Corail

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Modèle:Biohomonymie

Colonie d'Acropora pulchra.

Le corail est un animal de l'embranchement des Cnidaires (le même embranchement que les méduses). Les coraux vivent généralement en colonies d'individus qui sont des « superorganismes ». Les individus sont nommés « polypes ». Chaque polype sécrète son propre exosquelette (près de la base et tout au long de sa vie) ; selon les espèces, cet exosquelette est dur (à base de carbonate de calcium), ou mou et protéinique. Chaque colonie forme ainsi un « squelette colonial » plus important et durable, dont la forme est propre à l'espèce, à partir de minéraux prélevés dans l'océan. Les coraux durs, « constructeurs de récifs », ont formé par accumulation de ces squelettes durs des récifs coralliens dont certains sont devenus les plus grandes structures complexes connues créées par les organismes vivants (les grandes barrières de corail).

De nombreux coraux vivent en symbiose avec des végétaux unicellulaires : les zooxanthelles dans les mers chaudes, ou d'autres espèces de phytoplancton dans les mers froides. Un large éventail de bactéries fixatrices d'azote[1], y compris des décomposeurs de chitine vivent dans le mucus produit par les polypes[2] et forment une part importante de la nutrition des polypes[3]. Le type d'association entre le corail et sa flore varie selon l'espèce. Différentes populations bactériennes sont associées aux muqueuses, au squelette et aux tissus des coraux[4]

Depuis quelques décennies, les populations de corail se dégradent, probablement en raison du changement climatique, de la pollution et de la surpêche qui pourraient avoir développé la susceptibilité des coraux aux maladies. Plus de vingt maladies des coraux différentes ont été récemment décrites, seule une poignée d'entre elles sont comprises et ont des agents pathogènes isolés et caractérisés.

Histoire naturaliste

Comme en témoignent les fossiles, les coraux ont colonisé les mers il y a plusieurs centaines de millions d'années, y constituant l'un des puits de carbone les plus importants. Ce fossile d’Hexagonaria mirabilis trouvé à Ferques (Nord-Pas-de-Calais) provient de l'étage frasnien du Dévonien. (Collection C. Loones, Museum d'Histoire naturelle de Lille).

D'abord présenté comme une pierre arborescente, les pêcheurs et naturalistes savaient cependant que le corail a la faculté de grandir[5], et son origine vivante a rarement été remise en cause. Au IIIe siècle avant J.C., Théophraste (disciple et successeur d'Aristote) voit dans le corail une plante pétrifiée ; pour Ovide (43 avant J.C., 17 après J.C.) c'est une algue molle qui durcit à l'air. Il convient toutefois de garder en tête à la lecture de ces versions le fait que la plupart des naturalistes antiques dont les textes nous sont parvenus étaient méditerranéens, et ne connaissaient donc principalement de première main que des coraux alcyonaires comme le corail rouge, très différent des coraux sclératiniaires des régions tropicales.

À la suite d'Aristote, l'intellectuel musulman Al-Biruni (973-1048) les classe (ainsi que les éponges) parmi les animaux, au motif qu'ils répondent au toucher.

En occident, le corail a ensuite été supposé être une plante aquatique, car au début du XVIIe siècle, Marsigli observe ce qu'il prend pour des sortes de fleurs, qui s'y épanouissent quand on le maintient dans de bonnes conditions en aquarium[5]. Le Français Jean-André Peyssonnel (1694-1759), jeune naturaliste, médecin et botaniste du roi de France en Guadeloupe observant mieux ces « fleurs » en déduit ensuite qu'elles sont en fait des animaux[5]. Cette hypothèse est d'abord très discutée et même vivement attaquée par Réaumur et Bernard de Jussieu, avant d'être admise par tous[5]. Buffon tranchera définitivement en déclarant : « Ainsi les plantes marines, que d’abord on avait mises au rang des minéraux, ont ensuite passé dans la classe des végétaux, et sont enfin demeurées pour toujours dans celle des animaux. »

C'est William Herschel qui apportera la preuve scientifique irréfutable grâce à l'observation au microscope : les fines membranes cellulaires du corail sont caractéristiques des eumétazoaires.

C'est Christian Gottfried Ehrenberg qui se fait le descripteur scientifique moderne du groupe des Anthozoa en 1831, alors que Gilbert-Charles Bourne se charge des Scleractinia en 1900 (dans la sous-classe des Hexacorallia décrite par Haeckel en 1896), séparés des Gorgonacea (décrits par Lamouroux dès 1816), rangés parmi les Octocorallia, autre sous-classe décrite par Haeckel.

