Breguet Br.1050 Alizé

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Breguet Br.1050 Alizé
Vue de l'avion.

Constructeur Breguet Aviation
Rôle Avion de lutte anti-sous-marine
Premier vol
Mise en service
Date de retrait
Nombre construits 95 (dont 6 de présérie)
Équipage
3 : pilote, opérateur radar et des systèmes de détection, navigateur
Motorisation
Moteur Rolls-Royce Dart RDa.21
Nombre 1
Type Turbopropulseur
Puissance unitaire 1 565 kW en vol, 1 950 ch au décollage avec injection eau/méthanol + 230 kgp de poussée résiduelle
Dimensions
Envergure 15,60 m
Longueur 13,86 m
Hauteur m
Surface alaire 36,0 m2
Masses
À vide 5 700 kg
Maximale 8 200 kg
Performances
Vitesse maximale 459 km/h (au niveau de la mer)
Plafond 6 250 m
Vitesse ascensionnelle 421 m/min
Rayon d'action 1 850 km
Endurance 2 500 km
Charge alaire 229 kg/m2
Rapport poids/puissance 0,19 kg/ch
Armement
Interne 3 grenades ASM, bombes, 1 torpille L4, Mk.44, puis Mk.46, bombettes acoustiques (tactique Julie), 14 bouées acoustiques largables en nacelles
Externe 2 grenades ASM, bombes, roquettes ou 2 missiles air-mer AS 12
Avionique
• Radar DRAA-2A puis DRAA-10A Iguane dans un radôme rétractable
• Répondeur et interrogateur IFF
• Système d'écoute électronique ARAR-10 puis ARAR-12A
• récepteurs de bouées AN/ARR 52 et traitement acoustique AN/ASA 20

Le Breguet Br.1050 Alizé est un avion de lutte anti-sous-marine français, embarqué à bord de porte-avions. Il a été mis en service au début des années 1960 et construit à 89 exemplaires (dont douze exportés en Inde) utilisés jusqu'en après 330 000 heures de vol et 43 ans de service.

Conception

Après l'abandon de l'avion d'attaque Breguet Br.960 Vultur, il fut décidé de concevoir un avion de lutte anti-sous-marine à partir de la même cellule, qui avait montré ses qualités. Le turboréacteur arrière du Vulture fut supprimé et remplacé par un radar escamotable, tandis qu'un turbopropulseur Rolls-Royce Dart était installé à l'avant. Le fuselage fut largement modifié, notamment pour permettre d'installer un troisième membre d'équipage, ainsi que les ailes qui reçurent des nacelles encastrées sur les bords d'attaque.

Le second prototype du Breguet Br.960 Vultur fut modifié comme démonstrateur de l'Alizé, afin de permettre de valider certains des choix qui avaient été effectués. Il conservait son moteur Armstrong Siddeley Mamba mais n'avait plus de réacteur, le poste de pilotage était entièrement modifié, les nacelles installées sur les ailes et un radar fixe monté sous le fuselage. Ce fut cependant un piètre démonstrateur, à cause de ses caractéristiques de vol très limitées et de son pilotage difficile.

Le premier des trois prototypes de l'Alizé fit son vol inaugural le . Les premiers essais montrèrent de mauvaises qualités de vol, qui nécessitèrent une longue période de modifications et de mise au point. Le troisième prototype disposait d'un moteur plus puissant, qui sera retenu pour la production en série. Les essais de catapultage et d'appontage furent d'abord réalisés à partir d'installations au sol (mai 1957) puis depuis un bâtiment britannique (le HMS Eagle (R05)) en .

Carrière

Les prototypes furent suivis par deux avions de présérie, et le premier exemplaire de production livré en . Entre-temps, la commande initiale de 100 exemplaires avait été réduite à 75. Au total, 89 exemplaires de l'Alizé ont été construits entre 1957 et 1962, dont douze destinés à l'Inde.

