Tour de France 1903
Course |
1re Tour de France |
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Étapes |
6 |
Date | |
Distance |
2 428 km |
Pays traversé(s) | |
Lieu de départ | |
Lieu d'arrivée | |
Partants |
60 |
Coureurs au départ |
60 |
Coureurs à l'arrivée |
21 |
Vitesse moyenne |
25,607 km/h |
Vainqueur | |
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Deuxième | |
Troisième |
La 1re édition du Tour de France s'est déroulée du 1er au . Cette course cycliste est organisée par le journal L'Auto, l'ancêtre du quotidien L'Équipe. La course disputée sur six étapes est remportée par Maurice Garin.
La course est inventée pour stimuler la circulation du journal L'Auto, après s'être séparé avec un autre journal. Au départ, le nombre de participants n'est pas suffisant, la course est donc reportée de quelques semaines et les primes sont augmentées. Les cyclistes ne sont pas obligés de concourir les six étapes, sauf pour être classé au classement général.
Le favori d'avant-course, Maurice Garin, remporte la première étape et conserve la tête du classement général de bout en bout. Il s'impose également lors des deux dernières étapes, et remporte finalement cette première édition avec une marge de près de trois heures sur le deuxième. La vente du journal L'Auto augmente pendant et après la course, de sorte que la course est réorganisée en 1904.
Origine
À la fin du XIXe siècle, en France, il n'existe qu'un quotidien sportif, Le Vélo. Son rédacteur en chef, Pierre Giffard, intervenant dans ses colonnes pour soutenir Dreyfus, déplaît aux industriels du cycle et de l'automobile (pour la plupart antidreyfusards). Or, ceux-ci financent son journal par la publicité. En 1900, par leur représentant, le comte de Dion, ils choisissent Henri Desgrange pour créer un journal concurrent, L'Auto-Vélo. Alors que Le Vélo est publié sur papier vert, Desgrange fait éditer son quotidien sur papier jaune (quelques années plus tard, c'est cette couleur qui donnera naissance au maillot jaune). Or le titre choisi porte le terme Vélo. Le directeur du Vélo, Paul Rousseau, intente un procès. Le , de Dion le perd et se trouve contraint de renommer L'Auto-Vélo en L'Auto. Comme le cyclisme est alors important en termes économiques et sportifs, cette perte d'appellation pourrait affecter les ventes du journal. Desgrange doit trouver une riposte. Il s'avère que son collaborateur, le journaliste Géo Lefèvre lui a proposé d'organiser une course cycliste susceptible d'augmenter son lectorat : le Tour de la France.
Le , L’Auto annonce la création de « la plus grande épreuve cycliste jamais organisée » : le Tour de France. Il s'agit d'une course de cinq semaines, qui se dispute du 1er juin au 5 juillet avec un droit d'entrée de 20 francs. Ces conditions sont trop dures pour la plupart des cyclistes de l'époque : une semaine avant le départ de la course, seulement quinze concurrents sont inscrits. Desgrange reprogramme alors la course du 1er au 19 juillet, augmente les gains qui atteignent désormais 20 000 francs, réduit le droit d'entrée à dix francs et promet cinq francs par jour pour les cinquante premiers coureurs du classement. Après ces modifications, soixante coureurs prennent finalement le départ de la course. Vingt-et-un sont commandités par des usines de bicyclettes, les trente-neuf autres étant indépendants.
Géo Lefèvre devient le directeur, le juge et le chronométreur et Henri Desgrange le directeur-général, même s'il n'a pas suivi la course.
Règlement et avant-course
Le Tour de France 1903 est disputé sur six étapes. Par rapport aux courses par étapes actuelles, les étapes sont beaucoup plus longues ; la plus longue se déroule sur 471 kilomètres. Les cyclistes ont le droit à entre un et trois jours de repos entre les étapes. Les parcours des étapes sont plats, aucune montagne n'est franchie. Les cyclistes ne sont pas regroupés en équipes, tous les participants coururent individuellement. Chaque participant paie une participation de dix francs, soit environ 87,50 euros en 2003.
L'organisateur du Tour, le quotidien sportif L'Auto offre 20 000 francs de primes : 3 000 pour le vainqueur du classement général final, 2 000 pour le deuxième, 1 200 pour le troisième, 800, 500, 250, 200, 100, et 50 aux suivants. Le vainqueur de l'étape Paris-Lyon reçoit 1 500 francs ; 700 francs, seulement, pour le vainqueur de l'étape Toulouse-Bordeaux. Chaque coureur encore en course reçoit tous les jours un défrayement de cinq francs.
