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Religion en Roumanie

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Religion en Roumanie (2011)[1]

La Roumanie est une république laïque en ce sens que, constitutionnellement, l'État et les communautés religieuses sont indépendants les uns des autres, mais cette séparation est plus proche du système existant au Québec, en Belgique, en Suisse et dans les trois départements français d'Alsace-Moselle, que de la « laïcité à la française ». En effet, l'État rémunère les membres des clergés des religions qu'il reconnaît, et des cours de religion au choix sont offerts par l'école publique. L'État roumain reconnait 18 dénominations[2] sur la trentaine que compte le pays. Les autres sont considérées comme des sectes et ne bénéficient pas des mêmes avantages.

Démographie

La pratique religieuse régulière en Roumanie est faible[3], mais la majorité des habitants suit les rituels lors des principales fêtes et sacrements (baptêmes, mariages et enterrements, Pâques/Pessah, Noël, Aïd, Pourim...), car ces rituels font partie de leur identité historique[4]. Plus de 80 % des habitants de la Roumanie se déclarent fidèles de l'Église orthodoxe roumaine, appartenance plus culturelle et identitaire que mystique (presque toutes les familles ont recours aux services, forts coûteux, des prêtres aux baptêmes, mariages, enterrements, et participent aux grandes messes de Pâques et Noël, mais moins de 10 % se rendent régulièrement aux offices)[5].

Répartition de la population lors des recensements en %
Dénominations reconnues[2]
Dénomination Chef Population
Nom Titre 1992[6] 2002[7] 2011[8]
Christianisme
Orthodoxie
Église orthodoxe roumaine Daniel Patriarche 86,81 86,79 81,04
Éparchie de Timișoara Marinco Marcov Prêtre vicaire 0,07
Église orthodoxe russe vieille-ritualiste de Roumanie Leontie Izot Métropolite 0,14 0,17 0,16
Archidiocèse de l'Eglise arménienne (ro) Datev Hagopian Évêque 0,00
Catholicisme
Église romano-catholique Ioan Robu Primat 5,09 4,73 4,33
Église roumaine unie avec Rome, greco-catholique Lucian Mureșan Métropolite 0,98 0,88 0,75
Protestantisme
Église réformée de Roumanie Béla Kató Évêque 3,52 3,23 2,99
Culte chrétien pentecôtiste - Église apostolique de Dieu Moise Ardelean Président 0,97 1,49 1,80
Culte chrétien baptiste - Union des Églises baptistes de Roumanie Viorel Iuga Président 0,48 0,58 0,56
Église adventiste du septième jour de Roumanie Ștefan Tomoiagă Président 0,34 0,43 0,40
Église unitarienne hongroise Ferenc Bálint Benczédi Évêque 0,34 0,30 0,29
Organisation religieuse « témoins de Jehovah » Dumitriu Oul Président 0,25
Église évangélique de confession d'Augsbourg Roumanie (ro) Reinhart Guib Évêque 0,17 0,04 0,03
Église chrétienne selon l'évangile de Roumanie - Union des Églises chrétiennes selon l'évangile de Roumanie Virgil Achihai Président 0,12 0,20 0,21
Église évangélique luthérienne de Roumanie (ro) Dezső Zoltán Adorjáni Évêque 0,09 0,12 0,10
Église évangéliste de Roumanie (ro) Président 0,08 0,08
Autres
Culte musulman Murat Iusuf Mufti 0,25 0,31 0,32
Fédération des communautés juives de Roumanie - Culte mosaïque Rafael Shaffer Rabin 0,04 0,02 0,02
Autres dénominations et irreligions
Autres 0,25 0,41 0,15
Athées 0,05 0,03 0,10
Sans religion 0,11 0,05 0,09
Information non renseignée 0,04 0,05 6,26

