Micrasiates

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Les Micrasiates ou Grecs d’Asie Mineure sont les chrétiens orthodoxes, Grecs ou non, originaires d'Asie Mineure (en grec : Mikra Asia), parmi lesquels les langues parlées sont le grec, le pontique (200 000 locuteurs en Grèce vers 2001) et le cappadocien (dont il reste des locuteurs en Grèce, redécouverts en mai 2005), mais aussi le turc (e.a. karamanli, turc écrit en caractères grecs). Cette population vivait essentiellement le long des côtes de l'Empire ottoman, avec des concentrations en Ionie (qui correspond à l’ouest de l’Asie Mineure autour de la ville de Smyrne), dans le Pont (qui correspond à la région bordant la mer Noire), et dans le sud de la Cappadoce (qui se situe au centre-sud-est de l’actuelle Turquie). L’ensemble des Grecs d’Anatolie descend en partie des Ioniens (d’où le nom de Yunanistan donné par les Turcs à la Grèce), également des populations autochtones hellénisées depuis l’Antiquité et christianisées sous l’Empire byzantin, mais aussi de nombreux Grecs de l'archipel égéen, des îles ioniennes, de Crète ou du Péloponnèse venus s'installer par voies succèssives en Anatolie Ottomane comme à Smyrne[1].

En bleu, les Micrasiates en 1910.

Le terme, également utilisé comme adjectif, désigne plus particulièrement les centaines de milliers (entre 1,2 et 1,5 million) de réfugiés grecs (au sens de chrétiens grecs orthodoxes : le millet rum) d'Anatolie expulsés de la Turquie vers la Grèce à la suite de la défaite des armées grecques par celle de Mustafa Kemal en 1922 (la Grande catastrophe) et ensuite du traité de Lausanne de 1923, et leurs descendants. Officiellement, ils ne seraient plus aujourd’hui que 3 000 ou 2 000 en Turquie[2].

La musique du rebetiko est née dans les cafés fréquentés par ces Micrasiates, à la fin du XIXe siècle d'abord, à Smyrne et Constantinople en particulier, et surtout à partir des années 1920, au Pirée et dans la banlieue de Salonique où s'étaient installés beaucoup de ces réfugiés d'Asie Mineure.

Historique

Origines

Il y aurait eu des Grecs en Asie Mineure dès 1200 avant J.-C. En effet, de grandes migrations se produisirent à cette période et se sont traduites par le peuplement de la côte ouest de l’Asie Mineure par les Ioniens, les Doriens, les Achéens et les Éoliens venus de Grèce qui fondent près de 90 colonies sur la côte égéenne, (Smyrne, Éphèse, Milet), et le long de la mer de Marmara et de la mer Noire. Par la suite, durant les IVe et Ve siècles av. J.-C., l’empire perse achéménide étend son territoire et son influence jusqu’en Anatolie et ses colonies ioniennes.

En 334 avant J.-C., Alexandre le Grand, débutant ses grandes conquêtes, envahit l’Anatolie, qui se divise après sa mort en royaumes grecs dont ceux de Bithynie, de Cappadoce, de Pergame ou du Pont. Ces royaumes hellénistiques subsistèrent jusqu’à la conquête de l’Anatolie par les Romains, qui y pénétrèrent pour la première fois en l’an 189 av. J.-C. mais ne la soumirent tout entière qu’au Ier siècle de notre ère. Sous la domination romaine, l’hellénisation se poursuit, puis, au Ier siècle, l’apôtre Paul y introduit le christianisme et fonde de petites communautés chrétiennes dans des villes. En 325, le christianisme est proclamé religion officielle de l’Empire romain et lors du partage de l’empire, l’Asie Mineure, comprise dans l’Orient, forma le diocèse d’Asie.

Au VIIe siècle les califes conquirent l’actuel Kurdistan ; les Turcs Seldjoukides s’établirent au XIe siècle au centre de l’Anatolie et y fondèrent le sultanat de Roum, ne laissant aux empereurs grecs que le tiers nord-ouest du pays. Après 1204, l’Asie grecque forma les deux empires de Nicée et de Trébizonde.

En 1299, Osman Bey fonde l’Empire ottoman, organisé selon le système des milliyets et dont les provinces se multiplient au fil des conquêtes.

