Utilisateur:Leonard Fibonacci/Épaphrodite (affranchi)

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Inscription funéraire pour Épaphrodite (Musée national romain, section Epigrafico, Rome) ;
La femme d'Épaphrodite s'appelait Flaviae Prisca Prisca la Romaine ?

Épaphrodite (Tiberius Claudius Epaphroditus) (né v. 20/25, mort en 95/96) est un affranchi et secrétaire impérial qui servit sous les règnes des empereurs Néron, Vespasien, Titus et Domitien. Il est célèbre pour avoir aidé Néron à se donner la mort en lui enfonçant une épée dans la gorge. Il est exécuté sur ordre de Domitien fin 95 - début 96, pendant ce qu'il est convenu d'appeler la persécution de Domitien, bien qu'il ne s'agisse pas d'une persécution religieuse. Cette suite d'exécutions parmi les plus hauts personnages de l'Empire, entraînent l'assassinat de Domitien.

Il y a débat pour savoir si c'est à lui que Flavius Josèphe dédie ses livres et si c'est le même que l'Épaphrodite cité par Paul de Tarse dans l'Épître aux Philippiens.

Son nom[modifier | modifier le code]

Son nom provient du grecque Ἐπαφρόδιτος et signifie « favori d'Aphrodite », formé du préfixe grec « EP » qui veut dire « pour » combiné avec le nom de la déesse Aphrodite[1]. Les Romains ont souvent donné à des esclaves d'origine grecque des noms illustres de la mythologie et de la culture grecques, par exemple Narcisse, l'affranchi de Claude, Polyclitus, l'affranchi de Néron et Caenis l'affranchie d'Antonia Mineure.

Sa vie[modifier | modifier le code]

Épaphrodite est secrétaire a libellis de Néron. Ce qui signifie qu'il rédigeait les réponses de l'empereur aux requêtes qui lui étaient faites. Il est mentionné comme un appariteur Césarum. Il était donc une sorte de serviteur de la famille impériale, mais ses fonctions ne sont pas mentionnées précisément. En tant que viator tribunicius, il a dû servir quelqu'un avec les pouvoirs d'un tribun, et cela ne peut être que l'empereur[2].

En 65, Épaphrodite a appris qu'un groupe dirigé par le sénateur Pison organisait une conspiration. Les conjurés avaient convenu de poignarder Néron le 19 avril lorsqu’il se rendrait au Circus Maximus pour les jeux de Cérès, tandis que Pison serait présenté au camp des prétoriens par Faenius Rufus[3]. Épaphrodite l'a immédiatement rapporté à l'empereur et Pison et les autres ont été arrêtés. Après l'exécution des conspirateurs, Épaphrodite reçut les honneurs militaires. C'était désormais un homme riche qui possédait de grands jardins sur l'Esquilin, à l'est de la Domus Aurea («Maison d'Or»), que Néron avait commencé à construire après le Grand incendie de Rome en 64[2].

Au cours de la conspiration qui met un terme à la dynastie des Julio-Claudiens, Épaphrodite accompagne Néron dans sa fuite. Lorsque l'empereur apprend que les armées du vieux Galba le cherchent pour l'exposer au triomphe de ce dernier et ensuite l'exécuter publiquement par fustigation, il tente de se suicider ; manquant de courage, il demande l'aide de son affranchi, qui l'aide à enfoncer son couteau dans sa gorge[4] (9 juin 68).

Galba et ses deux éphémères successeurs le laissent en vie, se contentant de lui interdire l'Italie. Mais Vespasien le rappelle en 71, lui confiant diverses tâches, jusqu'à le nommer pour la deuxième fois secrétaire personnel de l'empereur. Titus fait le même choix à son arrivée au pouvoir en 79, ainsi que Domitien deux ans plus tard.

Mais vers la mi 95 éclate ce qu'on appelle traditionnellement la persécution de Domitien, bien que les historiens contestent que ce soit une persécution religieuse. Dion Cassius raconte que Domitien fait exécuter Titus Flavius Clemens[5] après son consulat[6] qui s'est terminé le 1er mai 95[7], puis Manius Acilius Glabrio, après que plusieurs autres aient aussi été condamnés à mort ou à la saisie de leurs biens à cause de leurs pratiques juives et sous l'accusation d'athéisme[8]. Enfin Épaphrodite semble exécuté pour les même motifs que les précédents, mais Dion Cassius ajoute ce qui semble être un prétexte que Suétone présente ainsi : « Quand Domitien se souvint que son secrétaire Épaphrodite avait aidé Néron à se suicider, il le fit tout de suite exécuter afin qu'il n'en prenne pas l'habitude[9],[10]. » Les exécutions se poursuivent ainsi, jusqu'à ce qu'une coalition entre le milieu judéo-chrétien de Rome et le milieu traditionaliste sénatorial se forme pour éliminer Domitien afin de faire cesser ce qui leur apparaît comme une folie meurtrière[11],[5] (18 septembre 96).

Épaphrodite eut comme esclave Épictète et le maltraita[12]. Toutefois, Épictète a été affranchi et au début du IIe siècle il est riche. Il est donc probable qu'Épaphrodite l'avait affranchi par une disposition de son testament et qu'il l'avait doté d'une partie de sa fortune, comme cela se faisait souvent pour les esclaves domestiques ayant bien servi leur maître.

Identifications en débat[modifier | modifier le code]

Éventuel patron littéraire de Flavius Josèphe[modifier | modifier le code]

Pour une part importante de la critique historique, Épaphrodite est le patron littéraire désigné par Flavius Josèphe (Contre Apion 1, 1 ; 2, 278) auquel il dédie ses Antiquités judaïques (I, 8-9), ce qu'il rappelle en conclusion de son Autobiographie (430)[13],[14]. Au début de ses Antiquités judaïques, publiée en 92/93, il le décrit comme un homme qui a été mêlé « à de grands événements et à des fortunes très diverses, au milieu desquels il a toujours fait preuve d'une merveilleuse force de caractère[15]. » La carrière d'Épaphrodite correspond au langage de la description de Josèphe dans les Antiquités (I, 8-9)[16],[17]. L'ancien secrétaire des pétitions de Néron (a libellis) qui a contribué à révéler la conspiration de Pison et qui a ensuite aidé l'empereur à mettre fin à ses jours dans des circonstances dramatiques[18], a effectivement été « associé à de grands événements »[13],[17]. Celui qui après avoir été esclave, a été secrétaire de Néron après avoir été affranchi, est ainsi devenu très riche, puis a été banni par Galba à cause de ce que certains ont considéré comme le meurtre d'un empereur et qui est redevenu secrétaire impérial sous Vespasien a connu « des vicissitudes diverses »[16]. Dans son Contre Apion, Josèphe l'appelle « très puissant Épaphrodite[19] », ce qui correspond bien à quelqu'un de très riche, qui a été secrétaire de quatre empereurs, et qui au moment où Josèphe publie ce livre (93/94[13]) est encore le secrétaire de Domitien. Combien d'hommes appelés Épaphrodite ont eu un tel contact avec ce que Josèphe appelle « de grands événements »[13] ?