Historique

Dans les principautés danubiennes, l'orthodoxie était religion d'État, de sorte que seuls des orthodoxes pouvaient être considérés comme citoyens : les musulmans, avdétis, romaniotes et séfarades étaient sujets et protégés de l’Empire ottoman, suzerain des hospodars moldaves et valaques ; les catholiques, protestants et ashkénazes étaient sujets et protégés de l’Empire des Habsbourg ou des États d’Europe centrale et occidentale dont ils étaient originaires. Certaines fonctions, droits, et devoirs, comme servir l’État, accomplir le service militaire, acquérir des terres et ouvrir des entreprises, étaient réservées aux citoyens orthodoxes. Cette situation, qui retarda la naturalisation des minorités non-orthodoxes jusqu'au début du XXe siècle, était un héritage de l'histoire roumaine : tributaires d’une puissante théocratie musulmane, l'Empire ottoman, les deux principautés orthodoxes devaient à la fois sauvegarder leur autonomie interne et néanmoins se situer dans le dar el ahd (« maison du pacte », en arabe : دار العهد), qui les préservait de l'annexion turque[9]. D'où la très grande influence de l'Église orthodoxe, facteur identitaire et religion d'État enseignée dans les écoles publiques jusqu'en 1947 : à titre d'exemple, la carrière du métropolite Miron Cristea, élu primat de Roumanie en 1919, initié franc-maçon en 1922, sacré Patriarche de l'Église orthodoxe roumaine le , élu sénateur en 1926, et enfin devenu Régent de 1927 à 1930, c'est-à-dire chef de l'État en pratique, le roi Carol II devant renoncer au trône et s'exiler en raison des trop nombreux scandales financiers et de mœurs où il était impliqué.

Sous la dictature communiste, officiellement séculière et athée, l'église orthodoxe dut se faire plus discrète mais ne perdit pas son influence ; son clergé était payé par l'État et devait informer la police politique communiste de la vie des paroisses (un dicton populaire disait « Si tu veux dénoncer quelqu'un sans te dévoiler comme délateur, va te confesser à l'église »[10]) ; les communistes eux-mêmes faisaient baptiser leurs enfants, se mariaient à l'église et administrer l'extrême-onction. Elle profita des confiscations du régime aux dépens d'autres églises (le décret no 358 du mit hors la loi l’Église grecque-catholique roumaine dont les biens furent attribués à l'Église orthodoxe) car les religions minoritaires étaient persécutées, soit parce qu'elles avaient des attaches dans les pays « impérialistes » (cas des obédiences catholiques, protestantes, israélites et musulmanes), soit parce qu'elles se positionnaient en objecteurs de conscience (cas des Lipovènes, des Adventistes et des Témoins de Jéhovah entre autres).

Toutefois, sous la présidence de Nicolae Ceaușescu, de nombreuses églises orthodoxes sont démolies ou déplacées dans le cadre de la politique de « systématisation du territoire », le Patriarcat de Roumanie n'en restant pas moins un pilier du régime[11], au point qu'un autre dicton satirique de l'époque rapportait ce dialogue fictif entre le patriarche Iustinian Marina et Ceaușescu : « - Hier, dit le premier, Dieu m'est apparu et m'a dit qu'aucune Église n'est plus humble et plus obéissante que la nôtre. - Tu as du trop boire et rêver, répond le second, car hier j'étais en province »[10].

Après la chute du régime communiste en 1989, la nouvelle constitution de la Roumanie confirme le caractère laïc de l'État, mais maintient la rémunération des clergés (étendue à tous les cultes officiellement enregistrés). Forte en 2011 de 16 307 004 fidèles, de 14 513 clercs plus environ 8 000 moines et religieuses d'après le recensement de 2011[8], créatrice de plus de 20 000 emplois, l'Église orthodoxe roumaine est la seconde église orthodoxe dans le monde après l'Église orthodoxe russe, par le nombre de ses fidèles et sa puissance médiatique, politique, culturelle, économique et financière : elle dispose de sa propre chaîne de télévision Ortodox TV, de plusieurs maisons d'édition, de 90 % du temps d'enseignement des religions dans le cursus des écoles publiques, de plusieurs facultés de théologie dont les diplômes sont valides comme degrés universitaires publics, et c'est aussi un très important propriétaire foncier et immobilier (qui n'a jamais restitué les biens confisqués à l’Église grecque-catholique).

Christianisme

La légende ecclésiastique affirme que le christianisme a été prêché sur l'actuel territoire de la Roumanie par l'apôtre André, et les sources antiques attestent la prédication du christianisme sous sa forme homéiste en Gétique par Wulfila. L'archéologie et les textes montrent qu'en Scythie mineure (patrie d'origine de Jean Cassien) les Grecs de la côte de la mer Noire étaient déjà chrétiens au IVe siècle. Quant à Wulfila, il convertit surtout des Goths, qui par la suite partirent vers le Sud et l'Ouest de l'Europe. Après la séparation des Églises d'Orient et d'Occident (au XIe siècle) les Hongrois et les Saxons présents sur ce territoire choisirent l'obédience de l'Église de Rome tandis que les Valaques, les Slaves et les Grecs choisirent l'obédience de celle de Constantinople[12].