Mode de vie sous l’Empire ottoman

Activités professionnelles

À l’origine, les Grecs d’Asie Mineure étaient pour la plupart des paysans, artisans, pêcheurs et marins. Beaucoup d’entre eux, pauvres, sont passés petit-à-petit à l’islam et à la langue turque, pour échapper aux obligations des non-mususlmans (voir « Religion » plus bas). Ceux qui, étant commerçants, armateurs ou aristocrates, avaient les moyens de satisfaire ces obligations, sont restés chrétiens, ce qui fait qu’au XVIIIe siècle le nombre de non-musulmans d’Anatolie avait beaucoup diminué, mais beaucoup d’entre eux avait un niveau économique et d’éducation plutôt élevé. Cela vaut tant pour les Micrasiates, que pour les Arméniens et les Juifs (les juifs passés à l’islam sont appelés Avdétis ou Dönmés). Les Ottomans se rendirent compte que ces personnes prospères accroissaient leur influence dans l’Empire et, dans le courant du XIXe siècle et au début du XXe siècle, ils limitèrent leur nombre dans l’administration et accrurent les taxes sur leurs commerces.

Culture

Les Grecs d’Anatolie avaient leur propre identité culturelle au sein de l’Empire ottoman. En effet, ils puisaient leur culture directement à l’influence de la Grèce, qui elle-même subissait l’influence de l’Occident. Les Phanariotes, par exemple, ont diffusé à Constantinople et dans les principautés chrétiennes vassales des Turcs, la philosophie des « Lumières ». Toutefois, les Micrasiates subissaient aussi l’influence orientale de l’Empire, avec un modèle familial très patriarcal et de nombreux aspects musicaux, vestimentaires ou culinaires empruntés aux Ottomans.

Religion

La majorité des Grecs d’Asie Mineure étaient chrétiens orthodoxes. Ils observaient donc ce culte dans des églises avec leurs popes. Les populations chrétiennes des Balkans, de l’Anatolie, de Syrie et d’Égypte devaient livrer à l’Empire leurs jeunes garçons pour son principal corps militaire : les Janissaires. Pour échapper à cette « pédomazoma » - παιδομάζωμα ("enlèvement des enfants") ainsi qu’au « Haraç » (double-capitation sur les non-musulmans) de nombreux chrétiens pauvres (Grecs, Arméniens, etc.) se convertissent à l’islâm et adoptent la langue turque : ils deviennent Ottomans. Aux premiers siècles de son existence, l’Empire ottoman comptait une majorité de chrétiens (Slaves, Grecs, Arméniens, Caucasiens, Assyriens…). Ils jouaient un grand rôle dans le commerce et l’administration, et leur influence atteignait le palais du sultan. Ces « protégés » n’en étaient pas moins soumis à l’interdiction de posséder de la terre ou de porter les armes, et leur nombre s’est amenuisé à cause des conversions au cours des quatre à six siècles de domination musulmane.

Déclin de l’Empire ottoman et montée des nationalismes

Didar-i Hürriyet kurtarılıyor (la Liberté sauvée) : carte postale de 1895 saluant la constitution ottomane du 23 novembre 1876, figurant le sultan Abdul-Hamid et la Turquie (non voilée) se relevant de ses chaînes. L’ange symbolisant l’émancipation porte une écharpe avec les mentions « Liberté, Égalité, Fraternité » en turc et grec ; les différents milliyets de l’empire sont figurés : Turcs avec les drapeaux rouges, Arabes avec les drapeaux verts, Arméniens et Grecs.

L’empire ottoman connaît son apogée au XVIe siècle au temps de Soliman. Le déclin de l’empire s’amorce à partir du XVIIIe siècle sous la poussée autrichienne puis russe, accentué au cours du siècle suivant par les appétits grandissants des puissances chrétiennes.

