Images (1re série)

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Images, 1re série
L 105 (110)
Page du manuscrit.
Première page du manuscrit autographe de Reflets dans l'eau.

Genre Triptyque pour piano
Nb. de mouvements 3
Musique Claude Debussy
Effectif piano seul
Durée approximative 15 min
Dates de composition 1905
Création
Paris, salle des Agriculteurs
Interprètes Ricardo Viñes

Images (1re série) est un recueil de trois pièces pour piano de Claude Debussy composées entre 1901 et 1905.

Présentation[modifier | modifier le code]

Les Images (1re série) sont composées entre 1901 et 1905 et sont publiées par Durand en 1905. Elles consistent en un ensemble de trois pièces, Reflets dans l'eau, Hommage à Rameau et Mouvement[1].

L'Hommage à Rameau est donné en première audition publique le par Maurice Dumesnil, lors d'un concert des « Soirées d'art », et le triptyque intégral des Images est créé le à la salle des Agriculteurs, à Paris, par Ricardo Viñes[2],[3].

Debussy envisageait dès 1899 la composition d'Images pour piano. En 1903, il signe avec Durand un contrat qui énumère les trois titres définitifs des pièces. Reflets dans l'eau lui demande le plus de travail. Il achève sa composition à l'été 1905[2],[4]. Le compositeur écrit alors à son éditeur : « Sans fausse vanité, je crois que ces trois morceaux se tiennent bien et qu'ils prendront leur place dans la littérature de piano..., à gauche de Schumann ou à droite de Chopin... as you like it »[4],[5].

Une transcription de Jacques Durand pour piano à quatre mains de l'Hommage à Rameau est publiée en 1907[2].

Structure[modifier | modifier le code]

Les Images comprennent trois mouvements :

  1. Reflets dans l'eau : en bémol majeur[6], Andantino molto (tempo rubato), à
    [7] ;
  2. Hommage à Rameau : en sol dièse mineur[6], Lent et grave (dans le style d'une Sarabande mais sans rigueur), à
    [7] ;
  3. Mouvement : en ut majeur, Animé (avec une légèreté fantasque mais précise), à
    [8], mouvement « vers la quarte diminuée ut, triomphe d'un diatonisme lumineux, laissant éclater une joie toute tactile, une véritable jubilation instrumentale[6] ».

La durée d'exécution moyenne du triptyque est de quinze minutes environ[9].

Dans le catalogue des œuvres du compositeur établi par le musicologue François Lesure, Images (1re série) porte le numéro L 105 (110)[1].

Analyse et commentaires[modifier | modifier le code]

Fichiers audio
Claude Debussy, Images (livre I)
I. Reflets dans l'eau
noicon
II. Hommage à Rameau
noicon
III. Mouvement
noicon
interprétés par Marcelle Meyer (avril 1957).

Reflets dans l'eau[modifier | modifier le code]

Reflets dans l'eau est pour Harry Halbreich une « évocation du liquide élément, inégalable de sensibilité poétique, de frémissante sensualité et de rêve[7] ». De « forme à cinq compartiments, alternant deux thèmes, on peut distinguer jusqu'à huit sections différentes[7] ». La partition est construite autour d'un « motif de trois notes, ce la, ce fa, ce mi, qui, jetés comme des cailloux dans l'onde, propagent à la surface du clavier les belles harmonies de septième et de neuvième, comme des cercles concentriques, dans la résonance de la pédale de tonique[10] », et de structure ABAB, « à quoi s'ajoute, dans le calme retrouvé, l'une des codas les plus poétiques de Debussy, juxtaposant le souvenir des deux thèmes, et laissant vibrer une dernière fois [...] les obsédantes trois notes initiales[10] ».

Pour reprendre les mots d'André Suarès, la pièce est un « poème de l'agonie de la lumière, de la lumière estompée par l'onde[7] ».

Pour Alfred Cortot, avec Reflets dans l'eau, voici « le sommeil lumineux et flottant des aspects inversés et les images lentes qui s'étirent au miroir ondoyant des sonorités, dans la transparence délicieuse des accords et des arpèges effleurés[11] ».

Pour Vladimir Jankélévitch, la pièce, « malgré le déluge des arpèges et des traits, [...] nous suggère elle aussi l'image onirique des eaux qui se morfondent, des eaux paresseuses, ensommeillées, sur lesquelles s'étirent les fantasmes et les moires[12] ».