En France, les Alizé furent mis en œuvre sur les porte-avions Clemenceau, Foch et Arromanches, mais aussi à terre pour l'entraînement. Ils étaient initialement équipés du radar DRAA-2A (dont la variante DRAA-2B équipa l'avion de patrouille maritime Br.1150 Atlantic) du détecteur de radar ARAR-10A (Mesures de soutien électronique et dont la variante ARAR-10B équipa le Br 1150 Atlantic), de récepteurs de signaux de bouées acoustiques français associés à un dispositif de présentation AN/ASA-26 (tactique Julie et dont la vaiante AN/ASA-20 équipa le Br 1150 Atlantic). L'Aéronautique navale a modernisé les Alizé à plusieurs reprises. Trente exemplaires furent modifiés en 1964-1965 pour faire évoluer le système d'écoute des bouées sonores et le rendre capable de tirer une torpille Mk-44 en plus de la L4 et le missile anti-surface filoguidé AS-12. Au début des années 1980, 28 appareils furent mis à jour au standard ALM (ALizé Modernisé) avec un nouveau radar à compression d'impulsion Thomson-CSF DRAA-10A Iguane (dont la version DRAA-10B est utilisé sur le Atlantique 2) d'une portée jusqu'à 200 nautiques sur navire, et capable de détecter un périscope jusqu'à 25 nautiques selon l'état de la mer, un système de navigation OMEGA, de nouveaux récepteurs de bouées acoustiques AN/ARR-52, une modernisation du traitement des signaux émis par les bouées acoustiques actives et l'ajout de 104 cartouches de leurrage IR et EM sous l'aile gauche. La mission ASM initiale évoluant de plus en plus vers la lutte ASF et le guet aérien, un détecteur de radar ARAR-12A, remplaçant l'ARAR-10A originel, sera installé offrant à la Marine une première capacité en attendant l'arrivée des E-2C Hawkeye et du porte-avions nucléaire Charles de Gaulle[1].

Un autre programme de modernisation au début des années 1990 dota 27 appareils d'un système de leurres, d'un nouveau pilote automatique, dérivé de celui de l'Atlantique 2, et d'une nouvelle avionique. Enfin, en 1996/1997, 15 avions furent dotés d'un système optronique infrarouge Thomson-CSF TTD Chlio. À la suite de ces modifications, l'Alizé fut appelé ALH (Alizé mis à hauteur). Malgré ces améliorations, les Alizé ne pouvaient plus faire face aux sous-marins nucléaires modernes et ils assurèrent des missions de renseignement d'intérêt maritime (ISR) consistant à surveiller les navires de surface[2]. À la fin de 1997, l'Aéronautique navale continuait à utiliser 24 exemplaires pour des surveillances côtières et non plus au large. Le dernier Br.1050 Alizé fut retiré du service le , avec la vente du Foch à la marine brésilienne.

L'Inde a utilisé ses Alizé à partir de bases terrestres mais aussi depuis le porte-avions léger INS Vikrant. Le nombre d'exemplaires en service dans la marine indienne a commencé à diminuer durant les années 1980. L'avion fut relégué à des patrouilles depuis la terre à partir de 1987 et finalement retiré du service en 1991, pour être remplacé par des hélicoptères.

Engagements

Les Alizé français effectuèrent de nombreuses missions de surveillance maritime au large du Liban dans les années 1980, puis dans le golfe Persique durant l'opération Salamandre. L'Alizé fut utilisé pendant les opérations de la guerre du Kosovo avec l'OTAN au printemps 1999, à partir du porte-avions Foch.

Un incident de tir à lieu le 24 octobre 1989, lorsqu'un appareil tire une salve de roquettes sur le remorqueur de la marine française Le Fort, confondu avec un navire-cible, causant un mort et trois blessés[3] .

Les Alizé indiens furent utilisés pour des missions de reconnaissance et de patrouille pendant l'opération de libération de Goa des Portugais en . Ils furent aussi utilisés pour des missions de lutte anti-sous-marine pendant la troisième guerre indo-pakistanaise en 1971. Durant ce conflit, un Alizé fut abattu par un F-104 Starfighter de l'armée de l'air pakistanaise.

Breguet Alizé sur rond-point à Rochefort (accès au musée de l'aéronautique navale)

Accidents

Liste exhaustive des accidents d'Alizé au sein de l'Aéronautique navale :

