Ernest-Antoine Seillière

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Ernest-Antoine Seillière
Fonctions
Président
BusinessEurope
-
Président
Mouvement des entreprises de France
-
Président
Conseil national du patronat français
-
Biographie
Naissance
Nom de naissance
Ernest-Antoine Seillière de LabordeVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Formation
Activités
Famille
Père
Jean Seillière de Laborde (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Mère
Renée de Wendel (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Autres informations
Membre de
Condamné pour
Distinctions

Ernest-Antoine Seillière de Laborde, connu sous le nom d'Ernest-Antoine Seillière ou Baron Seillière, né le à Neuilly-sur-Seine, est un ancien haut fonctionnaire français et héritier de la société d'investissement Wendel.

Il a été président de la principale organisation patronale française, le Conseil national du patronat français (CNPF), devenu sous sa présidence le Mouvement des entreprises de France (Medef), de 1998 à 2005.

En 2012, il est mis en examen dans une affaire de fraude fiscale instruite par le parquet national financier, pour laquelle il est condamné en 2022.

Biographie[modifier | modifier le code]

Origines familiales[modifier | modifier le code]

Ernest-Antoine Seillière porte, comme ses père et grand-père, un titre de baron romain[1]. En effet, la famille Seillière comprend deux branches : celle (cadette) des barons d'Empire français (par lettres patentes de l'empereur Napoléon Ier du [2], confirmés en 1843), propriétaires de la Banque Seillière-Demachy[3] — éteinte en la personne de François Alexandre (1849-1932), 5e baron Seillière ; et celle (aînée) des barons romains (par bref du pape Léon XIII en date du ) — dont Ernest-Antoine Seillière est l'actuel chef, membre de la Réunion de la noblesse pontificale[4]. Le nom de Laborde (nom de famille de la bisaïeule d'Ernest-Antoine et mère du premier baron romain) a été adjoint au patronyme Seillière en application de la loi du 11 germinal an XI () par l'autorité administrative (décret pris en Conseil d'État), procédure de changement de nom.

Ernest-Antoine Seillière est le fils de Jean Seillière de Laborde et de Renée de Wendel (fille de Maurice de Wendel). Il a notamment pour ancêtre Alexandre de Laborde, député de la Seine et principal opposant à la conquête d’Alger. Il est, par sa mère, le descendant et l’un des héritiers de François de Wendel, le descendant aussi du banquier franco-genevois Georges-Tobie de Thellusson. Par sa grand-mère Germaine Demachy, il descend encore de Cerf Beer, de Salomon Oppenheim et d'Auguste Ratisbonne.

Marié à Antoinette Barbey, fille de banquier suisse et arrière petite-fille de William Barbey, il est père de cinq enfants (trois filles et deux fils). Sa fille Noémie a épousé Charles de Yturbe, fils de Philippe de Yturbe, propriétaire du château de Montgraham, et neveu de Jean de Yturbe, propriétaire du célèbre château d'Anet ; ce mariage a été célébré au château d'Ognon, demeure familiale d'Ernest-Antoine Seillière.

Patron de CGIP puis Wendel[modifier | modifier le code]

Ernest-Antoine Seillière est diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris (1958), licencié en droit et ancien élève de l'École nationale d'administration (1964-1965)[5]. Il effectue son service militaire en Algérie comme sous-lieutenant affecté au 2e Spahis d'Oran. Après le cessez-le-feu, Christian Fouchet, nommé haut-commissaire en Algérie et proche de Charles Morazé, fait de Seillières son chef de cabinet. Cette nouvelle affectation va durer jusqu'à l'indépendance. Seillières travaille également avec Georges Buis, alors colonel et directeur du cabinet militaire de Fouchet, pendant la période de transition (Force locale et exécutif provisoire algérien).