Dion Cassius raconte qu'Épaphrodite a été exécuté car Domitien lui reprochait « de ne pas avoir secouru Néron[20] » afin de dissuader par cet exemple ses autres affranchis « de ne rien oser de semblable[20]. » Mais il indique préalablement qu'il s'était mis à soupçonner tout le monde et en particulier ses affranchis pour les mêmes motifs que ceux pour lesquels il avait mis à mort Titus Flavius Clemens et Acilius Glabrio, ce qui dans un premier temps avait valu à Épaphrodite d'être banni. Comme aux autres, il lui était donc aussi reproché un forme d'athéisme[21] qui avait fait « condamner aussi plusieurs citoyens, coupables d'avoir embrassé la religion des juifs[20]. » Josèphe indique qu'Épaphrodite était curieux de l'histoire antique des Juifs et que c'est pour cela qu'il l'avait pressé d'écrire ses Antiquités[22]. Ce qui là encore correspond bien à l'attitude de quelqu'un qui a « embrassé la religion des juifs[20]. » Les commanditaires de Josèphe, notamment pour l'écriture de la Guerre des Juifs, sont Vespasien et Titus. Bien que la « Guerre des Juifs » ne mentionne pas Épaphrodite, il serait logique qu'un secrétaire particulier de ces empereurs s'intéressant à ces questions et patronnant ses autres œuvres, ait déjà été impliqué anonymement dans l'écriture de ces premiers livres[13].

Toutefois, cette identification est contestée par ceux qui suivent l'évêque Photios de Constantinople (IXe siècle) et place la mort d'Agrippa (II) comme ayant eu lieu « la troisième année du règne de Trajan (100)[23]. » L'Autobiographie de Josèphe, dans laquelle il dédie à nouveau les Antiquités judaïques à Épaphrodite, a en effet été publiée pour récuser les révélations de Justus de Tibériade[23] qui a attendu la mort d'Agrippa pour publier son livre sur « l'Histoire de la guerre juive »[24]. Mais pour les tenants de l'identification du patron littéraire de Josèphe avec l'ancien secrétaire de Néron, Photios se trompe et il n'est même pas sûr qu'il connaisse la date du début du règne de Trajan[23]. Ils préfèrent s'en tenir aux inscriptions épigraphiques qui montrent qu'Agrippa n'était plus le dirigeant de son royaume, au plus tard en 96[25],[26],[27] et donc qu'il était probablement mort avant la réalisation de ces inscriptions[28], peut-être en 92-94[29], juste avant la publication de la première édition des Antiquités judaïques par Flavius Josèphe[24]. De plus, pour eux si Josèphe avait écrit sous Trajan il aurait été inconcevable qu'il rende un hommage appuyé à Domitien à la fin de son texte sans dire un seul mot en faveur de l'empereur au pouvoir. D'autant qu'après l'assassinat de Domitien, celui-ci a été considéré comme un tyran et qu'une damnatio memoriae a été prononcée contre lui[30],[31],[Note 1],[Note 2],[Note 3]. (Voir à ce sujet Date de la mort d'Agrippa.)

Épaphrodite de l'épître aux Philippiens[modifier | modifier le code]

Bien que cela soit contesté, il pourrait-être aussi celui à qui Paul de Tarse fait référence dans son Épître aux Philippiens[5] comme « mon frère Épaphrodite, mon compagnon d'œuvre et de combat, par qui vous m'avez fait parvenir de quoi pourvoir à mes besoins[32] » et qui semble appartenir à « la maison de César[33] »[34] (Ph 2, 25 et 4, 18)[35]. La mort d'Epaphrodite a lieu, alors que depuis la mi 95, Domitien fait exécuter plusieurs de ses proches ainsi que des membres de sa famille pour des motifs qui semblent être l'appartenance au mouvement créé par Jésus. Il est tué en 95/96, après l'exécution de Titus Flavius Clemens[5], qui a lieu dès la fin de son consulat[36], qui s'est terminé le 1er mai 95[7]. Flavius Clemens est un saint chrétien qui figure au Vetus Martyrologium Romanum à la date du 22 juin et dont la sépulture se trouve dans la Basilique du Latran[37]. Au même moment, Domitien exile la femme de ce consul, Flavia Domitilla[38],[39], et peut-être aussi sa nièce[5] Flavia Domitilla, la fille de Plautilla dont l'une des deux est vénérée comme sainte du Christianisme[40],[41]. La femme de Flavius Clemens a aussi donné son nom aux catacombes chrétiennes de Domitilla[42]. Selon Dion Cassius, après cela Domitien fait aussi mourir Acilius Glabrio et d'autres « coupables aux mêmes titres que la plupart des accusés d'alors[43]. » Plusieurs descendants directs d'Acilius Glabrio semblent être des chrétiens[Note 4], il est donc tout à fait vraisemblable comme l'indique Dion Cassius, qu'il ait appartenu au même mouvement religieux que Titus Flavius Clemens et les deux Flavia Domitilla. Chez Dion Cassius, Épaphrodite termine cette vague d'exécutions, après que dans un premier temps Domitien l'ait banni[43]. Mais les sources chrétiennes parlent aussi de la condamnation à mort de l'apôtre Jean de Zébédée qui semble avoir été commuée en une peine d'exil sur l'île de Patmos. D'autres, comme Nérée et Achillée sont aussi exécutés dans cette période, même si le motif de leur exécution a été légendé[44]. Leur sépulture se trouvait justement dans cette catacombe de Domitilla, appartenant à des membres de la famille flavienne[45]. Philostrate d'Athènes indique que la dernière exécution avant l'assassinat de l'empereur est celle d'un Clémens de rang consulaire « auquel pourtant [Domitien] avait donné sa soeur en mariage[46]. » Il s'agit vraisemblablement du « consul Clemens » frère (ou demi-frère) du père de l'évêque Clément de Rome dans certaines sources chrétiennes. Ce Clément marié avec une sœur de Domitien — et donc avec une « sœur de Titus » — pourrait être Kalonymus qui est mentionné dans le Talmud. De même que le consul Kalonymus est exécuté juste avant l'assassinat de Domitien, le Clemens dont parle Philostrate est exécuté juste avant que Domitien soit assassiné par Étienne qu'il avait affranchi[47] et qui est l'intendant de Domitilla[5],[Note 5]. Selon le Talmud de Babylone, Kalonymus est le père d'Onquelos dont la mère est une « sœur de Titus »[48],[49]. Kalonymus est probablement une déformation du nom "Clément"[50] et Onqelos est une déformation du nom "Aquila" alors que « Onqelos fils de Kalonymus » est très probablement Aquila de Sinope comme l'indique des passages parallèles du Talmud de Jérusalem[51] (Meguila 1, 11 et Kiddushin 1, 1[52],[53]). C'est d'ailleurs ce qu'a retenu la tradition juive. Aquila de Sinope est un judéo-chrétien traducteur de la Bible en grec qui a été excommunié, vers 135 - 150 par la tendance qui donnera naissance à la Grande Église[53]. Cette appartenance au mouvement créé par Jésus et le fait qu'il était marié à une proche parente de l'empereur Hadrien[53],[54],[Note 6] sont tout à fait cohérents avec le fait qu'il soit le fils d'une « sœur de Titus » avec un personnage de rang consulaire exécuté lors de ce qu'il est convenu d'appeler la « persécution de Domitien ».