  • Le , perte de l'avion de présérie no 05 sur le porte-avions Arromanches, l'équipage est sauvé par un hélicoptère de l'escadrille 23S[4] ;
  • Le survient le premier accident aérien du porte-avions Clemenceau. Le sauvetage de l'équipage de l'Alizé no 2 du CEPA est assuré par un hélicoptère de l'escadrille 23S[4] ;
  • Le , l'équipage de l'Alizé no 77 de la flottille 4F du porte-avions Clemenceau est récupéré par un hélicoptère de l'escadrille 23S[4] ;
  • Le crash de l'Alizé no 29 de la flottille 6F à Collias (gard) ;
  • Le crash de l'Alizé no 61 de la flottille 4F ;
  • Le crash de l'Alizé no 54 à Fréjus ;
  • Le crash de l'Alizé no 39 ;
  • Le crash de l'Alizé no 6 de la 9F à la suite d'un incendie moteur ;
  • En mai 1966 crash de l'Alizé no 32 de la 9F à Ajaccio ;
  • Le crash de l'Alizé no 46 en mer ;
  • Le crash de l'Alizé no 58 de la flottille 6F ;
  • Le crash de l'Alizé no 23 de la flottille 9F (problèmes moteur en mer ayant conduit à un amerrissage (ditching)) ;
  • Le crash de l'Alizé no 57 de la flottille 4F en mer au large de l'île de Groix à la suite d'une panne moteur ;
  • Le crash de l'Alizé no 38 ;
  • Le crash de l'Alizé no 70 de la flottille 4F au décollage. Pris dans le souffle de l'avion qui le précède, l'appareil est déséquilibré et s'écrase finalement sur la base de Lann Bihoué ;
  • Le , l'Alizé no 20 de la flottille 4F est détruit à Hyères à cause d'un feu survenu à la suite d'un atterrissage trop brutal ;
  • Le , crash de l'Alizé no 35 ;
  • Le , pendant une sortie d'entraînement individuel survient un accrochage sur le pont du porte-avions Clemenceau entre deux Alizé au cours d'un catapultage de nuit. Les deux appareils endommagés, mais sans conséquence pour le personnel ;
  • Le , crash de l'Alizé no 74 ;
  • Le , crash de l'Alizé no 75 ;
  • Le , le crash de l'Alizé no 44 à l'atterrissage près d'Hyères-Le Palyvestre (83) fait deux victimes ;
  • Le , l'Alizé no 37 s'écrase au sol au cours d'une mission à basse altitude dans le département du Lot, à Castelnau-Montratier, faisant deux victimes ;
  • Le , un hélicoptère Pedro de l'escadrille 23S récupère en un temps record l'équipage de Alizé no 28 (1er Alizé modernisé) abîmé en mer après son catapultage du porte-avions Foch[4] ;
  • Le crash de l'Alizé no 69 ;
  • Le , un Alizé du porte-avions Clemenceau en mission est atteint par un missile sol-air vraisemblablement syrien mais rentre à bord sans dommage important ;
  • Le , un Alizé (no 68) en présentation à l'appontage percute la mer sur l'arrière du porte-avions Clemenceau. Le pilote est porté disparu, les trois autres membres de l'équipage sont sauvés. La bande dessinée L'énigme W publiée en 1986 aux éditions Fleurus est dédiée à la mémoire de Marc Li Sen Lie, enseigne de vaisseau de 1re classe, pilote disparu en mer aux commandes de son Alizé ;
  • Le  : amerrissage de l'Alizé no 42 à la suite de l'explosion d'une roquette ;
  • Le , l'Alizé no 73 amerrit en urgence à la suite d'une collision en vol avec l'Alizé no 12 ; ce dernier parviendra à se poser à Nice. Un hélicoptère de l'escadrille 23S participe à partir du Clemenceau aux opérations de recherche et sauvetage de l’Alizé no 73[4] ;
  • Le , l'Alizé no 87 s'écrase de nuit après une remise de gaz après un appontage sans avoir pris les brins (bolter). L avion est perdu. Le pilote et le radariste sont indemnes, mais le navigateur est blessé. Il est ensuite héliporté vers l'hôpital Sainte Anne de Toulon ;
  • Le , un Alizé (no 36) de la flottille 6F de retour de mission sur le porte-avions Clemenceau réalise un amerrissage forcé à la suite d'une avarie grave de son moteur. L'aéronef coule et est perdu. Son équipage est sain et sauf ;
  • Le , l'Alizé no 64 de la flottille 6F alors en entraînement piste de nuit s'écrase à la suite d'un incendie à bord lors d'un atterrissage forcé sur une route à proximité de la base aéronavale de Nîmes-Garons. Il percute une voiture lors de la phase d'atterrissage : trois morts (deux membres d'équipage et le conducteur de la voiture) et un blessé.

Préservation

Breguet Br.1050 Alizé no 59 immatriculé F-AZYI présenté en vol au meeting de la Ferté-Alais 2015
Breguet Br.1050 Alizé no 59 immatriculé F-AZYI présenté en vil au meeting de la Ferté-Alais 2015.

