Cornouaille

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Cornouaille
Blason de Cornouaille
Héraldique
Drapeau de Cornouaille
Drapeau
Cornouaille
Carte de localisation.
Administration
Pays Drapeau de la France France
Création de l'évêché de Cornouaille 865
Capitale historique Quimper
Démographie
Gentilé cornouaillais
Langue(s) Français - Breton
Religion Catholique
Géographie
Coordonnées 47° 59′ 45″ nord, 4° 05′ 52″ ouest
Superficie 5 979 km2

La Cornouaille (Kernev, Bro Gernev en breton) est une ancienne division politique et religieuse de la Bretagne (à ne pas confondre avec la Cornouailles britannique (anglais : Cornwall, cornique : Kernow), dont le nom s'écrit avec un "s" ou encore avec le "Cornouaille", appellation récente du Festival de Cornouaille, célèbre événement culturel basé à Quimper).
Connue sous ce nom à partir du haut Moyen Âge, elle a été un comté et un évêché, tous deux disparus comme tels à la Révolution.

Le nom a été donné à une division administrative créée par la loi Voynet, créée en 1999 et couvrant environ le tiers de l'ancienne division politique.

Ses limites, qui semblent avoir été très stables et issues de la division de la cité gauloise des Osismes selon un axe Élorn-Montagnes d'Arrée[1], couvraient les deux tiers sud du département du Finistère, un fort secteur Sud-Ouest du département des Côtes-d'Armor et les grands alentours de Gourin et du Faouët dans le département du Morbihan. Sa capitale historique est Quimper, devenue aussi le chef-lieu du Pays Voynet.

On distingue donc toujours, par exemple, pour les activités culturelles issues de la tradition locale, la Basse-Cornouaille et la Haute-Cornouaille, mais ce dernier nom concerne, dans la pratique, le canton de Carhaix-Plouguer, le canton de Callac, le canton de Châteauneuf-du-Faou, le canton de Rostrenen et le canton de Corlay dans lesquels on définit les danses et les chants traditionnels de Haute-Cornouaille[2]. Ces cantons ne sont pas dans le Pays Voynet de Cornouaille, mais dans celui du Centre-Ouest Bretagne (COB).
On les désigne souvent par les termes « La Montagne » ou « Les Montagnes » en référence aux Montagnes d'Arrée et aux Montagnes Noires.

En 2006 a été créée la Communauté de communes de Haute-Cornouaille qui regroupe 11 communes, soit les 10 communes du canton de Châteauneuf-du-Faou et Spézet, commune du canton de Carhaix-Plouguer, là aussi sur une partie très limitée de la Haute-Cornouaille historique.

Le gentilé de la Cornouaille bretonne est cornouaillais ‑e (le gentilé de la Cornouailles britannique est cornique).

Étymologie

Cornouaille se dit Kerne, Kernev ou Bro Gerne en breton, et Cornugallia en latin, parfois « Cornubia ».

  • Il est vraisemblable que ce nom lui ait été donné par les émigrants bretons du Ve siècle en référence à leurs régions d'origine : la région de Cornouailles (Kernow), et l'actuel Devon (ancienne Dumnonia) qui a donné son nom à la Domnonée qui désignait la côte Nord de la Bretagne au Haut Moyen Âge. Selon les sources les plus récentes, des éléments gallois étaient associés à ces émigrants, eux-mêmes sous la double pression des Saxons à l'est et d'attaques irlandaises à l'ouest.
  • Selon une autre hypothèse qui a eu longtemps cours, le nom serait d'origine anglo-saxonne et signifierait « Le pays des étrangers » en référence au cantonnement des Celtes d'Outre-Manche par les envahisseurs Angles, saxons, jutes et frisons.
  • Une troisième hypothèse, basée sur la traduction latine cornugallia, est invoquée par certains auteurs : cornugallia signifierait le coin de la Gaule, relativement à la situation géographique de la Cornouaille bretonne.
  • Autre explication : le nom provient de la partition en deux du territoire des Osismes, suite à la création d'une principauté attribuée aux Bretons, à savoir :
    • un secteur breton (Britannia minor), entre les Monts d'Arrée et la Mer, limité par le Menez-Hom (=Cruc Ochidient), la cime de Kerchouan (=Mont Jovis), et l'embouchure de l'Ic (= confondu avec Cantia-Vicus).
    • un secteur gaulois (= cornu-gallia---) au sud de cette ligne.

Ces deux secteurs resteront au début sous le même épiscopat de Carhaix, lequel sera démembré en deux évêchés, l'un au Nord (englobant le Léon et le Trégor), pour les Bretons venus d'outre-Manche, l'autre au Sud, autour de Quimper, de Daoulas et de Carhaix, pour les Gaulois osismes.

