queens émergent.

Plusieurs artistes ouvertement LGBT sont couronnés de succès comme Elton John qui a le single le mieux vendu dans le Billboard des années 1990 (Candle in the Wind 1997) et le single Anything is Possible/Evergreen par Will Young qui était le single le plus vendu dans les années 2000[6]. Le chanteur country Ty Herndon a fait son coming out en 2014, après trois hits dans le Billboard Hot Country Songs[7].

Lorsque les artistes parlent directement de leur homosexualité

Tom Robinson en concert en 2004.

En 1978, l'artiste gay britannique Tom Robinson crée la chanson Glad to be Gay, qui devient un hymne pour les militants LGBT[4]. Il faut attendre 1983 et Relax de Frankie Goes to Hollywood pour avoir un nouveau titre parlant aussi ouvertement de la sexualité de son chanteur[4]. Outre ces chansons directes, l'homosexualité et la culture gaie sont plutôt évoquées par suggestion : c'est le cas par exemple des titres Macho Man, YMCA et In The Navy des Village People, de Tainted Love de Soft Cell ou de You Make Me Feel (Mighty Right) et Do You Wanna Funk de Sylvester[4].

Musiques par des artistes hétérosexuels

Soutien aux LGBT

The Miracles en 1972 ; ils sont l'un des premiers groupes hétérosexuels à produire une chanson de soutien à la communauté LGBT.

Dès les années 1970, des artistes hétérosexuels produisent des chansons de soutien à la communauté LGBT : ainsi les Miracles produisent en 1975 Ain't Nobody Straight in LA, figurant sur l'album City of Angels, qui parle de la banalité de l'homosexualité[4]. Rob Stewart évoquera quelques années plus tard le meurtre homophobe d'un ami dans The Killing of Georgie (Part I and II), qui atteindra la deuxième place des singles britanniques[4].

Le début des années 2000s voit la multiplication des titres explicitement de soutien : l'artiste countryBobby with an I de Phil Vassar (2009), I Kissed a Girl de Katy Perry (2008) et Same Love de Macklemore et Ryan Lewis (2012)[8].

Détournements et réappropriations par la culture queer

Hymnes gays

Un hymne gay est une chanson populaire qui est devenue très populaire auprès de la communauté gay. Si cette catégorie englobe des titres explicitement de soutien aux LGBT, qu'ils soient écrits par des membres de la communauté ou pas, elle comprend essentiellement des chansons écrites pour un public hétérosexuel et ensuite réinterprétées par la communauté gay.

Les paroles des hymnes gays abordent des thèmes récurrents : persévérance, de la force intérieure, et de l'unité[9], la résilience, qu'elle soit amoureuse ou personnelle; plus généralement, l'idée que l'amour triomphe de tout ; l'acceptation, fière et sans concession, de soi-même, en particulier de sa sexualité ; la difficulté de travailler pour obtenir une telle acceptation ; la rupture de la solitude, que ce soit en trouvant une communauté ou par l'acceptation par la société dans son ensemble ; et enfin, la capacité à vivre des moments d'insouciance, notamment par la fête[9].

Selon Popular Music, un journal musical, la chanson la plus communément identifiée comme un hymne gay est I Will Survive par Gloria Gaynor[10]. Stonewall, une association caritative pour les droits des LGBT au Royaume-Uni, a nommé Beautiful (2003) de Christina Aguilera, comme chanson la plus influente de la décennie 2000 pour les LGBT[11]. Elton John avait prédit qu'elle remplacerait "I Will Survive" en tant qu'hymne gay prééminent[11].

Y.M.C.A., In the Navy, Macho Man de Village People (1978)(1979)[12], I Need a Man de Grace Jones(1975)[13], Love Sansation de Loleatta Holloway(1980), The Other side of the Rainbow de Melba Moore(1982),It's Raining Men de The Weather Girls (1982)[14],[15], I'm Coming Out (1980) et Ain't No Mountain High Enough (1966) de Diana Ross[16], Dancing Queen (1976) et Gimme! Gimme! Gimme! (A Man After Midnight) (1979) de ABBA[9], Love to Love You Baby et Bad Girls (1979) de Donna Summer[9], mais aussi Last Night a D.J. Saved My Life de Indeep (1982), sont considérés comme des hymnes gays cultes.

Finally de CeCe Peniston (1991)[9], Hero de Mariah Carey (1993)[9], Free de Ultra Naté (1997)[9], Together Again de Janet Jackson (1997)[9], Believe de Cher (1999)[9], Mi Chico Latino (1999) et Bag It Up de Geri Halliwell[9], sont considérés comme des hymnes cultes de la décennie 90.

Never Be the Same Again (2000) de Mel C[9], I Think I'm in Love with You (2000) et A Public Affair (2006) de Jessica Simpson[9], Spinning Around (2000) et Can't Get You Out of My Head (2001) de Kylie Minogue[9], It's Raining Men (2001) et Ride It (2004) de Geri Halliwell[9], I Begin to Wonder (2003) de Dannii Minogue[9], Beautiful (2003) de Christina Aguilera[9] ou encore I Kissed a Girl de Katy Perry (2008)[9], sont considérés comme des hymnes cultes de la décennie 2000.

Think About It (2012) de Mel C[9], Hot Sugar (2013) et If I Don't Have You (2015) et My Man (2017) de Tamar Braxton[9], Born This Way (2011) de Lady Gaga[9], Same Love de Macklemore et Ryan Lewis (2012)[9], Everybody Talks (2012) de Neon Trees[9], For Once In My Life de Mel B (2013)[9], Sweater Weather (en) (2013) de The Neighborhood[9], mais aussi Break Free (2014) de Ariana Grande[9], mais aussi If I Don't Have You de Tamar Braxton (2015), sont considérés comme des hymnes cultes pour la nouvelle génération.