Habitat et répartition géographique

Répartition des récifs coralliens dans le monde.
Les coraux vivent en compétition avec de nombreuses autres espèces, dont les algues et bactéries, mais aussi avec les éponges. La compétition est spatiale, mais aussi allélopathique[6]

Les quatre plus grands récifs coralliens du monde sont situés en Australie, en Nouvelle-Calédonie[7], au Belize et en Floride (parc national de Dry Tortugas)[8]. Cependant, celui qui devrait être le plus ancien est celui de la baie de Kimbe en Papouasie-Nouvelle-Guinée : il concentre 60 % de la biodiversité des espèces de coraux.

Il est fréquent de croire que le corail ne se développe que dans les mers chaudes, où il forme les célèbres récifs et atolls. En réalité, les mers froides (large de la Scandinavie, de la Grande-Bretagne et de la péninsule Ibérique) hébergent aussi des récifs coralliens, qui sont des récifs d'« eau froide », profonds, à corail non photosynthétique. Ces récifs sont très poissonneux, certainement la raison pour laquelle les marins du Nord connaissent leur existence depuis des siècles.

On trouve ainsi des récifs de coraux partout dans le monde, des régions tropicales à la Mer du Nord et à la Méditerranée, dans les mers chaudes d’Asie ou froides comme la Grande-Bretagne. On en trouve de 0 à 4 000 mètres de profondeur. Au large de la Nouvelle-Écosse, des chercheurs ont découvert récemment des coraux dits « d'eau froide » qui peuvent vivre jusqu'à sept kilomètres de profondeur[9].

Les colonies de coraux ont la propriété de contribuer à fortement construire leur environnement et leur habitat. Ils constituent eux-mêmes un habitat pour de très nombreuses autres espèces, et représentent donc des espèces fondatrices de premier plan.

Types

Millepora sp. près de Dahab en mer Rouge.
Acropora cervicornis, un corail sclératinaire.
Corail rouge (Corallium rubrum), un gorgonacea.

Le mot corail est très ambigu, car il désigne des organismes marins coloniaux appartenant tous à l'embranchement des Cnidaires, mais à des familles très différentes et dont les exigences écologiques sont, de ce fait, très dissemblables.

Les animaux qu'on désigne sous le terme générique de corail peuvent appartenir à deux classes (ou super-classes) distinctes :

Les espèces du genre Millepora sont communément appelées coraux de feu (par exemple le corail de feu branchu Millepora alcicornis), en raison de leur fort pouvoir urticant. Cependant, malgré leur structure similaire les millepores ne sont pas de « vrais coraux », ce terme étant réservé à des Anthozoaires : ce sont juste des hydrozoaires à squelette calcaire.

  • Les Anthozoaires:
    • Zoanthaires (ou Hexacoralliaires) :
      • Les Scléractinaires (anciennement Madréporaires), encore appelés « coraux durs » car ce sont généralement des animaux coloniaux ayant un squelette minéralisé rigide. De formes et de tailles variées, ils sont très largement répandus dans les eaux côtières tropicales où ils forment des trottoirs (cas de la mer Rouge), des récifs frangeants (cas de la Réunion) des atolls (cas des îles polynésiennes) ou des barrières (cas de l'Australie). Ces colonies sont le plus souvent inféodées à des eaux très éclairées (la lumière étant nécessaire aux algues symbiotiques). Ces animaux aiment les eaux chaudes mais supportent mal une trop forte température ou des variations trop importantes du milieu et, surtout, une forte pollution qui entraînent leur mort rapide, que l'on désigne sous le terme de blanchiment (le squelette calcaire devenant apparent).
      • Les Antipathaires ou « coraux noirs » (par exemple Antipathes subpinnata en Méditerranée et le nord-est de l'Atlantique).
    • Alcyonaires (ou Octocoralliaires) :
      • Beaucoup d'entre eux (notamment des Alcyonacés) sont désignés par le terme générique de « coraux mous »
      • Les gorgonacés durs comme le corail rouge (Corallium rubrum) et les gorgones. Le célèbre corail rouge a généralement un exosquelette rouge vif, mais il peut parfois être plus clair, rose voire blanc, et est très exploité pour la joaillerie. Comme les gorgones, cette espèce ne nécessite pas de lumière pour croître et on la trouve soit dans des grottes sous-marines, soit à une certaine profondeur (jusqu'à plus de 100 m parfois), en particulier dans les eaux méditerranéennes et, notamment, celles du bassin occidental.