À partir de 1964, il travaille trois ans au Quai d'Orsay dans le même bureau que Lionel Jospin. Il figure entre 1969 et 1973 dans les cabinets ministériels de Jacques Chaban-Delmas, Pierre Messmer, Maurice Schumann, Robert Galley.

En 1974, il prend une année sabbatique aux États-Unis[6]. En 1975, il est diplômé de l'université Harvard[7].

Il exerce d'abord des fonctions dirigeantes au sein du groupe de la famille Wendel, à laquelle il appartient. Il préside ainsi la CGIP, holding regroupant la fortune de la famille, rebaptisée Wendel Investissement en 2003, puis Wendel en 2007. Il quitte la présidence de Wendel en [8].

À son arrivée chez Wendel en 1978, le groupe est sur le déclin, les derniers sites sidérurgiques ayant été nationalisés par le gouvernement de Raymond Barre. Il souhaite alors réorienter Wendel vers une transformation en fonds d'investissement à l'anglo-saxonne, alors qu'il ne possède plus que des participations financières diverses. Sous sa direction, le groupe finance les débuts de Capgemini, Afflelou, Valeo ou encore bioMérieux. En 2001, occupé par le MEDEF, il confie la gestion du groupe à Jean-Bernard Lafonta, qui poursuit ce projet en multipliant les LBO (« achats à effet de levier », qui permettent de prendre le contrôle d'un groupe en empruntant 80 % du prix conclu puis en utilisant les bénéfices pour rembourser le prêt initial). En 2007, leur projet de prise de contrôle de Saint-Gobain se solde par un échec[8].

Affaire Wendel[modifier | modifier le code]

Alors président non exécutif de Wendel, Ernest-Antoine Seillière participe à un montage financier baptisé « Solfur », initié en 2004 et finalisé en 2007, lui permettant de recevoir 83 millions d'euros d'actions de son groupe[9]. Sa cousine, Sophie Boegner, conteste les conditions d’approbation de ce montage et dénonce un non-respect de l’égalité de traitement entre actionnaires qui aurait lésé les intérêts financiers de la famille Wendel[10]. Elle porte plainte pour "abus de biens sociaux" contre son cousin[11], la part de la famille Wendel (via sa société SLPS) dans le groupe étant tombée de 55 % en 2002 à 34 % après Solfur[9]. La plainte est classée sans suite en 2008[12].

En parallèle, Sophie Boegner sollicite en octobre 2010 l’appui de Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances de l’Assemblée nationale, qui presse l’État de porter plainte pour fraude fiscale contre les dirigeants de Wendel[13]. En juin 2012, Bercy porte plainte pour fraude fiscale contre Ernest-Antoine Seillière, conduisant à sa mise en examen dans le cadre d'une instruction judiciaire pour fraude fiscale en 2012[14],[15],[16],[17],[18].

Il est également poursuivi par Christine Dutreil, ex-directrice de sa communication et épouse de Renaud Dutreil, qui lui réclame 3,9 millions d'euros pour avoir été, selon elle, ruinée dans un plan d'investissement (Christine Dutreil retire sa plainte en 2014[réf. nécessaire]). Arnaud Desclèves, ancien directeur juridique du groupe, dépose également plainte contre lui pour délit d'initié[8].

Le , le parquet national financier requiert le renvoi de Seillière en correctionnelle pour fraude fiscale. Selon les enquêteurs, le programme d'intéressement ayant donné lieu à l'attribution de 315 millions d’euros d’actions, pour un investissement de 996 000 euros, à Seillière, Lafonta et treize autres dirigeants de Wendel, a eu pour objet de soustraire plusieurs dizaines de millions d’euros à l’impôt[19]. En , le parquet national financier et les juges d'instruction renvoient en procès pour fraude fiscale les quinze dirigeants et cadres de Wendel[20].