Voir étude cartographique dans Kavell ar Vro, et comparer avec la carte citée ci-avant : [1]

Histoire

Antiquité tardive

Les deux Cornouaille(s) trouvent plus vraisemblablement leur origine commune à la fin du IIIe siècle, quand les incursions de pirates saxons, frisons et scots, associées aux pillages des bagaudes, contraignent les villes armoricaines (entre autres) à s'entourer en urgence de murailles dont les restes se voient encore à Alet, Brest, Nantes, Rennes et Vannes. Devant la désorganisation de l'empire romain, le responsable de la défense des côtes, le ménapien Carausius (puis son successeur Allectus) établit entre 288 et 296 un empire séparé sur les côtes nord et sud de la Manche pour les garantir des invasions.

L'empereur Constance Chlore les vainc en 293 et 296 et, ayant rétabli l'unité de l'empire de ce côté, organise la défense côtière en transférant des Bretons en Armorique à partir de 296-297. Ces Bretons sont des Cornovii, peuple sans doute fidèle à Rome et choisi pour ce motif. Le chef-lieu de leur cité est à Viroconium Cornoviorum (l'actuelle Wroxeter) et ils occupent plus au nord le port de Deva (Chester). Les Cornovii étant chargés du contrôle militaire des pointes occidentales de la Bretagne et de l'Armorique, c’est-à-dire de l'ouest de la Manche, leur nom se serait conservé en ces lieux. Il ne s'agit donc pas d'une colonisation massive comme cela arrivera au VIe siècle, mais d'une occupation militaire.

Le Tractus armoricanus et nervicanus (administration militaire chargée du contrôle de toutes les côtes de Boulogne à la Gironde), et son bras armé, la Classis armoricana (Flotte armoricaine), ne sont créés proprement qu'en 370, sous le règne de l'empereur Valentinien Ier.

Haut Moyen Âge

D'autres princes sont dits avoir régné sur les côtes Nord et Sud de la Manche occidentale, comme le roi de Cornouaille Daniel Drem Rud au VIe siècle, et le fameux comte Conomor assimilé au roi Marc de la Cornouailles britannique (Marcus Cunomorus).

La Cornouaille armoricaine est mentionnée pour la première fois et indirectement entre 852 et 857 quand « l'évêque de Saint-Corentin », Anaweten, est qualifié de Cornugallensis (adj. latin dérivé de Cornugallia).

L'existence d'une commune d'Anjou dénommée « La Cornuaille » a suscité une hypothèse qui en ferait une appellation géographique ou militaire couvrant toute la Bretagne du Sud et faisant pendant à la Domnonée sur le rivage Nord au VIe siècle ou VIIe siècle.

La Cornouaille a pu être le siège d'une royauté ou d'une principauté dans les siècles obscurs entre la chute de l'Empire romain< (476) et la création de l'Empire carolingien à la fin du VIIIe siècle. Avant cette date, la Papauté ne pouvait pas définir quels hauts seigneurs pouvaient porter la dignité royale.

La légende d'un roi de Cornouaille, dénommé Gradlon, accompagnée de récits tout aussi flous sur la création de l'abbaye Saint-Guénolé de Landévennec fondée par son principal conseiller peut être un indice. La présence d'un puissant complexe défensif sur la Montagne de Locronan, le camp des Salles, associé à une extraction et une fabrication d'or peut être un autre indice d'un pouvoir local fort, mais les documents sont inexistants et l'archéologie impuissante à donner des preuves d'une organisation politique.

À l'extrémité orientale du territoire, les fouilles du camp de Paule (Côtes-d'Armor) ont révélé une exploitation agricole gallo-romaine très importante, dotée d'un lieu fortifié et qui a dû être aussi le siège d'une principauté importante.

Formation de la Bretagne

Au IXe siècle, il semble que le nom de Poher (pour Pou-Caer = Pays de la Ville ou Pays du Château ou Pays de Carhaix) se soit substitué à celui de Cornouaille. Par la suite, il fut réservé à la vallée de l'Aulne, dont la capitale était Carhaix.

Le premier comte de Cornouaille, dont l'existence est attestée, est un premier Budic qui est mort entre 1008 et 1019 et qui apparaît dans les actes de l'abbaye Saint-Guénolé de Landévennec, première nécropole des comtes de Cornouaille et surtout destinataire privilégiée de leurs donations.