En 1821, les chrétiens orthodoxes des Balkans, notamment Grecs et Roumains, se révoltèrent contre l’Empire ottoman et en 1827, la Grèce (centrale) obtient son indépendance tandis que les principautés roumaines augmentent leur autonomie. À partir de là, la politique grecque est animée par la « Grande Idée » (espoir de réunir tous les Grecs en un seul État-nation) tandis que les Roumains aspirent également à leur unité. Les Slaves des Balkans, eux aussi, ne cessent tout au long du XIXe siècle de revendiquer autonomie (que la Serbie obtient dès 1817) et indépendance (que Serbie et Bulgarie obtiennent en 1878, en même temps que la Roumanie, grâce au soutien russe). À la fin des guerres des Balkans et de la Première Guerre mondiale, l’Empire ottoman se trouve dans le camp des vaincus ce qui fait peser un risque réel de partage entre la Grèce, l’Arménie et les puissances coloniales occidentales (Traité de Sèvres). C’est ce risque qui aboutira à la levée de l’armée républicaine d’Atatürk qui renverse le sultan en 1922, fait abolir le Traité de Sèvres et le remplace par celui de Lausanne rendant obligatoire l’expulsion des populations chrétiennes survivantes hors d’Anatolie.

Début du XXe siècle

Durant la Première Guerre mondiale, les Jeunes-Turcs, qui voient dans la population arménienne un obstacle à leurs aspirations panturquistes, commencent d’abord par la désarmer. Puis ils procèdent à des arrestations de centaines d'intellectuels et notables arméniens d'Istanbul en avril 1915, avant de les exécuter. Viennent ensuite les ordres de déportation des populations arméniennes, aussi bien dans les régions proches du front russe qu'en Anatolie centrale et occidentale. Bien que les Jeunes-Turcs parlent officiellement d'une simple relocalisation des Arméniens, la population est décimée durant ces déportations. Les Arméniens sont déplacés la plupart du temps à pied, dans de mauvaises conditions, subissant maladies et famine, attaqués par des bandes kurdes ou par les gendarmes eux-mêmes. Arrivés à Alep, ils sont répartis dans des camps où ils sont exterminés (notamment Chedaddiyé et Deïr-ez-or) dans le désert syrien. Les massacres sont orchestrés par les ordres du pouvoir Jeune-Turc. L'estimation du nombre de morts varie entre 600 000 et 1 500 000. Selon la plupart des spécialistes, environ les deux tiers de la population d'avant-guerre a disparu, soit 1 200 000 personnes.

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Les échanges de populations consécutifs au traité de Lausanne.

À la fin de la guerre, le traité de Neuilly et celui de Sèvres donnent à la Grèce la Thrace et la région de Smyrne en Asie Mineure en raison de son peuplement largement hellénophone. Ainsi, l’armée grecque occupe la ville à partir du 15 mai 1919. Durant cette période, la Turquie est occupée par les Français, les Italiens et les Grecs. C’est dans ce climat de tension nationale que Mustapha Kemal devient un homme important sur la scène politique turque : il déclenche la guerre d'indépendance turque. Les Français et les Italiens ayant choisi de se retirer, moyennant des compensations économiques, c’est surtout contre les Grecs que la guerre est menée. Ces derniers, qui occupent déjà Smyrne et la Thrace, se déploient en Anatolie occidentale, fidèles à l’idéal de reconquête de l’ancien monde hellénique. C’est ainsi que l’armée turque remporte, en septembre 1921, une victoire difficile mais décisive sur les Grecs. Après l’effondrement militaire de la Grèce à Smyrne durant l’été 1922, la ville est prise par les troupes de Mustapha Kemal le 9 septembre 1922. Dans les dernières semaines de la guerre, les Grecs ottomans de l’intérieur se réfugient en masse à Smyrne, au rythme de plus de 20 000 par jour : ils sont plus de 200 000 le 8 septembre lorsque les dernières forces grecques quittent la ville. Il ne reste plus alors dans le port que des navires étrangers (anglais, français, italiens et américains). Les premières troupes turques arrivent le 9 septembre dans la ville, et les exactions commencent: jusqu'au 13 septembre, la ville est livrée aux pillages et aux meurtres contre les populations grecque et arménienne. Les navires européens au large refusent les réfugiés qui tentent de les accoster.