La plus importante conséquence de cette vague répressive et de cette suite d’exécutions de très hauts personnages de l'Empire est la formation d'une coalition entre le milieu judéo-chrétien de Rome et le milieu traditionaliste sénatorial pour éliminer Domitien (le 18 septembre 96) afin de faire cesser ce qui leur apparaît comme une folie meurtrière[11]. Ainsi Étienne, le principal meurtrier de Domitien, est un intendant (procurator) de Domitilla[11],[5],[Note 5] et Philostrate d'Athènes indique qu'il avait été affranchi par Clemens[46]/Kalonimus. Tant Suétone que Philostrate d'Athènes disent que l'exécution de Clemens a accéléré la mise à mort de Domitien[55]. L'évêque Clément de Rome a ensuite été contraint à l'exil dans le Cherson (Crimée)[56] après cet assassinat. Il sera exécuté au début du règne de Trajan[56],[57] (98 - 117), tout comme Flavia Domitilla dont Nérée et Achillée étaient les chambellans ou les gardes cubiculaires et dont vraisemblablement Étienne était l'intendant[5].

Dans ces conditions, certains critiques estiment qu'il est vraisemblable qu'Épaphrodite ait été membre du mouvement créé par Jésus — qui ne s'appelait pas encore "mouvement chrétien"[Note 7] et n'était pas encore séparé du judaïsme. Certains, comme Robert Eisenman, estiment que c'est probablement le même que l'Épaphrodite cité par Paul de Tarse dans l'Épître aux Philippiens[5]. Un personnage suffisamment puissant et influent à Rome pour pouvoir accéder à un prisonnier impérial juif passible de la peine de mort et enfermé dans la terrible prison Marmertine (le Tullianum) en 67/68, dans une période particulièrement tendue puisqu'à peine trois ans auparavant des dizaines de "Chrétiens" accusés d'avoir incendié Rome avaient été exécutés et que depuis un an les messianistes juifs de Palestine avaient déclenché une révolte ouverte qui avait chassé les Romains de Judée et de Galilée, tout en créant des mouvements insurrectionnels dans la province romaine de Syrie et en Égypte[Note 8].

Cette identification du secrétaire de Domitien avec celui qui est mentionné dans l'Épître aux Philippiens est naturellement contestée[58].

Épaphrodite de Chéronée[modifier | modifier le code]

Certains critiques estiment que c'est le même que celui qui est connu presque exclusivement par quelques fragments de ses écrits qui ont survécu et qui sont des commentaires d'Homère[59], d'Hésiode ou de Callimachus[60]. Une brève mention dans la Souda, une encyclopédie byzantine du Xe siècle, l'appelle Épaphrodite de Chéronée[61],[62]. Ce grammairien était florissant depuis le règne de Néron jusqu'à Nerva[61],[62], ce qui correspond à la période du secrétaire de Néron dont l'activité se termine brutalement environ un an avant l'arrivée au pouvoir de Nerva, sachant que ce dernier régnera moins de deux ans. Tout comme le secrétaire de plusieurs empereurs, cet Épaphrodite était très riche puisqu'il possédait 30 000 volumes dans sa bibliothèque personnelle et qu'il utilisait deux de ses maisons de Rome pour les entreposer[61].

Certains critiques qui le distingue de l'ancien secrétaire de Néron estiment que c'est à lui que Flavius Josèphe dédie ses livres[63]. Toutefois, il est possible que ces deux figures appartiennent au même personnage historique. Depuis plus de deux siècles, Épaphrodite de Chéronée est identifié à Mettius Épaphroditus dont le nom figure sur le socle d'une statue découvert alors, sur lequel est indiqué qu'il était « grammairien ». Toutefois, la Souda indique qu'Épaphrodite de Chéronée a été affranchi par un préfet d'Égypte appelé « Modestus ». Or, il a récemment été montré qu'aucun préfet d'Égypte ne s'est appelé Mettius Modestus[64],[65], de même qu'on ne le trouve pas dans les fasti de la province d'Égypte (Bastianini 1988, p. 505)[65]. En revanche le seul préfet d'Égypte portant le nom de "Modestus" est Tiberius Claudius Balbillus Modestus qui a été préfet d'Égypte[66] de 54 à 59(Faux)[Note 9]. Il pourrait être l'Epaphrodite affranchi de Tiberius Claudius Felix qui a été préfet d'Egypte sous Néron jusqu'à son remplacement par Tiberius Claudius Balbilus vers 55[67]. Un de ses affranchis s'appelait Epaphrodite qui suivant les indications de la Souda pourrait être Epaphrodite de Chéronée. Il n'est connu que grâce à des papyrus documentaires retrouvés en Egypte. Cela correspondrait parfaitement au tria nomina du secrétaire de Néron qui s'appelle Tiberius Claudius Epaphroditus, l'usage étant que l'affranchi prenait le praenomen et le nomen de son maître et y accolait son nom comme cognomen[68].