Hommage à Rameau[modifier | modifier le code]

Première page du manuscrit autographe d'Hommage à Rameau.

L'Hommage à Rameau est « une sobre stèle, du plus pur marbre, au grand musicien français[7] ».

Au début de la pièce, « le thème non harmonisé expose, en octaves nues, sa courbe splendide en mode dorien pentaphone[7] ». La pièce est en trois volets : après « une première mélodie d'allure grégorienne, commencée dans la nudité [...], soutenue ensuite d'accords parfaits processionnels » vient « une seconde idée plus sombre, dont les tierces redoublées sont frôlées à leur crête de secondes douloureuses[10] ». La seconde partie fait se succéder un court motif d'appel et une progression d'accords, « scandée par un ostinato d'octaves à la main gauche[13] ». Enfin, le troisième volet combine des éléments des deux premiers[13]. Dans la conclusion, « les sons, au lieu de s'effiler, s'atténuent de mesure en mesure par dilution, étalement, déploiement progressifs[14] ».

Pour Cortot, l'Hommage à Rameau « s'adresse, par delà le symbole d'un nom préféré, à toute la lignée des clairs génies issus de notre sol, de la filiation desquels se réclamait si justement Claude Debussy, musicien français, ainsi qu'il se plaisait à se désigner lui-même[15] ».

Mouvement[modifier | modifier le code]

Première page du manuscrit autographe de Mouvement.

Mouvement est un mouvement perpétuel « plein d'humour et de fantaisie [...], aux triolets obstinés de doubles croches[8] ». Selon le conseil de Debussy à Marguerite Long, « il faut que ça tourne dans un rythme implacable[8] ».

La pièce est de forme ternaire, avec un passage central plus agité. Pour Harry Halbreich, c'est une « page étrange et envoûtante où Debussy atteint au fatalisme concentré des derviches tourneurs[8] ».

Cortot relève que « sous l'indifférence apparente d'un dessin de croches répétées qu'un bruissement égal de triolets active et talonne », Mouvement « donne naissance à cette sorte de tyrannie rythmique dont Strawinsky, et à sa suite Bartok, Casella ainsi que quelques autres jeunes musiciens, ont tiré un parti ingénieusement volontaire[16] ». Et le pianiste de souligner « l'impression dominante [...], celle d'une joie légère et vive, d'une activité sans frénésie[17] ».

Pour Jankélévitch, c'est « le mouvement pour le mouvement, in abstracto, le mouvement en soi et en général, le mouvement ayant sa fin en lui-même ; le mouvement indéterminé et dépourvu de finalité[18] ».

Discographie[modifier | modifier le code]

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b Lesure 2003, p. 531.
  2. a b et c Lesure 2003, p. 532.
  3. Halbreich 1987, p. 301-302.
  4. a et b Halbreich 1987, p. 301.
  5. Sacre 1998, p. 910.
  6. a b et c Lebrun 2018, p. 115.
  7. a b c d e f et g Halbreich 1987, p. 302.
  8. a b c et d Halbreich 1987, p. 303.
  9. (en) Michael Jameson, « Images (3), for piano, Set I, CD ... | Details », sur AllMusic (consulté le )
  10. a b et c Sacre 1998, p. 911.
  11. Cortot 1981, p. 25.
  12. Jankélévitch 2020, p. 145.
  13. a et b Sacre 1998, p. 912.
  14. Jankélévitch 2020, p. 285.
  15. Cortot 1981, p. 26.
  16. Cortot 1981, p. 26-27.
  17. Cortot 1981, p. 27.
  18. Jankélévitch 2020, p. 150.
  19. Christopher Howell, « Debussy 3 Thiollier 8553292 [CH]: Classical CD Reviews », sur www.musicweb-international.com (consulté le )
  20. (en-GB) Andrew Clements, « Debussy: Images; Etudes; Jean-Efflam Bavouzet », The Guardian,‎ (ISSN 0261-3077, lire en ligne)
  21. Pierre-Jean Tribot, « Le beau Debussy de Noriko Ogawa », sur ResMusica,
  22. Christophe Huss, « Images, L’isle joyeuse, Estampes, Children’s Corner, Masques, D’un cahier d’esquisses. Steven Osborne. Hyperion CDA 68161. », sur Le Devoir,
  23. Pierre Gervasoni, « Coffret : la trajectoire novatrice de Claude Debussy », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne)

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]