Le 13 septembre, un incendie éclate dans le quartier arménien. Il s'étend rapidement à toute la ville et échappe à tout contrôle : en une semaine, il détruit presque toute la ville et fait près de 2 000 morts. L’origine de ce désastre est fortement disputée : les Grecs et les Arméniens en imputent la responsabilité aux pillards turcs, tandis que les Turcs accusent les Grecs de s’être livrés à une politique de la terre brûlée pour éviter que leurs biens ne tombent aux mains des Turcs. De fait, ce type de pratique est attesté en Ionie à cette époque, et une commission d’enquête française reprend cette explication. Il faut néanmoins remarquer que le 13 septembre le quartier arménien était gardé par les troupes turques et que les Arméniens ne pouvaient circuler librement : c’est un des points soulignés par Horton, témoin oculaire qui accuse nommément l’armée turque de la destruction de Smyrne dans son ouvrage paru en 1926, The Blight of Asia. En septembre, la flotte grecque revient à Smyrne et évacue jusqu'au 1er octobre 180 000 réfugiés, prélude de l'échange de populations musulmanes et chrétiennes qui a lieu entre la Turquie et la Grèce l'année suivante.

La défaite grecque présage ce qui se passe durant les négociations de Lausanne qui aboutissent en 1923 à un traité de paix annulant le traité de Sèvres de 1920, et à la convention d’échange obligatoire des populations grecque et turque. En effet, en 1923, on peut estimer à 1,7 million le nombre de Grecs vivant en Turquie auxquels s'ajoutent 350 000 environ vivant à Constantinople. Le total des réfugiés est estimé à 1,5 million soit 25 % de la population du royaume hellénique à cette date. De leur côté, les Turcs de Grèce sont estimés à 512 000. C’est dans des conditions déplorables que l’échange a eu lieu. Beaucoup de déplacements ont été forcés, donnant lieu à pillages et exactions. Plus de 500 000 Grecs furent déportés, mais très peu survécurent. On appelle cet événement la « Grande catastrophe », car dans la précipitation, beaucoup de familles ont perdu leurs membres les plus faibles et tous leurs biens.

Installation en Grèce

Le royaume de Grèce n’était pas prêt à accueillir un afflux aussi considérable de réfugiés ayant absolument tout perdu. En effet, Le Pirée connut par exemple une énorme explosion urbaine. Rien n'ayant été prévu pour accueillir une telle quantité de réfugiés, les conditions de vie de ces derniers furent très longtemps précaires. Ces Grecs de Turquie furent essentiellement installés dans les banlieues des grandes villes telles qu’Athènes ou Thessalonique mais aussi dans des régions du nord de la Grèce d'où de nombreux habitants slavophones avaient été expulsés, notamment dans le cadre du traité de Lausanne.

Ils n’étaient pas très bien vus par la population locale car ils n’étaient pas considérés comme des Grecs à part entière mais plutôt comme des Turcs, alors qu’ils avaient été expulsés de la Turquie pour leur appartenance à la nation grecque. Leur intégration fut difficile, ils ont dû se regrouper et former des associations pour continuer à faire vivre leur culture et leurs traditions. Ce fut aussi le cas des Grecs pontiques réfugiés dans le Caucase et en URSS, en raison du régime autoritaire qui y régnait.

Héritage

Musique, sport, littérature, cinéma

Les Grecs de Turquie ont souvent constitué des communautés lors de leur installation en Grèce, aussi bien qu'après leur émigration aux États-Unis par exemple. Ils se sont rassemblés en fonction de leur région ou ville d'origine dans les mêmes quartiers ou ont construit des villes nouvelles.

Ils ont répandu à travers le pays leur musique, donnant naissance au Rébétiko ou l’influençant.

De nombreuses associations sportives ont été fondées par les micrasiates dans leurs villes d'accueil, comme l'AEK Athènes ou le PAOK Salonique dont le K fait référence à Constantinople. Certains clubs actuellement basés en Grèce, comme l'Apollon Smyrnis ou le Panionios de Smyrne, portent toujours le nom de la ville ou de la région où ils ont été fondés.

Depuis quelques décennies, les langues et les plumes se sont déliées au sujet de l’histoire des Grecs d’Asie Mineure. Et cela à travers le monde. Tout d’abord en Grèce, avec la romancière Didó Sotiríou née en 1909 en Turquie, qui décrivit avec réalisme et lucidité ce qu’on appelle la Grande catastrophe dans son roman Terres de sang.

En France, l’auteur Allain Glykos, dans ses livres Parle-moi de Manolis et Manolis de Vourla, évoque la destinée de son père qui, fuyant la Turquie étant enfant, est arrivé en Grèce pour enfin immigrer en France. Ainsi en écrivant ses livres, Allain Glykos fait vivre à travers l’âme de son père, toutes ces personnes qui ont fui, qui ont souffert mais il laisse aussi un merveilleux témoignage pour les générations présentes et celles qui suivent.

