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Oblast autonome juif

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Oblast autonome juif
(ru) Еврейская автономная область
(yi) ייִדישע אווטאָנאָמע געגנט
Blason de Oblast autonome juif
Armoiries de l'oblast autonome juif
Drapeau de Oblast autonome juif
Drapeau de l'oblast autonome juif
Oblast autonome juif
Administration
Pays Drapeau de la Russie Russie
Région économique Extrême-Orient
District fédéral Extrême-oriental
Statut politique Oblast autonome
Création
Capitale Birobidjan
Chef de l'administration Rostislav Goldstein (intérim)
Démographie
Population 166 120 hab. (2016)
Densité 4,6 hab./km2
Géographie
Coordonnées 48° 29′ 00″ nord, 132° 07′ 59″ est
Superficie 36 266 km2
Autres informations
Langue(s) officielle(s) Russe, yiddish[1]
Fuseau horaire UTC+11
Code OKATO 99
Code ISO 3166 RU-YEV
Immatriculation 79
Localisation
Localisation de Oblast autonome juif
Liens
Site web www.eao.ru

L'oblast autonome juif (en russe : Евре́йская автоно́мная о́бласть, Evreïskaïa avtonomnaïa oblast ; en yiddish : ייִדישע אווטאָנאָמע געגנט, yidishe avtonome gegnt), ou Birobidjan (en réalité le nom de la ville principale), est un sujet de la fédération de Russie situé en Sibérie (Extrême-Orient russe), à la frontière avec la Chine. Il est souvent nommé, en français uniquement, Birobidjan, selon sa capitale.

Cet oblast a été fondé à l’initiative de Staline en 1934, avec le yiddish comme langue officielle. Il a attiré peu de Juifs à sa création et d'autant moins après la création de l'État d'Israël en 1948. Il a conservé le statut de terre d'accueil pour les Juifs de Russie. L'article 65 de la Constitution de la Russie prévoit qu'il s'agit du seul oblast autonome de la Russie. C'est l'un des deux territoires juifs officiels dans le monde, l'autre étant Israël.

Géographie

L'oblast de 36 266 km2, peuplée de 166 120 habitants en 2016, se trouve sur la rive gauche du fleuve Amour qui marque une part importante de la frontière russo-chinoise, directement en amont de la ville de Khabarovsk. Le fleuve marque également la limite entre l'oblast avec le kraï de Khabarovsk qui l'enveloppe au nord et à l'est, tandis qu'à l'ouest se situe l'oblast de l'Amour.

Population et société

Démographie

Évolution démographique
2002 2014 2016 - -
190 915170 377166 120--
Indice de fécondité et taux de natalité
Année Fécondité Fécondité urbaine Fécondité rurale Année Fécondité Fécondité urbaine Fécondité rurale Année Fécondité Fécondité urbaine Fécondité rurale
1990 2,40 2,00 3,30 2000 1,24 1,12 1,53 2010 1,67 1,56 1,90
1991 2,15 1,76 3,00 2001 1,36 1,29 1,53 2011 1,79 1,67 2,16
1992 1,89 1,63 2,49 2002 1,38 1,31 1,58 2012 1,84 1,68 2,32
1993 1,67 1,39 2,27 2003 1,46 1,39 1,66 2013 1,86 1,68 2,34
1994 1,68 1,36 2,43 2004 1,45 1,39 1,60 2014 1,95 1,72 2,60
1995 1,51 1,27 2,14 2005 1,40 1,30 1,61 2015 2,02 1,95 2,28
1996 1,40 1,16 2,02 2006 1,47 1,38 1,64 2016 1,99 1,84 2,39
1997 1,32 1,15 1,73 2007 1,59 1,45 1,87 2017 1,81 1,76 2,00
1998 1,33 1,17 1,74 2008 1,72 1,59 1,98 2018 1,85 1,70 2,27
1999 1,23 1,09 1,56 2009 1,64 1,55 1,83 2019 1,73 1,69 1,88

Composition ethnique

À son apogée à la fin des années 40, la population juive de la région a culminé à environ 46 000 à 50 000 personnes, soit environ 25% de la population totale. Au recensement de 2010, la population était de 176 558 personnes, soit 0,1% de la population totale de la Russie. En 2010, selon les données fournies par le Bureau du recensement russe, il n'y avait plus que 1 628 juifs dans l'Oblast (moins de 1% de la population), tandis que les Russes ethniques représentaient 92,7% de la population. Le judaïsme n'est pratiqué que par 0,2% de la population de l'Oblast. Selon le recensement de 2010 en Russie, le groupe ethnique le plus important de l'oblast est constitué par les Russes (92,7 %), suivis des Ukrainiens (2,8 %), des Juifs (1 %) et d'autres[2].