Conclusions

Après avoir été préfet d'Egypte, il est tout à fait possible que Tiberius Claudius Felix ait succédé à Tiberius Claudius Balbilus comme procurateur de Judée. Si c'est bien le cas et qu'Epaphodite était son affranchi, on comprend pourquoi Flavius Josèphe l'escamote en le faisant disparaître sous l'identité du frère de Pallas qui lui s'appelait Antonius Felix et pas Claudius Felix. C'est lui qui aurait été procurateur de Judée au moment de l'inhumation de la reine Hélène d'Adiabène et c'est donc lui qui aurait autorisé Jésus/Îsâ à venir à Jérusalem pour assister à ces obsèques avec tous les apôtres et les frères de Jésus. Cette autorisation se serait terminé brutalement au bout de moins de 3 moins et Jésus serait alors reparti dans la clandestinité.

Un classement des lettres de Paul[modifier | modifier le code]

Épîtres proto-pauliniennes (considérées comme "authentiques")[modifier | modifier le code]

Épîtres deutéro-pauliniennes[modifier | modifier le code]

Épîtres trito-pauliniennes[modifier | modifier le code]

Les auteurs de TOB n'émettent aucun argument qui soutiennent le caractère non-authentique de ces 3 lettres.

La Deuxième épître à Timothée "paraît être la dernière des épîtres pastorales" (cf. TOB). « Paul y écrit en effet "J'ai achevé ma course" (4.7). » Elle se place donc juste avant sa mort. L'épître est rédigée à Rome (1.17) au cours d'une captivité où Paul est "enchaîné comme un malfaiteur" (2.9). Luc demeure auprès de lui (4.11).

Ces 3 épîtres « utilisent le même vocabulaire et traitent des mêmes sujets [...] Elles doivent donc être sensiblement de la même époque (TOB p. 1758) »

Une autre classification[modifier | modifier le code]

Lettres eschatologiques[modifier | modifier le code]

Paul remettant une lettre à un messager, miniature anonyme v. 1280, Getty Center.

Elles présentent l'espérance chrétienne et l'attente du retour glorieux du Christ qui marquent les premières communautés chrétiennes[69].

Lettres communautaires[modifier | modifier le code]

Ces lettres traitent de l'actualité du salut et de la vie des communautés.

Lettres de captivité[modifier | modifier le code]

Les lettres dites « de captivité » ont été écrites par Paul durant sa captivité à Césarée puis à Rome entre 58 et 63[70] ou lors de sa seconde captivité après avoir été arrêté en Asie et emmené à Rome (67-68) pour finalement y être exécuté.

Seconde captivité à Rome

Lettres pastorales[modifier | modifier le code]

Les lettres dites « pastorales » traitent de l'organisation des communautés. Elles sont les témoins de la transmission apostolique qui a donné naissance aux évêques, qui sont considérés dans les églises catholique et orthodoxes comme les successeurs des apôtres. L'attribution de certaines de ces lettres est contestée, particulièrement Tite et Tim 2[70].

Michel Leturmy, après avoir rappelé que la tradition unanime remontant au moins à la seconde moitié du second siècle avait toujours attribué les épitres pastorales à Paul, a indiqué que, depuis le début du XIXe siècle, cette attribution est de plus en plus contestée, et ce, pour les raisons suivantes : en premier lieu, les épitres pastorales font état d'hérésies et supposent une hiérarchie qui n'existerait qu'au IIe siècle. En second lieu, leur style et leur vocabulaire nouveau pour près d'un tiers sont étrangers à ceux de Paul. En troisième lieu, une morale du juste milieu aurait pris la place des grandes vues théologiques des épitres attribuées surement à Paul.[71]. Toutefois, cette appréciation est contestée par nombre de critiques (Eisenman, Mimouni, les auteurs de la TOB (p. 1758), tandis que d'autres botte en touche en disant que de toutes façons les données historiques qui y sont contenues doivent être exactes, sinon ellles auraient été récusées dès le premier ou le de début du deuxième siècle (M.-F. Baslez).

Selon les auteurs de la TOB, « La première épître à Timothée et l'épître à Tite utilisent le même vocabulaire et traitent des mêmes sujets que la seconde lettre à Timothée. Elles doivent donc être sensiblement de la même époque (p. 1758). »

Epaphrodite a-t-il colligé les lettres de Paul ?[modifier | modifier le code]

Certaines lettres de Paul ont une portée suffisament générale pour qu'il soit logique pour qu'on les retrouve dans la collection que publiera Marcion vers 140. Il est en effet tout à fait possible qu'en l'absence d'écrits "chrétiens" autorisés par le pouvoir impérial, ces lettres aient été recopiées et diffusées d'une communauté à une autre. Mais ce n'est pas le cas de toutes les lettres, parmi celle-là : la lettre à Tite, la lettres aux Philippiens et la lettre à Philémon peuvent attirer notre attention.

Épître à Tite[modifier | modifier le code]

Paul invite Tite à le rejoindre à Nicopolis où il a décidé de passer l'hiver. Cela correspond parfaitement à l'endroit où pouvait se trouver Saul/Paul, le frère de Costobar, après avoir fait son rapport à Néron. Si la demeure que Paul a utilisé à Nicopolis est bien celle qu'Epaphrodite a mis à sa disposition, il est logique que ce dernier se soit trouvé possesseur d'une copie de cette lettre.

Épître aux Philippiens[modifier | modifier le code]

Paul confie cette épître à Epaphrodite pour qu'il l'a porte aux Philippiens car après qu'il ait répondu à leur demande d'aider Paul en prison dans le Tullianum à Rome « il désire connaître » ceux qui l'ont contacté.

Épître à Philémon[modifier | modifier le code]

Lorsqu'il écrit cette courte lettre Paul est « prisonnier de Jésus-Christ ». Il y a de nombreux éléments qui montrent qu'il est alors prisonnier à Rome lors de sa deuxième incarcération. La lettre comporte en entête qu'il écrit avec Thimotée. Or l'entête de l'épître aux Philippiens indique aussi que ceux qui écrivent sont « Paul et Thimotée, serviteurs de Jésus-Christ ». Pour la première fois dans une de ses lettres paul se considère comme « un vieillard » ce qui plaide naturellement pour qu'il s'agisse de sa seconde incarcération. Enfin, il indique que « Epaphas est [son] compagnon de captivité ». Si et Epaphras est bien Epaphrodite de l’Épître aux Philippiens, cela fait 4 éléments qui convergent pour montrer qu'il s'agit bien du deuxième emprisonnement.