À la différence d'aujourd'hui, un coureur qui abandonne lors d'une étape, est autorisé à prendre le départ de l'étape suivante, bien qu'il ne soit plus classé au classement général. Cela profite à Hippolyte Aucouturier, qui abandonne au cours de la première étape, mais remporte les deuxième et troisième étapes. Même chose pour le Suisse Charles Laeser, qui s'impose lors de la quatrième étape sans avoir terminé la troisième.
À certains endroits de la course, Desgrange avait placé des hommes, pour s'assurer que les cyclistes parcourent toute la route du Tour.
Le maillot jaune porté par le leader du classement général n'est pas encore introduit, mais le premier du classement est identifié par un brassard vert. Le dernier coureur reçoit une lanterne rouge.
Les favoris d'avant-course pour la victoire se nomment Maurice Garin et Hippolyte Aucouturier.
Déroulement de la course
L'épreuve n'est suivie du départ à l'arrivée que par un seul journal, La Revue Sportive. Géo Lefèvre, journaliste de L'Auto, se contente en effet de couvrir les départs et les arrivées en effectuant le trajet des étapes en train. Il rate même l'arrivée de Garin à Lyon. Des 79 coureurs engagés, 60 seulement s'alignent au départ, 21 seulement passeront la ligne d'arrivée. Le peloton est majoritairement français avec 50 coureurs ; 3 Belges, 4 Suisses, 2 Allemands et l'Italien de Paris Rodolfo Muller, complètent la liste des engagés.
Pour le départ de la première étape, les coureurs se réunissent le 1er juillet à Montgeron, banlieue sud de Paris, devant le café « Le Réveil matin » mais le départ effectif de la première étape est donné sur la commune voisine de Villeneuve-Saint-Georges (sur la route de Montgeron) à 15h16[1]. En effet, Louis Lépine, Préfet de Police de la Seine, avait interdit les courses sur le territoire parisien. Lors de cette première étape entre Paris (Montgeron/Villeneuve-Saint-Georges) et Lyon, Maurice Garin s'impose en 17 heures, 45 minutes et 44 secondes devant son compatriote Émile Pagie, à 24 secondes. Situé entre Roanne et Lyon, le col du Pin-Bouchain est le premier col franchi par la Grande boucle. La deuxième étape se déroule le 5 juillet entre Lyon et Marseille. Le premier col à plus de 1 000 m d'altitude de l'histoire du Tour, le col de la République au sud de Saint-Étienne, est franchi par Hippolyte Aucouturier en premier qui remporte l'étape, mais Maurice Garin garde la tête au classement général. Aucouturier n'est plus en course pour le classement général depuis son abandon lors de la première étape, il est toutefois autorisé, comme tous les autres éliminés, à prendre part aux étapes.
Le 8 juillet, le Français Hippolyte Aucouturier remporte sa deuxième étape sur le Tour entre Marseille et Toulouse. Maurice Garin conserve la tête au classement général. Quatre jours plus tard, entre Toulouse et Bordeaux, le Suisse Charles Laeser remporte cette quatrième étape. Le Genevois n'est plus en course pour le classement général. C'est la première victoire d'étape pour un coureur non-français. Maurice Garin conserve la tête au classement général. Il remporte la cinquième étape (Bordeaux - Nantes) le 13 juillet et consolide sa position en tête au classement général. La sixième et dernière étape, entre Nantes et Paris (Parc des Princes) se déroule le 18 juillet. Maurice Garin remporte sa 3e étape sur le Tour et gagne l'épreuve en comptant près de trois heures d'avance sur le deuxième du classement, Lucien Pothier. L'étape parisienne est toutefois fort disputée et se joue au sprint. Maurice Garin devance d'une seconde Fernand Augereau et le Belge Julien Lootens. Le chronométrage (ligne d'arrivée réelle) s'effectue à Ville-d'Avray, mais le parcours conduit ensuite le peloton au Parc des Princes pour un tour d'honneur et la remise des prix. Les cinq premiers du classement général final courent sur des bicyclettes « La Française ». On estime à 100 000 le nombre de spectateurs présents le long du parcours en province et plus de 20 000 spectateurs à Paris pour l'arrivée finale.