Orthodoxie roumaine

L'Église orthodoxe de Roumanie se déclare autocéphale en 1865 et est reconnue comme telle par le Patriarche de Constantinople en 1885. Parmi ses fidèles, 96,46 % se sont déclarés de langue roumaine. Outre la majorité des Roumains (93,67 % d'entre eux), elle regroupe en Roumanie la plupart des Macédoniens (96,60 % d'entre eux), des Grecs (93,78 % d'entre eux), des Roms (76,36 %), des Ukrainiens (76,88 %) et des Arméniens (71,57 %) ainsi qu'une minorité des Serbes (33,23 %), des Bulgares (28,34 %) et des Lipovènes (33,23 %)[8].

Autres Églises

Les autres Macédoniens, Grecs, Arméniens et membres d'autres minorités de tradition orthodoxe se déclarent fidèles de leurs propres Églises orthodoxes implantées en Roumanie, mais les paroisses de celles-ci sont, sauf pour les Serbes, les Bulgares et les Lipovènes, très éparses.

Le terme de Lipovènes est l'un des noms modernes des Raskolniki ou Pravoslavniki, orthodoxes vieux-croyants partis de Russie à la fin du XVIIe siècle, lorsque cette dernière s'est « pervertie » à leurs yeux en adoptant les réformes religieuses initiées par le tsar Pierre le Grand. Ce mot vient de Filip Pustoviat de Kostroma, l'un de leurs fondateurs, qui leur a valu jadis le surnom de « Filipoviens » (Filipoveni).

Seule une minorité des Arméniens de Roumanie (15,58 %) appartiennent à l'Église apostolique arménienne, de tradition monophysite comme toutes les Églises des trois conciles.

Catholicisme

Catholicisme de rite latin

Historiquement, la plupart des fidèles de l'Église catholique latine de Roumanie étaient hongrois et allemands. Selon le recensement de 2011, parmi les 870 774 citoyens roumains se déclarant catholiques, 57,47 % sont hongrois, 34,14 % sont roumains, 2,45 % sont allemands et 2,39 % sont roms[8].

Le catholicisme romain est la religion de 97,69 % des Croates de Roumanie, de 91,03 % des Polonais de Roumanie, 76,52 % des Italiens, de 68,62 % des Csángós, de 67,75 % des Slovaques, de 65,98 % des Bulgares, de 59,16 % des Allemands et de 40,7 % des Hongrois. Seulement 1,77 % des Roumains et 3,35 % des Roms se déclarent aussi catholiques romains[8].

La grandes majorité des catholiques romains de Roumanie sont concentrés en Transylvanie, en particulier dans les județe de Hargita et de Covasna, qui regroupent respectivement 23,04 % et 8,47 % des catholiques, dans les régions limitrophes de la Hongrie, ainsi que dans certains județe de Moldavie tels que Bacău (11,08 %), Neamț (5,21 %) et Iași (4,05 %)[13].

Gréco-catholicisme

Cette Église est née en 1697 du ralliement d'une partie des orthodoxes roumains à la Papauté : par le synode d'Alba Iulia, ils sont entrés théologiquement dans le catholicisme, mais ont canoniquement gardé leur propre organisation, le droit d'ordonner des hommes mariés et leur liturgie grecque d'origine[12].

Lors du recensement de 2011, 150 593 citoyens roumains sont de confession gréco-catholique, dont une majorité de Roumains (82,72 %), ainsi que 10,72 % de Hongrois et 4,32 % de Roms[8].

Aucun groupe ethnique du pays n'est majoritairement de confession gréco-catholique, les groupes ethniques au sein desquels le pourcentage de gréco-catholiques est le plus élevé étant les Italiens (6,24 %), les Allemands (2,38 %), les Ukrainiens (2,36 %), les Grecs (1,39 %) et les Hongrois (1,32 %). Au sein des populations roumaines et roms, les gréco-catholiques ne représentent respectivement que 0,74 % et 1,05 %[8].

Protestantisme

Le protestantisme en Roumanie compte principalement l'Église réformée de Roumanie et les luthériens, mais aussi un nombre croissant de pentecôtistes, baptistes, unitariens, méthodistes, témoins de Jéhovah, adventistes et évangéliques soit en tout 6,71 % de la population. Historiquement, le protestantisme s'est implanté principalement en Transylvanie par l'Édit de tolérance promulgué en 1565, et est à l'origine des premiers textes religieux imprimés en roumain en 1570 et 1573[12]. La moitié des Sicules de Transylvanie et un tiers des Saxons de Transylvanie sont devenus calvinistes lors de l'Édit de tolérance ; un autre tiers des Saxons est devenu luthérien.