Enfin, aux États-Unis, Théo Halo publie en 2000 Not even my name. Dans ce roman, il suit le parcours de sa mère et rend compte des génocides des Arméniens, des Grecs pontiques et des Assyriens qui ont eu lieu pendant et après la Première Guerre mondiale. Théo Halo a la volonté de transmettre une vérité historique mais aussi une vérité culturelle en se focalisant sur la culture pontique. De nombreux essais universitaires ont aussi été publiés sur cette minorité d’Anatolie.

Au cinéma aussi on peut retrouver l’histoire de ces Grecs.

Le film Garçons d'Athènes (titre anglais From the edge of the city, dialogues en grec et en russe) du réalisateur Constantínos Giánnaris, sorti en 1998 et comparé par certains critiques au film américain My Own Private Idaho, décrit la situation des Micrasiates en Grèce.

Dans En attendant les nuages (titre original Bulutları Beklerken, 2004, avec Ismail Baysan, Ruşan Kaliskur, Ridvan Yağçi), la réalisatrice Yeşim Ustaoğlu relate l’histoire d’une Grecque recueillie par une famille turque et qui passera toute sa vie sur ce territoire et qui sera fondue dans ce peuple sans plus vraiment savoir qui elle est jusqu’à ce qu’elle retrouve ses racines à la suite de la rencontre fortuite d’un Micrasiate pontique émigré, venu en visite pour revoir sa terre natale. Elle découvre qu’elle a un frère émigré à Salonique et court l’y retrouver, alors qu’elle a quasiment oublié le grec. Tout en nuances, le film dépasse les clichés manichéens et lève un coin de voile sur un passé aussi complexe que tragique, instrumentalisé par le nationalisme grec et nié violemment par le nationalisme turc (le film n’a pas été distribué dans les cinémas turcs et les médias se sont déchaînés contre la réalisatrice, accusée de « trahison » comme avant elle Ömer Asan qui avait soulevé le même "lièvre").

Le film de Tassos Boulmetis, Un ciel épicé (titre original Πολίτικη Κουζίνα, 2003[3]) parle d’un homme ayant grandi à Istanbul mais qui a été chassé de Turquie enfant, après les émeutes des 6 et 7 septembre 1955 et après les violences à Chypre, mais qui garde au cœur la nostalgie de Constantinople, symbolisée par le parfum des épices que vendait son grand-père.

Un documentaire a par ailleurs été réalisé en 2000 par Maria Mavrikou, Le Voyage (titre original Tο Ταξίδι[4]), relatant les visites de Micrasiates à Ayvalık, en Turquie, et de Turcs originaires de Crète à Rethymno, en Crète.

Langue

Les Grecs d’Asie Mineure ont développé des langues propres en fonction du lieu de leur résidence. À leur venue en Grèce, ils ont essayé de maintenir leur langue comme faisant partie intégrante de leur culture. Bien sûr, ils ont dû tous apprendre le grec moderne, ainsi c’était à chacun de savoir s’il voulait continuer de parler sa langue d’origine au sein de la famille. Cependant, plusieurs de ces langues sont devenues langues officielles comme le grec pontique. De même, récemment des ouvrages à dessein pédagogique ont été publiés pour que les enfants (et adultes) apprennent le pontique.

Lors du recensement grec de 1928, il y avait 103 642 chrétiens orthodoxes turcophones réfugiés d'Asie Mineure, dont une moitié de Karamanlides, qui écrivaient le turc en caractères grecs. Les 193 premières éditions du quotidien Panrosfygiki, dont le public cible était les réfugiés micrasiates, furent publiées en karamanli. Il y avait en outre 240 695 réfugiés pontiques en provenance d'Anatolie, mais aussi du Caucase et de Russie[5]. Selon Evangelia Adamou (CNRS), des « réfugiés pontiques (…) ont appris et pratiqué les parlers slaves locaux lors de leur installation en Grèce au début du xxe siècle et (…) les parlent encore aujourd’hui dans certaines régions »[6].

Notes et références

Voir aussi

Lien externe