Histoire

Le problème de la répartition

Après la révolution d'Octobre (1917), la Déclaration des droits des peuples de Russie proclame « l'égalité et la souveraineté des peuples de Russie ». Les Juifs sont reconnus comme une nationalité au sein de l'URSS, mais alors que la Constitution fédérale du garantit un territoire à chaque nationalité soviétique, aucune région ne leur est attribuée. En effet, il n'existe aucun territoire de l'URSS où les Juifs représentent une majorité de la population, contrairement aux autres minorités nationales. Une forte minorité juive existe cependant dans l'ouest de l'Union, sur les anciens territoires de la Pologne, de l'Ukraine et de la Biélorussie.

Idéologie et assimilation

Depuis la fin du XIXe siècle, les tsars tentent d'organiser, sans succès, une réorientation des populations juives vers l'agriculture. L'URSS durant les années 1920, poursuivra cette œuvre, tenter de détourner les Juifs d'URSS de leurs métiers traditionnels de petits commerçants, de prêteurs et de manufacturiers, jugés absolument contraires à l'idéologie communiste, ceci avec un succès relatif[3]. Cependant, les paysans habitant les localités concernées n'apprécient guère de voir leurs terres investies par ces nouveaux venus, ce qui cause des tensions. Il faut donc trouver une terre pour les Juifs, l'émigration vers la Palestine prend alors de l'ampleur.

La création du Birobidjan

La place centrale de Birobidjan

Dès 1928, la région du Birobidjan est réservée par décret à l'établissement des Juifs[1]. Ils sont encouragés à s'installer dans ce territoire, et le décret propose la création d'une « entité administrative territoriale nationale juive » si l'expérience est un succès. C'est chose faite à l'initiative de Joseph Staline, qui crée une « Région autonome juive » en 1934, à Birobidjan à l'extrémité orientale de la Russie, à la frontière avec la Chine. Des primes incitatives sont données aux Juifs afin qu'ils partent s'installer dans cette région peu peuplée située à plus de 5 000 kilomètres de Moscou. Au début, la région autonome accueille des milliers d'individus, qui devaient y organiser une certaine vie nationale juive. L'oblast a une langue officielle : le yiddish[1], l'hébreu étant alors une langue liturgique, donc beaucoup moins parlé par la population que le yiddish, et le pouvoir soviétique hostile aux religions en général et donc à la religion juive. La vie culturelle en yiddish se développe progressivement : un théâtre juif est créé en 1934, et un journal en yiddish, « L'étoile du Birobidjan » paraît régulièrement. Des écoles en yiddish se développent pour faire face à l'afflux de nombreux colons avec enfants[4].

Les raisons de la création de l'oblast sont multiples, et ont été exposées notamment par l'historien Nikolaï Bougaï dans ses nombreux articles et ouvrages sur les déplacements et la déportation des peuples d'URSS :

  • la volonté de permettre aux Juifs soviétiques de disposer d'un territoire pour pouvoir s'y exprimer en tant que nationalité soviétique. Ce projet était conçu comme une alternative au sionisme jugé « nationaliste-bourgeois ». Mais la population juive ne sera jamais majoritaire dans cette Région autonome qui fut une « entité » politique communiste « pour le peuple juif », à l'opposé du projet officialisé en Palestine par le mandat de la Société des Nations de 1922, sur des bases « capitalistes » (voir histoire du sionisme). La politique des nationalités de l'URSS « prouvait » ainsi que le régime pouvait répondre aux aspirations juives sans soutenir un mouvement que le communisme soviétique réprouvait ;
  • la volonté de « renforcer » la zone autour du fleuve Amour, dans l'Extrême-Orient soviétique, historiquement possédée par la Chine. Et donc volonté de peupler cette région de la Sibérie supposée riche en ressources naturelles (bois, charbon, graphite) ;
  • la volonté d'« éloigner en douceur » les intellectuels juifs du Centre de la Russie, communistes ou ralliés, mais jugés peu fiables et « cosmopolites »[5].

Ce projet politique se poursuit après la création d'Israël en 1948 : on comptait alors 30 000 Juifs dans l'oblast. Dès la mort de Staline le , la population juive du territoire ne devait cesser de décroître, tant sous Khrouchtchev que sous Brejnev et en 1959, elle n'était plus que de 9 %, chutant même à 7 % en 1970.

Les limites et les failles du projet

Le projet de la République autonome juive contenait, dès son départ, de nombreux points faibles, dont les autorités soviétiques étaient plus ou moins conscientes. Premièrement, la région était très éloignée des lieux historiques de peuplement de la communauté juive russe. Il fallait donc effectuer une transplantation « à froid » du peuple et de sa culture.