Classification

Corail mou (Sarcophyton glaucum).

Les coraux sont des animaux pluricellulaires (Eumétazoaires), de l'embranchement des Cnidaires, de la classe des Anthozoaires.

Au sein des Anthozoaires, ils peuvent faire partie des Alcyonaires (Alcyonacés = « coraux mous », mais tous ne le sont pas), ou des Zoanthaires (Scléractiniaires = « coraux durs »).

On peut séparer les coraux en deux catégories, suivant qu'ils hébergent ou non des algues symbiotiques dans leurs tissus :

  • les coraux zooxanthellés vivent en symbiose avec des zooxanthelles, qui ont besoin de lumière, donc à faible profondeur ;
  • les coraux azooxanthellés (ou non symbiotiques ou non photo-synthétiques), dépourvus de zooxanthelles, n'ont donc pas besoin de lumière et peuvent vivre en profondeur.

En aquariophilie récifale, on distingue également deux catégories de coraux durs (Scléractinaires) :

  • les coraux durs à petits polypes, en anglais : Small Polyps Stony corals ou Small Polyps Scleractinians (SPS), par exemple : Acropora spp.
  • les coraux durs à grands polypes, en anglais : Large Polyps Stony corals ou Large Polyps Scleractinians (LPS), par exemple : Euphyllia spp.

Longévité

En tant que colonies, les grands récifs coralliens semblent être les plus vieux animaux coloniaux vivants du monde. En tant que colonies, leur longévité dépasse de loin celle des tortues géantes des Galapagos, vivant plus de 200 ans, ou des palourdes quahog qui peuvent vivre plus de 400 ans. Certaines colonies auraient peut-être plusieurs centaines voire plusieurs milliers d'années selon certains experts[10],[11].

Immunité particulière

Les biologistes et écologues ont eu la surprise de découvrir que les coraux vivent individuellement longtemps (jusqu'à plusieurs décennies[12]), sans pourtant qu'on ait pu découvrir chez eux de capacité d'adaptation du système immunitaire. Leur système immunitaire inné ne fonctionne pas en produisant des anticorps. Comme ils survivent sur de longues périodes et depuis très longtemps, bien que constamment exposés aux attaques bactériennes, virales, fongiques et de nombreux organismes parasites ou prédateurs opportunistes ou spécialisés, il faut supposer qu'il existe chez eux un type d'immunité encore inconnu.

Les maladies qui les touchent depuis peu, semblent nouvelles pour eux et préoccupent vivement les écologues, mais des chercheurs étudiant les réponses d'un corail massif (Goniastrea aspera) au blanchiment (en Thaïlande dans les années 1990), ont constaté des variations de sensibilité au blanchiment de ce corail. Ces variations semblent correspondre à une « tolérance médiée par l'expérience », comme si le corail et ses symbiotes « apprenaient » de leur expérience face à un ensoleillement élevé combiné à une température anormalement élevée, la réponse ne correspondant pas à une réaction du génome des zooxantelles (Symbiodinium sp.)[13],[14].
L'énigme que constitue la façon dont les coraux ont réussi à acquérir une résistance aussi efficace aux pathogènes spécifiques a conduit Eugene Rosenberg et Ilana Zilber-Rosenburg à proposer l'hypothèse de la probiotique des coraux[15] ; Cette hypothèse est qu'il existe une relation dynamique plus forte qu'on ne le pensait entre les coraux et leurs communautés microbiennes symbiotiques ; en modifiant sa composition, l' "holobionte" (le corail et toute sa communauté symbiotique) pourrait s'adapter à des conditions environnementales changeantes ou à des attaques microbiennes bien plus rapidement que par les processus classiques de mutations génétiques adoptées par l'évolution via le processus de sélection naturelle. Ce ne serait pas le corail qui évoluerait, mais l'holobionte.

Reproduction du Corail

Reproduction de Montastraea cavernosa : éjection des gamètes mâles.

De nombreux coraux tropicaux présentent la particularité d'avoir une reproduction annuelle synchrone.

L'émission au même moment d'une grande quantité de spermatozoïdes et d'ovules dans l'eau constitue une ressource dite « ressource pulsée » pour les nombreux animaux (filtreurs notamment) qui s'en nourrissent, tout en favorisant un brassage génétique important.