Reliquat[modifier | modifier le code]

Robert Eisenman propose d'identifier l'apôtre Paul de Tarse, dont le nom juif est Saul, avec Saul, le frère de Costobar, tous deux fils d'Antipater, lui même fils de la soeur d'Hérode le Grand appelée Salomé avec Costobar[72]. Saul/Paul serait revenu en Judée après avoir été libéré à Rome vers 61/62 après sa première arrestation. Il y aurait repris une activité similaire à celle qu'il avait avant de bénéficier d'une apparition de Jésus. Les deux frères Saul et Costobar dirigent en effet un des services de police du Temple vers 65 à Jérusalem. Lors du déclenchement de la Grande révolte juive, Saul s'oppose à son déclenchement en 66. Il se rend auprès du gouverneur de Syrie qui l'envoie avec d'autres expliquer la situation à Néron qui se trouve alors en Achaïe. Cela est tout à fait compatible avec ce que nous savons de Saul/Paul, notamment grâce à l'Épître à Tite, qui nous apprend qu'il a passé l'hiver 66/67 à Nicopolis d'Épire.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (en) Shaye J. D. Cohen, Josephus in Galilee and Rome, Brill, , 277 p. (ISBN 0-391-04158-4). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Thérèse Frankfort, La date de l'Autobiographie de Flavius Josèphe et des œuvres de Justus de Tibériade, Revue belge de Philologie et d'Histoire, Bruxelles, Société pour le Progrès des Études Philologiques et Historiques, coll. « Antiquité - Houdeid » (no 39), (ISSN 2295-9068, lire en ligne), p. 52-58. Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Lucrețiu Mihăilescu-Bîrliba, Les affranchis dans les provinces romaines de l'Illyricum, Wiesbaden, Harrassowitz Verlag, , 373 p. (ISBN 978-3-447-05380-8, lire en ligne). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Paul Veyne, Vie de Trimalcion, Annales. Economies, Sociétés, Civilisations, Paris, Édition de l'EHESS (no 16), (ISSN 0395-2649, lire en ligne), p. 213-247. Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • (en) Robert Eisenman, James the Brother of Jesus And The Dead Sea Scrolls, The Historical James, Paul as the Enemy, and Jesus' Brothers as Apostles, Vol. I, GDP, , 411 p. (ISBN 9780985599133). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • (en) Robert Eisenman, James the Brother of Jesus And The Dead Sea Scrolls, The Damascus Code, the Tent of David, the New Convenant, and the Blood of Christ, Vol. II, GDP, , 443 p. (ISBN 9780985599164). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • (en) Robert Eisenman, The New Testament Code : The Cup of the Lord, the Damascus Covenant, and the Blood of Christ, Grave Distractions Publications, , 800 p. (présentation en ligne). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • (en) Flavius Josèphe et Steve Mason (dir.) (trad. du grec ancien par Louis H. Feldman), Life of Josephus : Translation and Commentary, vol. 9, Leiden, Boston, Köln, Brill, , 293 p. (ISBN 90-04-11793-8, présentation en ligne). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Philippe Pergola, La condamnation des Flaviens chrétiens sous Domitien : Persécution religieuse ou répression à caractère politique ?, Mélanges de l'école française de Rome, Paris, École Française de Rome, coll. « archéologie, études classiques » (no 90), (lire en ligne), p. 407-423. Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • (en) Brian Jones, The Emperor Domitian, Londres et New-York, Routledge, (ISBN 0-415-10195-6, présentation en ligne). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • (en) Jack Pastor, Pnina Stern et Menahem Mor, Flavius Josephus, Leiden, Brill, , 438 p. (ISBN 978-90-04-19126-6, présentation en ligne). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • (en) Seth Schwartz, Josephus and Judaean Politics, Leiden - New-York - Köln, E. J. Brill, , 263 p. (ISBN 9004092307, présentation en ligne). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • (en) Lester L. Grabbe, Judaïsm from Cyrus to Hadrian, Vol. II, Fortress Press, , 722 p. (ISBN 0-8006-2621-4). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Maurice Sartre, Bostra : des origines à l'Islam, Paris, Librairie Orientaliste Paul Geuthner, , 279 p. (présentation en ligne). Document utilisé pour la rédaction de l’article

