Ali Tur
Ali Tur | |
Présentation | |
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Nom de naissance | Ali Georges Tur |
Naissance | Tunis, Tunisie (Protectorat français) |
Décès | (à 88 ans) Paris, France |
Nationalité | Français |
Activités | Architecte |
Formation | École des beaux-arts de Paris |
Œuvre | |
Distinctions | Prix Destors Grand prix de décoration |
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Ali Tur ou Ali Georges Tur, né le à Tunis (alors sous protectorat français) et mort le à Paris (16e arrondissement), est un architecte français. Il a notamment conçu de nombreux bâtiments en Guadeloupe durant l'entre-deux-guerres.
Biographie
Famille et formation
Ali Georges Tur nait en 1889 à Tunis, fils d'Henri Eugène Auguste Paul Tur, polytechnicien originaire des Cévennes travaillant pour les Ponts-et-Chaussées et de Caroline Lucius, une alsacienne. Son prénom « Ali » est le fruit de l'amour d'Henri Tur pour la culture orientale et en particulier la poésie arabe[1].
![](http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/4/42/Plaque_Ali_Tur.jpg/220px-Plaque_Ali_Tur.jpg)
Il débute en 1910 des études d'architecture à l’École des beaux-arts – notamment dans l'atelier de Victor Laloux[2] – qui sont interrompues par la Première Guerre mondiale. Après l'Armistice de 1918, il termine ses études et devient architecte diplômé par le gouvernement (DPLG) en 1920[1]. Recalé en 1919 au prix de Rome (reçu cette année-là par Jacques Carlu), il ouvre une agence d'architecture à Paris et construit ou agrémente des immeubles d'habitation à bon marché (HBM) et privés dans le secteur de la porte du Point-du-Jour et de la porte de Saint-Cloud[3],[4].
Ali Tur est à cette époque également mandaté par l'État pour écrire des rapports d'expertise sur les zones détruites par la Grande Guerre, acquérant alors une première expérience des reconstructions après des catastrophes. Il intègre, en 1925, la liste des architectes du ministère des Colonies qui est un agrément reçu par une dizaine d'architectes[1].
Ali Tur épouse en 1930, à Paris, Jacqueline Baszanger (1902-1933) issue d’une dynastie de joailliers[réf. nécessaire].
Reconstruction de la Guadeloupe après 1928
Le , le violent ouragan Okeechobee provoque de nombreux dégâts aux édifices de toute la Guadeloupe et plus de 1 200 victimes. En , un contrat est signé entre Ali Tur et le gouverneur Tellier – un ami de longue date[5],[1] –, prévoyant la construction de divers bâtiments publics (palais de justice, palais du conseil général, palais du gouverneur, etc.) sur une durée contractuelle de quatre ans pour un montant total estimé à quarante millions de francs[6]. Ses honoraires s'élèvent à 5 % des montants des travaux[1]. À ces commandes pour le compte de l’État français et la colonie de Guadeloupe, s'ajoutent des contrats passés avec les municipalités pour la construction d'hôtels de ville, d'églises ou d'écoles. Ces commandes s'inscrivent également dans le cadre du règlement des indemnité de guerre l'Allemagne à la France, pour lesquelles des « paiements en nature » ont été effectués par la fourniture de matières premières et de matériaux de construction fabriqués outre-Rhin (menuiserie – qui stockée sur l'île sera dégradée et non utilisée –, carrelage, sanitaires etc)[5],[1]. Constatant le manque de main de d'œuvre (occupée à la reconstruction des habitations et aux travaux agricoles) et de matériaux, sa stratégie est basée sur quelques grands principes : respect des sites à reconstruire (mêmes lieux et gabarits que les bâtiments détruits), utilisation exclusive du béton armé et venue de travailleurs de métropole, unité stylistique et déclinaison des modules de base par des ornements spécifiques (sous l'influence indirecte des travaux d'Auguste Perret[7]), épure des lignes géométriques, et ventilation naturelle par le haut et filtration de la lumière du soleil par des claustras tous différents[8],[1],[9]. Constatant les contraintes de la reconstruction, Ali Tur déclare qu'il doit :
« Constuire le plus vite possible et le plus économiquement possible, dans un pays privé d'industrie du bâtiment et de main d'œuvre spécialisée, une série d'édifices correspondant le mieux possible au climat de cette région des Tropiques »
— Ali Tur[10]
![](http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/7/7c/Expo_1931_Guadeloupe.jpg/220px-Expo_1931_Guadeloupe.jpg)
Le premier bâtiment construit pour la Guadeloupe par Ali Tur l'est à Paris avec le pavillon de l'île pour l'exposition coloniale de 1931[1]. Puis, entre 1931 et 1937, il réalise environ une centaine de bâtiments publics (et quelques réalisations privées) sur l'ensemble de l'archipel[11] avec l'entreprise Diligenti (dirigée par une famille originaire de Coggiola en Italie, basée à Saint-Étienne, et installée en Guadeloupe en décembre 1928), comme principal maître d'œuvre en raison de son expérience avec le béton armé[9]. L'ensemble des travaux est réalisé en un temps exceptionnellement court[1]. En 1937, un expert est nommé par le sous-secrétaire d'État aux colonies afin de régler un litige opposant Ali Tur (qui quitte définitivement la Guadeloupe cette année-là) à la colonie. L'expert est chargé d'évaluer les montants et les vices signalés lors de la réception des bâtiments notamment pour le toit du palais du Gouverneur[12],[1]. Ali Tur aura finalement gain de cause dans son procès contre l'État intenté au tribunal de Basse-Terre mais, en raison de la Seconde Guerre mondiale, ne sera dédommagé qu'après le conflit avec un franc dévalué[9],[1].