Ce cycle annuel est calé sur le cycle lunaire.

Symbolique

  • Les origines du corail selon la mythologie grecque : Dans Les Métamorphoses, Ovide profite de l'histoire de Persée et d'Andromède pour donner une signification à l’origine de la nature du corail, tout comme il était de coutume à l’Antiquité d’expliquer par la mythologie les différents phénomènes scientifiquement incompris à l’époque.
    Après avoir vaincu le monstre marin et sauvé la princesse Andromède, le héros Persée est acclamé par tout le peuple d’Éthiopie. Il prend alors bien soin de poser la tête de Méduse sur un lit de varech, face contre sol afin que son pouvoir ne soit dangereux pour personne dans la foule. Mais le regard de la Gorgone est éternel même après sa mort et il ne s’arrête pas à un lit d'algue. Il agit sur les végétaux alentour, les changeant en pierre. Ainsi Ovide explique la propriété du corail, considéré comme un végétal à l'époque, de se durcir à l’air, d’une façon poétique et naïve[16].
    Le corail se dit en grec Gorgeia, car Méduse était l'une des trois Gorgones.
  • Croyances et superstitions : D'une manière générale, selon la « symbolique des pierres », le corail protège son possesseur, calme les émotions et rétablit la paix intérieure. Il est le garant de récoltes fertiles et sert à éloigner la foudre des bateaux. Au Moyen Âge on avait pour habitude de cacher dans sa bourse ou dans sa poche un morceau de corail qui devenait alors un talisman contre la sorcellerie[17].
    En Chine antique, les coraux étaient symbole de richesse et d’un statut social élevé[17].
    Les Indiens d’Amérique considèrent le corail comme une pierre sacrée ; il symbolise « l’énergie de la force vitale » et protège du mauvais œil [17].
  • Le corail dans la tradition populaire : Les noces de corail symbolisent les 11 ans de mariage dans le folklore français.

Joaillerie

Corail rouge en joaillerie (Algérie).

Seuls le corail rouge (Corallium rubrum) et le corail du Japon (Corallium japonicum) sont utilisés en bijouterie[réf. nécessaire].

Le prix très élevé du corail rouge en joaillerie a entraîné une disparition presque totale de corallium rubrum sur les côtes françaises et italiennes à des profondeurs de moins de 10 m. Si l'espèce est aujourd'hui protégée, la lenteur de sa croissance n'a pas encore permis une recolonisation significative, d'autant que la pêche illégale est encore florissante, notamment en Corse.

Menaces

Acropora formosa.

Les récifs coralliens (et les services écosystémiques qu'ils assurent[18]) sont en situation de crise écologique[19] ou de stress partout dans le monde[20].
Environ 10 % des récifs coralliens du monde sont récemment morts[21],[22], et environ 60 % de ceux qui subsistent sont en danger à cause de l'homme, surtout en Asie du Sud. Au rythme des années 2000, plus de 50 % des récifs coralliens de la planète risquent d'être détruits d'ici à 2030. L'ONU, l'Europe et de nombreux États appellent à les protéger et/ou ont voté des textes ou lois en faveur de leur protection[23].

Plusieurs causes semblent conjuguer leurs effets négatifs pour les coraux :

Surexploitation et effets indirects de la pêche

Des coraux comme le corail rouge sont très menacés (là où ils n'ont pas déjà disparu) par leur exploitation pour la bijouterie. Les coraux ont ensuite été victimes à la fin du XXe siècle du chalutage dans les zones froides, tempérées et plus chaudes et du plateau continental ;
la surpêche et la pêche à l'explosif endommagent aussi respectivement le fonctionnement écologique (collapsus écologiques locaux[24]) et les équilibres des récifs, et les coraux eux-mêmes. Des déséquilibres entre poissons organismes carnivores et herbivores peuvent aussi, surtout en contexte eutrophe favoriser la croissance de biofilms de microalgues et de tapis algues susceptibles d'étouffer les récifs (en apportant des microbes avec lesquels les coraux ne sont normalement pas en contact[25], et/ou par simple compétition avec les coraux[26]) les récifs coralliens, algues brunes notamment[27],[28], en modifant les équilibres et complémentarités des espèces du récif[29]. Les algues ont des effets contrastés sur certains coraux massifs, par exemple les porites (coraux massifs) semblent assez peu affectés par les tapis plurispécifiques[30] d'algues, mais ils sont tués par les tapis d'algues rouges Anotrichium[31],[32]. Plus rarement, et parfois a priori suite à des déséquilibres induits par l'homme, certaines macroalgues entrent en compétition avec les coraux, avec les scléractiniaires (coraux durs) notamment[33]. Parfois, les macroalgues semblent être "neutres" à l'égard du récif[34], voire développer des effets positifs à son égard[35],[36]. Dans certains cas elles pourraient interagir négativement avec les zooxantelles de manière allélopathique.