Le Musée de l'air et de l'espace préserve[5] dans ses collections l'Alizé no 10. L'appareil est arrivé en 1979, et en 2013 il était stocké dans les réserves. Le musée aéronautique de Savigny-lès-Beaune de son côté expose[6] le no 4. Il est à noter que le no 59 a été remis en état de vol[7] sous l'immatriculation F-AZYI. Il s'agit de l'unique Alizé civil enregistré en 2013[8]. Le musée de l'aviation de Lyon-Corbas (Rhône) expose le no 47. L'Alizé no 5 est en cours de restauration par les Ailes Anciennes Toulouse[9].

Au moins 21 appareils sont conservés uniquement en France et en Inde.

Autres caractéristiques

Un Alizé avec ses ailes repliées.
L'Alizé no 59, seul appareil actuellement en état de vol.

Le turbopropulseur choisi était réputé manquer de puissance pour l'appareil, à 15 000 pieds, la vitesse de décrochage n'était dépassée que de 20 à 30 nœuds, ce qui ne facilitait pas le pilotage. L'autonomie, accrue par l'adjonction d'une troisième roue d'aubes à la turbine du moteur, était de h 45 min à la vitesse moyenne de 144 nœuds.

Le Breguet Alizé est un avion conventionnel à ailes basses. Il a un radar dont l'antenne se rétracte dans le ventre de l'appareil. En service normal, l'équipage comprend trois personnes : un pilote (avant gauche), un navigateur (avant droit) assurant les fonctions d'opérateur acoustique, un opérateur pour le radar et les autres systèmes de détection (à l'arrière dans le sens inverse au vol). Un quatrième membre d'équipage, ou un passager, peut être embarqué à l'arrière en remplaçant le siège monoplace par un biplace. Le train d'atterrissage est à configuration tricycle, le train principal se rétractant vers l'avant dans les nacelles des ailes. Les jambes principales ont chacune deux roues. La partie avant des nacelles contient les bouées acoustiques.

La soute interne ventrale a été conçue initialement pour l'emport d'une torpille L4 ou des grenades ASM Mk 54. Elle peut contenir des conteneurs SAR et un réservoir supplémentaire de 500 litres, portant l'autonomie à h 45 min (1 268 km franchissables). Les points d'attache sous les ailes peuvent recevoir des grenades anti-sous-marines, des bombes, des roquettes ou des missiles. Une configuration type inclut des paniers de roquettes de 68 mm ou des missiles anti-navires filoguidés AS.12. Des bouées acoustiques sont emportées sur des échelles de largage dans les ballonnets de voilure.

Utilisateurs

Notes et références

  1. « Aéronavale & porte-avions-Br.1050 Alizé », sur aeronavale-porteavions.com (consulté le )
  2. Jean-Marc TANGUY, « A l'assaut de Daesh : Opération Chammal », Marines & FORCES NAVALES, no 157,‎
  3. Remorqueur côtier Le Fort ; site=www.netmarine.net ; date=2010.
  4. a b c d et e L'histoire de l'escadrille 23S Sur le site netmarine.net - consulté le
  5. http://www.pyperpote.tonsite.biz/listinmae/index.php?option=com_content&view=article&id=227:breguet-1050-qalizeq-nd10&catid=35:les-reserves-du-musee-de-lair&Itemid=55
  6. http://aero.passion.perso.sfr.fr/Page498.html
  7. http://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2013/05/20/breguet-alize.html
  8. Le Fana de l'Aviation, Éditions Larivière, (ISSN 0757-4169)
  9. « Notre collection : BRÉGUET 1050 ALIZÉ », Ailes Anciennes Toulouse (consulté le )

Bibliographie

  • Enzo Angelucci et Paolo Matricardi (trad. de l'italien), Les avions, t. 5 : L'ère des engins à réaction, Paris/Bruxelles, Elsevier Sequoia, coll. « Multiguide aviation », , 316 p. (ISBN 2-8003-0344-1), p. 249.
  • (en) Jean-Claude Fayer, Prototypes de l'aviation française : 1945-1960, Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), éd. E.T.A.I, , 320 p. (ISBN 978-2-7268-8608-3, OCLC 401666082).
  • (en) Simon Michell, Jane's civil and military aircraft upgrades : 1994-95, Coulsdon, Jane'S Information Group, , 489 p. (ISBN 978-0-7106-1208-3, OCLC 464200198).
  • Christophe Touzet, BREGUET 1050 ALIZE : 40 ans d'histoire de l'aviation embarquée, Auto-édition Christophe Touzet (ISBN 978-2-7466-7655-8)

Liens externes

Annexes

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Articles connexes