Pierre Goldman

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Pierre Goldman (Lyon, 22 juin 1944 - Paris, 20 septembre 1979) est un intellectuel engagé d'extrême gauche ayant glissé dans le banditisme, demi-frère aîné du chanteur Jean-Jacques Goldman. Il meurt assassiné dans le 13e arrondissement de Paris. L'acte, revendiqué par un mystérieux groupe clandestin d'extrême droite, Honneur de la Police, n'a jamais été complètement élucidé.

Enfance

Pierre Goldman naît à la fin de la Seconde Guerre mondiale de parents juifs polonais (Alter Mojsze Goldman (1909-1988), natif de Lublin, et Janine Sochaczewska) qui participent activement à la Résistance à Lyon. Il raconte ainsi que ses parents traversaient la ville avec des armes et de la propagande anti-allemande cachées dans son berceau[1]. Ses parents se séparent quelques mois après sa naissance. Pierre est alors élevé par sa mère, avant qu'il ne soit enlevé par son père qui ne veut pas que son fils parte avec elle en Pologne communiste. Pierre est alors élevé par son père et sa nouvelle femme, Ruth Ambrunn, et officialisé comme premier enfant du couple qui en aura trois autres : Evelyne, née en 1950, Jean-Jacques en 1951 et Robert en 1953[2].

Jeunesse

Élève instable, il passe par plusieurs établissements scolaires. En classe de seconde au collège d'Étampes, il se montre extrêmement agité et contestataire[3]. Admiratif de l'action de ses parents, il adhère aux Jeunesses communistes, puis intègre le cercle philo de l'UEC Sorbonne.

Le chef du S.O. de l'UEC Sorbonne

Il devient responsable du service d'ordre de l'Union des étudiants communistes et, après sa rencontre avec Régis Debray, finit par rejoindre le Venezuela en 1968, où il passe un an dans les rangs de la guérilla. Mais, « son seul fait d’armes consiste en un hold-up organisé et réussi par son groupe dans une banque de Puerto de la Cruz. »[4].

Banditisme

Dès son retour en France, en septembre 1969, il commet trois braquages : la pharmacie Farmachi, rue Ernest-et-Henri-Rousselle, dans le 13e arrondissement, un magasin de haute couture, les Établissements Vog, et le payeur de la caisse des allocations familiales, passage Ramey[5].

Affaire Goldman

Un indicateur de la police dénonce Pierre Goldman comme auteur d'un braquage sanglant de la pharmacie Delaunay, située boulevard Richard-Lenoir à Paris, le 19 décembre 1969. Deux pharmaciennes y ont été tuées, alors qu'un client, ainsi qu'un gardien de la paix en civil, Gérard Quinet, avaient été blessés. Ce dernier et d'autres témoins prétendent le reconnaître, d'abord sur photo puis en parade d'identification, dans des conditions mises en doute lors du second procès.

Arrêté, Pierre Goldman nie avoir participé au braquage et ne reconnaît que les trois précédents méfaits. Soutenu par les milieux de gauche, son procès déchaîne les passions. Il est dans un premier temps condamné à perpétuité par la cour d'assises de Paris le 14 décembre 1974. L'annonce du verdict se fait dans une ambiance houleuse. À la suite de ce procès, un comité de soutien est créé, une pétition est lancée, la presse en parle, des personnalités intellectuelles ou artistiques de gauche, telles que Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir, Simone Signoret ou Maxime Le Forestier (qui écrira sur lui sa chanson La Vie d'un homme) prennent fait et cause pour lui. Pour l'intelligentsia de gauche, Goldman, sans nul doute, est « une victime symbolique de la mauvaise France, celle de Pétain qui perdure sous la carapace démocratique et républicaine »[4]. Le 20 novembre 1975, l'arrêt de la cour d'assises est cassé par la cour de cassation. Le 4 mai 1976, au terme d'un second procès à Amiens devant la cour d'assises de la Somme, où il est défendu par les avocats Georges Kiejman et Émile Pollak, sa culpabilité n'est pas retenue pour les meurtres du boulevard Richard-Lenoir, mais il est condamné à douze ans de réclusion criminelle pour les trois autres braquages. Par le jeu des réductions de peine et de la prise en compte de la détention provisoire déjà effectuée, il est libéré quelques mois plus tard. En 2005, Michaël Prazan dans un livre et un documentaire télévisé, mettra fortement en doute la thèse de l’innocence de Goldman dans l’affaire des meurtres des deux pharmaciennes[4].

Après sa libération, Pierre Goldman collabore notamment aux journaux Les Temps modernes et Libération.

Écrivain

En prison, Pierre Goldman écrit Souvenirs obscurs d'un juif polonais né en France, qui obtient un succès critique et populaire (plus de 60 000 exemplaires vendus[6]). Me Arnaud Lyon-Caen, son avocat devant la Cour de cassation, en fait même distribuer un exemplaire à chaque membre de la Cour avant son procès en révision[6]. Ce livre autobiographique attire la sympathie d'une partie de l'opinion publique pour sa cause. Son second ouvrage connaît un succès moindre et est beaucoup plus contesté. Publié en 1977, quelques mois après sa libération, L'ordinaire Mésaventure d'Archibald Rapoport, met en scène un personnage qui lui ressemble par certains aspects et qui commet une série d'assassinats, créant chez beaucoup de lecteurs un sentiment de malaise[6].