Destruction directe et volontaire

Localement, la création de ports, le creusement de canaux et l'accès aux îles et baies sont des sources de dégradation des écosystèmes coralliens. Le corail et le sable corallien sont en outre de plus en plus utilisé comme source de calcaire et pour la construction dans de nombreux pays.

Dépérissement

Corail blanchi à la Réunion.

Il est observé à échelle planétaire, et dit blanchiment des coraux car le corail perd sa couleur à la suite de l'expulsion des zooxanthelles avec lesquelles il vit normalement en symbiose. Les causes encore mal comprises du blanchiment peuvent résulter de la conjonction de l'eutrophisation, la pollution, une agriculture intensive (basée sur l'usage de pesticides et d'engrais en partie perdus en mer via le ruissellement et l'évaporation), ou du réchauffement, voire d'un début de montée trop rapide des océans, ou localement de la présence de polluants issus de munitions immergées, chacun de ces facteurs prenant une part plus ou moins importante selon la situation géographique. Certaines espèces peuvent survivre quelques mois après avoir expulsé leurs zooxanthelles (3-4 mois à Mayotte ; 7 mois en Floride).
On a localement et parfois constaté une recolonisation par les zooxanthelles de coraux blanchis. La mortalité est considérée comme certaine quand une colonie blanchie a secondairement été recouverte par un feutrage d’algues filamenteuses, après quelques semaines ou mois. Les Acropores semblent les plus sensibles au blanchissement (30 % sont morts en 1991 dans l’Archipel de la Société). Les effets de l'Acidification des océans sont encore à venir et mal compris ; on a trouvé quelques coraux résistants à des sources sous-marines naturellement acides le long de la côte de la péninsule du Yucatán (Mexique), mais ils ne forment que de petites colonies éparses et inégalement réparties, sans former de récifs complexes tels que ceux qui composent les barrières coralliennes et le système méso-américaine proche des barrières de Corail[37].

Turbidité et eutrophisation

L'impact des dépôts de sédiments apportés par une eau turbide est discutée. En effet, quand ces sédiments en suspension ne sont pas anormalement pollués, et au moins pour certaines espèces de corail, le corail récifal peut aussi parfois se nourrir de ces particules. Si les récifs coralliens comptent parmi les écosystèmes marins les plus productifs au monde, alors qu'on les trouve souvent dans des eaux plutôt oligotrophes, c'est certes en raison de leur aptitude (notamment grâce à leur endosymbiose avec les zooxanthelles) à utiliser des ressources alimentaires variées (zooplancton, phytoplancton, matières organiques dissoutes), c'est peut-être aussi grâce à l'aptitude de certains coraux à les extraire de l'eau et les consommer.

La sédimentation est cependant un facteur de stress reconnu pour la plupart des coraux, en inhibant la plupart de leurs modes d'alimentation, de diverses manières dont en empêchant les algues symbiotes d'accéder à la lumière nécessaire à la photosynthèse. Des travaux récents montrent que des dépôts accrus de sédiments sur certains coraux (induits par leur morphologie) sont aussi utilisé par ces coraux pour se nourrir[38]. Un suivi de la cinétique de la matière organique de sédiments en suspension (par des marqueurs fluorescence) montre qu'ils sont ingérés par les cellules du corail Fungia horrida Dana 1846[38] (C'est la première preuve concrète de la capacité de certains coraux à ingérer et digérer la fraction organique du sédiment en suspension dans l'eau[38]. Quand il est propre, le sédiment pourrait avoir un rôle positif pour ces coraux[38], mais quand il est pollué, ils pourraient être encore plus vulnérables à certains polluants, souvent piégés sur ou dans le sédiment.

Prédateurs introduits

ugroupe d'acanthasters terminant de consommer une table d'acropora.
Groupe d'acanthasters finissant un acropora tabulaire en Australie.

Plusieurs animaux sont capables de se nourrir de corail, comme les poissons-perroquets. Généralement, leur activité est en équilibre avec la croissance du corail, et permet un bon renouvellement des populations et assure la biodiversité du récif en consommant en priorité le corail à croissance rapide, au profit des coraux à croissance lente.

