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Stanislas de Boufflers

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Stanislas de Boufflers
Description de l'image Stanislas de Boufflers 01.jpg.
Naissance
Nancy
Décès (à 76 ans)
Paris
Activité principale
Poète
Distinctions
Auteur
Langue d’écriture Français

Stanislas Jean de Boufflers, marquis de Remiencourt, plus souvent appelé le chevalier de Boufflers ( à Nancy en France - à Paris en France) est un maréchal de camp et poète lorrain puis français.

Biographie

Stanislas de Boufflers était le fils de Louis François, marquis de Remiencourt, et de la marquise, la belle et spirituelle Marie-Françoise-Catherine de Beauvau-Craon. Il grandit à la cour de Lunéville où il eut pour parrain le roi Stanislas, dont sa mère était la maîtresse en titre.

En 1760, destiné à l’Église, il passa deux ans au séminaire de Saint-Sulpice où il composa un conte légèrement licencieux, Aline, reine de Golconde, qui connut un grand succès. Peu fait pour l’état ecclésiastique, il quitta le séminaire sans avoir prononcé de vœux et conserva un bénéfice de 40 000 livres dont le roi Stanislas l’avait pourvu.

En 1762, à vingt-quatre ans, il entra au service, s’illustra sur les champs de bataille, par exemple pendant la campagne de Hanovre où il prit part à la sanglante bataille d'Amenebourg. Il gravit tous les échelons, fut nommé colonel de hussards en 1772, devint maréchal de camp en 1784.

Quelque temps après, il obtint un régiment ; mais une espièglerie le lui fit perdre presque aussitôt. Envoyé en ambassade à Remiremont pour féliciter la princesse Christine, de la maison de Lorraine, sur sa nomination à cette abbaye, il se vengea de l'accueil plein de hauteur qu'elle lui fit essuyer par une chanson qui déplut à la "princesse boursouflée" (page 146 du volume Œuvres complètes de Boufflers, de l'Académie française - Tome premier). Cette boutade ayant été imprimée, les plaintes du comte de Lusace, frère de la noble abbesse, firent encourir une complète disgrâce au pauvre chevalier, qu'on déporta, pour ainsi dire, en qualité de gouverneur du Sénégal et de la colonie de Gorée.

Hostellerie du Chevalier de Boufflers sur l’île de Gorée (Sénégal).

En 1786, il prit sa dignité nouvelle en patience, il se montra un administrateur avisé et humain, et il s’attacha à mettre en valeur la colonie, tout en se livrant à la contrebande de gomme arabique et d’or avec les signares : il se lia en particulier avec la célèbre Anne Pépin[1]. Il fit envoyer plusieurs enfants-esclaves en France dont Jean Amilcar qu'il offrit à la reine Marie-Antoinette. Durant cette période, il entretint une correspondance dense avec la comtesse de Sabran dont il était l'amant depuis 1781. Cette correspondance nous renseigne en détail sur la vie dans la colonie. Elle a été publiée dès 1875[2], puis en 2009-2010[3].

Après une première absence pendant laquelle François Blanchot de Verly assura l'intérim, il quitta définitivement le Sénégal le , regretté par les habitants des comptoirs de Gorée et Saint-Louis. Ces épisodes de la vie du chevalier de Boufflers ont été portés à la scène, en 2010, par la Compagnie La Poursuite sous le titre Ourika de Gorée au Pays des Lumières.

À son retour en France, il remboursa ses dettes grâce au produit de son commerce de contrebande[4].

De retour d'Afrique et élu a l'Académie Française en 1788 il débuta son discours de réception en parlant de "ces hommes simples réduits aux seuls besoins physiques, bornés à des notions pour ainsi dire animales "qui au lieu de recevoir des européens "les bienfaits que l'obscurité doit attendre de la lumière" avaient été victimes de leur cupidité barbare . "Les vainqueurs de l'Océan" s'étaient révélés "comme des dieux malfaisants qui viennent exiger des victimes humaines"[5] Cette prise de position publique, mais aussi le recours a son vaste réseau de relations mondaines et le brio de sa conversation, seront à l'origine de la prise de conscience qui mobilisa en 1788 Condorcet, Brissot, Lafayette et Sieyes et fit de Mme de Staël une militante qui exprima, sa vie durant, son indignation contre l'esclavage et la traite des Noirs.