Assassinat

Pierre Goldman est assassiné le jeudi 20 septembre 1979, en pleine rue, à bout portant, place de l'Abbé-Georges-Hénocque dans le 13e arrondissement de Paris. Les témoins décrivent trois personnes communiquant entre elles en espagnol. La police pense à une piste liée à la pègre. L'assassinat est néanmoins revendiqué à l'AFP par une organisation d'extrême droite inconnue : Honneur de la Police.

Près de 15 000 personnes, dont de nombreuses personnalités intellectuelles de gauche, assistent à son enterrement[6],[7] au cimetière du Père-Lachaise. Sa femme, épousée en prison, accouche de leur fils Manuel, quelques heures après son assassinat[6].

Les responsables du meurtre de Pierre Goldman n'ont pas été retrouvés. Plusieurs hypothèses ont été avancées les concernant :

  • Celle d'un groupe de policiers d'extrême droite, mécontents de son acquittement et de sa libération ;
  • Celle des services secrets français, évoquée par VSD le 19 juillet 2001 ;
  • Une autre piste est celle du milieu marseillais qui aurait réalisé un contrat commandité par des structures qui formeront plus tard les Groupes antiterroristes de libération (peut être à la suite de rumeurs selon lesquelles Pierre Goldman aurait voulu aider l'ETA à se procurer des armes). En , le journal Libération a publié ainsi une entrevue avec le commissaire Lucien Aimé-Blanc dans laquelle celui-ci affirme révéler le nom de son assassin :
« C'est mon informateur Jean-Pierre Maïone qui a flingué Pierre Goldman et me l'a avoué bien après. Au départ, comme la revendication était signée « Honneur de la Police » et que Maïone travaillait avec le directeur des RG (Renseignements généraux), Maurice Paoli, ancien des réseaux Algérie française, j'ai pensé que ces « ultras » avaient liquidé Goldman, acquitté du double meurtre de la pharmacie. Mais mon collègue Paoli, qui ne me cachait pas grand-chose, m'a dit : « C'est pas nous ». Et puis mon indic, Maïone, m'a expliqué que c'est le futur Groupe d'action libération, le GAL, qui avait décidé du « flingage » de Goldman. Le GAL, c'était un service parallèle de contre-terrorisme composé de barbouzes et de voyous manipulés par les forces répressives officielles espagnoles qui liquidaient des gens d'ETA. Pierre Goldman, qui fréquentait la brasserie Bofinger, fief des indépendantistes basques, ambitionnait de monter un réseau armé pour contrer ces anti-ETA. Il a contacté des voyous de gauche, comme Charlie Bauer qui n'a pas marché, Mesrine qui s'est défilé, et des autonomes. À force de se vanter de ses futures actions contre le GAL, Goldman est apparu dangereux. Des voyous marseillais du GAL l'ont tué avec Maïone, qui a évoqué aussi un commandant, ancien du SDECE mais actif à l'époque, sans me donner son identité[8]. » Le commissaire Lucien Aimé-Blanc a exprimé son accord avec cette dernière version dans un livre paru en 2006[9] ;
Tombe de Pierre Goldman au cimetière du Père-Lachaise.
  • En 2009, un homme a affirmé avoir fait partie d'un commando de quatre personnes qui aurait tué Pierre Goldman. D'après cette personne, un membre du commando travaillait pour la DST, un autre pour les RG, le tout sous la supervision du SAC. Son témoignage a été recueilli par le journaliste Michel Despratx, qui l'a présenté dans un documentaire intitulé Comment j'ai tué Pierre Goldman et diffusé sur la chaîne de télévision Canal+, le [10] ;
  • En 2012, la lettre Faits et Documents affirme que le tueur de Pierre Goldman interviewé dans l'émission de Canal+ est René Resciniti de Says dit « René l'élégant », décédé en avril 2012[11].

Bibliographie

Œuvres de Pierre Goldman

Livres écrits sur lui

Film réalisé sur lui

Chansons écrites sur lui

Documentaire télévisé

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. Hervé Hamon et Patrick Rotman, Génération 1. Les années de rêve, Éditions du Seuil, collection « Points – essais », 2008, p. 150.
  2. Jean-Paul Dollé, L'Insoumis (Grasset, 1997, p. 212)
  3. Frédéric Gatineau, article « Collège » in Étampes en lieux et places, édition À Travers Champs, 2003, en ligne (texte révisé) sur corpusetampois.com, p. 39.
  4. a b et c Pierre Goldman, encore et toujours, Luc Rosenzweig, causeur.fr, 29 janvier 2010
  5. Philippe Ridet, « L'arrestation de Pierre Goldman : ultimes souvenirs obscurs », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  6. a b c d et e Faites entrer l'accusé, France 2, diffusé le 5 décembre 2007.
  7. Vidéo des obsèques Pierre Goldman
  8. « Mon indic a flingué Pierre Goldman, entretien avec Lucien Aimé-Blanc » publié par Libération le 20 avril 2006.
  9. L'Indic et le Commissaire (par Lucien Aimé-Blanc et Jean-Michel Caradec'h, Plon, 2006, 246 pages).
  10. « J'ai assassiné Pierre Goldman, un tueur se confie », publié par Rue89, 23 janvier 2010
  11. « L’identité de « Gustavo », l’homme qui dit avoir tué Pierre Goldman, révélée », blog « Droite(s) extrême(s) » de deux journalistes du journal Le Monde
  12. article sur Actualitté