Retour en métropole
En 1939, Ali Tur concourt pour la construction d'un hôtel en Martinique et obtient le marché qui lui est retiré à la demande de Gratien Candace, député de la Guadeloupe.
La Deuxième Guerre mondiale éclate et il est mobilisé le jusqu'au . Il s'établit alors à Nîmes avec sa fille Isabelle en . Il est interné au Camp de Saint-Sulpice-la-Pointe du au [pourquoi ?]. Le , Ali Tur est arrêté à Bagnac-sur-Célé et envoyé dans les Sudètes pour le S.T.O. d'où il s'évade en 1945 pour regagner Nîmes puis Paris.
En 1946, Ali Tur est nommé architecte agréé par le Ministère de la Reconstruction et de l'Urbanisme et collabore à la reconstruction de Condé-sur-Noireau. Il obtient le Grand prix d'architecture du Ministère de la France d'outre-mers en 1950 et cessera son activité professionnelle en 1959 après avoir brûlé l'ensemble de ses archives[1]. En 1972, il est nommé architecte honoraire de l'Ordre des architectes.
Ali Tur meurt le à Paris.
Réalisations
Guadeloupe
Liste partielle des bâtiments de Guadeloupe selon l'Inventaire général du patrimoine culturel[13] :
Paris
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20, avenue Dode-de-la-Brunerie (1934)
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3, place du Général-Stefanik (1934)
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- Jardins d'une HBM, porte du Point-du-Jour, 1931[14]
- Immeuble de rapport, 20 avenue Dode-de-la-Brunerie, 1934[15]
- Immeuble de rapport, 3 place du Général-Stefanik, 1934[16]
Toulon
Autres localités
- Monument aux morts de Villers-Farlay (Jura), 1921[18]
Monuments protégés
Parmi les bâtiments réalisés par Ali Tur en Guadeloupe, une douzaine ont été protégés au titre des monuments historiques lors de deux campagnes d'inventaire et de restauration qui lui ont été dédiées[19] :
- Hôtel de préfecture de la Guadeloupe, à Basse-Terre[20]
- Palais du conseil général de Guadeloupe, à Basse-Terre[21]
- Palais de justice de Basse-Terre[22]
- Église de la Sainte-Trinité de Lamentin[23]
- Hôtel de ville de Lamentin[24]
- Square et monument aux morts, de Lamentin[25]
- Groupe scolaire de Lamentin[26]
- Justice de paix de Lamentin[27]
- Presbytère de Lamentin[28]
- Église Saint-André de Morne-à-l'Eau[29]
- Hôtel de ville de Pointe-Noire[30]
- Église Saint-Jean-Baptiste de Baie-Mahault[31]
Ouvrages
- Notes sur la reconstruction de la Guadeloupe, Basse-Terre, Imprimerie catholique (lire en ligne)
- « Architecture coloniale en Guadeloupe. Bâtiments gouvernementaux et communaux », dans L’Encyclopédie de l’Architecture des Constructions Modernes, Paris, Albert Morancé, (lire en ligne)
- « L'Enseignement technique à la Guadeloupe », dans Congrès intercolonial de l'enseignement technique d'Outre-mer, Paris, Association colonies-sciences, (lire en ligne)
- « Un ensemble de constructions en Guadeloupe (1931-1934) », L'Architecte, vol. 7, (lire en ligne)
- « Architecture et Urbanisme aux Colonies Françaises puis La Reconstruction de la Guadeloupe », L'Architecture d'aujourd'hui, vol. 3, (lire en ligne)
- « Salon 1936 Salon des Artistes français », La Construction moderne, no 24, , p. 758-759 (lire en ligne)
- Ali Tur, Ma plaidoirie,
Notes et références
- [vidéo] « Ali Tur, un architecte moderne reconstruit la Guadeloupe », conférence de Sophie Paviol, ENSAG, 19 mars 2015.