En septembre 2021, la banque JP Morgan Chase, qui a traité le montage Solfur, et bien qu'elle n'en ait pas elle-même tiré un avantage fiscal, accepte de payer 25 millions d'euros en signant une convention judiciaire d’intérêt public avec le parquet national financier, pour éviter un procès en complicité de fraude fiscale. Le procès des dirigeants de Wendel mis en cause est prévu pour janvier-février 2022[21].

Il est condamné en avril 2022 à trois ans de prison avec sursis et 37 500 euros d’amende[22].

Président du MEDEF[modifier | modifier le code]

Ernest-Antoine Seillière prend ensuite des responsabilités au sein du monde patronal. Vice-président du Conseil national du patronat français (CNPF) et membre du Conseil exécutif de l'organisation patronale de 1988 à 1997, Ernest-Antoine Seillière en préside également la commission économique de 1988 à 1994.

Le 13 octobre 1997, le président du CNPF Jean Gandois annonce sa démission de la direction de l'organisation patronale. Il estime avoir été « berné » par le gouvernement en raison de l'annonce par celui-ci de la réforme des 35 heures, auquel il est lui-même opposé. Il appelle « un patron de combat » à lui succéder pour mener la fronde contre le gouvernement[23]. Ernest-Antoine Seillière lui succède en décembre 1997 après avoir fait campagne pour son élection sur l'opposition à la réforme et recueilli 82 % des suffrages[24],[25].

À la tête de l'organisation patronale, Ernest-Antoine Seillière affiche une position intransigeante vis-à-vis du gouvernement[26],[8]. En mars 1998, il demande au Premier Ministre Lionel Jospin un délai pour appliquer la réforme jusqu'en 2002[27].

C'est sous sa direction que le syndicat patronal, qu'il anime alors avec Denis Kessler, change de nom pour devenir le Mouvement des entreprises de France (Medef) le . Il se retire après en avoir assuré la présidence durant sept années. Laurence Parisot lui succède le .

De 2005 à 2009, Ernest-Antoine Seillière a été président de l'Union des confédérations des industries et des employeurs d'Europe (UNICE)[28] (rebaptisée « BusinessEurope » en janvier 2007), la fédération des entreprises européennes, basée à Bruxelles.

Autres[modifier | modifier le code]

Ernest-Antoine Seillière fut membre du comité de direction du groupe Bilderberg[29]. Il est membre du club « Le Siècle ».

Décorations[modifier | modifier le code]

Publications[modifier | modifier le code]