Retombées
Les ventes de L'Auto ont augmenté considérablement en raison de cet événement. Une édition spéciale de 130 000 exemplaires a été publiée après la fin de la course. Le tirage normal est passé de 25 000 à 65 000 à la suite de cet évènement. Les cyclistes sont devenus des héros nationaux. Maurice Garin reviendra en 1904 où il tentera vainement de défendre son titre.
Résultats
Les étapes
Étape | Date | Villes étapes | km | Vainqueur d'étape | Temps | Leader du classement général |
1re étape | mer. 1er juillet | Montgeron/Villeneuve-Saint-Georges – Lyon | 467 | Maurice Garin | 17 h 45 min 13 s | Maurice Garin |
2e étape | dim. 5 juillet | Lyon – Marseille | 374 | Hippolyte Aucouturier | 14 h 28 min 53 s | Maurice Garin |
3e étape | mer. 8 juillet | Marseille – Toulouse | 423 | Hippolyte Aucouturier | 17 h 55 min 04 s | Maurice Garin |
4e étape | dim. 12 juillet | Toulouse – Bordeaux | 268 | Charles Laeser | 8 h 46 min 00 s | Maurice Garin |
5e étape | lun. 13 juillet | Bordeaux – Nantes | 425 | Maurice Garin | 16 h 26 min 31 s | Maurice Garin |
6e étape | sam. 18 juillet | Nantes – Paris | 471 | Maurice Garin | 18 h 09 min 00 s | Maurice Garin |
Classement général
Maurice Garin remporte cette course en 94 heures 33 minutes et 14 secondes, Lucien Pothier termine deuxième à 2 heures 49 minutes et 21 secondes. Garin détient le record du plus grand écart entre le premier et le deuxième. Finalement, 21 cyclistes prennent part à l'ensemble des étapes et figurent au classement général final. Le vainqueur Maurice Garin reçoit 6 075 Francs pour cette victoire.
La « lanterne rouge » est Arsène Millocheau, qui termine à 64 heures, 57 minutes et 8 secondes du premier.
Rang | Coureur | Temps |
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1 | Maurice Garin | 94 h 33 min 14 s |
2 | Lucien Pothier | + 2 h 49 min 21 s |
3 | Fernand Augereau | + 4 h 29 min 24 s |
4 | Rodolfo Muller | + 4 h 39 min 30 s |
5 | Jean-Baptiste Fischer | + 4 h 58 min 44 s |
6 | Marcel Kerff | + 5 h 52 min 24 s |
7 | Julien Lootens | + 9 h 31 min 8 s |
8 | Gustave Pasquier | + 10 h 24 min 4 s |
9 | François Beaugendre | + 10 h 52 min 14 s |
10 | Aloïs Catteau | + 12 h 44 min 57 s |
11 | Jean Dargassies | + 13 h 49 min 10 s |
12 | Ferdinand Payan | + 19 h 9 min 2 s |
13 | Julien Girbe | + 23 h 16 min 52 s |
14 | Isidore Lechartier | + 24 h 5 min 13 s |
15 | Josef Fischer | + 25 h 14 min 26 s |
16 | Alexandre Foureaux | + 31 h 30 min 52 s |
17 | René Salais | + 32 h 34 min 43 s |
18 | Émile Moulin | + 49 h 43 min 14 s |
19 | Georges Borot | + 51 h 37 min 38 s |
20 | Pierre Desvages | + 62 h 53 min 54 s |
21 | Arsène Millocheau | + 64 h 57 min 8 s |
Liste des coureurs
Quatre-vingt coureurs furent inscrits à l'épreuve[2] ; mais seuls cinquante neuf d'entre eux prirent effectivement le départ de Paris[2]. Le numéro de dossard indiqué est celui attribué par le journal L'Auto[2]. De plus, le règlement rend possible l'inscription à une étape isolée, vingt-cinq autres coureurs ont ainsi participé à une étape sans courir la ou les étapes précédentes.
Notes et références
- Geoffrey Wheatcroft, Le Tour: A History of the Tour de France, Simon and Schuster, , p. 360
- Vespini 2013, p. 264-266.
Bibliographie
- Coll., Tour de France, 100 ans, Paris, L'Équipe, 2003, tome 1, p. 22-33.
- Jean-Paul Vespini, Le Premier Tour de France : 1903, Paris, Jacob-Duvernet, , 278 p. (ISBN 978-2847244663)
Liens externes
- Tour de France 1903 sur letour.fr
- (en) Tour de France 1903 sur bikeraceinfo.com