Cependant, depuis les années 1970 des invasions spectaculaires d'étoiles de mer dévoreuses de corail, Acanthaster planci, provoquent des mortalités massives et brutales de grandes quantités de corail, ravageant parfois des côtes entières notamment en Australie, au Japon et en Indonésie. Ces invasions semblent être de plus en plus fréquentes et brutales, et inquiètent d'autant plus les scientifiques que les causes en sont encore mal connues.

Métaux toxiques

Le « squelette » et les organismes de certains coraux se montrent plus chargés en métaux lourds et ETM que d'autres.
C'est le cas par exemple de Lobophyllia corymbosa (ci-dessus). Les espèces de coraux formant des colonies aux formes plus complexes semblent absorber de plus grandes quantités de ces métaux.

Des métaux lourds et ETM sont présents en mer. Ils sont issus des remontées volcaniques, d'apports terrigènes naturels et surtout anthropiques depuis quelques décennies, de dépôts aériens ou encore de la dissolution naturelle des roches immergées. Ces métaux sont plus ou moins sélectivement absorbés et concentrés par les coraux qui détoxiquent le milieu, mais éventuellement en s'empoisonnant. Selon une étude faite dans l'archipel de Lakshadweep (océan Indien), la morphologie des différentes familles, genre et espèce influe sur cette capacité. Les coraux massifs (ex Porites andrewsi) absorbent moins les métaux que les coraux rameux ou ramifiés (ex : Lobophyllia corymbosa, Acropora formosa et Psammocora contigua) ou foliacées (Montipora digitata). Dans les squelettes coralliens de cette région, les taux de métaux les plus élevées - pour tous les métaux traces sauf Zn - ont été rapportées chez les coraux en rameaux. Dans les tissus vivants, tous les métaux (indispensables, non-essentiels, ou écotoxiques) étaient plus concentrés chez les coraux en formes de branches. Indépendamment de leurs caractéristiques de croissance et forme, toutes les espèces étudiées, sauf P. contigua présentaient des taux de Pb, Ni, Mn et Cd plus élevés dans leur squelette que dans leurs tissus, ce qui laisse penser que le squelette est utilisé pour détoxiquer les organismes de métaux hautement toxiques tels que Cd et Pb[39]. De manière générale, les métaux se montrent plus mobiles et toxiques dans les contextes acides.

Menace écosystémique

Elle est planétaire, résultant des effets combinés du réchauffement des eaux de surface, de la montée de la mer et de l'acidification des océans, le tout associé à une hausse continue des émissions de gaz à effet de serre[40]. Le dérèglement climatique est une source de stress pour les coraux[41] ; En 1998, 16 % des récifs coralliens du monde seraient morts suite à des température d'eau trop élevées[42] qui semblent déjà mettre à mal la capacité de résilience écologique des coraux[43].

En 1983 l’épisode ENSO aurait en mer de Java induit la mort de 80 à 90 % des coraux.

Fin 2006, au moins 40 % des coraux de Martinique sont morts du blanchiment observé en 2005. Enfin, certaines études[réf. nécessaire] (probablement à confirmer) indiquent que les produits de protection solaire utilisés par les baigneurs seraient également responsables de la destruction des coraux, et ceci pour une part non négligeable. De 1955 à 2007 dans les caraïbes, 32 à 72 % des poissons des récifs auraient disparu [44], avec une réduction du stock de 2,5 à 6 % par an depuis 1995.

Projets de conservation

La coraliculture est la culture du corail, et si elle fait la joie des aquariophiles elle intéresse également les scientifiques et les écologues. Des projets de transplantation de corail à grande échelle dans des zones dégradées se développent dans certains pays, parfois avec succès[45]. Des associations telles que la Coral Reef Alliance[46] ou surtout Reef Check[47] organisent également un suivi de l'état des récifs à des fins de conservation et de prévention des menaces. En France, il existe également une Initiative française pour les récifs coralliens (IFRECOR), dépendant du Ministère de l’Écologie.

Étymologie

Le terme français provient du latin coralium, du grec archaïque κοράλλιον (korállion), désignant déjà ces animaux[48]. La première occurrence du mot « corail » dans la langue française est attestée au XVe siècle[49], et la racine latine s'est répandue dans toutes les langues européennes jusqu'au Russe.


Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

Liens externes

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Notes et références

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