Lip-syncs

La drag queen Silky Nutmeg Ganache, célèbre pour ses lipsyncs dans RuPaul's Drag Race, en 2019.

La pratique des lip-syncs, une forme de playback où l'artiste utilise costume, chorégraphie et expression faciale pour raconter une histoire ayant pour support une chanson est constituante de la culture drag et se retrouve dans les bars gays et lesbiens[17]. La pratique, dont l'origine remonterait à un bar de Chicago, n'a été rendue possible qu'au milieu du XXème siècle, avec la démocratisation des lecteurs de musique personnels : auparavant, les drag queen chantaient uniquement en live[17].

La pratique du lip-sync est très liée à celle du voguing et surtout présente dans les communautés latinos et afro-américaines dans les années 1960[17]. Plus généralement, ce sont les drag queens les moins favorisées, en particulier financièrement, qui pratiquaient les lip-sync, les autres formes de drag étant alors plus rémunératrices[17].

Les chansons des Supremes sont en particulier très souvent reprises pour faire des lip-sync[17].

Parmi les lip-syncs les plus célèbres, on peut citer les performances de Lypsinka ou celles des candidates de RuPaul's Drag Race, émission de téléréalité où les participantes doivent réaliser des lip-sync pour ne pas être éliminées ou pour remporter la saison[17].

Si le lip-sync, comme plus généralement la culture ball, est une manière pour celle qui le réalise de s'approprier un univers de richesse et de célébrité auquel elle n'a pas accès, il se rapproche aussi de la démarche des hymnes gays, où une chanson peut trouver un tout nouveau sens par le travail d'interprétation d'une drag queen et de son public[17].

Styles musicaux associés à la communauté LGBT

Camp

Dori Hartley et Sal Piro en 1977, pour une projection du Rocky Horror Picture Show à New York.

Le camp est un mélange d'esthétique, de politique et de style marqué par l'autodérision et emblématique des cultures gaies, travesties et trans[3]. Parmi les éléments de culture camp : les artistes Boy George et Dave, la chanson Goûte mes frites de Valérie Lemercier, la comédie musicale The Rocky Horror Picture Show ou la réinterprétation de chansons d'Abba dans Priscilla, folle du désert et Muriel[3]. Le camp ne se limite pas à la musique mais s'exprime aussi dans le cinéma ou les arts visuels[3].

Eurovision

Le concours Eurovision de la chanson est l'évènement musical le plus associé à la communauté LGBT d'Europe. Depuis les années 1970, la majorité des fans de l'évènement sont LGBT, pour plusieurs raisons. D'abord, l'esthétique principale du concours, « la danse, le disco et les divas », s'alignent parfaitement avec les préférences de la culture LGBT et en particulier la culture gaie[18]. Ensuite, cet évènement, diffusé sur la télévision publique, était avant internet l'une des seules manières dont pouvait s'exprimer la différence dans des médias grand publique, puisque de nombreuses cultures y sont représentées[18]. Enfin, surtout pour le public gay, l'Eurovision est un évènement très émotif, entre les chansons et les résultats du concours, ce qui permet le temps d'une soirée d'échapper aux normes de la masculinité qui veulent qu'un homme ne montre pas ses émotions[18].

Disco

Notes et références

  1. (en) Shane Phoenix, « The 2010 LGBT Music In Review », Hot Spots magazine (consulté le ).
  2. (en) « LGBT Music Festival », Mo's Universe (consulté le ).
  3. a b c d et e Didier Eribon, Frédéric Haboury et Arnaud Lerch, Dictionnaire des cultures gays et lesbiennes, Larousse, (ISBN 2-03-505164-9 et 978-2-03-505164-6, OCLC 300482574, lire en ligne).
  4. a b c d e f g h i j k et l Frédéric Martel, Travis Alabanza et Matthew Traduction de : Todd, Pride : l'histoire du mouvement pour l'égalité LGBTQ, (ISBN 978-2-324-02491-7 et 2-324-02491-8, OCLC 1128201273, lire en ligne).
  5. (en) « Tegan and Sara Oreo Jingle ».
  6. (en) « Lady Gaga weeps at Poland show its trendy to be free »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?).
  7. (en) « Ty Herndon Comes Out As Gay ».
  8. Alex Hawgood, « For Gays, New Songs of Survival », New York Times,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  9. a b c d e f g h i j k l m n o p q r s t u v w x et y Meghan Casserly, « Lady Gaga's Born This Way: Gay Anthems and Girl Power », Forbes,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  10. Nadine Hubbs, « 'I Will Survive': musical mappings of queer social space in a disco anthem », Popular Music, vol. 26, no 2,‎ , p. 231–244 (DOI 10.1017/s0261143007001250, lire en ligne).
  11. a et b « Media: Current Releases » [archive du ], stonewall.org.uk (consulté le ).
  12. Jeff Perlman, « "Y.M.C.A." (An Oral History) », Spin magazine (consulté le ).
  13. Grace Jones 2021-09-13.
  14. Simon Gage, Lisa Richards et Howard Wilmot, Queer, , 26–7 p. (ISBN 1-56025-377-0, lire en ligne).
  15. « The pink hit parade: Sing if you're glad to be gay », The Independent,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  16. « 25 Essential LGBTQ Pride Songs », Rolling Stone (consulté le ).
  17. a b c d e f et g (en) Nicole Pasulka, « Today, Almost All Drag Artists Have to Lip-Sync for Their Livelihoods. But That Wasn’t Always the Case. », sur Slate Magazine, (consulté le ).
  18. a b et c « L'Eurovision et l'homosexualité, une histoire de strass et de tolérance », sur France 24, (consulté le ).

Bibliographie

Voir aussi