Islam

La communauté musulmane rassemble en 2011 environ 64 000 personnes, principalement turques et tatares[8], vivant essentiellement en Dobroudja qui fit jadis partie de l'Empire ottoman et auquel les principautés roumaines versaient un tribut. En Dobroudja ces communautés étaient socialement et économiquement dominantes, de sorte qu'aux yeux des musulmans, la Roumanie fait partie du Dar el Ahd (« maison du pacte », en arabe : دار العهد), terme décrivant une relation pacifique avec eux[12].

Outre les minorités turque et tatare qui représentent respectivement 41,82 % et 31,18 % de la population musulmane de Roumanie, celle-ci compte aussi 9,76 % de Roumains, 5,22 % de Roms ainsi qu'un pourcentage non défini d'immigrés provenant du Moyen-Orient et du sous continent indien.

Judaïsme

Le judaïsme a une histoire plus que bimillénaire sur l'actuel territoire de la Roumanie[14], mais la confession commence à jouer un rôle significatif tant du point de vue démographique que du point de vue économique ou culturel, seulement à partir du XIXe siècle, avec l'arrivée des Ashkénazes. Selon le recensement officiel de 1930, en Roumanie, il y avait 756 930 Juifs. Selon le recensement de 2011, le pays compte seulement 3 271 personnes s'identifiant comme juives et 3 519 personnes de confession juive[8]. Néanmoins, la diaspora juive roumaine, descendant des 450 000 personnes émigrées entre 1919 et 2002, compte plus d'un million de personnes réparties entre Israël, les États-Unis et l'Europe occidentale[15].

Autres religions

En plus des 18 confessions reconnues par l'État, la Roumanie compte aussi de petites minorités bouddhistes, bahá’íes, hindoues et autres[réf. nécessaire].

Irreligion

Par « irreligieux » on désigne en Roumanie les personnes déclarées athées ou agnostiques soit 0,2% de la population. On compte environ 21 000 athées déclarés, et 19 000 personnes qui déclarent ne pas avoir de religion sans être athées[8].

Quelques exemples de lieux de culte

Références

  1. (ro) (ro) « Populația stabilă după religie – județe, municipii, orașe, comune », Institutul Național de Statistică
  2. a et b (ro) « Culte recunoscute oficial în România » [archive du ], sur culte.gov.ro.
  3. Selon l'Eurobaromètre de la Commission européenne en 2005, 40 % de la population est athée ou agnostique : (en) Eurobarometer Social values, Science and Technology January - February 2005, [1].
  4. (ro) Simona Nicoară, O istorie a secularizării : de la “Cetatea lui Dumnezeu” la Cetatea Oamenilor, Cluj, Accent, .
  5. Sur un total de 18 861 902 citoyens roumains, 13 108 227 se sont déclarés de tradition orthodoxe au recensement de 2011, mais seulement 952 813 ont déclaré être des pratiquants réguliers hebdomadaires
    (ro) « Recensămintele despre religie », sur insse.ro.
  6. (en) Varga E. Árpád, « Hungarians in Transylvania between 1870 and 1995. Supplementary Tables », sur www.kia.hu (consulté le ).
  7. (ro) « Structura Etno-demografică a României », sur www.edrc.ro (consulté le ).
  8. a b c d e f g h i et j (ro) « Tab14. Populaţia stabilă după etnie şi religie – categorii de localităţi », sur recensamantromania.ro.
  9. Mihnea Berindei, L'Empire ottoman et les pays roumains, 1544-1545 : étude et documents, Editions de l'Ecole des hautes études en sciences sociales, (ISBN 2713208580, OCLC 17610079, lire en ligne)
  10. a et b (ro) Dana-Maria Niculescu-Grasso, Bancuri politice, Bucarest, Fundaţia Culturală Română, .
  11. (ro) Victor Frunză, Istoria Comunismului în Romania, Aarhus, Nord, .
  12. a b c et d Traian Sandu, Histoire de la Roumanie, Perrin, (ISBN 9782262024321, OCLC 319214652, lire en ligne)
  13. (ro) « Tab13. Populaţia stabilă după religie – judeţe, municipii, oraşe, comune », sur recensamantromania.ro.
  14. Revue Pontica
  15. Chronology - From the History Museum of the Romanian Jews; Hasefer Publishing House, The Romanian Jewish Community [lire en ligne (page consultée le 6 décembre 2007)].

Annexes

Articles connexes

Liens externes