Deuxièmement, du fait de son éloignement, la région et sa capitale (Birobidjan) étaient quasiment dépourvues d'infrastructures. L'afflux massif de colons prit de court les autorités locales, dépassées. L'insalubrité s'installe dans la capitale, qui n'aura pas d'égouts avant la Seconde Guerre mondiale. Le long de la rue principale en terre battue s'alignent des baraquements en bois mal étayés qui servent de maisons aux nombreux Juifs ayant choisi de vivre dans un environnement urbain. En effet, le projet de retour à la terre avait lui aussi partiellement échoué : en 1939, seuls 25 % des Juifs de la R.A.J. habitaient à la campagne, car un grand nombre de sols s'étaient révélés marécageux et/ou impropres à la culture[6]. Les colons, issus pour la plupart des villes, rechignaient en outre à apprendre un nouveau métier dans un environnement hostile, préférant se concentrer dans la capitale. De plus, la mystique du retour des juifs à la terre perdit de son importance quand les plans quinquennaux se tournèrent vers l'industrialisation de l'URSS. Ce n'est donc pas étonnant si, en 1939, la population juive ne correspond qu'à 18 000 des 109 000 habitants de la région. Comme le reste de l'URSS, la région souffrit des Grandes Purges décidées par Staline, puis du nationalisme patriotique qui s'empara de la Russie durant la Seconde Guerre mondiale[7].

Le chant du cygne

Ce sont paradoxalement la Shoah et les ravages causés par la Seconde Guerre mondiale qui redonnèrent vie au projet de la RAJ. En effet, entre 1945 et 1948, de nombreux Juifs soviétiques qui avaient fui l'avancée allemande ou tout perdu durant la guerre immigrèrent dans cette terre soviétique promise depuis très longtemps. Près de dix mille d'entre eux s'installèrent dans cette région en trois ans, de 1945 à 1948. Les habitants et les responsables politiques reprenaient espoir de voir la RAJ remplir son rôle. Mais la création de l'État d’Israël fit l'effet d'une bombe dans tout l'espace soviétique. Le projet Birobidjan perdit son élan, cette fois définitivement. L'Alya allait commencer, et le Birobidjan se viderait lentement de ses Juifs.

Depuis 1991

Malgré des tentatives d'aide financière à l'époque de Gorbatchev, la majorité des Juifs qui restaient dans l'oblast émigra après la chute de l'URSS en 1991. Les traces du judaïsme y sont aujourd'hui bien maigres : en 2002, il ne restait que 2 327 Juifs, une synagogue, quelques inscriptions à même les façades et un journal régional en yiddish : Birobidjanèr chtern (ביראָבידזשאנער שטערן) ou l'Étoile du Birobidjan[8].

En 1991, l'oblast est passé de la juridiction du Kraï de Khabarovsk à la juridiction de la Fédération[9].

Depuis le recensement russe de 2010, sa population est russe à 92 % et il ne reste que 1 % de Juifs[10],[11]. Toutefois, entre 5 % et 10 % de la population parleraient le yiddish à divers niveaux (souvent très mal), car le yiddish était enseigné dans les collèges et lycées, avant 1986, et il serait donc parlé par des non-Juifs. Sinon, au Birobidjan, seuls entre 1 % et 2 % de la population saurait parler couramment cette langue (dont des Russes).[réf. nécessaire]

De nos jours, c'est surtout l'anglais, qui est parlé en seconde langue, et qui est enseigné dès le collège.

Divisions administratives

Les cinq raïons de l'oblast.

L'oblast autonome juif est divisé en cinq raïons, et une ville indépendante :

Politique

Titulaires de la fonction de gouverneur de l'Oblast autonome juif (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
IdentitéPériodeDuréeÉtiquette
DébutFin
Nikolaï Mikhaïlovitch Volkov (en)
(ru) Николай Михайлович Волков
(né en )
13 ans, 3 mois et 30 joursNotre maison la Russie
Russie unie
Alexandre Aronovitch Vinnikov (en)
(ru) Александр Аронович Винников
(né en )
4 ans, 11 mois et 30 joursRussie unie
Alexandre Borissovitch Levinthal (en)
(ru) Александр Борисович Левинталь
(né en )
4 ans, 2 mois et 20 joursRussie unie
Rostislav Goldstein (en)
(ru) Ростислав Эрнстович Гольдштейн
(né en )
En cours4 ans, 11 mois et 3 jours

Notes et références

  1. a b et c Fondation du Birobidjan juif, sur le site Hérodote
  2. (ru) « Всероссийская перепись населения 2010 года. Том 1 », Федеральная служба государственной статистики,‎ .
  3. Le Birobidjan, 1928-1996 : l'histoire oubliée de l'État juif fondé par Staline
  4. Guillaume Fraissard, « Birobidjan, Birobidjan ! », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le )
  5. Benjamin Pinkus, The Jews of the Soviet Union : the history of a national minority, Cambridge University Press, 1988, (ISBN 978-0-521-34078-6).
  6. Le Birobidjan, 1928-1996 : l'histoire oubliée de l'État juif fondé par Staline p. 48
  7. « Les revenants du Birobidjan », sur Libération.fr, (consulté le )
  8. Bienvenue chez nos cousins du Birobidjan, Gérard Xavier, sur le site genami
  9. (en) « History », sur www.eao.ru (consulté le )
  10. (ru) Информационные материалы об окончательных итогах Всероссийской переписи населения 2010 года
  11. Piotr Smolar, « Birobidjan : frontière juive », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le )

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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Bibliographie