Député de la noblesse aux États généraux de 1789, il fut l'auteur de deux célèbres rapports relatifs aux deux premières lois françaises modernes de propriété intellectuelle[6].

Il émigra après le et trouva refuge en Prusse polonaise, à Breslau, où il régularisa une liaison de plus de quinze ans en épousant, en 1797, Éléonore de Sabran. Le chevalier avait refusé d'épouser Mme de Sabran avant cette date en raison de leur écart de fortune, mais en 1797, ruinés tous les deux par la Révolution, il n'y avait plus de raison de différer ce mariage[7].

Ils revinrent en France après le 18 brumaire (1800). Le chevalier de Boufflers se rallia à Bonaparte. Courtisan de la princesse Élisa Bonaparte, il chanta également les louanges du roi Jérôme. Il se fit nommer bibliothécaire-adjoint de la Bibliothèque Mazarine et reprit son fauteuil à l’Académie française en 1803. Son esprit lui ouvrit les portes des salons de l’Empire, même si l’on avait peine à reconnaître dans ce vieillard empâté et peu soigné le fringant officier de jadis.

Il mourut en janvier 1815. Sa tombe se trouve au Père-Lachaise. On y lit, à demi-effacée, cette mélancolique inscription : Mes amis, croyez que je dors !.

Œuvres

Élégant, aimable, gai et spirituel, Boufflers savait, dans l’esprit du temps, tourner un madrigal ou une épigramme ou rimer une épître ou une chanson. Il a laissé de nombreuses pièces fugitives, ainsi que le récit d’un voyage en Suisse, écrit avec beaucoup d’agrément. Il a également composé des éloges académiques et un Traité sur le libre arbitre. C’est lui aussi qui serait l’auteur du fameux allographe connu sous le nom de la Vie d’Hélène.

« Il a beaucoup de demi-talents en tout genre, dit Jean-Jacques Rousseau ; il fait très bien de petits vers, écrit très bien de petites lettres, va jouaillant un peu du sistre, et barbouillant un peu de peinture au pastel[8]. » Saint-Lambert, qui fut l’amant de sa mère, l’a jugé d’un trait : « Boufflers, c’est Voisenon le Grand. », tandis que Rivarol le résume en ces termes : « Abbé libertin, militaire philosophe, diplomate chansonnier, émigré patriote, républicain courtisan. ». Si Chamfort ne voyait en lui qu'un faiseur de meringues, Voltaire lui témoigna une véritable estime comme à un homme dans les compositions duquel il retrouvait beaucoup de sa philosophie frondeuse et cynique.

  • Aline, reine de Golconde, conte en prose (1761), dont s'inspira Sedaine pour son opéra-ballet homonyme (1766)
  • Lettres à ma mère, sur la Suisse (1770)
  • Traité sur le libre arbitre (1808)

Ses œuvres complètes ont été publiées en 1803 (2 volumes in-8) et en 1828 (4 volumes in-18).

Œuvres iconographiques

Le Chevalier de Boufflers a réalisé des croquis et dessins lors de son séjour au Sénégal en 1786 ; parmi les ébauches produites, l'une a fait l'objet d'une huile sur toile dénommée Ourika probablement réalisée par Madame Vigée le Brun, amie de son épouse la comtesse de Sabran. La peinture fut transmise aux enfants adoptifs du Chevalier, les Pontevès et en l'année 2006, elle faisait partie de la collection privée du Comte Jean de Sabran-Pontevès au château d'Ansouis, en Provence.

Anecdote

Tirée de la notice des œuvres complètes de Boufflers M DCCC XXVII

Peu d'hommes ont obtenu autant de galants succès que Boufflers. Peut-être nous a-t-il donné la véritable explication de ces triomphes continus quand il a dit: En amour j'étais tout physique... C'est un point essentiel.

Quoi qu'il en soit, il est certain qu'il ne trouva guère de cruelles. Des infidèles, c'est une toute autre chose; et, à cette occasion, je me rappelle une aventure qui longtemps occupa tout Paris et dans laquelle il joua un rôle assez nouveau.