Joëlle Quaghebeur souligne que des Budic sont mentionnés lors de donations faites au IXe siècle à l'abbaye Saint-Sauveur de Redon par Nominoë et par Érispoë, ainsi que par Salomon, roi de Bretagne. Le deuxième Budic, fils de Romel, est accompagné de Rivelen et de Guethenoc, noms de familles associés par ailleurs au Poher. Elle ajoute que la Première Vie de saint Gwenael, successeur de saint Guénolé à la tête de Landévennec, lui donne comme père Romelius (Romel?), comte de Cornouaille et mentionne un Guethenoc comme frère de Guénolé.

Ces possibles proximités familiales entre hauts reponsables politiques et hauts responsables religieux sont souvent mentionnées dans les autres vies de saints bretons et engendreront des confusions de pouvoir par lesquelles des évêques ont pu devenir comtes de leur diocèse, ce qui est précisément attesté au Xe siècle pour le comté de Cornouaille.

Le roi de Bretagne, Alain le Grand, dont la famille était originaire de la région de Vannes, épousa un peu avant 899 une Orgain (Aourken en breton) dont Joëlle Quaghebeur rapproche le nom d'une « Ouragona », curieusement titrée « reine de Brest » (cacographie pour Bretagne?) donnée par un obituaire de Landévennec comme enterrée dans cette abbaye et elle est dite avoir rappelé que les deux "maisons royales" sises dans l'enceinte du monastère devaient 24 deniers à celui-ci.

Àu même moment, Judicaël, attesté comme comte du Poher (=comte de Cornouaille?), est dans l'entourage très proche du roi Alain, alors que son père, Gurvant, a participé au complot qui fait périr le roi Salomon de Bretagne, frère d'Alain le Grand et il n'est pas impossible que ce soit lui qui lui ait donné une épouse de sang royal (elle était petite-fille d'Érispoé) en signe de réconciliation, peut-être même sa propre sœur.

Alain Barbe-Torte (-1058), duc de Bretagne, selon sa chancellerie, mais, seulement comte selon celle du roi carolingien est aussi comte du Poher. Il est accompagné, lors de la donation qu'il fait à l'abbaye de Landévennec vers la fin du 10e siècle, par Diles, vicomte (vicecomes) implicitement de Cornouaille, donc son principal auxiliaire. Son fils est Ehuarn qui semble avoir eu pour successeur Morvan attesté lors d'une donation de Budic, comte de Cornouaille à l'abbaye Notre-Dame de Locmaria de Quimper. Morvan accompagne son comte et duc, Alain Barbe-Torte, en guerre avec le vicomte de Léon, Guihomarc'h, mais il semble l'avoir trahi, peut-être au cours de cette même guerre, alors qu'Alain était affaibli par la maladie[3].

À la fin du IXe siècle, le comté féodal de Cornouaille reprend le nom de l'ancien royaume. Sa dynastie accède au trône ducal (comtal pour la chancellerie royale), il passa à l'évêque de Quimper qui devient comte-évêque de Cornouaille jusqu'au XIe siècle où deux frères s'en répartissent les dignités.

En 2011

En 2011, le territoire historique de la Cornouaille correspond à celui de 218 communes actuelles, sur une superficie totale de 5 979 km2.

Le nom a été repris en 2001 pour une partie minoritaire au sud d'une ligne Châteaulin-Scaër pour la circonscription de programmation « Pays de Cornouaille » composée de 112 communes (loi Voynet, 1999).

Bibliographie

  • Joëlle Quaghebeur, La Cornouaille du IXe au XIIe siècles, Société archéologique du Finistère, 2001. Thèse universitaire, ISBN 2-906790-05-2.
  • S. Le Gall Mémoire en image : de Quimper à Quimperlé, Ed. A. Sutton, Joué-les-Tours, 1996, 128 p.
  • J.-F. Simon Tiez. Le paysan breton et sa maison. La Cornouaille, Editions de l'Estran. Le Chasse-Marée, 1988, 315 p.
  • M. Siou La Cornouaille, Ed. A. Sutton, Joué-les-Tours, 1997, 128 p.
  • C. Frochen Le Finistère : la Cornouaille, Ed. Y. Salmon, Janzé, 1981, 274 p
  • Auguste Dupouy, La Cornouaille, Paris, De Gigord, 1947, Collection "Gens de chez nous".
  • Auguste Dupouy, Au Pays breton : la Cornouaille, Paris, De Gigord, vers 1940.

Notes et références

  1. Louis Pape, La Civitas des Osismes à l'époque gallo-romaine, Rennes, 1978, Thèse universitaire.
  2. Dans toute la Haute-Cornouaille, les danses sont à chaîne fermée, l'inverse de ce qui est habituel à l'Ouest et au Sud (chaîne ouverte)
  3. Toutes les précisions sur l'histoire de la Cornouaille tirée des chartes comtales sont dans la thèse de Joëlle Quaghebeur, citée en référence bibliographique

Voir aussi

Liens externes