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Steve Mason indique : « Comme l'ont déjà souligné Niese (1896: 226-27) et Luther (1910: 63), il est difficile de voir comment Josèphe aurait pu écrire cette note reconnaissante envers Domitien après la fin de son règne en 96. Josèphe semble avoir été parfaitement conscient des contraintes politiques de l'écriture de l'histoire: en témoigne son traitement de Vespasien et Titus dans la « Guerre des Juifs ». Mais ici, d'une part, il omet de mentionner les bienfaits d'un dirigeant ultérieur à Domitien - une faiblesse impensable s'il écrivait sous Nerva ou Trajan. D'un autre côté, il est difficile de voir comment il pouvait parler avec tendresse et innocence de Domitien après sa mort et sa damnatio memoriae (Josèphe et Mason 2001, note no 1770). »
  2. Dion Cassius raconte : « En haine du tyran, ses nombreuses statues d'argent et même d'or furent fondues, et l'on en retira des sommes énormes ; on renversa aussi les arcs de triomphes, élevés en trop grand nombre pour un seul homme. » Pour sa part Suétone raconte que le Sénat « s'assembla en foule, et déchira à l'envi la mémoire du prince mort par les plus amères et les plus outrageantes invectives. Il fit apporter des échelles pour détacher ses écussons et ses portraits, et les briser contre terre. Enfin il (le Sénat) décréta que ses inscriptions seraient effacées partout, et que sa mémoire serait abolie. »
  3. Steve Mason fait remarquer que tous les auteurs qui ont écrit après sa damnatio memoriae (Tacite, Suétone et Dion Cassius) « deviennent uniformément hostiles, représentant la totalité de son régime comme le règne de la terreur (Tacite, Agr. 2-3 ; Suétone, Domitien, 1.2, 3.2 et passim, Dion Cassius 67) ; cf. Josèphe et Mason 2001, note no 1770. »
  4. Par exemple Acilius Glabrio qui est consul en 124, fils ou petit-fils de celui qui est exécuté par Domitien, se marrie avec Cornelia Sev[era] Manliol[ia] petite-fille de Sergius Paulus (cf. Françoise Des Boscs-Plateaux, Un parti hispanique à Rome?: ascension des élites hispaniques et pouvoir, p. 545). Selon les Actes des Apôtres, Sergius Paulus a été converti par Paul de Tarse et Joseph dit Barnabas lors de leur passage à Chypre lorsque celui-ci en était gouverneur.
  5. a et b Suétone mentionne une Domitilla une seule fois, en identifiant Stephanus, le principal assassin de Domitien, comme « intendant de Domitilla » (Suétone, Vie de Domitien, chapitre XVII) ; « (1) Voici à peu près ce qu'on apprit de cette conjuration et du genre de sa mort. (2) Les conjurés ne sachant s'ils l'attaqueraient au bain ou à table, Stephanus, intendant de Domitilla, alors accusé de concussion, leur offrit ses conseils et sa coopération au complot. (3) Pour détourner les soupçons, il porta pendant quelques jours son bras gauche en écharpe, comme s'il eût été blessé, et, à l'instant marqué, il cacha un poignard dans les bandages de laine qui enveloppaient son bras. Il obtint audience de l'empereur en annonçant qu'il allait lui découvrir une conspiration; et, tandis que Domitien lisait avec effroi le billet qu'il lui avait remis, Stephanus lui perça le bas-ventre. (4) Le tyran blessé se débattait, lorsque Clodianus, corniculaire, Maximus, affranchi de Parthenius, et Satur, décurion des gardes de la chambre, secondés par quelques gladiateurs, fondirent sur lui et le tuèrent de sept coups de poignard. (5) Le jeune esclave chargé du culte des dieux Lares se trouvait là au moment du meurtre. Il racontait que, au premier coup qu'il reçut, l'empereur lui avait ordonné de lui apporter le poignard qui était sous son chevet et d'appeler ses serviteurs, mais qu'il ne trouva que le manche, et que toutes les portes étaient fermées; que cependant Domitien, ayant saisi Stephanus, l'avait terrassé et prolongé la lutte, en s'efforçant, quoiqu'il eût les doigts blessés, tantôt de lui enlever son arme, tantôt de lui arracher les yeux. (6) Il périt le quatorzième jour avant les calendes d'octobre, dans la quarante-cinquième année de son âge et la quinzième de son règne. (7) Son cadavre fut transporté sur un brancard par des fossoyeurs comme celui d'un homme du peuple. Sa nourrice Phyllis lui rendit les derniers devoirs dans sa villa sur la voie latine; puis elle porta secrètement ses restes dans le temple des Flavius, et les mêla aux cendres de Julie, fille de Titus, qu'elle avait aussi élevée. »
  6. Aquila de Sinope était probablement le beau-frère de l'empereur Hadrien. Il était le « frère selon la loi » d'Hadrien: (πενθερίδής Dialogue de Thimothée et Aquila 117; πενθερός selon le pseudo-Athanase dans le Chronicon Pascale. (cf. Épiphane de Salamine, Dialogue de Thimothée et d'Aquila, confirmé par le Chronicon Pascale du pseudo-Athanase et Marcos 2011 p. 111)
  7. Voir à ce sujet le § Le nom de Chrétien aux Ier et IIe siècles.