"Un jour il s'était vengé par une épigramme sanglante de l'inconstance d'une belle marquise. Cette petite pièce parvint à sa destination après avoir passé par vingt cercles. La marquise lui écrivit sur le champ pour lui demander pardon de ses torts, le supplier de détruire toutes les traces de sa vengeance et l'engager à venir chez elle à une heure indiquée, pour sceller une réconciliation sincère. Le chevalier connaissait trop bien les femmes pour aller sans défiance au rendez-vous; il se munit de pistolets. A peine avait-on échangé les premières explications que quatre grand drôles arrivent, le saisissent, l'étendent sur le lit, le déshabillent, autant qu'il était nécessaire pour exécuter leur dessein, et lui administrent en cadence cinquante coups de verges chacun, sous le commandement de madame. La cérémonie terminée, le chevalier se relève froidement, se rajuste, et, s'adressant aux spadassins que la vue de ses armes fait trembler: " Vous n'avez pas fini votre besogne, leur dit-il; madame doit être satisfaite, mon tour est venu. Je vous brûle la cervelle à tous les quatre, si vous ne lui rendez à l'instant ce que je viens de recevoir....." Cet ordre était donné avec trop de fermeté et Boufflers l'accompagnait de manières trop engageantes pour qu'on tardât à lui obéir. Les pleurs de la belle dame n'empêchèrent pas que le satin de sa peau ne fût outragé sans pitié. Mais ce ne fut pas tout: Boufflers voulut que les exécuteurs de ces actes de vengeance se fissent subir mutuellement une semblable punition; puis, prêt à se retirer: " Adieu, madame, que rien ne vous empêche de publier cette plaisante aventure; je serai le premier à en régaler les oisifs... " On prétendit que la marquise courut après lui, se jeta à ses genoux, et le conjura tellement de lui garder le secret qu'il soupa chez elle le soir même pour démentir les indiscrétions. Bien plus, on ajouta que, malgré ces fustigations, la scène se termina beaucoup plus gaiement qu'elle n'avait commencé.

Le chevalier de Boufflers réside à de nombreuses occasions à Plombières-les-Bains (ville thermale des Vosges. Le musée de Plombières expose ses œuvres. Une rue de Plombières a pour nom "chevalier de Boufflers".

Notes

  1. Dont la nièce Anna Colas Pépin possédait la demeure connue sous le nom de Maison des Esclaves (cette appellation est controversée).
  2. Correspondance inédite de la comtesse de Sabran et du chevalier de Boufflers : 1778-1788 / recueillie et publiée par E. de Magnieu et Henri Prat, (lire en ligne)
  3. Stanislas-Jean de Boufflers, Le lit bleu : correspondance, 1777-1785, Tallandier, (ISBN 978-2-84734-492-9 et 2-84734-492-6, OCLC 436843684, lire en ligne)
  4. Selon Jean-Luc Angrand, Céleste ou le temps des signares, Editions Anne Pépin, 2006.
  5. Benedetta Craveri, Les Derniers Libertins, Paris, Flammarion, , 637 p., page 267
  6. André Lucas, « L’arbre dans le champ, le brevet d’invention et le droit d’auteur »,
  7. Benedetta Craveri, Les derniers Libertins, Paris, Flammarion, , 637 p. (ISBN 978-2-0812-4931-8), p. 553
  8. Jean-Jacques Rousseau, « Confessions », Œuvres complètes, Bibliothèque de la Pléiade, 1947, vol.I, p. 552.

Voir aussi

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Oeuvres

  • Chevalier de Boufflers, Lettres d'Afrique à madame de Sabran, Actes Sud, « Babel - Les épistolaires », 1998.
  • Journal inédit du second séjour au Sénégal : (3 décembre 1786-25 décembre 1787) (préf. et publication par Paul Bonnefon), Paris, Éditions de la Revue politique et littéraire et de la Revue scientifique, , 196 p. (Wikisource)
  • Œuvres complètes de Boufflers, de l'académie française. Nouvelle édition, augmentée d'un grand nombre de pièces non recueillies. - Tome Premier." chez Furne, libraire, quai des augustins, no 37. M DCC XXVII

Bibliographie

Romans historiques

  • Jacqueline Sorel, Boufflers, un gentilhomme sous les tropiques, L'Harmattan, Paris, 2012, 192 p. (ISBN 9782296963153)
  • Marie Brantôme, Le Galant exil du marquis de Boufflers, 1986.

Filmographie

Hommage

Liens externes