- Sophie Paviol 2014, p. 33.
- Ali Tur, www.pss-archi.eu, consulté le 12 avril 2020.
- Sophie Paviol 2014, p. 18.
- Ali Tur sur le site des Architectes du patrimoine, consulté le 10 août 2017.
- Fac-similé du contrat passé en 1929
- Sophie Paviol 2014, p. 35.
- Sophie Paviol 2014, p. 13-17.
- Alain Glasberg et Christian Galpin 2002.
- Sophie Paviol 2014, p. 9-10.
- Michèle Robin-Clerc, Note descriptive de l’œuvre d’Ali Tur, Basse-Terre, Conseil régional de Guadeloupe, (lire en ligne), p. 1
- Premières pages du rapport d'expertise
- Ali Tur sur la base Mistral du Ministère de la Culture.
- L'Architecte 1932 no 11
- L'Architecte 1935 no 01
- L'Architecte 1935 no 02
- L'Architecture d'aujourd'hui 1939 no 06
- Monument aux morts de Villers-Farlay, Les monuments aux morts, université de Lille, consulté le 10 mai 2021.
- Ali Tur, architecte des colonies sur le site du Ministère de la Culture.
- Notice no PA00105887, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
- Notice no PA00105889, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
- Notice no PA00105888, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
- Notice no PA97100059, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
- Notice no PA97100055, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
- Notice no PA97100058, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
- Notice no PA97100057, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
- Notice no PA97100056, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
- Notice no PA97100060, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
- Notice no PA00105891, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
- Notice no PA00105892, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
- Notice no PA97100067, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
Annexes
Bibliographie
- Dominique Amouroux, Ali Tur : L'Architecte et le Cyclone – Guadeloupe 1928, Paris, Nouvelles Éditions Jean-Michel Place, coll. « Architecture/Archives », , 84 p. (ISBN 978-2-85893-977-0)
- Christian Galpin, Ali Tur, architecte : 1929/1937, itinéraire d'une reconstruction, Basse-Terre, Conseil général de la Guadeloupe, , 8 p. (présentation en ligne, lire en ligne)
- (en) Christian Galpin et Anne Hublin, « A Tradition in Transition: Ali Tur in Guadeloupe, 1929-1937 », Traditional Dwellings and Settlements Review, vol. X, no 2, , p. 12 (lire en ligne)
- Jean-Pierre Giordani, La Guadeloupe face à son patrimoine : Itinéraires et modalités d'une reconnaissance et d'une revalorisation, Paris, éditions Karthala, , 170 p. (ISBN 978-2-86537-641-4, présentation en ligne)
- Marthe Oulié, Les Antilles filles de France : Martinique, Guadeloupe, Haïti, Paris, éditions Fasquelle, , 324 p. (présentation en ligne, lire en ligne), Guadeloupe à partir de la page 139
- Sophie Paviol (photogr. Charles Chulem-Rousseau), Ali Tur : Un architecte moderne en Guadeloupe, Gollion, Infolio éditions, coll. « Archigraphy », , 172 p. (ISBN 978-2-88474-460-7)
- Michèle Robin-Clerc, Note descriptive de l’œuvre d’Ali Tur, Basse-Terre, Conseil régional de Guadeloupe, , 9 p. (présentation en ligne, lire en ligne)
- Michèle Robin-Clerc, Guadeloupe, années 30 : Ali Tur, l'architecte d'une reconstruction, Somogy, , 312 p. (ISBN 978-2-7572-0962-2)
Vidéographie
- Alain Glasberg et Christian Galpin, Ali Tur, architecte colonial, durée 26', RFO Guadeloupe et AMDA Production, (présentation en ligne)
- Jean Michel Guibert, Ali Tur, durée 5', Architectes du Patrimoine (présentation en ligne)