En 2012, Ernest-Antoine Seillière a publié ses mémoires dans un livre qui porte le titre d'une chanson écrite par Boris Vian : On n'est pas là pour se faire engueuler[31]. Il y défend la thèse qu'il n'y a pas d'alternative au capitalisme et que l'avenir de la France passe par l'Europe et la mondialisation[32].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Sans toutefois avoir bénéficié d'une autorisation de port de ce titre étranger en France, dans les actes publics, par décret du président de la République — accordée de manière rarissime et pour la dernière fois, en 1961, par le général de Gaulle (Qu'est-ce que la noblesse ?, Alain Texier, Paris, éditions Tallandier, 1988, p. 217).
  2. Albert Réverend, Jean Tulard, Titres, anoblissements et pairies de la Restauration, 1814-1830, Volumes 5 à 6, 1974
  3. Raymond Dartevelle (dir.), 1999, La Banque Seillière-Demachy - Une dynastie familiale au centre du négoce, de la finance et des arts, 1798-1998, Librairie académique Perrin, Collection broché, 239 p. (ISBN 2262015201).
  4. isgn.fr, Institution Saint-Georges pour la noblesse.
  5. a et b [PDF] medef.fr.
  6. « Ernest-Antoine Seillière, le patron qui tranche », sur le site internet de L'Express.
  7. Présentation d'Ernest-Antoine Seillière, sur le site zonebourse.com.
  8. a b c et d Patrice Lestrohan, « L'homme qui en voulait trop », Vanity Fair n°4, octobre 2013, pages 168-175.
  9. a et b « Acrobaties financières et histoires de famille », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  10. François Vidal, « Wendel : Sophie Boegner porte le différend familial devant la justice », Les Echos,‎ (lire en ligne)
  11. Anne-Laure Julien, « Le conflit familial chez Wendel s'envenime », Le Figaro,‎ (lire en ligne)
  12. « Affaire Wendel : la plaintede Sophie Boegner classée », Challenges,‎ (lire en ligne)
  13. Libie Cousteau et Benjamin Masse-Stamberger, « L'étau judiciaire se resserre sur le baron Seillière », Challenges,‎ (lire en ligne)
  14. Yann Philippin, « Fraude fiscale: la justice met à nu le système Wendel », publié par le site Mediapart le 28 juillet 2015.
  15. Gérard Davet et Fabrice Lhomme, « Affaire Wendel : perquisitions au siège de Wendel et au domicile d'Ernest-Antoine Seillière », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  16. « Perquisitions chez Wendel et chez Ernest-Antoine Seillière », Libération,‎ (lire en ligne).
  17. Le Parisien, « Fraude fiscale : perquisition au siège de Wendel et chez Seillière », Le Parisien,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  18. http://www.leparisien.fr/economie/fraude-fiscale-le-baron-seilliere-dans-la-tourmente-30-09-2012-2190955.php ; Vanity Fair, no 4, octobre 2013, http://www.vanityfair.fr/actualites/france/articles/l-enquete-le-baron-ernest-antoine-seilliere/14119.
  19. « Fraude fiscale : poursuites contre Ernest-Antoine Seillière et JP Morgan Chase ? », Le Monde, 12 novembre 2015.
  20. « Affaire Wendel : Ernest-Antoine Seillière sera jugé avec d’autres cadres de la société pour fraude fiscale », sur lci.fr,
  21. « Fraude fiscale : JPMorgan Chase accepte de payer 25 millions d’euros d’amende pour mettre fin aux poursuites », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  22. « Procès Wendel: l’ex-président du Medef Ernest-Antoine Seillière condamné à 3 ans de prison avec sursis », sur Mediapart,
  23. « 10 octobre 1997, le jour où le CNPF a été « berné » ! », La Tribune,‎ (lire en ligne)
  24. Gérard Adam, « Les trois raisons de l'opposition du CNPF aux 35 heures », La Croix,‎ (lire en ligne)
  25. Christophe Forcari, « Devine qui prend la tête du CNPF? Sans surprise, Seillière devient patron des patrons. », Libération,‎ (lire en ligne)
  26. « 35 heures : Seillière demande un sursis », La Dépêche du Midi,‎ (lire en ligne)
  27. « 35 heures : Seillière demande à Jospin un délai jusqu'en 2002 », Les Echos,‎ (lire en ligne)
  28. Parcours d'Antoine Seillière, sur le site du cercle des Européens.
  29. « bilderbergmeetings.org/former-… »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?).
  30. « Légion d'honneur : la promotion du Nouvel An », sur LEFIGARO, (consulté le )
  31. Sophie Coignard et Romain Gubert, « Le baron Seillière et ses cadres face aux juges », Le Point, (consulté le ).
  32. « Seillière : "il n'y a pas d'alternative au capitalisme" » [vidéo], sur Challenges, (consulté le ).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Jean Bothorel, Ernest-Antoine Seillière : le baron de la République. avec la coll. de Philippe Sassier, Robert Laffont, 2001.
  • Michel J. Cuny, Françoise Petitdemange, Christine Cuny, Ernest-Antoine Seillière - Quand le capitalisme français dit son nom, Éditions Paroles Vives, 2002, 478 pages.
  • Jean Magniadas, Un héritier du capitalisme dynastique, Ernest-Antoine Seillière, Montreuil : VO éd. , 2002.

Liens externes[modifier | modifier le code]

Emmanuelle Dancourt, « Visages inattendus de personnalités »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?) [vidéo], sur KTO TV, .