  8. Certains critiques dont Robert Eisenman proposent d'identifier l'apôtre Paul de Tarse, dont le nom juif est Saul, avec Saul, le frère de Costobar, tous deux fils d'Antipater, lui même fils de la soeur d'Hérode le Grand appelée Salomé avec Costobar (cf. Robert Eisenman, Paul as Herodian, JHC 3/1, printemps 1996, p. 110-122 ; (en) résumé en ligne). Saul/Paul serait revenu en Judée après avoir été libéré à Rome vers 61/62 après sa première arrestation. Il y aurait repris une activité similaire à celle qu'il avait avant de bénéficier d'une apparition de Jésus. Les deux frères Saul et Costobar dirigent en effet un des services de police du Temple vers 64 à Jérusalem. Lors du déclenchement de la Grande révolte juive, Saul s'oppose à son déclenchement en 66. Il se rend auprès de Cestius Gallus, le gouverneur de Syrie. Cestius Gallus envoie « Saul et ses compagnons » en Achaïe pour qu'ils rendent compte à Néron, car celui-ci est à ce moment en tournée artistique en Grèce, tout en surveillant le creusement du canal de Corinthe. Si le frère de Costobar appelé Saul est l'apôtre Paul de Tarse comme le propose ces critiques, cela expliquerait pourquoi l'apôtre passe l'hiver 66/67 à Nicopolis d'Épire, comme indiqué dans l'Épître à Tite. Jusqu'à présent cette présence dans cette ville où il ne semble pas y avoir de communauté "chrétienne" était inexpliquée par les historiens. Après être parvenu à rencontrer Néron et à avoir facilité les décisions qui vont aboutir à la nommination de Vespasien pour mener la campagne romaine en Galilée et en Judée, Saul, parti au plus tôt à la fin octobre, s'est retrouvé en Achaïe à une époque de l'année trop avancée pour naviguer — la navigation était interrompue en hiver. C'est ce qui ressort de l'Épître à Tite pour l'apôtre Saul/Paul. Si l'identification est exacte, Saul/Paul n'a pas pu non-plus rester à Corinthe où pourtant une église existait à cause de la présence de Néron et de l'immense foule de courtisans qui l'accompagnait et probablement parce que cela lui a été interdit par les Romains. C'est aussi probablement à ce moment que Saul/Paul a connu Épaphrodite. Celui-ci est secrétaire de Néron et il est tout à fait vraisemblable qu'il soit passé par lui pour accéder à Néron et que ce soit à lui qu'il ait fait un rapport détaillé dont l'exposé et la rédaction a probablement pris plusieurs jours. Puisque pour un grand nombre de critiques, le secrétaire de Néron est le patron littéraire de Flavius Josèphe très intéressé par l'histoire juive et exécuté avec plusieurs autres membres du mouvement créé par Jésus pendant ce qu'il est convenu d'appeler la persécution de Domitien, il est donc probable que celui-ci ait lui aussi été membre de ce mouvement, comme Titus Flavius Clemens, Flavia Domitilla, l'apôtre Jean de Zébédée ou l'évêque Clément de Rome exécutés ou réprimés à partir de juin 95 pour athéisme et pratiques juives. Dans ces conditions, le secrétaire de Néron peut très bien être l'Épaphrodite que Paul appelle « mon frère Épaphrodite, mon compagnon d'œuvre et de combat, par qui vous m'avez fait parvenir de quoi pourvoir à mes besoins (Épître aux Philippiens, 2, 25.) » dans l'Épître aux Philippiens et qui semble appartenir à « la maison de César (Épître aux Philippiens, 4, 18.) ». Un personnage suffisamment puissant et influent à Rome pour qu'il puisse accéder à Paul prisonnier impérial passible de la peine de mort et emprisonné dans la terrible prison Mamertine (le Tullianum) en 67/68, dans une période très soupçonneuse à l'égard des juifs comme l'était Paul, puisque 3 ans auparavant des dizaines de chrétiens avaient été exécutés pour avoir incendié Rome, sans parler de la révolte qui à ce moment là s'est étendue à toute la Palestine en provoquant aussi des mouvements insurrectionnels dans la province de Syrie et en Égypte. Si Paul et Épaphrodite se sont rencontrés et ont sympathisé lors de cet envoi en Achaïe, il est tout à fait possible qu'Épaphrodite ait proposé à Paul qui ne pouvait pas rester à Corinthe de passer l'hiver dans la résidence qu'il possédait en Grèce. Or Épaphrodite avait comme esclave Épictète qui lorsqu'il a été expulsé par Domitien avec d'autres philosophe est venu s'installer dans une demeure à Nicopolis d'Épire, où il a fondé une célèbre école. Comme Épictète était esclave, cette demeure appartenait donc à son maître qui ne lui a probablement laissé qu'une petite dépendance de la grande propriété qu'il devait y posséder. Il est donc possible que Paul ait passé l'hiver dans la demeure que possédait Épaphrodite à Nicopolis. Jusqu'à présent, cette présence à Nicopolis d'Épire était inexpliquée et semblait tellement étrange aux historiens que Marie Françoise Baslez a proposé que Paul était resté dans une autre Nicopolis située en Cilicie.
  9. Cetrains critiques proposent d'identifier Simon le Magicien avec Tiberius Claudius Balbillus Modestus. C'est notamment le cas d'Ernest Renan et à l'époque actuelle de Marie Françoise Baslez, parmi plusieurs autres. Si Épaphrodite a été l'esclave de Tiberius Claudius Balbilus et que celui-ci est effectivement Simon le Magicien, Épaphrodite pourrait avoir été en contact avec le mouvement créé par Jésus dès les années 40. Simon le Magicien est en effet décrit comme opérant en Samarie dès la fin des années 30 ou au début des années 40 dans les Actes des Apôtres et dans la littérature pseudo-clémentine. Il a même pendant un temps été intégré à l'église de Samarie par Philippe, avant que l'apôtre Pierre ne l'en exclue. Il se rend ensuite à Rome où il connaît une ascension rapide auprès de Claude, mais surtout auprès de Néron, ce qui correspond bien au cursus de Tiberius Claudius Balbilus.

Références[modifier | modifier le code]

  1. Behind the Name: Meaning, Origin and History of the Name Epaphroditos.
  2. a et b Tiberius Claudius Epaphroditus sur livius.org.
  3. Tacite, Annales Livre XV, 52-53.
  4. Suétone, Néron, 49 ; Dion Cassius, Histoire romaine, livre 63, 29 ; Aurelius Victor, Epitome de Caesaribus, V Néron.
  5. a b c d e f g h et i Eisenman 2012 vol. II, p. 27.
  6. Suétone, « Vie de Domitien, 15 », sur Biblioteca Classica Selecta, Vie des douze Césars.
  7. a et b Brian Jones, The Emperor Domitian, 1993, Routledge, Londres, p. 47.
  8. Mireille Hadas-Lebel, La présence juive à Rome IIe siècle av. - IIIe siècle EC., p. 204, note no 47.
  9. Suétone, Domitien, 14.
  10. Après avoir dit que Domitien soupçonnait tout le monde à raison des mêmes motifs pour lesquels il avait envoyé en exil Flavia Domitilla et fait exécuter Titus Flavius Clemens, Manius Acilius Glabrio et plusieurs autres — c'est-à-dire une impiété pour laquelle furent condamnés plusieurs citoyens coupables d'avoir embrassé la religion des juifs —, Dion Cassius écrit : « Il fit exécuter à mort [Épaphrodite], lui reprochant de ne pas avoir secouru Néron, afin par la vengeance accordée à cet empereur, de détourner ses propres affranchis, en les effrayant de loin à l'avance, de ne rien oser de semblable. » cf. Dion Cassius, livre 67, 14.
  11. a b et c Pergola 1978, p. 408.
  12. Arrien, Entretiens, livre I, 26
  13. a b c d et e Steve Mason, Life of Josephus, note no 1780.
  14. Parmi ceux qui défendent que le "patron" de Josèphe est le secrétaire de différents empereurs exécuté en 95/96 sur ordre de Domitien, il y a Mason (2003), Haaland (2005), Berber (1997) (cf. Pastor, Stern et Mor 2011, p. 68, note no 11), Robert Eisenman (cf. Eisenman 2012 vol. II, p. 27 et passim) ; Théodore Reinach.).
  15. Flavius Josèphe, Antiquités judaïques I, I, 2 (8-9).
  16. a et b cf. Niese 1896: 226-227, Luther 1910: 61-63, Nodet 1990: 4 n.1, Mason 1998: 98-101 ; cité par Steve Mason, Life of Josephus, note no 1780.
  17. a et b « Le langage de Josèphe dans ces divers passages prouve que c'était un personnage haut placé et qui avait subi des vicissitudes politiques; aussi l'a-t-on identifié, non sans vraisemblance, à Épaphrodite, affranchi et secrétaire de Néron, qui aida son maître à se tuer, et fut plus tard, à raison de ce fait, banni puis mis à mort par Domitien en 96 (Suétone, Domitien, 14). » Théodore Reinach, note no 2 de la traduction du Contre Apion par René Harmand.
  18. Suétone, Vie de Néron 49, Tacite, Annales, 15, 55, Dion Cassius 63, 29.
  19. Flavius Josèphe, Contre Apion, livre I, 1.
  20. a b c et d Cassius Dio Cocceianus, Histoire romaine de Dion Cassius: traduite en français, Volume 9, p. 375.
  21. Mireille Hadas-Lebel, La présence juive à Rome IIe siècle av. - IIe siècle EC., p. 204, note no 47.
  22. Flavius Josèphe, Antiquités judaïques I, I, 2.
  23. a b et c Frankfort 1961, p. 53.
  24. a et b Frankfort 1961, p. 54.
  25. Thérèse Frankfort, Le royaume d'Agrippa II et son annexion par Domitien, in Hommage à A. Grenier, II, 1962, p. 659s.
  26. Henry Seyrig, Rev. numis., 1964, p. 55.
  27. Sartre 1985, p. 53.
  28. Henry Seyrig, Antiquités syriennes, 88 Deux pièces énigmatiques, 2. Un officier d'Agrippa II, p. 34, note no 3.
  29. Maurice Sartre situe cette date de mort entre 92 - 96 et propose la date de 93/94 cf. Sartre 1985, p. 53.
  30. Grabbe 1992, p. 591.
  31. Josèphe et Mason 2001, note no 1776.
  32. Nouveau Testament, Épître aux Philippiens, 2, 25.
  33. Nouveau Testament, Épître aux Philippiens, 4, 18.
  34. Eisenman 2016, p. 399.
  35. Robert Eisenman, James the Brother of Jesus and the Dead Sea Scrolls , p. 92.
  36. Suétone, « Vie de Domitien, 15 », sur Biblioteca Classica Selecta, Vie des douze Césars.
  37. Le Vetus Martyrologium Romanum indique à la date du 22 juin:
    « À Rome, transfert [des restes du corps] de Saint Flavius Clémens, homme de niveau consulaire et martyr, le frère de la Sainte Plautilla et oncle de la martyr et Vierge Flavia Domitilla, avec qui elle a été mise à mort par l'empereur Domitien, à cause de la foi du Christ. Son corps a été retrouvé dans la Basilique du pape Saint Clément, après une cérémonie solennelle, il a été replacé au même endroit » En latin:
    « Item Romae Translatio sancti Flavii Clementis, viri Consularis et Martyris; qui, sanctae Plautillae frater ac beatae Virginis et Martyris Flaviae Domitillae avunculus, a Domitiano Imperatore, quocum Consulatum gesserat, ob Christi fidem interemptus est. Ipsius porro corpus, in Basilica sancti Clementis Papae inventum, ibidem solemni pompa reconditum est. », (la) Vetus Martyrologium Romanum (22 juin).
  38. PIR² F 418.
  39. Brian Jones, The Emperor Domitian, 1993, Routledge, Londres, p. 47-48.
  40. Jérôme de Stridon, Ep. 108.7.1.
  41. Peter Lampe, Christians at Rome in the First Two Centuries: From Paul to Valentinus, T & T Clark International, 2003, Mohr Siebeck, Tübingen, p. 204, note no 12.
  42. Philippe Pergola, La condamnation des Flaviens chrétiens sous Domitien : Persécution religieuse ou répression à caractère politique ?, Mélanges de l’École française de Rome. Antiquité Année 1978, Volume 90, Numéro 1, p. 412-415.
  43. a et b Dion Cassius traduit par Théodore Reinach, « Dans Fontes rerum judaicarum : Histoire romaine, livre 67, page 195 », Ernest Leroux,  ; (épitomé de Xiphilin).
  44. Actes des martyrs, Actes des martyres de la vierge sainte Flavia Domitilla et des saints Nérée et Achillée.
  45. Louis Reekmens, Recherches récentes dans les cryptes des martyrs romains, in Mathijs Lamberigts, Peter van Deun, in Martyrium, La pluralité, p. 63.
  46. a et b Philostrate d'Athènes, Vie d'Appolonios de Tyane, livre VIII, XXV, lire en ligne.
  47. Jones 2002, p. 48 et 193.
  48. Jones 2002, p. 117.
  49. Talmud de Babylone, Talmud Gittin 56b.
  50. Granger Cook 2011, p. 127.
  51. Natalio Fernández Marcos, The Septuagint in Context: Introduction to the Greek Version of the Bible, 2000, Brill, Leiden, p. 111-112.
  52. Talmud, Meguila 3a.
  53. a b et c Natalio Fernández Marcos, The Septuagint in Context: Introduction to the Greek Version of the Bible, 2000, Brill, Leiden, p. 111.
  54. (en) Épiphane de Salamine, The Treatise On Weights And Measures, 14, 134.
  55. Jones 2002, p. 48.
  56. a et b (it) Francesco Scorza Barcellona, «Clemente I, santo» ; Enciclopedia dei Papi, Treccani, Enciclopedia italiana, 2000, Consulté le 4 octobre 2015.
  57. Pierre Maraval in Simon Claude Mimouni, Pierre Maraval, Le christianisme des origines à Constantin, 2006, Paris,  éd. P.U.F./Nouvelle Clio, p. 232.
  58. "From all these persons of the name of Epaphroditus, we must distinguish the one whom the Apostle Paul mentions as his companion." Leonhard Schmitz, « Epaphroditus », dans Dictionary of Greek and Roman Biography and Mythology, vol. 2, Boston, Little, Brown and Company, (lire en ligne [archive du ]), p. 24 (archive du 2009-06-20)
  59. Pierre Chuvin, Ernest Will, Mythologie et géographie dionysiaques, Adosa, 1991, p. 266.
  60. Schwartz 1990, p. 17.
  61. a b et c Pastor, Stern et Mor 2011, p. 68.
  62. a et b Hannah M. Cotton et Werner Eck, Flavius Josephus and Flavian Rome, p. 51.
  63. Frankfort 1961, p. 57.
  64. Hannah M. Cotton et Werner Eck, Flavius Josephus and Flavian Rome, p. 51-52.
  65. a et b Jonathan Edmondson, Steve Mason, James Rives, Flavius Josephus and Flavian Rome, p. 51.
  66. Harold Idris Bell, Walter Ewing Crum, British Museum, Greek Papyri in the British Museum, British Museum. Dept. of Manuscripts, p. 193.
  67. Greek Papyri in the British Museum, British Museum. Dept. of Manuscripts, Harold Idris Bell, Walter Ewing Crum, British Museum, p. 193 et p. XXVII
  68. Vu ses praenomen et le nomen, certains critiques ont estimé qu'Épaphrodite était l'affranchi de l'empereur Claude, mais en fait on ne sait pas de qui Épaphrodite était l'affranchi et les sources antiques parlent de lui comme le secrétaire de Néron et ne le lient jamais à Claude.
  69. Catéchèse de Benoît XVI à Rome le 12 novembre 2008
  70. a et b Notes de la Bible de Jérusalem
  71. Michel Leturmy, In La Bible, Nouveau Testament, Paris, Gallimard, collection La Pléiade, , p 705.
  72. Robert Eisenman, Paul as Herodian, JHC 3/1, printemps 1996, p. 110-122 ; (en) résumé en ligne.